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19/09/2023 | FRANCE | N°22MA01350

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 19 septembre 2023, 22MA01350


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, en premier lieu, d'annuler tant la décision du 28 janvier 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre les décisions révélées le 4 juillet 2014 portant, d'une part, résiliation du contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale qu'il avait signé pour la période du 19 août 2012 au 18 août 2014 et, d'autre part, non-renouv

ellement de ce contrat pour la période du 19 août 2014 au 18 août 2016, que cett...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, en premier lieu, d'annuler tant la décision du 28 janvier 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre les décisions révélées le 4 juillet 2014 portant, d'une part, résiliation du contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale qu'il avait signé pour la période du 19 août 2012 au 18 août 2014 et, d'autre part, non-renouvellement de ce contrat pour la période du 19 août 2014 au 18 août 2016, que cette décision du 4 juillet 2014, en deuxième lieu, d'enjoindre au ministre de l'intérieur, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, de le réintégrer et de procéder à la reconstitution de sa carrière et, en troisième et dernier lieu, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902752 du 10 mars 2022, le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, annulé la décision portant radiation-résiliation du contrat d'engagement à servir de M. A... B... conclu pour la période du 19 août 2012 au 18 août 2014, d'autre part, enjoint au ministre de l'intérieur de procéder, dans le délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement, à la réintégration juridique de M. A... B... sur le contrat à durée déterminée dont il était titulaire et qui restait à courir sur la période du 4 juillet au 18 août 2014 inclus et, enfin, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à ce dernier en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, avant de rejeter le surplus des conclusions présentées par ce dernier.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2022, M. A... B..., représenté par Me Carles de Caudemberg, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 4 de ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 mars 2022 en tant qu'il porte rejet de ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction relatives au non-renouvellement de son contrat d'engagement à servir pour la période du 19 août 2014 au 18 août 2016 ;

2°) d'annuler cette décision portant refus de renouveler son contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, en application des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, de procéder à sa réintégration juridique sur le contrat à durée déterminée dont il était titulaire portant sur la période du 19 août 2014 au 18 août 2016 inclus et à la reconstitution de sa carrière, sous une astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit en jugeant que le contrat prévu pour la période du 19 août 2014 au 18 août 2016 n'avait pas d'existence juridique ; ce tribunal aurait dû retenir qu'il avait un droit acquis sur cette même période en application de ce contrat ;

- le refus de renouvellement de son contrat est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur et des outre-mer qui n'a pas présenté de mémoire.

Par une ordonnance du 30 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er mars 2023, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lombart,

- et les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... a signé un contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale pour la période courant du 19 août 2012 au 18 août 2014. Mais, par un courriel du gestionnaire de la cellule réserve 04 du 4 juillet 2014, lui ont été révélées des décisions de résiliation, d'une part, et de non-renouvellement de ce contrat d'engagement, d'autre part. Après plusieurs décisions juridictionnelles, dont une décision n° 400435 rendue par le Conseil d'Etat le 2 octobre 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a, par un arrêt n° 17MA04090 du 14 juin 2018, annulé la décision du président de la commission des recours des militaires du 16 décembre 2014 qui s'était substituée, par l'effet du recours administratif préalable obligatoire formé par M. A... B..., aux décisions initiales ainsi révélées, tout en précisant qu'il appartenait au ministre de l'intérieur de se prononcer sur le bien-fondé du recours de M. A... B..., après examen sur le fond du différend par la commission des recours des militaires. En exécution de cet arrêt devenu définitif, après avoir recueilli l'avis de cette commission, le ministre de l'intérieur a, le 28 janvier 2019, rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé par M. A... B.... Saisi par ce dernier, le tribunal administratif de Marseille a, par le jugement du 10 mars 2022, annulé la décision valant résiliation du contrat d'engagement à servir de M. A... B... qui expirait le 18 août 2014, enjoint au ministre de l'intérieur de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement, à la réintégration juridique de M. A... B... sur le contrat à durée déterminée dont il était titulaire et qui restait à courir sur la période du 4 juillet au 18 août 2014 et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à celui-ci en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, avant de rejeter le surplus des conclusions présentées par ce dernier. M. A... B... relève appel de ce jugement en tant qu'il porte rejet de ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction relatives à la décision portant refus de renouveler son contrat d'engagement pour la période du 19 août 2014 au 18 août 2016.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, l'article L. 4211-1 du code de la défense dispose, dans sa rédaction applicable au présent litige, que : " I.- Les citoyens concourent à la défense de la nation. Ce devoir peut s'exercer par une participation à des activités militaires dans la réserve. / (...) III.- La réserve militaire a pour objet de renforcer les capacités des forces armées dont elle est une des composantes pour la protection du territoire national, comme dans le cadre des opérations extérieures, d'entretenir l'esprit de défense et de contribuer au maintien du lien entre la nation et ses forces armées. Elle est constituée : / 1° D'une réserve opérationnelle comprenant : / a) Les volontaires qui ont souscrit un engagement à servir dans la réserve opérationnelle auprès de l'autorité militaire (...) ". Aux termes de l'article L. 4221-1 du même code : " Le contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle est souscrit pour une durée de un à cinq ans renouvelable (...) ". Selon l'article L. 4221-10 dudit code : " Les conditions de souscription, d'exécution et de résiliation des engagements à servir dans la réserve opérationnelle, les conditions de radiation, les modalités d'accès et d'avancement aux différents grades et les règles relatives à l'honorariat sont fixées par décret en Conseil d'Etat. " Aux termes de l'article R. 4221-3 de ce même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le contrat d'engagement est dressé ou homologué par un commissaire de l'armée de terre, de l'air ou de la marine. Il prend effet au jour de sa signature par un commissaire de l'armée de terre, de l'air ou de la marine ou, le cas échéant, de son homologation par une de ces autorités. Pour le contrôle général des armées, le contrat d'engagement est dressé par le chef du corps militaire du contrôle général des armées et prend effet au jour de sa signature. (...) ".

3. Il résulte des dispositions précitées que l'homologation du contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle par un commissaire de l'armée de terre, de l'air ou de la marine était alors une condition de l'entrée en vigueur d'un tel contrat. Par conséquent, en l'espèce, faute d'homologation par le commissaire de l'armée de terre, le contrat signé, le 5 juin 2014, par M. A... B... puis, le 27 juin 2014, par le commandant de la région de gendarmerie Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) ne peut pas être regardé comme ayant été conclu et il n'a donc pu produire aucun effet. Ainsi, contrairement à ce que soutient l'appelant, il ne saurait être créateur de droits, ni, au surplus, avoir fait l'objet d'une résiliation. Ce premier moyen doit dès lors être écarté.

4. En second lieu, un volontaire qui a souscrit un engagement à servir dans la réserve opérationnelle auprès de l'autorité militaire ne bénéficie d'aucun droit au renouvellement de son contrat. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard de la satisfaction des besoins des armées ou de considérations tenant à la personne du volontaire.

5. Au cas particulier, M. A... B... se réfère au courrier du 21 juillet 2014 du général-commandant de la région de gendarmerie de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) et pour la zone de défense et de sécurité Sud pour soutenir que la justification du refus de renouveler son contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale, pour la période du 19 août 2014 au 18 août 2016 pourrait tenir au souhait des autorités militaires d'ouvrir le corps des réservistes à des volontaires plus jeunes. Il ressort toutefois de la lecture de ce courrier que ledit général-commandant n'y indique pas les motifs de cette décision mais qu'après avoir rappelé qu'il n'en était pas l'auteur, il se borne à émettre une simple hypothèse. Et, il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter le recours administratif préalable obligatoire formé par M. A... B... à l'encontre de la décision du 4 juillet 2014 portant non-renouvellement de son contrat d'engagement, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a relevé, dans sa décision contestée du 28 janvier 2019, que M. A... B... n'avait pas fait preuve d'une manière de servir exemplaire lors de l'exécution de ses missions de réserviste au profit de la communauté de brigades d'Annot et de la compagnie de Castellane. Dans la note adressée à la commission des recours des militaires, l'autorité administrative indique que, bien que M. A... B... ait donné satisfaction lorsqu'il était employé en unité territoriale, il a fait preuve d'un mauvais état d'esprit et a régulièrement dénigré des militaires d'active de son lieu de résidence, situés dans le même département, alors qu'il était amené à travailler avec eux dans le cadre de ses missions de réserviste. L'autorité administrative précise que, le 18 mai 2014, M. A... B... n'est pas parvenu à gérer la circulation d'un carrefour alors qu'il assurait la circulation dans le village d'Annot, pour une course cycliste et qu'il en a rejeté la responsabilité sur les militaires de la communauté de brigades d'Annot, lesquels ont été contraints d'intervenir pour pallier son impéritie. Par ailleurs, le 23 mai 2014, M. A... B... s'est plaint à un gradé du traitement d'un litige privé le concernant par une militaire " sous un ton dédaigneux " et dénigrant. La matérialité de ces griefs rapportés par un courriel du 28 juin 2014 du commandant en second de la compagnie de Castellane, est suffisamment établie au vu des pièces du dossier. Au demeurant, elle n'est pas sérieusement contestée par l'appelant qui se borne à se prévaloir de certains de ses comptes-rendus d'entretien professionnel et de la circonstance qu'il n'était pas en service le 18 mai 2014, et à affirmer que la preuve des critiques qu'il aurait formulées à l'encontre de ses collègues n'aurait pas été rapportée tout en ajoutant qu'" en tout état de cause, [elles] ne concernaient nullement le service dans lequel il intervenait ". Alors que M. A... B... n'avait aucun droit au renouvellement de son contrat, il ressort ainsi des pièces du dossier que, pour prendre sa décision contestée du 28 janvier 2019, le ministre de l'intérieur ne s'est pas fondé sur des motifs étrangers à l'intérêt du service et n'a pas entaché d'erreur manifeste l'appréciation à laquelle il s'est livré de cet intérêt. Par suite, ce second moyen doit également être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 mars 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

7. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... B... n'implique aucune mesure d'exécution. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent donc également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. A... B... tendant à l'application des dispositions de L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2023.

2

No 22MA01350


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01350
Date de la décision : 19/09/2023
Type d'affaire : Administrative

Analyses

08-01-02-04 Armées et défense. - Personnels militaires et civils de la défense. - Questions particulières à certains personnels militaires. - Réservistes.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Laurent LOMBART
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : CARLES DE CAUDEMBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-09-19;22ma01350 ?
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