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14/06/2018 | FRANCE | N°17MA04090

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 14 juin 2018, 17MA04090


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... di Toro a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 4 juillet 2014 par laquelle la gestionnaire de la cellule réserve 04 de l'unité CRGD de Digne-les-Bains, région de gendarmerie de Provence-Alpes-Côte-d'Azur avait résilié son contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle et a refusé de le renouveler.

Par une ordonnance n° 1500297 du 28 janvier 2015, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande

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Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 février 2015, M. d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... di Toro a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 4 juillet 2014 par laquelle la gestionnaire de la cellule réserve 04 de l'unité CRGD de Digne-les-Bains, région de gendarmerie de Provence-Alpes-Côte-d'Azur avait résilié son contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle et a refusé de le renouveler.

Par une ordonnance n° 1500297 du 28 janvier 2015, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 février 2015, M. di Toro, représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 28 janvier 2015 ;

2°) d'annuler la décision attaquée ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- en l'absence de notification régulière de la décision attaquée, le tribunal ne pouvait se fonder sur l'existence d'une précédente requête pour opposer une tardiveté ;

- la décision attaquée, notifiée irrégulièrement, est entachée d'incompétence et n'est pas motivée ;

- la décision attaquée est erronée en droit et entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un arrêt n° 15MA00792 du 5 avril 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. di Toro contre cette ordonnance.

Par une décision n° 400435 du 2 octobre 2017, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la Cour du 5 avril 2016 et lui a renvoyé l'affaire pour y être jugée.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Les parties ont été informées le 17 octobre 2017 de ce qu'il leur était loisible de produire, si elles le jugeaient utile, et dans le délai d'un mois, les observations qu'il leur paraîtrait opportun d'adresser à la Cour.

Par un mémoire, enregistré le 13 mars 2018, le ministre de l'intérieur conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête et, à titre subsidiaire, à son rejet au fond.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en ce qu'elle est dirigée contre une mesure d'information n'ayant pas le caractère de décision faisant grief ;

- en outre, M. di Toro est réputé avoir renoncé au recours préalable obligatoire qu'il a formé contre ce courriel et qui a été classé par décision du 16 décembre 2014 ;

- il n'a donc pas satisfait à l'obligation d'introduire un recours préalable obligatoire ;

- à titre subsidiaire, aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par un mémoire, enregistré le 15 mars 2018, M. di Toro, représenté par Me A...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1500297 du 28 janvier 2015 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler la décision, en date du 4 juillet 2014, par laquelle la gestionnaire de la cellule réserve 04 de l'unité CRGD de Digne-les-Bains, région de gendarmerie de Provence-Alpes-Côte-d'Azur a résilié son contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle et a refusé de le renouveler, ensemble la décision en date du 16 décembre 2014 par laquelle le président de la commission des recours des militaires a rejeté son recours administratif préalable en application de l'article R. 4125-2 du code de la défense ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que la commission des recours des militaires a classé son recours préalable alors qu'il avait communiqué la décision contestée à deux reprises ;

- la décision du 27 juin 2014, de résiliation immédiate et de non renouvellement, en ce qu'elle met fin de manière anticipée au contrat, est susceptible d'un recours en excès de pouvoir ;

- il a valablement saisi la commission des recours et ses conclusions doivent être regardées comme visant la décision de rejet de son recours préalable du 16 décembre 2014 ;

- la décision déférée est entachée d'insuffisante motivation et d'un vice de forme faute d'identification de l'auteur de l'acte ;

- la décision attaquée est entachée d'incompétence ;

- le préavis de six mois prévu par l'article 18 du décret n° 2008-961 n'a pas été respecté ;

- la décision attaquée est erronée en droit et entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Un mémoire présenté par le ministre de l'intérieur a été enregistré le 23 avril 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Évelyne Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative de Marseille.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

1. Considérant que M. di Toro a signé un contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie pour la période courant du 19 août 2012 au 18 aout 2014 ; qu'il a formé, le 4 septembre 2014, un recours pour excès de pouvoir contre la décision du 4 juillet 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur aurait résilié son contrat et refusé de le renouveler ; que, par une ordonnance du 3 novembre 2014, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande comme manifestement irrecevable, au motif que M. di Toro n'avait pas fait précéder son recours contentieux du recours administratif préalable obligatoire devant la commission de recours des militaires ; que, par un courrier du 16 décembre 2014, le président de la commission de recours des militaires, saisie par l'intéressé, l'a informé qu'en l'absence de production de la décision contestée, il était réputé avoir renoncé à son recours ; que, par une ordonnance du 28 janvier 2015, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté le second recours de M. di Toro, au motif que celui-ci avait saisi la commission des recours des militaires postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux, qui, selon ce tribunal, courait à compter du premier recours, le 4 septembre 2014 ; que par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par l'intéressé contre ce jugement ; que par décision n° 400435 du 2 octobre 2017, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la Cour du 5 avril 2016 et a renvoyé l'affaire à la Cour ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative que la notification d'une décision administrative doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ; qu'en l'absence de toute mention, dans la notification d'une décision entrant dans le champ de compétence de la commission de recours des militaires, tel qu'il est défini par l'article R. 4125-1 du code de la défense, du caractère obligatoire du recours administratif préalable devant cette commission, le délai de recours contentieux ne commence pas à courir ; qu'ainsi, dans l'hypothèse où, en l'absence d'une telle mention, un premier recours juridictionnel a été formé sans être précédé d'un recours administratif devant la commission et a été, par voie de conséquence, rejeté pour irrecevabilité, l'exercice de ce recours, alors même qu'il établit que son auteur a eu connaissance de la décision, au plus tard, à la date à laquelle il l'a formé, ne fait pas, par lui-même, courir le délai dans lequel doit être introduit le recours administratif préalable obligatoire auquel est subordonnée la recevabilité du recours contentieux ;

3. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que M. di Toro a saisi la commission de recours des militaires le 20 novembre 2014 dans le délai de recours prévu à l'article R. 421-5 du code de justice administrative qui a commencé à courir à compter de la notification de l'ordonnance susmentionnée du 3 novembre 2014, par laquelle il a été informé de l'obligation d'exercer un recours administratif préalable obligatoire ; que, par suite, c'est à tort que le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté comme irrecevable la demande de M. di Toro enregistrée le 15 janvier 2015 devant le tribunal administratif de Marseille au motif que celui-ci avait saisi la commission des recours des militaires postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux ; qu'il s'ensuit que l'ordonnance du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille est entachée d'irrégularité et doit être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. di Toro devant le tribunal administratif de Marseille ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 4 juillet 2014 :

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I. - Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 4125-10 de ce code : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent, ou le cas échéant, des ministres conjointement compétents. La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale. (...) " ;

6. Considérant que, lorsqu'il est saisi de conclusions tendant à l'annulation d'une décision qui ne peut donner lieu à un recours devant le juge de l'excès de pouvoir qu'après l'exercice d'un recours administratif préalable et si le requérant indique, de sa propre initiative ou à la demande du juge, avoir exercé ce recours et, le cas échéant après que le juge l'y ait invité, produit la preuve de l'exercice de ce recours ainsi que, s'il en a été pris une, la décision à laquelle il a donné lieu, le juge de l'excès de pouvoir doit regarder les conclusions dirigées formellement contre la décision initiale comme tendant à l'annulation de la décision, née de l'exercice du recours, qui s'y est substituée ; que, dans la présente instance, les conclusions d'annulation présentées par M. di Toro contre le courriel qui lui a été adressé le 4 juillet 2014 doivent être regardées comme dirigées contre la décision du 16 décembre 2014 qui s'est substituée aux précédentes par l'effet du recours administratif préalable obligatoire ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 16 décembre 2014 du président de la commission des recours des militaires :

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 4125-2 du code de la défense : " A compter de la notification ou de la publication de l'acte contesté, ou de l'intervention d'une décision implicite de rejet d'une demande, le militaire dispose d'un délai de deux mois pour saisir la commission par lettre recommandée avec avis de réception adressée au secrétariat permanent placé sous l'autorité du président de la commission. / La lettre de saisine de la commission est accompagnée d'une copie de l'acte. (...) / Si la copie de l'acte ou, dans le cas d'une décision implicite de rejet, la copie de la demande ne sont pas jointes à l'envoi, le secrétariat permanent de la commission met l'intéressé en demeure de la produire dans un délai de deux semaines ; en l'absence de production dans ce délai, l'intéressé est réputé avoir renoncé à son recours. Le président de la commission en dresse le constat et en informe l'intéressé " ;

8. Considérant que le président de la commission des recours des militaires tient des dispositions précitées de l'article R. 4125-2 du code de la défense le pouvoir de rejeter les recours des militaires qui, ayant omis de produire une copie de l'acte contesté et s'étant abstenus, malgré une mise en demeure en ce sens, de régulariser leur recours dans un délai de deux semaines, sont, dès lors, réputés avoir renoncé à celui-ci ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par un recours administratif préalable obligatoire du 10 novembre 2014, M. di Toro a saisi la commission des recours des militaires d'une demande d'annulation du courriel du 4 juillet 2014 par lequel d'une part, il avait été informé que la mission prévue fin juillet était annulée, son contrat n'étant pas renouvelé, et d'autre part, qu'il était invité à rendre son gilet pare-balles ; que par un courrier du 16 décembre 2014, le président de la commission de recours des militaires l'a informé qu'en l'absence de production de la décision contestée, il était réputé avoir renoncé à son recours ;

10. Considérant que le courriel du 4 juillet 2014 du gestionnaire de la cellule réserve 04 qui s'apprécie comme révélant des décisions faisant grief de résiliation d'une part, et de non-renouvellement du contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle de gendarmerie d'autre part, a été produit par de M. di Toro à l'appui de son recours administratif formé le 10 novembre 2014 ; que, par suite, en rejetant pour le motif d'absence de production de la décision attaquée le recours administratif préalable de M. di Toro, le président de la commission des recours des militaires a entaché sa décision du 16 décembre 2014 d'erreur de droit ; qu'il suit de là qu'en estimant, par voie de conséquence, qu'il devait être réputé avoir renoncé à son recours, le président de la commission des recours des militaires a entaché sa décision d'une illégalité ; que, par suite, cette décision doit être annulée ; qu'il appartiendra au ministre de l'intérieur de se prononcer sur le bien-fondé du recours de M. di Toro après examen sur le fond du différend par la commission des recours des militaires ;

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. di Toro est fondé à demander l'annulation de la décision du 16 décembre 2014 ;

Sur les frais applicables au litige :

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. di Toro et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 1500297 du 28 janvier 2015 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée.

Article 2 : La décision en date du 16 décembre 2014 du président de la commission des recours des militaires est annulée.

Article 3 : L'Etat versera à M. di Toro une somme de 2 000 euros à au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. di Toro est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... di Toro et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au commandant de la région de gendarmerie de Provence-Alpes-Côte-d'Azur.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement par intérim,

- M. Haïli, premier conseiller,

- M. Sauveplane, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 juin 2018.

6

N° 17MA04090


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA04090
Date de la décision : 14/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : GRASSO

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-06-14;17ma04090 ?
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