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08/11/2022 | FRANCE | N°20MA03751

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 08 novembre 2022, 20MA03751


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté n° 3210 du 27 juillet 2012 par lequel le ministre de l'intérieur a décidé sa mutation à compter du 1er septembre 2012 à la direction interrégionale de la police judiciaire de Marseille.

Par un jugement n° 1205439 du 6 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15MA04811 du 2 mai 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et la décis

ion du 27 juillet 2012, a mis à la charge de l'Etat au bénéfice de M. D... la somme de 200...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté n° 3210 du 27 juillet 2012 par lequel le ministre de l'intérieur a décidé sa mutation à compter du 1er septembre 2012 à la direction interrégionale de la police judiciaire de Marseille.

Par un jugement n° 1205439 du 6 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15MA04811 du 2 mai 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et la décision du 27 juillet 2012, a mis à la charge de l'Etat au bénéfice de M. D... la somme de 2000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de M. D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2019, et un mémoire complémentaire, enregistré le 14 novembre 2019, M. D..., représenté par la SELARL Mock-Frédéric agissant par Me Frédéric, demande à la Cour :

1°) de faire assurer l'exécution de l'arrêt rendu par la Cour le 2 mai 2018 ;

2°) de prononcer à l'encontre de l'Etat une astreinte de 700 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut de prendre une décision d'affectation du requérant dans le département de la Guadeloupe ;

3°) de condamner l'Etat à régulariser rétroactivement sa situation financière ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'annulation de la décision du 27 juillet 2012 implique nécessairement qu'il soit replacé dans la situation qui était la sienne avant cet arrêté de mutation, et qu'il soit donc affecté dans le département de la Guadeloupe, sur un poste similaire à celui qu'il occupait précédemment ;

- le ministre fait preuve d'une inertie volontaire pour mettre en œuvre cette annulation, dans l'attente de l'admission à la retraite du requérant par l'effet de la limite d'âge ;

- l'exécution de l'arrêt de la Cour est tout à fait possible, compte tenu, par exemple, de l'ouverture de deux postes, en Guadeloupe, de major A... et de major à l'échelon exceptionnel et de la possibilité, en tout état de cause, de l'affecter en surnombre ;

- l'arrêté pris par le ministre le 26 juin 2013 à la suite de la décision du Conseil d'Etat est purement confirmatif de l'arrêté annulé par la Cour et ne peut s'opposer à la demande d'exécution ;

- cette inertie volontaire justifie le prononcé d'une astreinte d'un montant conséquent.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 octobre 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la demande d'exécution, l'arrêt de la Cour ayant été complètement exécuté avec le prononcé, par arrêté du 26 juin 2013 pris après réexamen de la situation de l'intéressé faisant suite à la suspension d'exécution de l'arrêté du 27 juillet 2012 par décision du Conseil d'Etat du 24 avril 2013, de sa mutation dans la direction interrégionale de la police judiciaire de Marseille.

Par une ordonnance du 7 septembre 2020, la présidente de la Cour a ouvert une procédure juridictionnelle en vue de prescrire les mesures d'exécution de l'arrêt n° 15MA04811 rendu par la Cour le 2 mai 2018.

Vu l'arrêt dont l'exécution est demandée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêté interministériel du 20 octobre 1995 pris pour l'application de l'article 28 du décret n° 95-654 du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., fonctionnaire de police, a été affecté en Guadeloupe à compter du

1er juillet 2007 par arrêté ministériel du 2 avril 2007. Par arrêté du 27 décembre 2011, le ministre de l'intérieur a précisé que la durée de cette affectation était de trois ans, a constaté une prolongation de séjour d'un an du 1er juillet 2010 au 1er juillet 2011 et a accordé à M. D... une prolongation supplémentaire jusqu'au 1er juillet 2012. Par un troisième arrêté du 13 juin 2012, le ministre a accordé à M. D... une nouvelle prolongation de deux mois de son affectation en Guadeloupe, celle-ci prenant fin le 31 août 2012. Par un quatrième arrêté du 27 juillet 2012, le ministre l'a affecté à la direction interrégionale de la police judiciaire de Marseille à compter du 1er septembre 2012. Si, par une ordonnance du 23 août 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu l'exécution de cet arrêté de mutation du 27 juillet 2012, le Conseil d'Etat a annulé cette ordonnance par décision du 24 avril 2013 et le tribunal, statuant au fond de la légalité de cet arrêté, a rejeté la demande de

M. D... tendant à l'annulation de celui-ci, par un jugement du 6 octobre 2015. Mais par un arrêt du 2 mai 2018, devenu irrévocable, la Cour a annulé ce jugement et l'arrêté du

27 juillet 2012. M. D... demande à la Cour de faire assurer l'exécution de cet arrêt, en prononçant à l'encontre de l'Etat une astreinte à défaut pour le ministre de l'intérieur de prendre un nouvel arrêté décidant de l'affecter dans le département de la Guadeloupe.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-4 du code de justice

administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de définition, par le jugement ou l'arrêt dont l'exécution lui est demandée, des mesures qu'implique nécessairement cette décision, il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'y procéder lui-même en tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision, sans toutefois pouvoir méconnaître l'autorité qui s'attache aux motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution lui est demandée. En particulier, la rectification des erreurs de droit ou de fait dont serait entachée la décision en cause ne peut procéder que de l'exercice, dans les délais fixés par les dispositions applicables, des voies de recours ouvertes contre cette décision.

4. Si l'arrêt rendu par la Cour le 2 mai 2018 a prononcé non seulement l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 octobre 2015 rejetant la demande de

M. D... dirigée contre l'arrêté du 27 juillet 2012 par lequel le ministre de l'intérieur a affecté l'intéressé à la direction interrégionale de la police judiciaire de Marseille, mais encore l'annulation de cet arrêté, la même décision de la Cour a, en revanche et de manière irrévocable, rejeté les conclusions de M. D... tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de le réaffecter en Guadeloupe dans ses anciennes fonctions, eu égard au motif d'annulation retenu. L'arrêt de la Cour n'appelle donc par lui-même aucune mesure d'exécution.

5. Certes, l'annulation d'une décision ayant illégalement muté un agent public, même pour un vice de procédure, oblige l'autorité compétente à replacer l'intéressé, à la date de sa mutation, dans l'emploi qu'il occupait précédemment et à reprendre rétroactivement les mesures nécessaires pour le placer dans une position régulière.

6. Mais d'une part, ainsi qu'il a été dit au point 3, il n'appartient pas à la Cour, statuant comme juge de l'exécution, de prononcer des mesures d'exécution qui, bien que tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision, méconnaîtraient l'autorité qui s'attache aux motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution lui est demandée.

7. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article 1er de l'arrêté interministériel du 20 octobre 1995 pris pour l'application de l'article 28 du décret n° 95-654 du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale, que la durée de séjour des personnels actifs de la police nationale appelés à servir outre-mer est limitée à trois ans en Guadeloupe, et qu'il ne peut être dérogé à cette durée de séjour que dans les trois cas limitativement énumérés à l'article 2 de cet arrêté. Il résulte de l'instruction que M. D..., dont la situation ne relève pas de deux des trois hypothèses mentionnées à l'article 2 de l'arrêté du 20 octobre 1995, a bénéficié à plusieurs reprises de prolongations exceptionnelles de séjour en Guadeloupe, au titre du troisième cas prévu à cet article 2, portant la durée totale de celui-ci à cinq ans et deux mois.

8. Il résulte de ce qui précède que ni en application de l'arrêt de la Cour du

2 mai 2018, ni en vertu d'un changement de circonstances de droit ou de fait, M. D... ne peut prétendre, en exécution de cet arrêt, à sa réaffectation en Guadeloupe dans l'emploi qu'il y occupait à la date de sa mutation illégale du 27 juillet 2012 ou sur un poste similaire à celui-ci, alors d'ailleurs que, par un arrêté du 26 juin 2013, devenu définitif, le ministre de l'intérieur a décidé d'affecter M. D... à la direction interrégionale de la police judiciaire de Marseille à compter du 1er septembre 2013. Sa demande d'exécution de l'arrêt de la Cour du 2 mai 2018 ne peut donc qu'être rejetée, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2022.

N° 20MA037512


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03751
Date de la décision : 08/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exécution décision justice adm

Analyses

54-06-07 Procédure. - Jugements. - Exécution des jugements.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Michaël REVERT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL MOCK-FREDERIC ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-11-08;20ma03751 ?
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