Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Vu la procédure suivante :
M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté n° 3210 du 27 juillet 2012 par lequel le ministre de l'intérieur a décidé sa mutation à compter du 1er septembre 2012 à la direction interrégionale de la Police Judiciaire à Marseille.
Par un jugement n° 1205439 du 6 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 8 décembre 2015, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 27 juillet 2012 portant mutation à compter du 1er septembre 2012 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de le réaffecter dans ses anciennes fonctions en Guadeloupe ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision a été signée par une autorité incompétente ;
- le ministre était tenu de consulter la commission administrative paritaire ;
- il n'a pas été informé de la possibilité de consulter son dossier ;
- il n'a pas été informé des emplois vacants ;
- la décision en litige n'est ni fondée sur un motif d'intérêt général, ni liée au fonctionnement des services de police ;
- la décision en litige porte atteinte aux droits acquis ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à sa vie familiale.
Une mise en demeure de présenter un mémoire en défense a été adressée au ministre de l'intérieur le 8 février 2018 en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 ;
- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
- l'arrêté du 20 octobre 1995 pris pour l'application de l'article 28 du décret du 9 mai 1995 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. d'Izarn de Villefort pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutel,
- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. D....
1. Considérant que M. D..., brigadier major de police a été muté, par arrêté du 2 avril 2007 du ministre de l'intérieur, à la direction interrégionale de la Police Judiciaire de Pointe-à-Pitre à compter du 1er juillet 2007, pour occuper les fonctions de chef de groupe technique documentation opérationnelle spécialisée ; qu'aux termes d'un arrêté préfectoral en date du 26 avril 2010, M. D... a été détaché dans l'emploi de responsable d'unité locale de police à compter du 1er janvier 2009 en qualité de chef du groupe documentation et des supports opérationnels pour une durée de trois ans ; que par un arrêté du 27 décembre 2011 notifié à l'intéressé le 20 janvier 2012, le ministre a modifié son arrêté du 2 avril 2007 en prévoyant une durée maximale d'affectation de M. D... en Guadeloupe de 3 ans, ainsi qu'une prolongation exceptionnelle d'un an à compter du 1er juillet 2011 ; que M. D... a formé un recours gracieux contre cette décision par courrier du 20 février 2012, reçu par l'administration le 27 février 2012, demeuré sans réponse ; que par une décision du 13 juin 2012 notifiée le 1er juillet 2012, le ministre de l'intérieur a accordé à M. D... une nouvelle prolongation exceptionnelle de séjour d'une durée de deux mois à compter du 1er juillet 2012 ; que, par la décision contestée du 27 juillet 2012, l'intéressé a été muté à compter du 1er septembre 2012 à la direction interrégionale de la Police Judiciaire à Marseille ;
2. Considérant que l'article 25 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale rend applicable les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 aux termes duquel : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires (...). Dans le cas où il s'agit de remplir une vacance d'emploi compromettant le fonctionnement du service et à laquelle il n'est pas possible de pourvoir par un autre moyen, même provisoirement, la mutation peut être prononcée sous réserve d'examen ultérieur par la commission compétente " ; que ce même article 25 précise toutefois que les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ne sont pas applicables lorsque le fonctionnaire actif de la police nationale, parce que l'intérêt du service l'exige, est exceptionnellement déplacé ou changé d'emploi ; que l'article 28 du même décret renvoie à un arrêté interministériel la fixation de la durée maximale de séjour de ces personnels lorsqu'ils sont appelés à servir outre-mer, en précisant qu'une prolongation d'un an, qui ne saurait constituer un droit, peut leur être accordée à leur demande ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 20 octobre 1995 pris pour l'application de cet article 28, qui fixe à 3 ans la durée maximale du séjour dans le département de la Guadeloupe : " (...) II. - La durée de séjour n'est pas applicable : / (...) 2. Aux fonctionnaires affectés dans les départements et collectivités d'outre-mer s'ils en sont originaires ; (...) / III. - Il peut être dérogé à la durée de séjour, après avis des commissions administratives paritaires compétentes, pour des fonctionnaires servant outre-mer en cas : / 1. De mariage ou de pacte civil de solidarité contracté avec un originaire au moins un an avant la date du dépôt de la demande de dérogation. Cette demande doit être formulée au plus tard six mois avant la date d'expiration du séjour ; /2. De circonstances graves ou exceptionnelles ; / 3. D'une insuffisance de candidats à la mutation dans un département ou une collectivité d'outre-mer. / IV. - La qualité d'originaire s'apprécie à la date du dépôt de la demande de mutation en fonction du lieu de résidence habituelle, tel que défini par le décret du 20 mars 1978 susvisé ".
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la consultation préalable de la commission administrative paritaire compétente s'impose s'agissant des fonctionnaires actifs de la police nationale servant outre-mer qui demandent qu'il soit dérogé à la durée maximale de séjour outre-mer autorisée pour l'un des motifs prévus par ces dispositions ; qu'en outre, en application des articles 60 de la loi du 11 janvier 1984 et 25 du décret du 9 mai 1995, la mutation des fonctionnaires actifs de la police nationale à l'issue de leur séjour ultra-marin doit être soumise à l'avis préalable des commissions administratives paritaires, sauf s'il s'agit de remplir une vacance d'emploi compromettant le fonctionnement du service et à laquelle il n'est pas possible de pourvoir par un autre moyen, même provisoirement ou s'ils sont déplacés ou changés d'emploi dans l'intérêt du service ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre n'a pas consulté la commission administrative paritaire, pour prendre la décision de mutation en litige ; qu'il ne ressort pas des motifs de cette décision, ni même des écritures du ministre en première instance, que cette décision serait fondée sur un intérêt du service de nature à ce qu'il soit dérogé aux prescriptions citées de l'article 25 du décret du 9 mai 1995 portant application aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale des dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ; que contrairement à ce que soutient le ministre, les mutations prises en application de l'article 28 du décret du 9 mai 1995 relatives aux demandes de prolongation de séjour outre-mer entrent dans le champ d'application de la procédure précédemment décrite ; qu'il s'ensuit que la décision a été prise à la suite d'une procédure irrégulière, privant l'intéressé d'une garantie ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant que le motif d'annulation retenu n'implique pas nécessairement que l'administration procède à la réaffectation de M. D... sur l'emploi qu'il occupait avant l'édiction de la décision annulée ; que les conclusions présentées aux fins d'injonction doivent donc être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, le versement à M. D..., de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 6 octobre 2015 est annulé.
Article 2 : La décision du 27 juillet 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a décidé la mutation de M. D... est annulée.
Article 3 : L'Etat versera à M. D... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2018, où siégeaient :
- M. d'Izarn de Villefort, président,
- MmeC... , première conseillère,
- M. Coutel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 mai 2018.
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N° 15MA04811