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17/03/2022 | FRANCE | N°20MA00093

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 17 mars 2022, 20MA00093


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 4 avril 2016 par laquelle le préfet de la région Provence-Alpes-Côte-D'azur a refusé de lui délivrer une autorisation européenne de pêche " canne ligne exclusif " pour la pêche professionnelle du thon rouge par les petits métiers artisanaux en mer Méditerranée pour l'année de gestion 2016 en sa qualité d'armateur du navire " Mistigri II " ainsi que la décision du 27 mai 2016 rejetant son recours gracieux.

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ar un jugement n° 1700193 du 4 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulon a ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 4 avril 2016 par laquelle le préfet de la région Provence-Alpes-Côte-D'azur a refusé de lui délivrer une autorisation européenne de pêche " canne ligne exclusif " pour la pêche professionnelle du thon rouge par les petits métiers artisanaux en mer Méditerranée pour l'année de gestion 2016 en sa qualité d'armateur du navire " Mistigri II " ainsi que la décision du 27 mai 2016 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1700193 du 4 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulon a annulé ces décisions et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 janvier 2020, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 novembre 2019 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de rejeter la demande de M. B....

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le critère de l'antériorité doit être apprécié au regard de l'activité du demandeur et non au regard du volume de captures ;

- la décision du 4 avril 2016 est motivée ;

- elle n'est pas entachée d'une erreur de droit ;

- elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. B....

Par un mémoire en défense enregistré le 14 juillet 2021, M. B... représenté par Me Semeriva, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête du ministre de l'agriculture et de l'alimentation ;

2°) d'enjoindre à l'Etat, à titre principal, de lui délivrer une autorisation européenne de pêche " canne ligne exclusif " pour la pêche professionnelle au thon rouge, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation au regard de sa demande d'autorisation, sous astreinte de 500 euros par jour de retard dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de la renonciation de son avocat au bénéfice de l'aide juridictionnelle sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la requête du ministre de l'agriculture est irrecevable, puisqu'introduite après l'expiration du délai d'appel ;

- la décision du 4 avril 2016 est insuffisamment motivée dès lors que l'avis de la commission consultative de la gestion des ressources halieutiques du 12 janvier 2016 ne lui a pas été communiqué et que les critères pris en compte pour l'édiction de cet avis ne sont pas précisés ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, le directeur de la direction interrégionale de la mer méditerranée ne pouvait pas se fonder sur un critère non prévu à l'article 9 de l'arrêté du 22 mars 2013, à savoir justifier d'une activité de pêche d'une durée supérieure à 9 mois d'embarquement sur une période d'un an ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation, il est pêcheur de longue date et son navire a été conçu exclusivement pour la pêche au thon ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, au regard du motif retenu par la Cour dans son arrêt n° 13MA00028, à savoir que, l'administration n'établissait pas que son navire ne pouvait pas figurer sur la liste initiale d'éligibilité, prévue à l'article 6 de l'arrêté du 22 mars 2013.

Par ordonnance du 20 juillet 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 septembre 2021.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement d'exécution (UE) n° 404/2011 de la Commission du 8 avril 2011 modifié portant modalités d'application du règlement (CE) n° 1224/2009 du Conseil instituant un régime communautaire de contrôle afin d'assurer le respect des règles de la politique commune de

la pêche ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2014-1608 du 26 décembre 2014 ;

- l'arrêté du 22 mars 2013 portant création d'une autorisation européenne de pêche pour la pêche professionnelle du thon rouge (Thunnus thynnus) dans l'océan Atlantique à l'est de

la longitude 45° Ouest et en mer Méditerranée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Massé-Degois,

- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... propriétaire et armateur du navire Mistigri-II, a demandé la délivrance d'une autorisation européenne de pêche (AEP) du thon rouge par les métiers artisanaux en Méditerranée " Canne Ligne Exclusive " pour l'année 2016. Le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a refusé de lui délivrer cette autorisation par une décision du 4 avril 2016, après avis de la commission consultative pour la gestion des ressources halieutiques (CCGRH) confirmée par une décision du 27 mai suivant rejetant son recours gracieux du 9 avril 2016. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation relève appel du jugement du 4 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé ces décisions.

Sur la recevabilité de la requête :

2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf dispositions contraires, le délai d'appel est de deux mois ". Aux termes de l'article R. 751-4-1 du même code : " Par dérogation aux articles R. 751-2, R. 751-3 et R. 751-4, la décision peut être notifiée par le moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 aux parties qui sont inscrites dans cette application (...) / Ces parties sont réputées avoir reçu la notification à la date de première consultation de la décision, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié à l'Etat, en la personne du ministre de l'agriculture et de l'alimentation au moyen de l'application informatique Télérecours le 13 novembre 2019, et qu'il a consulté ce jugement le même jour. Il en résulte que le délai d'appel opposable au ministre de l'agriculture et de l'alimentation a commencé à courir, à compter de cette date. Dans ces conditions, la requête présentée par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, enregistrée au greffe de la cour le 9 janvier 2020, n'est pas tardive. La fin de non-recevoir opposée par M. B... doit donc être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. D'une part, il ressort de la combinaison des dispositions des articles L. 921-2, R. 921-21 et D. 921-5 du code rural et de la pêche maritime que les AEP délivrées par le préfet de région, ou sur délégation par le directeur de la direction interrégionale de la mer Méditerranée, prennent en compte trois critères tirés de l'antériorité des producteurs, des orientations du marché ainsi que des équilibres économiques et font l'objet d'un examen préalable par la commission consultative de la gestion des ressources halieutiques (CCGRH). Ainsi, la CCGRH est obligatoirement consultée sur les demandes de transfert ou de cession d'AEP mentionnés aux articles R. 921-31 et R. 921-32 de ce code et facultativement consultée sur les demandes initiales ou de renouvellement mentionnées aux articles R. 921-21 et R. 921-26 du même code.

5. D'autre part, aux termes des articles 4, 6, 7 et 9-3 de l'arrêté du 22 mars 2013 modifié portant création d'une autorisation européenne de pêche pour la pêche professionnelle du thon rouge, en vigueur à la date de la décision attaquée, les demandes d'AEP pour la pêche au thon rouge présentées pour des navires non-inscrits sur la liste initiale des navires éligibles à " l'AEP thon rouge " sont instruites conformément à l'article 8 de l'arrêté du 18 décembre 2006 selon lesquelles la " Commission consultative d'attribution " est chargée d'examiner les demandes de " permis de pêche spécial (PPS) " en tenant compte " des antériorités des producteurs, des orientations du marché et des équilibres socio-économiques ". Toutefois, ces dispositions ayant été abrogées par celles de l'article 4 du décret du 26 décembre 2014 relatif à la codification de la partie règlementaire du livre IX du code rural et de la pêche maritime, il y a lieu, pour l'instruction des demandes présentées pour des navires non-inscrits sur la liste initiale des navires éligibles à " l'AEP thon rouge " de faire application des modalités prévues aux articles du code rural et de la pêche maritime cités au point précédent et en particulier celles résultant de la combinaison des articles L. 921-2, R. 921-21 et D. 915-5 précités.

6. Enfin, selon l'article D. 921-1 du code rural et de la pêche maritime : " Pour l'application du présent livre, on entend par : (...) / 12° " Quota de captures " : la quantité maximale de captures pouvant être réalisées sur un stock donné (...); un quota de captures est une masse mesurée en tonnes ou en kilogrammes de poids vif ; / 13° " Quota d'effort de pêche " : la durée maximale d'activité de pêche ou d'absence du port en vue de capturer une quantité d'un ou de stocks donnés, (...) ; un quota d'effort de pêche est exprimé soit en jours, soit en kW-jours, soit en kW-heures, soit en GT-jours ; / 14° " antériorité " : " une référence historique se rapportant à l'activité de pêche maritime ou procédant d'échanges réalisés par une organisation de producteurs à une date donnée. Elle est établie à partir des données déclarées par les capitaines des navires de pêche conformément aux réglementations européennes et nationales, en application de l'article D. 921-5. Elle constitue une base de calcul permettant de procéder à la répartition des quotas et non un droit permettant de revendiquer ces quotas ". Il résulte de ces dispositions que le critère de " l'antériorité des producteurs " qui se rapporte à une activité de pêche doit être apprécié au vu de la quantité des captures réalisées et de la durée d'activité de pêche ou d'absence du port.

7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la demande d'AEP du thon rouge " canne ligne exclusif " de M. B..., propriétaire du navire Mistigri-II non inscrit sur la liste initiale des navires éligibles à " l'AEP thon rouge ", a été refusée le 4 avril 2016 par le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, après avoir été examinée le 12 janvier précédent par la CCGRH selon la procédure prévue aux articles D. 921-5 et D. 921-6 du code rural et de la pêche maritime, au motif que la totalité du temps d'embarquement à la pêche de l'armateur n'atteignait pas la durée requise de neuf mois sur la période de référence. Le motif relatif à la durée d'embarquement des producteurs relève du critère de " l'antériorité des producteurs " figurant aux articles L. 921-2 et R. 921-21 du code rural et de la pêche maritime, lequel s'apprécie, contrairement à ce qu'a considéré le tribunal et ainsi qu'il a été dit au point précédent, au vu de la quantité des captures réalisées ainsi que de la durée d'activité de pêche ou d'absence du port et non exclusivement au vu des captures effectuées. Par suite, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 4 avril 2016 au motif que le préfet a commis une erreur de droit en fondant son refus sur le critère tenant à une durée minimale d'embarquement au cours de la période de référence, soit au cours de la période du 1er novembre 2014 au 31 octobre 2015.

8. Lorsque le juge d'appel, saisi par le défendeur de première instance, censure le motif retenu par les premiers juges, il lui appartient, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des moyens présentés par l'intimé en première instance, alors même qu'ils ne seraient pas repris dans les écritures produites, le cas échéant, devant lui, à la seule exception de ceux qui auraient été expressément abandonnés en appel.

9. En premier lieu, la décision contestée du 4 avril 2016 vise notamment le livre IX du code rural et de la pêche maritime, l'arrêté ministériel du 22 mars 2013 modifié portant création d'une autorisation européenne de pêche pour la pêche professionnelle du thon rouge ainsi que l'avis de la CCGRH du 12 janvier 2016 et mentionne le motif de refus de la demande d'AEP du thon rouge présentée par M. B... pour l'année 2016 à savoir que " la totalité du temps d'embarquement à la pêche de l'armateur n'atteint pas les neufs mois requis sur la période de référence ". En énonçant ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, elle satisfait aux exigences des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public reprises à l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté. Si M. B... soutient, par ailleurs, ne pas avoir eu communication de l'avis de la CCGRH du 12 janvier 2016 ni connaissance des critères pris en compte pour l'édiction de cet avis, il n'établit ni même n'allègue avoir vainement sollicité de l'administration la transmission de ces documents.

10. En deuxième lieu, il ressort du relevé des Services des marins versé aux débats que M. B... a, au cours de la période du 1er novembre 2014 au 31 octobre 2015, embarqué durant 37 jours. Il résulte des points 4 à 7 du présent arrêt, qu'en refusant de délivrer une AEP à M. B... au motif qu'il ne remplissait pas la condition tenant à l'exigence d'avoir embarqué au moins neuf mois au cours de l'année de référence, le préfet a, comme il a été dit au point 7, exactement appliqué les dispositions des articles L. 921-2 et R. 921-21 du code rural et de la pêche maritime. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant la délivrance de l'AEP demandée pour le motif qui vient d'être rappelé.

11. En dernier lieu, M. B... soutient que la décision contestée du 4 avril 2016 portant refus d'AEP est entachée d'une erreur de droit pour le même motif que celui qui a justifié l'annulation par la cour administrative d'appel de Marseille dans son arrêt n° 13MA00028 du 2 novembre 2015 des décisions du ministre de l'agroalimentaire, de l'agriculture et de la pêche de mai et du 16 juin 2010 refusant de faire figurer son bateau sur la liste des navires habilités " permis de pêche spécial thon rouge ".Toutefois, et dès lors que la décision du 4 avril 2016 confirmée par la décision du 27 mai suivant, en litige dans la présente instance, refusent à M. B... la délivrance d'une AEP thon rouge et non l'inscription de son navire sur la liste initiale d'éligibilité comme dans l'affaire n° 13MA00028 jugée le 2 novembre 2015, ce moyen doit être écarté comme inopérant.

12. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué du tribunal administratif de Toulon et de rejeter la demande présentée devant ce tribunal par M. B....

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 présentées par M. B... devant la Cour :

13. Par voie de conséquence du rejet de la demande de M. B... présentée devant le tribunal administratif de Toulon, les conclusions susvisées doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1700193 du 4 novembre 2019 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Toulon par M. B... ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles fondées sur les articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 présentées devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., Me Semeriva et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie en sera adressée au préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Délibéré après l'audience du 24 février 2022, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,

- M. Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.

2

N° 20MA00093


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00093
Date de la décision : 17/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline. - Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SEMERIVA

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-17;20ma00093 ?
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