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25/11/2021 | FRANCE | N°21MA00354

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 25 novembre 2021, 21MA00354


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Calme a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer le report des déficits constatés à la clôture de l'exercice 2009 à hauteur de la somme de 497 961 euros.

Par un jugement n° 1601086 du 16 octobre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17MA04833 du 21 décembre 2018, la cour administrative de Marseille a rejeté l'appel formé par la SCI Calme contre ce jugement.

Par une décision

n° 428297 du 31 décembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Calme a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer le report des déficits constatés à la clôture de l'exercice 2009 à hauteur de la somme de 497 961 euros.

Par un jugement n° 1601086 du 16 octobre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17MA04833 du 21 décembre 2018, la cour administrative de Marseille a rejeté l'appel formé par la SCI Calme contre ce jugement.

Par une décision n° 428297 du 31 décembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la cour administrative de Marseille du 21 décembre 2018 et a renvoyé l'affaire, devant la même cour, où elle a été de nouveau enregistrée sous le n° 21MA00354.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 15 décembre 2017, le 28 juin 2018, le 23 février 2021 et le 28 avril 2021, la SCI Calme, représentée par Ellaw Avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 octobre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en procédant, le 15 janvier 2014, à des investigations complémentaires, l'administration a dépassé la durée de la vérification de comptabilité, qui a débuté le 4 septembre 2013, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ;

- les deux propositions de rectification des 10 décembre 2013 et 24 avril 2014 qui lui ont été adressées sont insuffisamment motivées en ce qui concerne le refus de l'administration de prendre en compte des déficits reportables ;

- son activité ayant toujours été de nature commerciale, l'administration ne pouvait, au motif d'un changement de régime fiscal, refuser de prendre en compte les déficits reportables à la clôture de l'exercice clos en 2009 ;

- les documents comptables produits justifient l'existence de déficits d'un montant de 497 961 euros à l'ouverture de son exercice clos en 2010.

Par des mémoires en défense enregistrés le 11 juin 2018 et le 10 mars 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SCI Calme ne sont pas fondés.

Un mémoire a été enregistré le 6 mai 2021, présenté par le ministre de l'action et des comptes publics, et non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 29 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Massé-Degois,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Schabo, représentant le ministre de l'action et des comptes publics.

Vu la note en délibéré présentée pour le ministre de l'action et des comptes publics, enregistrée le 10 novembre 2021.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SCI Calme, propriétaire d'un bien immobilier à Prades (Pyrénées-Orientales) donné en location à une société qui y exploite un fonds de commerce de gîtes et tables d'hôtes, l'administration fiscale a remis en cause l'application du régime d'imposition des sociétés de personnes pour soumettre cette société, au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, à l'impôt sur les sociétés en raison de son objet commercial. Après avoir demandé en vain à l'administration fiscale la prise en compte du déficit constaté à la clôture de l'exercice 2009 à hauteur de 497 961,07 euros sur les résultats du premier exercice soumis à l'impôt sur les sociétés, la SCI Calme a saisi le tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande. Par une décision du 31 décembre 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi de la SCI Calme, annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 21 décembre 2018 rejetant son appel et renvoyé l'affaire devant la cour administrative de Marseille.

2. D'une part, la circonstance que la SCI Calme, dont il n'est pas contesté qu'elle a toujours exercé une activité de nature commerciale, a été assujettie à l'impôt sur les sociétés à la suite de la vérification de comptabilité, à compter de son exercice clos le 31 décembre 2010, n'emporte pas cessation d'entreprise au sens du 5 de l'article 221 du code général des impôts et ne fait ainsi pas obstacle au bénéfice du report déficitaire prévu par les dispositions du I de l'article 209 du code général des impôts.

3. D'autre part, pour l'application des dispositions de l'article 209 du code général des impôts, selon lesquelles le déficit subi pendant un exercice est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice, il appartient au contribuable de justifier l'existence d'un déficit reportable et son montant. Il s'acquitte de cette obligation par la production d'une comptabilité régulière et probante ou, à défaut, par toute autre preuve extracomptable suffisamment probante. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation en produisant une comptabilité, il incombe alors à l'administration, si elle s'y croit fondée, soit de critiquer les écritures ayant conduit à la constatation d'un déficit, soit de demander au contribuable de justifier de la régularité de ces écritures. Il appartient alors au juge de l'impôt d'apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.

4. A l'issue de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SCI Calme, l'administration fiscale après avoir remis en cause l'application du régime d'imposition des sociétés de personnes pour la soumettre à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 en raison de son objet commercial, a refusé de faire droit à la demande de la société tendant à obtenir sur les résultats de ces trois exercices le report des déficits nés au cours des exercices précédents dont le montant cumulé s'élevait à la clôture de l'exercice 2009 à 497 961,07 euros sans cependant remettre en cause le caractère sincère et probant de la comptabilité commerciale tenue tout en admettant, au stade de la réclamation, le caractère déductible des amortissements de même nature pratiqués au titre des exercices 2011 et 2012.

5. Le déficit d'un exercice étant la résultante de l'ensemble de charges et de produits de l'exercice, si sa justification ne peut être apportée que par la production de l'ensemble des éléments de la comptabilité, il est constant que les éléments produits par la SCI Calme, se rapportant à la période 2003 à 2011, en l'occurrence les grands livres des comptes généraux afférents aux exercices 2003 à 2008 et à celui clos en 2011 ainsi que la balance des comptes généraux pour les exercices clos en 2009 et 2010 et le bilan de l'exercice clos en 2010, font état de pertes annuelles résultant pour l'essentiel de l'amortissement du bien immobilier donné en location dont elle était propriétaire et reportées d'exercice en exercice pour atteindre la somme de 497 961,07 euros à la clôture de l'exercice 2009. Il s'ensuit, et dès lors que le caractère sincère et probant de la comptabilité commerciale tenue par la SCI n'a pas été remis en cause lors des opérations de vérification par l'administration, qui a au surplus admis le caractère déductible des amortissements de même nature pratiqués au titre des exercices vérifiés, le ministre ne peut être regardé comme critiquant utilement les écritures comptables de l'appelante ayant conduit à la constatation du déficit litigieux en se bornant à affirmer que les éléments versés à l'instance ne permettent pas de dégager les résultats des opérations effectuées par la société en vertu de l'article 38 du code général des impôts, qu'ils ne sont assortis d'aucun justificatif des écritures constatées en méconnaissance de l'article 39 du même code et que les écritures comptables ainsi que les états présentés sont entachés d'anomalies de dates, sans même préciser la nature des retraitements extracomptables nécessaires au dégagement du résultat fiscal des exercices dans le respect desdites règles fixées aux articles précités du code général des impôts, ni faire valoir d'éléments susceptibles de jeter un doute sur la sincérité ou l'exactitude des éléments comptables versés.

6. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard à l'ensemble des éléments qui précèdent, la SCI Calme doit être regardée comme justifiant l'existence et le montant des déficits reportables à la clôture de l'exercice clos en 2009. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de sa requête, la SCI Calme est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué et le report sur les résultats des exercices suivants les déficits nés au cours des exercices précédents s'élevant, à la clôture de l'exercice 2009, à 497 961,07 euros.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 2 000 euros à verser à la SCI Calme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1601086 du 16 octobre 2017 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Les déficits nés au cours des exercices précédents, d'un montant de 497 961,07 euros à la clôture de l'exercice 2009, sont reportés sur les exercices suivants.

Article 3 : L'Etat versera à la SCI Calme la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Calme et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2021, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,

- M. Sanson, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 novembre 2021.

5

N° 21MA00354

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00354
Date de la décision : 25/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SELARL ELLAW

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-11-25;21ma00354 ?
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