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21/12/2018 | FRANCE | N°17MA04833

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 21 décembre 2018, 17MA04833


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Calme a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer le report des déficits constatés à la clôture de l'exercice 2009 à hauteur de la somme de 497 961 euros.

Par un jugement n° 1601086 du 16 octobre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 décembre 2017 et le 28 juin 2018, la SCI Calme, représentée par PVB Avocats, demande

à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 octobre 2017 du tribunal administratif de Montpellie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Calme a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer le report des déficits constatés à la clôture de l'exercice 2009 à hauteur de la somme de 497 961 euros.

Par un jugement n° 1601086 du 16 octobre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 décembre 2017 et le 28 juin 2018, la SCI Calme, représentée par PVB Avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 octobre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en procédant, le 15 janvier 2014, à des investigations complémentaires, l'administration a dépassé la durée de la vérification de comptabilité, qui a débuté le 4 septembre 2013, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ;

- les deux propositions de rectification des 10 décembre 2013 et 24 avril 2014 qui lui ont été adressées sont insuffisamment motivées en ce qui concerne le refus de l'administration de prendre en compte des déficits reportables ;

- son activité ayant toujours été de nature commerciale, l'administration ne pouvait, au motif d'un changement de régime fiscal, refuser de prendre en compte les déficits reportables à la clôture de l'exercice clos en 2009 ;

- les documents comptables produits justifient l'existence de déficits d'un montant de 497 961 euros à l'ouverture de son exercice clos en 2010.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SCI Calme ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carotenuto,

- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la SCI Calme.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Calme est propriétaire d'un bien immobilier sur le territoire de la commune de Prades (Pyrénées-Orientales) donné en location à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Castell Rose à fin d'exploitation d'un fonds de commerce de location de gîtes ruraux, de chambres et tables d'hôtes et de toute activité d'hébergement assortie de prestations à caractère hôtelier et para-hôtelier. La société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a considéré que la société avait exercé une activité industrielle et commerciale et lui a notifié, par deux propositions de rectification du 10 décembre 2013 et du 24 avril 2014, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés au titre, respectivement, de l'exercice clos en 2010 et des exercices clos en 2011 et 2012. A la suite d'une entrevue avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, intervenue le 3 avril 2014, la SCI Calme a été informée, par lettre du 18 avril suivant, du refus de l'administration de constater des déficits reportables à la clôture de l'exercice 2009 à hauteur de la somme de 497 961 euros. La SCI Calme a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande qui a été regardée comme tendant à ce que ces déficits constatés à hauteur de la somme de 497 961 euros sur son exercice clos le 31 décembre 2009 soient reportés au titre de son exercice clos le 31 décembre 2010. La SCI Calme relève appel du jugement du 16 octobre 2017 qui a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, la SCI Calme reprend en appel le moyen invoqué devant les premiers juges et tiré de ce que la vérification de comptabilité aurait excédé la durée de trois mois prévue à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales. Il y a lieu, en tout état de cause, d'écarter ce moyen qui ne comporte aucun élément nouveau, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai (...) ".

4. A supposer que la SCI Calme ait entendu se prévaloir des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, il ressort des termes mêmes de la proposition de rectification du 10 décembre 2013 qu'elle a été expressément informée des conséquences financières du contrôle par l'exposé des montants des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés envisagées au titre de l'exercice clos en 2010. La société ne peut utilement se prévaloir de l'absence de mention dans cette proposition de rectification du rejet de déficits reportables dès lors que cette demande de report n'a été adressée à l'administration que postérieurement à la notification de cette proposition de rectification. Par suite, le moyen tiré de ce que les propositions de rectification des 10 décembre 2013 et 24 avril 2014 sont insuffisamment motivées, doit, en tout état de cause, être écarté.

En ce qui concerne les déficits reportables :

5. Aux termes de l'article 206 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. (...) sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés (...) n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes (...) 2. (...) les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt, même lorsqu'elles ne revêtent pas l'une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35. (...) ". Aux termes du I de l'article 209 du même code relatif à la détermination de la base de l'impôt sur les sociétés, dans sa rédaction alors applicable : " (...) en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice (...). Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté sur les exercices suivants. (...) ". Enfin, aux termes du 5 de l'article 221 du même code, dans sa rédaction applicable à l'année de réalisation du déficit en litige : " Le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société emporte cessation d'entreprise. (...) ". Il résulte de la combinaison des dispositions du I de l'article 209 et du 5 de l'article 221 du code général des impôts que la mise en oeuvre du droit au report déficitaire est subordonnée notamment à la condition qu'une société n'ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu'elle n'est plus, en réalité, la même.

6. La circonstance que la SCI Calme, dont il n'est pas contesté que son activité a toujours été de nature commerciale, a été assujettie à l'impôt sur les sociétés à la suite de la vérification de comptabilité, à compter de son exercice clos le 31 décembre 2010, n'emporte pas cessation d'entreprise au sens du 5 de l'article 221 du code général des impôts et ne fait donc pas obstacle au bénéfice du report déficitaire prévu par les dispositions du I de l'article 209 du code général des impôts.

7. Toutefois, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier l'existence et le montant du déficit qu'il entend reporter. Pour la première fois en appel, la SCI Calme produit les grands livres des comptes généraux afférents aux exercices clos de 2003 à 2008 et à celui clos en 2011 ainsi que la balance des comptes généraux pour les exercices clos en 2009 et 2010, ainsi que le bilan de l'exercice clos en 2010. Toutefois, à défaut de toute justification des écritures comptables correspondantes et en l'absence de précision sur l'origine de ces déficits, et alors même que l'administration a admis la déduction des amortissements au titre des exercices clos en 2011 et 2012, la SCI Calme ne saurait être regardée comme justifiant l'existence et le montant des déficits reportables à la clôture de l'exercice clos en 2009. Par suite, la SCI Calme n'est pas fondée à demander le report des déficits pour un montant de 497 961 euros au titre de son exercice clos le 31 décembre 2010.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Calme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SCI Calme la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Calme est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Calme et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2018, où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme Carotenuto, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 décembre 2018.

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N° 17MA04833

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