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18/09/2020 | FRANCE | N°20MA03379

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 18 septembre 2020, 20MA03379


Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance n° 443716 du 7 septembre 2020, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la Cour le jugement de la requête présentée par M. B... C... tendant au dessaisissement du tribunal administratif de Montpellier, pour suspicion légitime, dans l'affaire relative à la contestation du premier tour des élections municipales de la commune d'Ille-sur-Têt (Pyrénées orientales) qui se sont déroulées le 15 mars 2020.

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conse

il d'Etat, et par un mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 13 septembre ...

Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance n° 443716 du 7 septembre 2020, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la Cour le jugement de la requête présentée par M. B... C... tendant au dessaisissement du tribunal administratif de Montpellier, pour suspicion légitime, dans l'affaire relative à la contestation du premier tour des élections municipales de la commune d'Ille-sur-Têt (Pyrénées orientales) qui se sont déroulées le 15 mars 2020.

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et par un mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 13 septembre 2020, M. C..., représenté par Me F... H..., demande le renvoi à un autre tribunal, pour cause de suspicion légitime du tribunal administratif de Montpellier, du jugement de la protestation enregistrée au greffe de ce tribunal sous le n° 2001412.

Il soutient que :

- le tribunal administratif de Montpellier a refusé, pour des motifs manifestement erronés, d'annuler la décision manifestement illégale par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de délivrer un récépissé de candidature aux élections municipales de la commune d'Ille-sur-Têt de la liste dont il faisait partie ;

- trois juges et un rapporteur public ont ainsi agi de concert pour priver des citoyens de leur droit de présenter une liste électorale, ce qui constitue un grave manquement au principe d'impartialité, alors que ces juges constituent la seule formation de jugement du tribunal spécialisée en contentieux électoral ;

- dans le cadre de l'instruction de la protestation contre les élections municipales de la commune d'Ille-sur-Têt qui se sont déroulées le 15 mars 2020, le président de la formation de jugement a entendu rejeter cette protestation en raison d'un moyen d'ordre public, tiré de l'irrecevabilité pour leur prétendue tardiveté de certains griefs, qui est manifestement inopérant ; il a ainsi mis en place une stratégie manifestement illégale pour rejeter la protestation ;

- les parties à la protestation ont reçu du tribunal un avis de radiation du rôle de l'affaire dont l'examen était initialement prévu à une audience du 10 septembre 2020, ce qui en l'absence de toute précision a pu leur faire croire que cette affaire était réglée.

Par un mémoire, enregistré le 11 septembre 2020, la présidente du tribunal administratif de Montpellier déclare s'en remettre à la sagesse de la Cour.

M. C... ayant concomitamment présenté des conclusions tendant à la récusation de cinq magistrats du tribunal, demande que le président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a renvoyée au tribunal administratif de Montpellier afin qu'il y soit statué, la présidente de ce tribunal informe la Cour qu'aucun de ces magistrats ne siègera dans la formation de jugement qui aura à connaître de la protestation électorale en cause, dans l'hypothèse d'un rejet par la Cour de la requête à fin de renvoi pour cause de suspicion légitime.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code électoral ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 17 septembre 2020 :

- le rapport de M. Lascar, président-rapporteur, qui informe les parties que la décision sera rendue dès le lendemain de l'audience ;

- les conclusions de Mme Courbon, rapporteur public ;

- et les observations de Me H..., pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. Tout justiciable est recevable à demander à la juridiction immédiatement supérieure qu'une affaire dont est saisie la juridiction compétente soit renvoyée devant une autre juridiction du même ordre si, pour des causes dont il appartient à l'intéressé de justifier, le tribunal compétent est suspect de partialité.

2. Par décision du 28 février 2020, le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de délivrer à la liste " Ille, nouveau départ " un récépissé de candidature aux élections municipales d'Ille-sur-Têt des 15 et 22 mars 2020. Par jugement n° 2001041 du 3 mars 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la requête aux fins d'annulation de cette décision. Les élections municipales d'Ille-sur-Têt ont été remportées, dès le premier tour de scrutin, le 15 mars 2020, par la liste " l'Ille avec vous ", dont la tête était M. D... G.... Les membres de la liste " Ille, nouveau départ ", qui n'avaient pas pu prendre part au scrutin, ont formé devant le tribunal administratif de Montpellier une protestation contre le premier tour de ces élections municipales. Par la présente requête, M. C... demande le renvoi à un autre tribunal, pour cause de suspicion légitime du tribunal administratif de Montpellier, du jugement de cette protestation enregistrée au greffe du tribunal sous le n° 2001412.

3. En premier lieu, une cour administrative d'appel ne peut connaître d'un jugement d'un tribunal administratif statuant, en premier et dernier ressort, sur le refus de délivrance du récépissé de candidature prévu par l'article L. 265 du code électoral. La Cour n'est par suite pas compétente pour se prononcer sur la régularité ou le bien-fondé du jugement rendu par le tribunal administratif de Montpellier le 3 mars 2020 sous le n° 2001041. En tout état de cause, la circonstance que ce jugement, comme le prétend le requérant, serait mal fondé, fût-ce " manifestement ", n'est pas de nature à établir que le tribunal ne serait pas impartial, et dès lors ne peut être par elle-même utilement invoquée au soutien d'une demande en dessaisissement de la juridiction pour suspicion légitime. Le moyen qui en est tiré ne peut donc qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, si M. C... prétend que les membres de la chambre qui a eu à connaître de la requête dirigée contre la décision préfectorale du 28 février 2020 ont agi de concert pour priver des citoyens de leur droit de présenter une liste électorale, il n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de ses allégations. Ce moyen doit dès lors être écarté. Par ailleurs, aucun texte ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'une affaire relevant d'une matière affectée, pour l'organisation interne d'une juridiction, à l'une des chambres de celle-ci, soit attribuée à une autre formation de jugement.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. (...) ". En informant les requérants, dans le cadre de l'instruction de la protestation contre le premier tour des élections municipales d'Ille-sur-Têt, de ce que la décision à intervenir lui paraissait susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de chambre n'a fait qu'appliquer les dispositions précitées, sans que cette mesure puisse être regardée comme préjugeant du sens de la décision à intervenir. Si le requérant allègue que le président de chambre a ainsi mis en place " une stratégie manifestement illégale " pour rejeter la protestation, il n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de ce qu'il prétend. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le déroulement de l'instruction de la protestation révèlerait la partialité du tribunal.

6. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que les avis de radiation de la protestation du rôle de l'audience auquel elle était initialement inscrite ne comportent pas le motif de cette radiation est inopérant.

7. Il résulte des motifs qui précèdent que la requête de M. C... doit être rejetée.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à M. D... G..., à la présidente du tribunal administratif de Montpellier et au préfet des Pyrénées-orientales.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2020, où siégeaient :

- M. Lascar, président,

- Mme E..., présidente assesseure,

- Mme A..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 18 septembre 2020.

4

N° 20MA3379


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03379
Date de la décision : 18/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Récusation

Analyses

Juridictions administratives et judiciaires - Règles générales de procédure.

Procédure - Incidents - Récusation.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Michel LASCAR
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : DANGLEHANT

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-18;20ma03379 ?
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