Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du conseil d'administration de l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " du 18 septembre 2014 prononçant son licenciement et de lui accorder une indemnité en réparation des préjudices subis du fait de cette délibération.
Par un jugement n° 1404041, 1500316, 1500452 du 3 juillet 2015, le tribunal administratif de Toulon a rayé du registre de son greffe la demande n° 1500452, annulé la délibération du conseil d'administration de l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " du 18 septembre 2014 et rejeté le surplus des demandes.
Procédure devant la Cour avant renvoi :
Par une requête, enregistrée le 2 septembre 2015, sous le n° 15MA03692, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 3 juillet 2015 en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires ;
2°) de condamner l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " à lui verser la somme de 47 502,78 euros en réparation du préjudice subi ;
3°) de condamner l'office public de l'habitat à lui verser les traitements qu'il aurait dû percevoir depuis la fin de son préavis de licenciement ;
4°) d'enjoindre à l'office public de l'habitat de procéder à la reconstitution de sa carrière depuis la fin du préavis de licenciement jusqu'à la date du jugement du 3 juillet 2015, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'annulation de son licenciement implique nécessairement que l'administration procède à la reconstitution de ses droits sociaux et au versement des traitements qu'il aurait dû percevoir s'il n'avait pas été licencié ;
- la circonstance qu'il a créé une société dont il n'a pas perçu de revenu est sans incidence sur l'obligation de son employeur de lui verser ses traitements ;
- la réalité de la perte de confiance, sur laquelle est fondée la décision de licenciement, n'est pas établie ;
- la responsabilité de l'administration est engagée ;
- le préjudice résultant de l'altération de sa santé physique et mentale doit être évalué à 6 mois de traitement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 août 2016, l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat ", représenté par Me G..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les conclusions à fin d'injonction de la requête, qui ne sont pas accessoires au litige indemnitaire devant la Cour administrative d'appel, sont irrecevables ;
- en l'absence de service fait, M. B... n'a pas le droit au versement de son traitement ;
- la perte de revenus de M. B... a été causée par la décision de placement sous contrôle judiciaire dont il a fait l'objet.
Par un arrêt n° 15MA03692 du 28 février 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la requête.
Par une décision n° 410167 du 28 septembre 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par M. B..., annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Marseille.
Procédure devant la Cour après renvoi :
Par un mémoire, enregistré le 8 novembre 2018, sous le n° 18MA04412, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) de condamner l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " à lui verser la somme de 337 005,61 euros à titre de dommages et intérêts pour perte d'emploi et la somme de 75 071 euros au titre de ses préjudices matériel et moral ;
2°) d'enjoindre à l'office public de l'habitat de reconstituer sa carrière ;
3°) de mettre à la charge de l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'office public de l'habitat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- il a droit à la somme globale de 337 005,61 euros au titre de la perte de ses rémunérations ;
- il a droit également à la somme globale de 75 071 euros au titre de ses préjudices matériel et moral.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2018, l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat ", représenté par Me G..., conclut au rejet de la requête, à la condamnation de M. B... à lui verser la somme de 17 328,37 euros net ou 21 912,99 euros brut correspondant au paiement de son préavis et à ce que soit mise à la charge de l'intéressé la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la Cour ne peut juger que de la somme initialement demandée en appel, soit 47 502,78 euros au titre de la perte de rémunération de l'intéressé entre la fin de son préavis et le 3 juillet 2015, date du jugement du tribunal ;
- le surplus des demandes indemnitaires est irrecevable ;
- la demande de reconstitution des droits sociaux est également irrecevable dès lors que cette demande est accessoire à un litige principal en excès de pouvoir et qu'elle doit être regardée comme une demande d'injonction à titre principal ;
- en tout état de cause, l'office a régularisé les droits sociaux de l'intéressé ;
- M. B... a été réintégré par un arrêté du 21 août 2015 ;
- l'intéressé a vu son préavis payé jusqu'au 18 décembre 2014.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions reconventionnelles de l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat ", nouvelles en appel.
Une réponse à ce moyen d'ordre public a été présentée le 8 novembre 2019 pour M. B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- l'ordonnance n° 2007-137 du 1er février 2007 ;
- le décret n° 88-545 du 6 mai 1988 ;
- le décret n° 2000-487 du 2 juin 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. F...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., représentant l'office public d'habitat " Terres du Sud Habitat ".
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été recruté par contrat à durée indéterminée en qualité de directeur général de l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " à compter du 25 juin 2009. Par une délibération du 18 septembre 2014, le conseil d'administration de cet office a prononcé son licenciement au seul motif tiré d'une perte de confiance. Par un jugement du 3 juillet 2015, devenu définitif, le tribunal administratif de Toulon a annulé cette délibération pour erreur de droit mais a rejeté les conclusions indemnitaires présentées par M. B.... L'intéressé relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande d'indemnisation et demande de condamner l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " à lui verser la somme de 337 005,61 euros à titre de dommages et intérêts pour perte d'emploi et la somme de 75 071 euros au titre de ses préjudices matériel et moral.
Sur la recevabilité des conclusions de l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " :
2. Les conclusions présentées par l'office public de l'habitat tendant à ce que la Cour condamne M. B... à lui verser la somme de 17 328,37 euros net ou 21 912,99 euros brut correspondant au paiement de son préavis constituent des demandes nouvelles en appel. Elles doivent, dès lors, être rejetées comme irrecevables.
Sur le bien-fondé des conclusions aux fins d'indemnisation :
3. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité.
4. Il résulte de l'instruction que M. B... a détourné la somme de 117 378,70 euros de l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " afin de recouvrer le montant d'une facture de consommations téléphoniques et de réseau internet correspondant à des communications personnelles passées depuis l'étranger. L'intéressé a été cité, à ce titre, devant le tribunal correctionnel de Toulon, placé sous contrôle judiciaire par ordonnance du 14 octobre 2014 confirmé par un jugement du 19 novembre 2014 lui interdisant de se rendre ou paraître au sein de locaux de son employeur et a été condamné pour prise illégale d'intérêts par un jugement définitif du 27 mai 2015. L'ensemble de ces éléments, compte tenu de la gravité des fautes commises, du niveau élevé de responsabilité de M. B... en sa qualité de directeur général, ainsi que de l'importance du préjudice qui a pu en résulter pour son employeur, sont de nature à caractériser une faute personnelle détachable de l'exercice des fonctions de l'intéressé. Il résulte de l'instruction que l'office public de l'habitat aurait pris légalement la même décision de le licencier s'il s'était fondé uniquement sur un motif disciplinaire. Ainsi, M. B... ne saurait soutenir que les préjudices dont il fait état trouveraient leur origine dans l'illégalité du motif de licenciement, tiré de la perte de confiance, censuré par le tribunal administratif de Toulon.
Sur les conclusions tendant au versement des traitements depuis la fin du préavis de licenciement :
5. M. B... a été juridiquement réintégré, par un arrêté du 21 août 2015, à compter du 20 décembre 2014 puis licencié de nouveau, pour fautes graves, par une délibération du 9 octobre 2015. En l'absence de service fait, l'intéressé ne peut prétendre au versement par son employeur des traitements qu'il aurait perçus à compter du 20 décembre 2014 s'il était resté en fonction. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été indiqué au point précédent que le requérant ne peut pas davantage réclamer une indemnité en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait d'une perte de traitements à compter du 20 décembre 2014 dès lors que ce préjudice ne peut pas être regardé comme directement imputable à l'illégalité entachant la délibération du conseil d'administration de l'office en date du 18 septembre 2014.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat ", que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté le surplus de ses demandes.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
7. Il résulte de l'instruction que l'office public de l'habitat a procédé à la reconstitution complète de la carrière de l'intéressé. Par suite, ces conclusions sont dépourvues d'objet.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat ", qui n'a pas la qualité de partie perdante à la présente instance, verse sur leur fondement une quelconque somme à M. B... au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre, sur le fondement des mêmes dispositions, à la charge de M. B..., le versement à l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat " de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par cet établissement public et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera la somme de 2 000 euros à l'office public de l'habitat de la Seyne-sur-Mer " Terres du Sud Habitat " au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à l'office public de l'habitat " Terres du Sud Habitat ".
Délibéré après l'audience du 26 novembre 2019, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président,
- Mme H..., première conseillère,
- M. F..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2019.
N° 18MA04412 2