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31/10/2018 | FRANCE | N°17MA00091

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 31 octobre 2018, 17MA00091


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un déféré du 29 décembre 2014, le préfet du Var a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 27 juin 2014 par lequel le maire de la commune de La Crau a délivré au groupement foncier agricole (GFA) de Montbel un permis de construire portant sur la création de gîtes ruraux sur un terrain cadastré section BZ n° 16, 27, 28, 34, 43 et 44 et CA n° 44 et 45, et situé au lieu-dit Montbel sur le territoire communal.

Par un jugement n° 1404610 du 8 novembre 2016, le tribun

al administratif de Toulon a fait droit à sa demande et a prononcé l'annulation de ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un déféré du 29 décembre 2014, le préfet du Var a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 27 juin 2014 par lequel le maire de la commune de La Crau a délivré au groupement foncier agricole (GFA) de Montbel un permis de construire portant sur la création de gîtes ruraux sur un terrain cadastré section BZ n° 16, 27, 28, 34, 43 et 44 et CA n° 44 et 45, et situé au lieu-dit Montbel sur le territoire communal.

Par un jugement n° 1404610 du 8 novembre 2016, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à sa demande et a prononcé l'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2017, le GFA de Montbel, représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 8 novembre 2016 ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le déféré du préfet du Var est irrecevable dès lors que les notifications prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'ont pas été régulièrement accomplies ;

- le projet en litige ne méconnaissait pas les dispositions de l'article A 2.2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de La Crau.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2017, le préfet du Var conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la fin de non-recevoir opposée par le pétitionnaire doit être écartée et que les autres moyens soulevés par le GFA de Montbel ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Silvy, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le groupement foncier agricole (GFA) de Montbel a déposé le 19 février 2014 une demande de permis de construire en vue de la création de quatre gîtes ruraux dans un bâtiment agricole existant, ainsi que de huit places de stationnement sur un terrain d'une superficie de 81 135 m² situé au lieu-dit Montbel-Maraval sur le territoire de la commune de La Crau. Le maire de la commune de La Crau a délivré le permis de construire relatif à ce projet par arrêté n° PC 083 047 14 HO 010 du 27 juin 2014. Le GFA de Montbel relève appel du jugement du 8 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulon a fait droit au déféré formé le 29 décembre 2014 par le préfet du Var à l'encontre de cet arrêté et a prononcé son annulation.

Sur les fins de non-recevoir opposées par le GFA de Montbel :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet (...) à l'encontre (...) d'un permis de construire (...), le préfet (...) est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. ".

3. En premier lieu, le GFA de Montbel fait valoir que le préfet du Var ne justifie pas de la notification du recours gracieux qu'il a introduit auprès du maire de la commune de La Crau dès lors qu'il se borne à produire une simple lettre d'accompagnement. Il est toutefois constant que le GFA de Montbel a reçu le 3 septembre 2014 un pli recommandé adressé par la préfecture du Var et comportant un courrier daté du 2 septembre 2014 relatif au recours gracieux adressé au maire le même jour et faisant état d'une copie de ce recours sous le présent pli. Si le GFA de Montbel soutient que l'enveloppe qui lui a été remise ne contenait pas la copie du recours gracieux annoncé, contrairement aux affirmations du préfet du Var, il lui incombe d'en apporter la preuve soit en faisant état des diligences effectuées auprès de cette autorité à la réception de ce pli, soit par tout autre moyen. En l'état de l'instruction, l'appelant n'apporte aucun commencement de preuve de nature à étayer ses allégations et ne contredit pas utilement, par ses écritures et ses productions, les mentions portées sur le courrier d'accompagnement. Cette fin de non-recevoir tenant au défaut de notification complète du recours gracieux du préfet du Var doit, par suite, être écartée.

4. En deuxième lieu, le GFA de Montbel fait également valoir que le préfet du Var ne justifie pas du respect des prescriptions précitées de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme s'agissant de la notification du déféré du 29 décembre 2014. Il ressort toutefois des pièces produites en première instance par le préfet du Var que celui-ci a procédé à l'envoi le 24 décembre de courriers recommandés au maire de la commune de La Crau. Si le GFA de Montbel soutient que les pièces produites par le préfet du Var ne sont pas de nature à établir que les copies annoncées des requêtes introductives d'instance étaient effectivement jointes à ces envois, contrairement aux affirmations de cette autorité, il lui incombe d'en apporter la preuve soit en faisant état des diligences effectuées auprès de cette autorité à la réception de ce pli, soit par tout autre moyen. En l'état de l'instruction, l'appelante n'apporte aucun commencement de preuve de nature à étayer ses allégations et ne contredit pas utilement, par ses écritures et ses productions, les mentions portées sur le courrier d'accompagnement. Cette fin de non-recevoir tenant au défaut de notification complète du déféré du préfet du Var doit, par suite, également être écartée.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

5. Aux termes du préambule du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme de La Crau, relatif au caractère de la zone : " La zone A comprend les terrains qui font l'objet d'une protection particulière en raison de la valeur et du potentiel agronomique, biologique et économique des terres agricoles. Elle est destinée à l'activité agricole et aux constructions liées et nécessaires aux besoins de l'exploitation agricole. / (...) ". Aux termes de l'article A1 de ce règlement : " Toutes les occupations et utilisations du sol non mentionnées à l'article A2 sont interdites. (...) ". Aux termes de l'article A2 de ce même règlement : " En zone A (hors secteur Ap), seules peuvent être autorisées les occupations et utilisations du sol ci-après selon l'une des conditions particulières suivantes : (...) 2.2. À condition qu'ils s'inscrivent dans le prolongement de la production agricole et utilisent l'exploitation agricole comme support : / - l'aménagement de bâtiments existants de caractère en vue de favoriser les activités agritouristiques, sous réserve que ces bâtiments ne soient plus utiles au fonctionnement de l'exploitation / (...) ". Et aux termes de l'annexe au règlement de la zone A du plan local d'urbanisme de La Crau : " Critères de définition de l'exploitation agricole (...) / Critères normatifs / En application des articles L. 311-1 et L. 312-1 du code rural. / L'exploitation agricole, considérée en tant qu'entité de production végétale et/ou animale devra disposer de la surface minimum d'installation (S.M.I.) en référence, d'une part, au Schéma Directeur des Structures Agricoles du Département du Var établi par arrêtés préfectoraux et définissant notamment cette SMI, et d'autre part à l'arrêté ministériel fixant les coefficients d'équivalence pour les productions hors sol. / Pour les exploitations agricoles dont les types de productions végétales et/ou animales ne disposent pas d'une S.M.I., définie par l'un ou l'autre des arrêtés ci-dessus évoqués, les revenus annuels dégagés de l'activité agricole devront être au moins égaux à 1,5 SMIC. / Les activités d'agritourisme et de diversification telles que définies par l'article L. 311-1 du code rural pourront être autorisées selon la réglementation en vigueur, à condition qu'elles s'inscrivent dans le prolongement de l'acte de produire, ou qu'elles aient pour support l'exploitation. / (...) ".

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire et notamment des clichés photographiques n°1 et n°2 présentant l'état actuel du bâtiment en cause, désigné comme " hangar " aux termes mêmes de ce dossier de demande, que cet édifice récent présente une conception fonctionnelle dépourvue de tout style architectural particulier et doté d'une toiture moderne. À supposer même que le cliché n° 3 de ce dossier, qui révélerait une toiture en tuiles d'inspiration traditionnelle, corresponde réellement à l'état de cette construction à la date de la demande de permis de construire, cette seule circonstance n'est pas de nature à la faire regarder comme un " bâtiment de caractère " au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme.

8. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas utilement contesté que le GFA de Montbel a pour activité agricole principale la culture de l'algue spiruline, laquelle se pratique en bassin, production végétale qui ne fait pas l'objet d'une surface minimum d'installation en application de l'arrêté préfectoral du 9 août 1990 établissant le schéma directeur des structures agricoles du département du Var. Il en résulte que le critère de définition de l'exploitation agricole, tel que déterminé par le plan local d'urbanisme de la commune de La Crau, applicable à cette exploitation est celui des revenus annuels dégagés par l'activité agricole. Il ne ressort toutefois ni des productions de la commune en première instance, ni de celles du GFA de Montbel en appel que les revenus dégagés par cette activité agricole seraient au moins égaux à 1,5 fois le montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance tel qu'il était fixé à la date du permis de construire en litige.

9. Le maire de la commune de La Crau ne pouvait, dès lors, légalement délivrer le permis de construire en cause qui méconnaissait les dispositions de l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme communal.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le GFA de Montbel n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a fait droit au déféré du préfet du Var et a prononcé l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2014 du maire de la commune de La Crau.

Sur les conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

12. En vertu de ces dispositions, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par le GFA de Montbel doivent, dès lors, être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du GFA de Montbel est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au GFA de Montbel et au ministre de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2018, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- M. Portail, président assesseur,

- M Silvy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 octobre 2018.

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N° 17MA00091


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00091
Date de la décision : 31/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation locale.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Jean-Alexandre SILVY
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : MARION

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-10-31;17ma00091 ?
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