La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/05/2018 | FRANCE | N°17MA00597

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 09 mai 2018, 17MA00597


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Monblanc a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le permis de construire tacitement délivré par la commune de Tarascon à la société civile d'exploitation agricole (SCEA) " Terroir saveur production " (TSP).

Par un jugement n° 1507919 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ainsi que l'intervention de l'association pour la défense de l'environnement rural (ADER).par voie de conséquence ;

Procé

dure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 février 2017, l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Monblanc a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le permis de construire tacitement délivré par la commune de Tarascon à la société civile d'exploitation agricole (SCEA) " Terroir saveur production " (TSP).

Par un jugement n° 1507919 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ainsi que l'intervention de l'association pour la défense de l'environnement rural (ADER).par voie de conséquence ;

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 février 2017, le 24 août 2017 et le 13 novembre 2017, l'association pour la défense de l'environnement rural (ADER), représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 décembre 2016 ;

2°) d'admettre son intervention volontaire au soutien de la demande de la SCI Monblanc ;

3°) d'annuler le permis de construire tacite précité ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Tarascon et de la SCEA " TSP " la somme de 3 000 euros chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a statué infra petita ;

- l'ADER qui était présente à l'audience n'a pas été appelée à la cause pour formuler ses observations ;

- elle avait intérêt à intervenir au soutien de la demande de la SCI Monblanc ;

- le délai de recours contentieux n'a pas couru en l'absence d'affichage régulier en application des articles R. 424-15 et A 424-17 du code de l'urbanisme ;

- à défaut de justifier de la réalisation des formalités de l'article L. 2131-1 alinéa 1 et L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales, le permis de construire attaqué n'est pas exécutoire ;

- le dossier de permis de construire est insuffisant sur le volet paysager en méconnaissance des articles L. 431-2 alinéa 2 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

- l'autorisation de construire accordée méconnaît l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) communal ;

- elle méconnaît aussi les articles R. 111-27 et L. 421-6 alinéa 1 du code de l'urbanisme ;

- elle favorise le mitage en méconnaissance de l'article L. 101-2 1°c) du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté contesté méconnaît aussi l'article L. 110-1 du code de l'environnement ;

- la requête d'appel a régulièrement été notifiée en application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 août 2017 et le 4 décembre 2017, la commune de Tarascon conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'ADER et de la SCEA " TSP " la somme de 1 500 euros chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête d'appel, qui n'est pas suffisamment motivée au regard de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, est irrecevable ;

- l'intervention de l'ADER en première instance, qui n'a pas été formée par mémoire distinct, était irrecevable et l'ADER n'a donc pas qualité pour interjeter appel ;

- la requête d'appel de la SCI Monblanc est irrecevable, à défaut de qualité pour agir ;

- la demande de première instance est irrecevable, à défaut d'intérêt à agir de la SCI Monblanc ;

- la requête d'appel, qui n'a pas été régulièrement notifiée en application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme est irrecevable ;

- aucun moyen de la requête n'est fondé.

Par des mémoires enregistrés le 11 septembre 2017, le 7 octobre 2017 et le 14 janvier 2018, la société civile d'exploitation agricole (SCEA) Terroir Saveur Production (TSP) demande à la Cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de la SCI Monblanc et de l'ADER la somme de 2 500 euros chacune, dans le dernier état de ses écritures, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- l'intervention volontaire de l'ADER au soutien de la demande de première instance formée par la SCI Monblanc est irrecevable car elle n'a pas été formée par mémoire distinct ; elle est en tout état de cause irrecevable, par voie de conséquence de l'irrecevabilité de la demande de première instance et l'ADER n'a donc pas qualité pour en interjeter appel ;

- la requête d'appel ne lui a pas été régulièrement notifiée en application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- la demande de première instance est irrecevable car tardive ;

- c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande de première instance pour défaut d'intérêt à agir de la SCI Monblanc au regard de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- les autres moyens de la requête ne sont fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gougot,

- les conclusions de M. Gonneau, rapporteur public,

- et les observations de M. D..., co-président de l'ADER, de Me C..., représentant la commune de Tarascon, et de Me B... substituant Me A..., représentant la SCEA " Terroir Saveur Production ".

1. Considérant que le 10 janvier 2015, le maire de Tarascon a tacitement accordé à la société civile d'exploitation agricole (SCEA) Terroir saveur production (TSP) un permis de construire aux fins d'extension d'un bâtiment existant, du quai de chargement, de réaménagement intérieur et de création de quais et d'une dalle sur des parcelles cadastrées section ZX no 16 et 17, lieudit " Les Dounines " ; que l'association pour la défense de l'environnement rural (ADER) interjette appel du jugement du 15 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la SCI Monblanc, à laquelle l'ADER est intervenue volontairement, tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la recevabilité de l'appel :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 632-1 du code de justice administrative : " L'intervention est formée par mémoire distinct. " ; que la personne qui, devant le tribunal administratif, est régulièrement intervenue à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir est recevable à interjeter appel du jugement rendu contrairement aux conclusions de son intervention lorsqu'elle aurait eu qualité pour introduire elle-même le recours ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'intervention de l'ADER en première instance, qui n'a pas été formée par mémoire distinct, était irrégulière et par suite, irrecevable ; qu'en conséquence, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'ensemble des fins de non-recevoir de la requête d'appel, la commune de Tarascon est fondée à soutenir que l'ADER, qui n'était ni appelée en cause ni intervenante régulière à l'instance, n'a pas qualité pour former appel à l'encontre du jugement du 15 décembre 2016 en tant qu'il a rejeté la demande de la SCI Monblanc ; qu'en revanche, un intervenant en première instance a toujours intérêt pour former appel contre le jugement en tant qu'il a refusé d'admettre son intervention ;

Sur la régularité du jugement, en tant qu'il a rejeté l'intervention de l'ADER par voie de conséquence:

4. Considérant, d'une part, qu'il ressort du jugement attaqué que le conseil de l'ADER a présenté des observations orales à l'audience ; que les mentions du jugement font foi, jusqu'à preuve du contraire ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien ; qu'il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité ; que le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci ; qu'eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction ; qu'en outre, le propriétaire d'un terrain non construit est recevable, quand bien même il ne l'occuperait ni ne l'exploiterait, à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, si, au vu des éléments versés au dossier, il apparaît que la construction projetée est, eu égard à ses caractéristiques et à la configuration des lieux en cause, de nature à affecter directement les conditions de jouissance de son bien ;

6. Considérant que le projet de construction en litige vise seulement à l'extension d'une construction préexistante ainsi qu'il a été dit au point 1 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction projetée sera visible depuis la bastide existante sur le terrain cadastré section ZY n° 100, propriété de la SCI Monblanc, dont elle est distante de plusieurs centaines de mètres vers le Nord Ouest et est séparée par la route départementale ; que si la SCI Monblanc soutient que le projet altèrerait la vue depuis sa propriété en direction du massif des Alpilles elle ne le démontre pas alors notamment qu'il ressort d'un procès-verbal d'huissier établi le 9 mars 2016 à la demande de la société pétitionnaire que depuis le lieu d'implantation du projet il n'existe aucune vue depuis le sol sur le massif des Alpilles et que la société TSP fait valoir, sans être contestée, que les terrains d'assiette du projet ne sont pas inclus dans le parc naturel des Alpilles ; qu'à supposer même que le projet soit partiellement visible depuis la parcelle n° 101, également propriété de la SCI Monblanc, qui est non construite et est bordée à l'Est par une haie de cyprès et au Sud par une haie, et dont le projet est séparé par la route départementale, la SCI Monblanc n'a pas démontré, en se bornant à arguer, sans plus de précision, d'un préjudice de vue lié à sa qualité de voisine immédiate, que la construction supplémentaire projetée serait, eu égard à ses caractéristiques et à la configuration des lieux en cause, de nature à affecter directement les conditions de jouissance de ce terrain qui est une prairie destinée au pâturage de troupeaux de moutons ; que la SCI Monblanc n'a pas davantage établi l'existence d'un trouble de jouissance direct en se bornant à soutenir que l'accès à sa propriété passe devant la construction en litige, à arguer d'une pollution lumineuse et de l'augmentation du trafic qui serait générée par le projet d'extension alors que la route départementale à proximité supporte déjà un trafic important et à se prévaloir de documents de caractère général sur la richesse environnementale des lieux ; que, par suite, et alors même que la construction litigieuse mesure plus de 7 mètres de hauteur, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que l'extension du bâtiment existant pourrait affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien appartenant à la SCI Monblanc ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête d'appel dirigée contre le jugement qui a rejeté l'intervention de l'ADER par voie de conséquence, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la SCI Monblanc, comme irrecevable à défaut d'intérêt à agir ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ADER n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la SCI Monblanc et par voie de conséquence n'a pas admis son intervention ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'ADER dirigées contre la commune de Tarascon et la SCEA " TSP " qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes ; que les conclusions de la commune de Tarascon et de la société " TSP" dirigées contre la SCI Monblanc qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie doivent être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Tarascon et la SCEA " TSP " présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'ADER est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Tarascon et de la SCEA " Terroir Saveur Production " formées à l'encontre de l'ADER et de la SCI Monblanc au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de défense de l'environnement rural, à la commune de Tarascon et à la société civile d'exploitation agricole " Terroir Saveur Production ".

Délibéré après l'audience du 18 avril 2018, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme Gougot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 mai 2018.

2

N° 17MA00597


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00597
Date de la décision : 09/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Incidents - Intervention - Recevabilité.

Procédure - Voies de recours - Appel - Recevabilité - Qualité pour faire appel.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. GONNEAU
Avocat(s) : FARGEPALLET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-05-09;17ma00597 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award