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07/03/2024 | FRANCE | N°21LY00044

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 07 mars 2024, 21LY00044


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions des 19 et 20 février 2018 par lesquelles le directeur du centre pénitentiaire de Valence a refusé de reconnaître les arrêts de travail et les soins prescrits à compter du 18 octobre 2017 comme imputables à un accident de service survenu le 17 octobre 2017 et a par conséquent décidé de lui servir un demi-traitement à compter du 31 décembre 2017, d'enjoindre à l'administration, à titre principal, de

reconnaître qu'elle a été victime d'un accident de service et en conséquence de la rétabli...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions des 19 et 20 février 2018 par lesquelles le directeur du centre pénitentiaire de Valence a refusé de reconnaître les arrêts de travail et les soins prescrits à compter du 18 octobre 2017 comme imputables à un accident de service survenu le 17 octobre 2017 et a par conséquent décidé de lui servir un demi-traitement à compter du 31 décembre 2017, d'enjoindre à l'administration, à titre principal, de reconnaître qu'elle a été victime d'un accident de service et en conséquence de la rétablir dans ses droits à plein traitement à compter du 31 décembre 2017 et de lui rembourser l'ensemble des dépenses de santé liées à cet accident, à titre subsidiaire, de statuer à nouveau sur sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, de condamner l'État à lui payer une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1804377 du 14 novembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble, dans un article 1er a annulé les décisions susvisées, dans un article 2, a enjoint à la ministre de la justice de placer Mme D... en position de congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 18 octobre 2017, de prendre en charge les soins et frais médicaux directement entraînés par l'accident du 17 octobre 2017 et de maintenir le plein traitement de Mme D... au-delà du 30 décembre 2017, ce dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, dans un article 3, a condamné l'État à payer à Mme D... une indemnité de 3 000 euros en réparation du préjudice moral causé par le harcèlement dont elle a été victime et, dans un article 4, a mis à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à Mme D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n°20LY00305 du 26 août 2020, la cour a donné acte du désistement de la requête du ministre de la justice, garde des sceaux.

Procédure d'exécution devant la cour

Par une ordonnance du 5 janvier 2021, le président de la cour a décidé, en application de l'article R. 921-6 du code de justice administrative, l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de prescrire les mesures d'exécution du jugement n° 1804377 du 14 novembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble.

Par un arrêt n° 21LY00044 du 15 juillet 2021, la cour a, dans son article 2, enjoint au ministre de la justice, garde des sceaux, de prendre en charge les soins et frais médicaux de Mme D... directement entraînés par l'accident du 17 octobre 2017 et de maintenir le plein traitement de celle-ci au-delà du 30 décembre 2017, dans un délai d'un mois à compter de la notification et a décidé de prononcer une astreinte provisoire à son encontre, dont le taux journalier a été fixé à 100 euros.

Par un arrêt n° 21LY00044 du 27 octobre 2022, la cour a, dans un article 1er, condamné l'État à verser à Mme D... une somme de 11 400 euros au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte.

Par cinq mémoires, enregistrés les 29 mars 2023, 15 septembre 2023, 8 janvier 2024, 11 février 2024 et 13 février 2024 (non communiqué), Mme D..., représentée par Me Ricci, demande dans le dernier état de ses écritures à la cour de liquider provisoirement l'astreinte prononcée à hauteur de la somme de 47 600 euros à parfaire à hauteur de 100 euros par jour de retard jusqu'à la date de notification de l'arrêt à intervenir, de prononcer une nouvelle astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir concernant les mesures d'injonction qui n'ont pas encore été exécutées et de condamner l'État à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le ministre de la justice n'a pas exécuté l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 14 novembre 2019 ni l'arrêt de la cour du 15 juillet 2021 malgré le prononcé d'une astreinte provisoire par l'arrêt du 27 octobre 2022 et précise que les sommes qui lui sont dues s'élèvent à 20 696,48 euros au titre du rétablissement du plein traitement au-delà du 30 décembre 2017, à 4 200 euros au titre des jours de congés non pris soit 56 jours et 2 136,08 euros au titre du remboursement des frais médicaux engagés à la suite de l'accident du 17 novembre 2017.

Par courrier du 6 juin 2023, le greffe de la cour a invité le garde des sceaux, ministre de la justice à produire sous quinzaine les mesures prises en exécution de l'injonction.

Par cinq mémoires, enregistrés les 1er septembre, 27 septembre, 3 octobre 2023, 17 janvier 2024 et 9 février 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut dans le dernier état de ses écritures à l'exécution totale du jugement du 14 novembre 2019.

Il fait valoir que l'intégralité des sommes dues au titre des salaires a été versée sur la fiche de paye du mois d'août 2021 soit une somme de 1 121,80 euros au titre de l'indemnité de charges pénitentiaires, une somme de 745,74 euros au titre de l'indemnité de sujétions spéciales due et une somme de 5 205,83 euros au titre des traitements bruts non versés et qu'il a accompli toutes les diligences pour verser à Mme D... la part des frais médicaux qui seraient restés à sa charge.

Les parties ont été informées le 10 janvier 2024 en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par Mme D... tendant à la condamnation de l'État à lui verser la somme de 4 200 euros au titre des congés payés non pris sur les années 2017 et 2018 qui relèvent d'un litige distinct du litige d'exécution dont est saisie la Cour.

Par un mémoire, enregistré le 10 janvier 2024, Mme D... déclare renoncer expressément à ces dernières conclusions.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,

- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,

- et les observations de Mmes G..., Niang et M. E... pour le ministre de la justice.

Vu la note en délibéré enregistrée le 20 février 2024 présentée pour Mme D...,

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement n° 1804377 du 14 novembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble, dans un article 2, a enjoint au ministre de la justice de placer Mme D... en position de congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 18 octobre 2017, de prendre en charge les soins et frais médicaux directement entraînés par l'accident du 17 octobre 2017 et de maintenir le plein traitement de Mme D... au-delà du 30 décembre 2017, ce dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et dans un article 3, a condamné l'État à payer à Mme D... une indemnité de 3 000 euros en réparation du préjudice moral causé par le harcèlement dont elle a été victime. Par une ordonnance n°20LY00305 du 26 août 2020, la cour a donné acte du désistement de la requête du garde des sceaux, ministre de la justice. Par un arrêt n° 21LY00044 du 15 juillet 2021, la cour a, dans un article 2, enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, de prendre en charge les soins et frais médicaux directement entraînés par l'accident du 17 octobre 2017 et de maintenir le plein traitement de Mme D... au-delà du 30 décembre 2017, dans un délai d'un mois à compter de la notification de sa décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par un arrêt n°21LY00044 du 27 octobre 2022, la cour a condamné l'État à verser à Mme D... une somme de 11 400 euros au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte en raison de l'exécution partielle de l'article 2 du jugement du 14 novembre 2019.

Sur le désistement partiel :

2. Mme D... a déclaré renoncer expressément à ses conclusions relatives au versement de la somme de 4 200 euros au titre des 56 jours de congés non pris sur les années 2017 et 2018. Elle doit être considérée comme s'étant désistée purement et simplement de ces conclusions. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

Sur la liquidation de l'astreinte :

3. Aux termes de l'article L. 911-6 du code de justice administrative : " L'astreinte est provisoire ou définitive. Elle doit être considérée comme provisoire à moins que la juridiction n'ait précisé son caractère définitif. Elle est indépendante des dommages et intérêts ". Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ". Aux termes de l'article L. 911-8 du même code : " La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. / Cette part est affectée au budget de l'État ".

3. Il ressort des éléments produits par le garde des sceaux, ministre de la justice, à la suite du courrier du 6 juin 2023 qui lui a été adressé par le greffe de la cour aux fins de produire sous quinzaine les mesures prises en exécution de l'injonction prononcée par l'article 2 du jugement du 14 novembre 2019 et de la demande de précisions effectuée le 11 septembre 2023, que Mme D... a perçu, sur son bulletin de paie du mois d'août 2021, les sommes de 745,74 euros au titre de " l'indemnité sujétions spécifiques ", de 1 121,80 euros au titre de " l'indemnité charges pénitentiaires " et de 5 205,83 euros au titre du traitement brut en exécution de l'injonction prononcée le 14 novembre 2019 s'agissant du maintien de son plein traitement au-delà du 17 octobre 2017. Elle a également perçu la somme de 1 126,86 euros en septembre 2023 au titre des intérêts dus sur ces sommes. Si Mme D... fait valoir que les sommes qui lui ont ainsi été versées au titre de l'année 2018 ne correspondraient pas à ce qui aurait dû lui être versé au regard de l'évolution de sa rémunération par rapport au niveau de sa rémunération pour l'année 2017, elle ne justifie pas de l'augmentation théorique de sa rémunération sur l'année 2018 alors que le ministre fait valoir que l'écart de traitement persistant s'explique par la différence entre le nombre d'heures supplémentaires effectuées sur ces deux années et par le fait que Mme D... ayant intégré l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire en septembre 2018 une partie de ses précédentes indemnités n'étaient plus versées. Si l'intéressée se prévaut dans le dernier état de ses écritures également de l'absence de perception de son plein traitement en 2020 et 2022, elle ne démontre pas que cette différence de rémunération aurait un lien avec le présent litige d'exécution. Il s'ensuit que l'injonction prononcée le 14 novembre 2019 doit être regardée comme intégralement exécutée et ce dès le mois d'août 2021 s'agissant du rétablissement du plein traitement de l'intéressée au-delà du 17 octobre 2017.

4. S'agissant du remboursement des frais médicaux engagés par Mme D... à la suite de l'accident du 17 octobre 2017, il ressort des éléments produits au dossier que Mme D... ne démontre pas avoir réglé la note d'honoraires du docteur A..., psychiatre, pour un montant de 400 euros en date du 17 mars 2018 alors que le ministre de la justice produit un échange de courriel avec le docteur A... indiquant qu'il n'a pas été réglé. S'agissant des frais de pharmacie en litige, il ne ressort pas des pièces produites par Mme D... qu'une somme quelconque serait restée à sa charge à ce titre alors que le ministre de la justice démontre avoir réglé la somme de 80,12 euros directement à la pharmacie concernée. Il justifie également avoir réglé les sommes de 186,8 euros et 63,4 euros au docteur C... restant en litige. Mme D... ne démontre pas qu'une somme quelconque serait restée à sa charge au titre de ces dépenses. S'agissant des frais médicaux relatifs aux consultations effectuées auprès du docteur H... soit un montant de 887,3 euros, Mme D... produit des feuilles de soins non exhaustives ne mentionnant aucun reste à charge. Il en va de même des frais médicaux relatifs aux consultations effectuées auprès du docteur F.... Par suite, il y a lieu de considérer que l'injonction prononcée le 14 novembre 2019 doit être regardée comme intégralement exécutée s'agissant également du remboursement des frais médicaux qui auraient été engagés par Mme D....

5. Il n'appartient pas à la cour de prononcer, ainsi que le demande Mme D..., une astreinte de 150 euros par jour de retard s'agissant des mesures qui n'ont pas encore été prises en exécution des décisions susvisées à compter de la notification du présent arrêt.

6. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de considérer que le garde des sceaux, ministre de la justice a procédé à l'exécution complète de l'injonction prononcée le 14 novembre 2019. Compte tenu des diligences effectuées par le ministre de la justice pour cette période, il n'y a pas lieu de procéder au bénéfice de Mme D... à la liquidation provisoire de l'astreinte pour la période du 28 octobre 2022 au 1er février 2024. En revanche, il y a lieu de procéder au bénéfice de Mme D... à la liquidation définitive de l'astreinte pour la période du 15 août 2021 inclus au 27 octobre 2022 inclus, soit 456 jours, et de fixer à titre définitif à 11 400 euros le montant de la somme due par l'État à Mme D... à ce titre.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 500 euros au titre des frais liés au litige exposés par Mme D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions de Mme D... tendant au versement de la somme de 4 200 euros au titre de jours de congés payés non pris.

Article 2 : L'État versera à Mme D... la somme de 11 400 euros sous déduction des sommes déjà versées en exécution de l'arrêt susvisé du 27 octobre 2022.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte prononcée à l'encontre de l'État par l'arrêt de la cour du 15 juillet 2021 pour la période du 28 octobre 2022 au 1er février 2024.

Article 4 : L'État versera à Mme D... une somme de 2 500 euros au titre des frais liés au litige qu'elle a exposés sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par Mme D... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Copie en sera adressée au président de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes et à la présidente de la section du rapport et des études du Conseil d'État.

Délibéré après l'audience du 15 février 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Dèche, présidente,

Mme Burnichon, première conseillère,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mars 2024.

La rapporteure,

V. Rémy-Néris

La présidente,

P. Dèche

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 21LY00044

kc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00044
Date de la décision : 07/03/2024
Type de recours : Exécution décision justice adm

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie - Accidents de service.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.

Procédure - Jugements - Exécution des jugements - Astreinte - Liquidation de l'astreinte.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : RICCI

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-07;21ly00044 ?
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