Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... G... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du 3 juin 2021 par laquelle le conseil municipal de la commune de Corpeau a exercé son droit de préemption sur deux parcelles cadastrées section AB et AE.
Par un jugement n° 2101983 du 11 février 2022, le tribunal administratif de Dijon a, dans un article 1er, annulé la délibération susvisée.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 25 mars 2022, la commune de Corpeau, représentée par Me Gourinat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 11 février 2022 et de rejeter la demande présentée par M. G... devant le tribunal ;
2°) de mettre à la charge de M. G... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a annulé l'intégralité de la délibération alors qu'il lui était loisible de censurer uniquement la partie de la délibération concernant la décision de préemption de la parcelle cadastrée section AE ;
- la délibération attaquée est suffisamment motivée ;
- la commune justifie d'un projet d'aménagement s'inscrivant dans le cadre d'une orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme approuvé le 25 mars 2009 prévoyant la construction de pavillons individuels destinés aux personnes à mobilité réduite au lieu-dit " B... de Cave ".
Par un mémoire, enregistré le 2 juin 2022, M. G..., représenté par Me Chiron, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la commune de Corpeau la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 22 décembre 2022 a fixé la clôture de l'instruction au 20 janvier 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme,
- le code général des collectivités territoriales,
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une déclaration d'intention d'aliéner datée du 12 mai 2021, Mme F... A..., M. D... A... et M. E... A..., co-indivisaires, ont fait connaître à la commune de Corpeau qu'ils entendaient céder deux parcelles cadastrées section AB, sise au lieu-dit " B... de Cave " et AE, sise au lieu-dit " B... L'Huilier ", en état de vignes, au prix global de 16 200 euros à M. G..., preneur en place. Par délibération du 3 juin 2021, la commune de Corpeau a décidé d'exercer sur ces parcelles son droit de préemption urbain. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé cette délibération.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :
2. Aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision de préemption en litige : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / (...) / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) ". Aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. L'aménagement, au sens du présent livre, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations. (...) ".
3. D'une part, il résulte de ces dispositions que, pour exercer légalement ce droit, les collectivités titulaires du droit de préemption urbain doivent justifier, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et faire apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption. En outre, la mise en œuvre de ce droit doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre à un intérêt général suffisant.
4. D'autre part, si l'article L. 213-2-1 du code de l'urbanisme permet au titulaire du droit de préemption, lorsqu'une opération d'aménagement le justifie, d'exercer son droit de préemption urbain sur une fraction de l'unité foncière mise en vente qui est comprise dans une zone soumise à ce droit, et précise qu'en ce cas le propriétaire peut exiger du titulaire du droit de préemption qu'il se porte acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière, ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer lorsqu'une déclaration d'intention d'aliéner porte sur deux ou plusieurs unités foncières distinctes dont l'une ou certaines seulement sont comprises dans le périmètre du droit de préemption urbain. De même, alors que la déclaration d'intention d'aliéner indique un prix global pour la vente de l'ensemble des unités foncières, les articles R. 213-8 et suivants du code de l'urbanisme, qui prévoient une procédure fixant des délais très précis aux deux parties pour prendre position sur la question du prix avant la saisine du juge de l'expropriation, sont inapplicables. Dans ces conditions, une décision de préemption, qui porte sur une vente unique ayant pour objet deux ou plusieurs unités foncières distinctes dont l'une ou certaines seulement sont comprises dans le périmètre du droit de préemption urbain, présente un caractère indivisible, nonobstant les possibilités de préemption partielle ouvertes par l'article L. 213-2-1 du code de l'urbanisme dans des conditions strictement définies. En pareil cas, il appartient au titulaire du droit de préemption de déclarer la déclaration d'intention d'aliéner déposée comme irrecevable dès lors qu'elle porte sur une parcelle qui n'entre pas dans le B... du droit de préemption urbain et d'inviter le ou les vendeurs à déposer une nouvelle déclaration sur la ou les seules unités foncières comprises dans le périmètre de préemption.
5. En l'espèce, il ressort de la délibération litigieuse que la commune de Corpeau a exercé son droit de préemption sur les deux parcelles cadastrées sections AB et AE en vue de la construction de pavillons individuels destinés aux personnes à mobilité réduite au lieu-dit " B... de Cave ". Toutefois, si ce projet s'inscrit dans le cadre d'une orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme de la commune approuvé le 25 mars 2009 prévoyant pour ce secteur une ouverture à l'urbanisation avec l'accueil de logements en bande ou groupés pouvant accueillir environ 20 logements dont 40% de logements locatifs sociaux, opération d'aménagement dont la réalité est justifiée par l'exercice le 8 avril 2021 du droit de préemption urbain par la commune pour une parcelle voisine cadastrée également section AB, il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté par la commune de Corpeau que la parcelle cadastrée section AE en litige, distante d'environ 300 mètres de la parcelle cadastrée section AB litigieuse et du lieu-dit " B... de Cave ", n'est pas incluse dans l'emprise de l'opération ainsi projetée ni d'ailleurs dans le B... du droit de préemption urbain en raison de son classement en zone agricole. Elle ne pouvait donc faire l'objet d'une décision de préemption à ces titres. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que, en ce qui concerne la parcelle cadastrée section AE, la délibération en cause a été prise en méconnaissance de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme.
6. Il est constant que les deux parcelles litigieuses constituent deux unités foncières distinctes. En l'espèce, l'existence d'une unique déclaration d'intention d'aliéner faisant état d'un prix global pour les deux unités foncières en cause fait obstacle à la possibilité pour la commune de préempter uniquement la parcelle cadastrée section AB. De même, cette circonstance ne permet pas, contrairement à ce que fait valoir la commune, de déterminer un prix moyen au mètre carré pour évaluer le prix de vente de la parcelle cadastrée section AB dès lors notamment que les deux parcelles en cause ne relèvent pas du même zonage et ainsi que leur valeur vénale, au mètre carré, ne peut être identique. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont regardé la délibération en litige comme un acte indivisible.
7. Il résulte de ce qui précède que la commune de Corpeau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé la délibération du 3 juin 2021 par laquelle le conseil municipal de la commune de Corpeau a exercé son droit de préemption sur les parcelles cadastrées AB et AE de l'indivision A....
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. G... qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Corpeau réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Corpeau la somme de 2 000 euros à verser à M. G... au titre des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Corpeau est rejetée.
Article 2 : La commune de Corpeau versera à M. G... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Corpeau et à M. G....
Délibéré après l'audience du 23 février 2023 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mars 2023.
La rapporteure,
V. Rémy-NérisLe président,
F. Bourrachot
La greffière,
A-C. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY00878
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