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09/11/2021 | FRANCE | N°20LY03487

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 09 novembre 2021, 20LY03487


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 août 2019 par lequel le maire de Morzine a accordé à M. C... A... un permis de construire valant démolition, pour l'édification d'un ensemble immobilier de onze logements sur un terrain situé 848 avenue de Joux Plane à Morzine (74110).

Par une ordonnance n° 1907667 du 7 octobre 2020, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de Mme D....


Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 1er décemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 août 2019 par lequel le maire de Morzine a accordé à M. C... A... un permis de construire valant démolition, pour l'édification d'un ensemble immobilier de onze logements sur un terrain situé 848 avenue de Joux Plane à Morzine (74110).

Par une ordonnance n° 1907667 du 7 octobre 2020, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de Mme D....

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 1er décembre 2020, 21 mai 2021, 12 juillet 2021, 25 août 2021 et le 13 septembre 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, Mme D..., représentée par Me Damien Merotto, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler cette ordonnance du 7 octobre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté de permis de construire n° PC 07419119B0038 du maire de Morzine en date du 8 août 2019 valant démolition accordé à M. C... A... pour l'édification d'un ensemble immobilier de onze logements sur un terrain situé 848 avenue de Joux Plane à Morzine (74110) ;

3°) d'annuler l'arrêté n° PC07419119B0038 M02 du 3 juin 2021 par lequel le maire de la commune de Morzine a accordé un permis de construire modificatif à Monsieur C... A... ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Morzine et de M. A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le panneau d'affichage n'indique pas la surface des bâtiments à démolir et il n'est pas visible de la voie publique étant affiché au 1er étage, il est ainsi irrégulier et les délais de recours n'ont pas commencé à courir ;

- le plan d'implantation apparaît particulièrement sommaire dès lors que toutes les cotes ne sont pas mentionnées et la notice ne lui a pas été adressée permettant de vérifier que le document répond à l'ensemble des critères fixés par les articles R.431-8 et R.431-10 du code de l'urbanisme ;

- le permis initial méconnait l'article Ua3 du règlement du PLU ;

- le permis initial méconnait l'article Ua10 du règlement du PLU ;

- le permis initial et le permis modificatif méconnaissent l'article Ua12 du règlement du PLU ;

Par des mémoires en défense, enregistrés le 16 février 2021 et le 23 juillet 2021, la commune de Morzine, représentée par Me Nicolas Gautier, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme D... à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable car tardive ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés les 19 janvier 2021, 23 juin 2021 et 8 septembre 2021, M. A..., représenté par la SCP Ballaloud Aladel, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme D... à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable car tardive ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 août 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 15 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Déal, présidente,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Arnaud, substituant Me Merotto, pour Mme D..., celles de Me Gautier pour la commune de Morzine et de Me Planchet pour M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 8 août 2019, le maire de Morzine a délivré à M. A... un permis de construire valant démolition pour l'édification d'un ensemble immobilier de onze logements sur un terrain situé 848 avenue de Joux Plane à Morzine. Par une ordonnance du 7 octobre 2020, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de Mme D... aux fins d'annulation de cet arrêté. Elle relève appel de cette ordonnance.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite (...) est acquis et pendant toute la durée du chantier. / (...) ". Aux termes de l'article A. 424-16 du code de l'urbanisme : " Le panneau prévu à l'article A. 424-15 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l'architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. / Il indique également, en fonction de la nature du projet (...) d) Si le projet prévoit des démolitions, la surface du ou des bâtiments à démolir. ".

3. En imposant que figurent sur le panneau d'affichage du permis de construire les caractéristiques projetées, les dispositions citées au point précédent ont pour objet de permettre aux tiers, à la lecture du panneau, d'apprécier l'importance et la consistance du projet. La surface des bâtiments à démolir est au nombre des mentions substantielles que doit comporter cet affichage. L'affichage ne peut, en principe, être regardé comme complet et régulier si cette mention fait défaut ou si elle est affectée d'une erreur substantielle, alors qu'aucune autre indication ne permet aux tiers d'estimer les démolitions. Le délai de recours de deux mois prévu à l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme ne commence à courir qu'à la date d'un affichage complet et régulier.

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux de l'huissier de justice produit par le pétitionnaire, que le permis de construire litigieux a fait l'objet d'un affichage sur un panneau fixé au premier étage d'une des maisons située sur le terrain d'assiette du projet, à compter du 1er septembre 2019, et que cet affichage est visible depuis la voie publique. Toutefois, il est constant que cet affichage ne comportait aucune mention de maisons à démolir, en violation des prescriptions de l'article A. 424-16 précité du code de l'urbanisme, alors que le permis délivré au pétitionnaire prévoyait la démolition de maisons individuelles. Ainsi le panneau d'affichage, bien qu'il précisât la surface de plancher à construire, ne permettait dès lors pas aux tiers d'être informés que la mise en œuvre du projet autorisé emportait la démolition de maisons, et par suite d'apprécier la consistance exacte de l'opération dans son ensemble. Dans ces conditions, alors même que la requérante n'a soulevé à l'encontre du permis litigieux que des moyens relatifs à sa légalité sans contester la démolition autorisée par celui-ci, l'affichage du permis doit être regardé comme ne comportant pas d'informations suffisantes pour faire courir le délai de recours contentieux prévu par les dispositions précitées de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme. Dès lors, la requérante est fondée à soutenir que son recours contentieux exercé le 25 novembre 2019 et notifié tant à la commune qu'au pétitionnaire, a été exercé dans les délais de recours contentieux à l'encontre du permis en litige, lesquels n'ont pas commencé à courir faute de publicité suffisante.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que sa demande a été rejetée comme manifestement irrecevable et à demander l'annulation de l'ordonnance de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble du 7 octobre 2020. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer le jugement de l'affaire au tribunal administratif de Grenoble.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune de Morzine et M. A..., parties perdantes, tendant au remboursement des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Morzine et de M. A... la somme de 1 000 euros chacun à verser à Mme D... au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble du 7 octobre 2020 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Grenoble.

Article 3 : La commune de Morzine versera à Mme D... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : M. A... versera à Mme D... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D..., à M. C... A... ainsi qu'à la commune de Morzine.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Déal, présidente-rapporteure,

M. Besse, président assesseur,

M. Bodin-Hullin, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2021.

2

N° 20LY03487


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03487
Date de la décision : 09/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Point de départ des délais - Publication - Affichage.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Daniele DEAL
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SELARL BG AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-09;20ly03487 ?
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