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11/02/2021 | FRANCE | N°20LY01576

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 11 février 2021, 20LY01576


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon, à titre principal, de la décharger de l'obligation de payer la somme de 6 606,91 euros qui lui a été notifiée par le titre de recettes émis le 27 août 2013 par le maire de la commune de Bron et à titre subsidiaire de condamner la commune à lui payer une indemnité de 6 606,91 euros.

Par un jugement n° 1307395 du 29 juin 2016, le tribunal administratif de Lyon a déchargé Mme C... de l'obligation de payer la somme de 6 606,91 euros.
>Procédure devant la cour

I. Par une requête, enregistrée le 29 août 2016, la commune ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon, à titre principal, de la décharger de l'obligation de payer la somme de 6 606,91 euros qui lui a été notifiée par le titre de recettes émis le 27 août 2013 par le maire de la commune de Bron et à titre subsidiaire de condamner la commune à lui payer une indemnité de 6 606,91 euros.

Par un jugement n° 1307395 du 29 juin 2016, le tribunal administratif de Lyon a déchargé Mme C... de l'obligation de payer la somme de 6 606,91 euros.

Procédure devant la cour

I. Par une requête, enregistrée le 29 août 2016, la commune de Bron, représentée par la SELARL B... et Associés, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1307395 du 29 juin 2016 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les juges de première instance ont considéré que la période du 11 avril 2008 au 15 septembre 2010 durant laquelle Mme C... a été réintégrée juridiquement dans les services de la commune de Bron ne constituait pas une période de service au sens du troisième alinéa de l'article 46 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 modifié, alors que cette même période a été prise en compte par l'autorité territoriale au titre du premier alinéa du même décret avant application de la réduction prévue au troisième alinéa ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations et du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales doit être écarté ;

- la réduction de l'indemnité de licenciement opérée par le titre de recettes contesté n'est pas la conséquence directe de l'illégalité du premier licenciement de Mme C... intervenu au printemps 2008 ;

- la commune n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité, dès lors que ni le titre de recettes contesté ni le second licenciement de Mme C... intervenu le 15 septembre 2010 ne sont illégaux ;

- l'intéressée a bénéficié de revenus et indemnités dont le montant total excède celui de l'indemnité de 6 606,91 euros qu'elle sollicite.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2017, Mme A... C..., représentée par la SELARL Urban Conseil, avocat, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire et par la voie de l'appel incident, à la condamnation de la commune de Bron à lui payer une indemnité de 6 606,91 euros avec intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable d'indemnisation et capitalisation des intérêts ;

3°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Bron au profit de son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Elle fait valoir que :

- les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés ;

- la responsabilité pour faute de la commune de Bron est engagée en raison de l'illégalité de la décision de licenciement du 27 mars 2008 reconnue par le jugement n° 0803664 du 26 mai 2010 du tribunal administratif de Lyon, devenu définitif.

- elle peut solliciter une indemnité de 6 606,91 euros correspondant à la réfaction de l'indemnité de licenciement qui lui avait été initialement servie.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 19 octobre 2016.

Par un arrêt n° 16LY02995 du 26 juin 2018, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de la commune de Bron, annulé le jugement du tribunal administratif de Lyon et rejeté les conclusions de Mme C... ainsi que le surplus des conclusions de la commune de Bron.

Par une décision n°425288 du 9 juin 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et a, renvoyé à la cour le jugement de l'affaire.

II. Par courriers du 11 juin 2020, les parties ont été informées du renvoi à la cour administrative d'appel de Lyon de l'affaire qui a été enregistrée sous le n° 20LY01576.

Par deux mémoires enregistrés le 21 août 2020 et le 19 octobre 2020, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la commune de Bron représentée par Me B..., persiste dans ses écritures introductives d'instance.

Elle soutient que :

- son maire a exécuté à la lettre le jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 mai 2010 qui lui enjoignait de procéder à la réintégration juridique de Mme C... ;

- le juge de cassation ne se réfère pas à la version des textes applicable au 22 juin 2010 ;

- Mme C... a bénéficié du congé, prévu à l'article 9 du décret du 15 février 1988, assimilé à une période de travail effectif, selon l'article 27 du même décret.

Par un mémoire enregistré le 23 septembre 2020, Mme C..., représentée par Me D... demande à la cour :

1°) à titre principal, rejeter la requête d'appel présentée par la commune de Bron ;

2°) subsidiairement, de condamner la commune de Bron à lui verser la somme de 6 606,91 € en réparation du préjudice que lui a causé le licenciement illégal dont elle a fait l'objet, outre les intérêts de droit à compter de sa réclamation préalable et avec capitalisation desdits intérêts ;

3°) à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bron sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- sa réintégration à caractère rétroactif n'a donné lieu à l'accomplissement d'aucun service effectif, dès lors qu'elle était uniquement justifiée par l'annulation de la décision de licenciement prise à son encontre le 27 mars 2008 ;

- la décision du Conseil d'Etat invite la Cour à qualifier expressément la position dans laquelle elle a été rétroactivement placée, suite à l'annulation du premier licenciement, dans le cadre de la reconstitution de carrière, puis à faire application des règles de calcul de l'indemnité de licenciement suivant les dispositions réglementaires en vigueur ;

- l'autorité territoriale a cependant expressément reconnu par courrier du 17 janvier 2008 la convoquant devant le médecin agréé qu'elle était en arrêt de travail depuis le 13 juillet 2006 ;

- du fait de la consolidation de son état de santé au 6 janvier 2008, elle doit être regardée sur la période de reconstitution de carrière, soit entre le 11 avril 2008 et le 15 septembre 2010 date de prise d'effet du nouveau licenciement, comme placée en position de congé sans traitement pour maladie, au titre de l'article 11-1 du décret n°88-145, congé qui n'est pas assimilé à une période de travail effectif, la commune ne pouvait ainsi valablement prendre en conséquence la période de reconstitution de carrière dans le calcul de l'indemnité de licenciement.

Par ordonnance du 8 septembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 23 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 modifié pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la commune de Bron et de Me D... représentant Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., qui est née en 1946 et qui a été recrutée en 1983 par la commune de Bron en qualité qu'agent d'entretien contractuel, a fait l'objet, par une première décision du 27 mars 2008, d'un licenciement pour inaptitude physique à compter du 11 avril de la même année et a perçu à cette occasion une indemnité de licenciement de 8 258,44 euros. En exécution d'un jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 mai 2010 ayant prononcé l'annulation de cette décision pour vice de procédure, elle a été réintégrée à compter du 11 avril 2008, puis elle a fait l'objet, d'une part, d'une seconde décision du 30 août 2010, prononçant son licenciement pour inaptitude physique à compter du 15 septembre 2010, et d'autre part, d'un titre de recette du 27 août 2013 relatif au remboursement d'un trop-perçu de l'indemnité de licenciement à hauteur de 6 606,91 euros. Par un jugement du 29 juin 2016, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à la demande de l'intéressée tendant à la décharge de l'obligation de payer cette somme. Par un arrêt n° 16LY02995 du 26 juin 2018, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de la commune de Bron, annulé le jugement du tribunal administratif de Lyon et rejeté les conclusions de Mme C... ainsi que le surplus des conclusions de la commune de Bron. Par une décision n°425288 du 9 juin 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt, au motif que la cour n'avait pas recherché quelle était la position précise dans laquelle Mme C... avait été replacée et si celle-ci était au nombre de celles dont la durée devait être prise en compte pour le calcul de l'indemnité. L'affaire a été renvoyée à la cour administrative de Lyon.

2. Aux termes, d'une part, de l'article 46 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au litige : " L'indemnité de licenciement est égale à la moitié de la rémunération de base définie à l'article précédent pour chacune des douze premières années de services, au tiers de la même rémunération pour chacune des années suivantes, sans pouvoir excéder douze fois la rémunération de base. (...) / (...) / Pour les agents qui ont atteint l'âge de 60 ans mais ne justifient pas d'une durée d'assurance tous régimes de retraite de base confondus au moins égale à celle exigée pour obtenir une retraite au taux plein, l'indemnité de licenciement subit une réduction de 1,67 % par mois de service au-delà du soixantième anniversaire. / (...) ". Aux termes de l'article 47 du même décret dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Ne sont pris en compte pour le calcul de l'indemnité de licenciement que les services effectifs ininterrompus accomplis pour le compte de la même collectivité territoriale (...) auquel elle participe. ". Aux termes de l'article 48 du même décret : " L'ancienneté retenue pour le calcul de l'indemnité définie à l'article 46 est décomptée selon les modalités prévues au titre VII du présent décret, sous réserve que ces services n'aient pas été pris en compte dans le calcul d'une autre indemnité de licenciement ou d'une pension autre que celle du régime général de la sécurité sociale. / (...) ".

3. Aux termes, d'autre part, de l'article 27 du décret mentionné au point précédent, qui figure au titre VII de celui-ci : " La durée des congés prévus aux articles 5, 6, 7, 8, 9, 10, 14-2, 14-3, 16 et 20 est prise en compte pour la détermination de l'ancienneté ou de la durée de services effectifs exigées (...) ". L'article 9 du même décret prévoit que : " L'agent non titulaire en activité bénéficie en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle d'un congé pendant toute la période d'incapacité de travail jusqu'à la guérison complète, la consolidation de la blessure ou le décès. L'intéressé a droit au versement par l'autorité territoriale de son plein traitement dans les limites suivantes : 1. Pendant un mois dès son entrée en fonctions ; 2. Pendant deux mois après un an de services ; 3. Pendant trois mois après trois ans de services. (...) ". L'article 11 du même décret précise : " L'agent non titulaire, qui est contraint de cesser ses fonctions pour raison de santé (...) et qui se trouve, en l'absence de temps de services suffisant, sans droit à congé rémunéré de maladie (...) est : 1. En cas de maladie, soit placé en congé sans traitement pour maladie pendant une durée maximale d'une année si l'incapacité d'exercer les fonctions est temporaire, soit licencié si l'incapacité de travail est permanente ; / (...) / Si l'agent se trouve à l'issue de la période de congé sans traitement dans la situation définie aux articles 9 ou 10, le bénéfice du congé prévu par l'un ou l'autre de ces articles lui est accordé ".

4. L'annulation, pour irrégularité de procédure, d'une décision licenciant un agent public implique nécessairement que celui-ci soit replacé dans la position administrative qui était la sienne à la date de cette décision et que l'autorité compétente reconstitue rétroactivement sa carrière en application de la réglementation applicable à cette position.

5. Il résulte des dispositions précitées que l'indemnité de licenciement est réduite, de 1,67% par mois de service accompli au-delà du soixantième anniversaire, à la condition que l'agent, ayant atteint l'âge de soixante ans, ait accompli, de manière effective, son service durant cette période. En l'espèce, il est constant que Mme C... a été réintégrée juridiquement dans les services de la commune de Bron entre le 11 avril 2008 et le 15 septembre 2010. Cette réintégration strictement juridique, à caractère rétroactif, ne peut donner lieu à l'accomplissement d'aucun service effectif de la part de l'intéressée, dès lors qu'elle était uniquement justifiée par l'annulation de la décision de licenciement prise à son encontre le 27 mars 2008. En outre et surtout, il résulte de l'instruction et notamment d'un courrier du 17 janvier 2008 par lequel la commune convoque l'intéressée devant le médecin agréé, que cette dernière était en arrêt de travail depuis le 13 juillet 2006. Dans ces conditions, du fait de sa réintégration juridique dans les effectifs de la commune à compter du 11 avril 2008, Mme C... doit être regardée, pour la période de reconstitution de carrière en litige, comme ayant été placée en position de congé sans traitement pour maladie, au titre de l'article 11-1 du décret n° 88-145, congé qui n'est pas assimilé à une période de travail effectif et qui a conduit à son licenciement pour inaptitude physique le 27 mars 2008. Par suite, pour procéder au calcul de l'indemnité de licenciement due à Mme C..., la commune de Bron ne pouvait prendre en considération les mois postérieurs à la première décision de licenciement et ne devait tenir compte que des mois de services effectifs accomplis par Mme C... au sein de la collectivité territoriale, à l'exclusion de la période comprise entre le 11 avril 2008 et 15 septembre 2010.

6. Il résulte de tout ce qui précède, que la commune de Bron n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a déchargé Mme C... de l'obligation de payer la somme de 6 606,91 euros.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Bron. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bron le versement à Mme C... d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Bron est rejetée.

Article 2 : La commune de Bron versera à Mme C... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et à la commune de Bron.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Paix, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.

2

N° 20LY01576


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01576
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat - Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DOITRAND et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-11;20ly01576 ?
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