La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/02/2020 | FRANCE | N°17LY01373

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 27 février 2020, 17LY01373


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 10 juillet 2013 par laquelle la directrice des ressources humaines de l'Agence entreprise Rhône-Alpes Auvergne de la société Orange a reconstitué sa carrière, d'enjoindre à cette autorité d'intégrer à sa reconstitution de carrière deux annuités de service national actif et de lui allouer les rappels financiers afférents, et de condamner la société Orange à lui verser une somme de 70 000 euros en réparation des pr

judices de carrières subis.

Par jugement n° 1305659 lu le 30 décembre 2016, le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 10 juillet 2013 par laquelle la directrice des ressources humaines de l'Agence entreprise Rhône-Alpes Auvergne de la société Orange a reconstitué sa carrière, d'enjoindre à cette autorité d'intégrer à sa reconstitution de carrière deux annuités de service national actif et de lui allouer les rappels financiers afférents, et de condamner la société Orange à lui verser une somme de 70 000 euros en réparation des préjudices de carrières subis.

Par jugement n° 1305659 lu le 30 décembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 10 juillet 2013 de la directrice des ressources humaines de l'Agence entreprise Rhône-Alpes Auvergne de la société Orange, a enjoint au réexamen de la situation statutaire et financière de M. C... dans un délai de deux mois et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 31 mars 2017 et le 20 juin 2017, la société Orange, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a annulé la décision du 10 juillet 2013 et lui a enjoint de reconstituer la carrière de M. C... en tenant compte des deux années de service national ;

2°) de rejeter la demande de M. C... devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a exécuté l'arrêt de la cour administrative d'appel lu le 8 janvier 2013, dès lors que M. C... a bénéficié d'une ancienneté de deux années à la date de sa titularisation et les conséquences financières de cette décision ont été tirées ;

- suite à la demande de M. C..., elle a complété la reconstitution de carrière de l'intéressé et a apporté des modifications à sa situation administrative à partir de la date de sa promotion dans le grade de classification III.2 ; la quotité de service militaire a été intégrée au calcul de la promotion en retenant le dispositif le plus favorable ;

- le jugement du 30 décembre 2016, doit être confirmé en ce qu'il a déclaré les conclusions à fin indemnitaires irrecevables pour défaut de demande préalable ;

- l'exception de la chose jugée faisait obstacle à ce que le tribunal administratif statue sur la légalité de la décision du 10 juillet 2013, qui relève de la procédure d'exécution de l'arrêt du 8 janvier 2013 ;

- les deux années de service national ont été prises en compte en début de carrière mais pour le changement de grade il n'y a pas de " décalage automatique de deux ans ".

Par mémoire en défense enregistré le 5 mai 2019, M. A... C..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête de la société Orange et à ce que soit mise à la charge de ladite société le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'exception de chose jugée opposée par la société Orange doit être écartée ;

- les premiers juges ont considérés à bon droit que dans le cadre de son reclassement, la société Orange n'a pas pris en compte l'intégralité de la période de service national effectuée soit vingt-quatre mois.

Par ordonnance du 7 mai 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 mai 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'État ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom ;

- le décret n° 93-515 du 25 mars 1993 relatif aux dispositions statutaires applicables au corps des cadres de La Poste et au corps des cadres de France Télécom ;

- le code civil ;

- le code du service national ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public,

- les observations de Me B..., pour la société Orange ;

Considérant ce qui suit :

1. La société Orange relève appel du jugement du 30 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 10 juillet 2013, de la directrice des ressources humaines de l'Agence entreprise Rhône-Alpes Auvergne de la société Orange portant reconstitution de la situation statutaire de M. C... à compter de sa promotion au grade III.2 (cadre de premier niveau) intervenue dans le courant de l'année 1997 et lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation administrative et financière de l'intéressé.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article 1351 du code civil : " L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ".

3. Par un arrêt lu le 8 janvier 2013, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement n° 0705439, 0804473 du 17 décembre 2010, par lequel le tribunal administratif de Grenoble avait rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de la décision de la directrice territoriale de France Télécom Centre-Est refusant de le reclasser à la date de sa titularisation en prenant en compte les deux années de service national actif qu'il a effectuées comme objecteur de conscience et la décision précitée de la directrice territoriale France Télécom Centre Est et, d'autre part, a enjoint à cette autorité de prendre une nouvelle décision de reclassement intégrant les deux années de service accomplis comme objecteur de conscience à la date de sa titularisation, et de verser à l'intéressé le rappel de traitement consécutif à ce reclassement. En exécution de cet arrêt, la société Orange était dans l'obligation de prendre une nouvelle décision de titularisation de M. C..., à la date du 19 juin 1979, en prenant en compte les deux années de service national actif qu'il avait effectuées et d'en tirer les conséquences pécuniaires pour l'intéressé. Par un arrêt n° 13LY02588 lu le 10 juin 2014, la cour, a estimé que la société Orange venant aux droits de France Telecom avait exécuté l'arrêt du 8 janvier 2013.

4. Un tel litige est distinct de celui soumis au tribunal administratif de Grenoble et portant sur la légalité de la décision du 10 juillet 2013, par laquelle la directrice des ressources humaines de l'Agence entreprise Rhône-Alpes Auvergne de la société Orange a reconstitué le déroulement de carrière de M. C... à compter de sa promotion au grade III.2 intervenue dans le courant de l'année 1997. Par suite, faute d'identité d'objet, la société Orange n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité pour avoir méconnu l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 8 janvier 2013.

Sur le bien-fondé de la demande :

5. D'une part, aux termes de l'article L. 63 du code du service national, dans sa version applicable au présent litige : " Le temps de service national actif est compté, dans la fonction publique, pour sa durée effective dans le calcul de l'ancienneté de service exigée pour l'avancement et pour la retraite ". En vertu de ces dispositions, le fonctionnaire qui change de corps a droit, lors de son reclassement dans le corps d'accueil, au report intégral du temps de service national actif qu'il a accompli, sauf si et dans la mesure où ce temps de service a déjà été pris en considération lors de son accès à ce corps.

6. D'autre part, aux termes de l'article 11 du décret du 25 mars 1993 susvisé : " I. - (...) les cadres d'exploitation et les agents de maîtrise de France Telecom [Orange] nommés (...) dans le grade de cadre de premier niveau de France Telecom sont classés dans leur nouveau grade conformément au tableau ci-après - : / (...) / situation ancienne /Agent de maîtrise de France télécom 4ème échelon / Situation nouvelle / (...) cadre de premier niveau de France Telecom / (...) / 5ème échelon/ moitié de l'ancienneté acquise. / (...) ". Aux termes de l'article 13 du même décret : " La durée du temps passé dans chacun des échelons normaux des grades des corps régis par le présent décret, pour accéder à l'échelon supérieur, est fixée ainsi qu'il suit : " (...) / (...) Cadre de premier niveau de France Telecom / (...) / 5e (...) échelon / (...) durée 1 an ".

7. Il ressort des pièces du dossier que suite à l'arrêt de la cour administrative d'appel lu le 8 janvier 2013, la société Orange a reconstitué la carrière de M. C... avec rappel d'ancienneté de deux années à la date de sa titularisation. En conséquence, au 16 juin 1978, il a été reclassé au 3ème échelon avec un indice de 297 et une ancienneté d'un an et six mois. Compte tenu des différentes durées d'ancienneté dans les échelons et des périodes de disponibilité de M. C..., il a été intégré au grade II.3 (agent de maîtrise), le 31 décembre 1993, avec un indice 463. M. C... est parvenu au dernier échelon et 5ème échelon de son grade, avant changement de grade, le 26 juillet 1996 et si la société Orange avait pris en compte à ce stade les deux ans et trois jours de service national, il n'aurait été promu au grade III.2 (cadre de premier niveau) qu'après le 1er février 2017. Par suite, c'est à bon droit que la société Orange a appliqué la reconstitution la moins défavorable à l'agent et a intégré celui-ci au 4ème échelon à la date du 26 juillet 1994. Ainsi, après avoir pris en compte de la durée du service national de M. C... et au regard de sa promotion au 1er février 1997, l'intéressé bénéficiait d'une ancienneté de six mois et trois jours dans le 4ème échelon du grade II.3.

8. De plus, compte tenu des dispositions de l'article 11 du décret n° 93-515 susvisé, M. C... a été promu avec une ancienneté moindre soit trois mois et un jour emportant une date d'entrée dans l'échelon initial du grade III.2, le 31 octobre 1996. Par conséquent, il convenait de se placer à cette date pour déduire la durée du service national, afin de déterminer la date théorique à laquelle M. C... devait bénéficier du changement de grade II.3 au grade III.2 5ème échelon, soit le 28 octobre 1994. Compte tenu de l'ancienneté statutairement requise au 5ème échelon qui est d'une année en application des dispositions de l'article 13 du décret précité du 25 mars 1993, M. C... a donc atteint le 6ème échelon de son grade III.2 au 28 octobre 1995. Compte tenu de ces éléments, la décision du 10 juillet 2013, reconstituant le déroulement de carrière de M. C... n'est pas entachée d'illégalité.

9. Il résulte de ce qui précède que, la société Orange, en procédant ainsi à la reconstitution de carrière a pris en compte la durée du service national de M. C.... Elle est ainsi fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 10 juillet 2013.

10. A défaut d'autres moyens à examiner au titre de l'effet dévolutif, la demande d'annulation dirigée contre la décision du 10 juillet 2013, doit être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Orange, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... la somme demandée à ce titre par la société Orange.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 30 décembre 2016, du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande de M. C... devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Orange tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la société Orange.

Délibéré après l'audience du 6 février 2020 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 février 2020.

N° 17LY01373 2

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17LY01373
Date de la décision : 27/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36 Fonctionnaires et agents publics.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Effets des annulations - Reconstitution de carrière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : BONNEFOY-CLAUDET

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-02-27;17ly01373 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award