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19/12/2019 | FRANCE | N°17LY03791

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 19 décembre 2019, 17LY03791


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... F... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2016 par lequel le maire de Péron a délivré à la société Progimo un permis d'aménager quatorze lots à bâtir sur les parcelles implantées au hameau de Feigères.

Par une ordonnance n° 1704200 du 22 septembre 2017, la présidente de la première chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 no

vembre 2017, Mme F..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance de la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... F... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2016 par lequel le maire de Péron a délivré à la société Progimo un permis d'aménager quatorze lots à bâtir sur les parcelles implantées au hameau de Feigères.

Par une ordonnance n° 1704200 du 22 septembre 2017, la présidente de la première chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 novembre 2017, Mme F..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance de la présidente de la première chambre du tribunal administratif de Lyon du 22 septembre 2017 et d'annuler le permis d'aménager du 20 décembre 2016 ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Péron les entiers dépens et la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance est insuffisamment motivée en ce qu'elle n'explique pas en quoi la dénomination des pièces pose problème ; l'ordonnance est infondée : la présentation des pièces jointes à sa demande sont conformes aux exigences de l'article R. 414-3 du code de justice administrative, éclairées par le guide télérecours fourni par la juridiction administrative ;

- elle a intérêt à agir en qualité de voisin immédiat du projet ;

- le permis d'aménager a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R. 441-5 du code de l'urbanisme ; une étude d'impact sur le milieu naturel était nécessaire au soutien de la demande de permis ;

- le dossier de demande de permis est incomplet s'agissant de l'état de l'existant, du traitement paysager et des abords du projet ainsi que des plantations à conserver ;

- elle est fondée à exciper de l'illégalité du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Péron : par l'ouverture à l'urbanisation qu'il préconise au hameau de Feigères, le PLU n'est pas compatible avec le schéma interrégional d'aménagement et de développement du massif du Jura, ni avec le schéma de cohérence territorial (SCOT) du pays de Gex, ni avec les dispositions de la loi Montagne ;

- le permis d'aménager est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; le busage d'un ruisseau souterrain est susceptible de porter atteinte au milieu naturel ; le projet est en totale contradiction avec le caractère rural des constructions et du paysage à proximité immédiate ; il est inclus dans le périmètre de protection de l'article L. 123-1 7° du code de l'urbanisme ; le projet se réalise aux dépens d'une grande surface agricole et s'insère au sein d'une vaste plaine agricole identifiée comme enjeu paysager fort ; le projet engendrera une pollution lumineuse disproportionnée et inadaptée aux caractères de ce hameau de montagne.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 juillet 2019, la commune de Péron, représentée par la société Droit Public Consultant, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est irrecevable, faute de lui avoir été notifiée ainsi qu'à la société Progimo, et que la requérante n'a pas d'intérêt à agir dès lors qu'elle n'apporte aucune précision sur l'atteinte à ses conditions d'occupation ou de jouissance de son bien et, enfin, que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 7 octobre 2019 par une ordonnance du même jour prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Mme F... a produit un mémoire le 9 octobre 2019 postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le plan local d'urbanisme de Péron dans sa version issue de la délibération du conseil municipal de la commune du 12 juillet 2011 ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... D..., première conseillère,

- les conclusions de Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour Mme F..., ainsi que celles de Me B... pour la commune de Péron ;

Considérant ce qui suit ;

1. Par arrêté du 20 décembre 2016, le maire de Péron a délivré à la société Progimo un permis d'aménager quatorze lots à bâtir sur les parcelles implantées au lieudit Grand Pré, route de Choudans, dans le hameau de Feigères et classées en zone U du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune. Mme F... relève appel de l'ordonnance du 22 septembre 2017, par laquelle la présidente de la première chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande comme irrecevable.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance en litige :

2. Aux termes de l'article R. 414-3 du code de justice administrative : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 411-3, R. 411-4, R. 412-1 et R. 412-2, les requérants sont dispensés de produire des copies de leur requête et des pièces qui sont jointes à celle-ci et à leurs mémoires. / Les pièces jointes sont présentées conformément à l'inventaire qui en est dressé. / Lorsque le requérant transmet, à l'appui de sa requête, un fichier unique comprenant plusieurs pièces, chacune d'entre elles doit être répertoriée par un signet la désignant conformément à l'inventaire mentionné ci-dessus. S'il transmet un fichier par pièce, l'intitulé de chacun d'entre eux doit être conforme à cet inventaire. Le respect de ces obligations est prescrit à peine d'irrecevabilité de la requête. ". Il ressort de ces dispositions que la présentation des pièces jointes est conforme à leur inventaire détaillé lorsque l'intitulé de chaque signet au sein d'un fichier unique global ou de chaque fichier comprenant une seule pièce comporte au moins le même numéro d'ordre que celui affecté à la pièce par l'inventaire détaillé. En cas de méconnaissance de ces prescriptions, la requête est irrecevable si le requérant n'a pas donné suite à l'invitation à régulariser que la juridiction doit, en ce cas, lui adresser par un document indiquant précisément les modalités de régularisation de la requête.

3. Constatant que les pièces jointes de la requête introductive d'instance de Mme F... déposée au greffe du tribunal administratif de Lyon le 6 juin 2017 n'étaient pas précisément dénommées, la présidente de la première chambre a invité la requérante à régulariser sa demande par courrier du 6 juin 2017, notifié par la voie de télérecours et à l'issue du délai imparti pour régulariser sa demande, a rejeté sa demande comme irrecevable sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Toutefois, il ressort des pièces du dossier de première instance que la demande était constituée d'un seul fichier comportant 16 signets renvoyant à un mémoire, à un inventaire et à 14 pièces jointes numérotées de 1 à 14, présentées par ordre croissant conformément à l'inventaire précité. Bien que les pièces jointes n'étaient pas précisément dénommées, l'intitulé de chaque signet au sein du fichier unique global comportait le même numéro d'ordre que celui affecté à la pièce par l'inventaire détaillé, lequel en précisait la nature et le contenu. Dans ces conditions, Mme F... est fondée à soutenir que c'est à tort que la présidente de la première chambre a estimé que la présentation de la demande n'était pas conforme aux dispositions de l'article R. 414-3 du code de justice administrative précitées. Par suite, l'ordonnance attaquée doit être annulée.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme F....

Sur la légalité du permis d'aménager du 20 décembre 2016 :

En ce qui concerne l'étude d'impact :

5. Aux termes de l'article R. 441-5 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis d'aménager comprend en outre, lorsqu'elles sont exigées au titre de la soumission du projet à permis d'aménager en application du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, l'étude d'impact ou la décision de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement dispensant le demandeur de réaliser une étude d'impact. ".

6. Le projet litigieux, qui s'implante sur des terrains d'une superficie totale de 7 643 m² et qui créé 3000 m² de surface plancher, n'est pas soumis à étude d'impact en vertu des dispositions de l'article R. 122-2 du code de l'environnement. Par conséquent, la requérante ne peut utilement soutenir qu'une étude d'impact devait nécessairement être jointe à la demande de permis d'aménager.

En ce qui concerne le caractère incomplet du dossier de demande de permis :

7. Aux termes de l'article R. 441-3 du code de l'urbanisme : " Le projet d'aménagement comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords et indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) La composition et l'organisation du projet, la prise en compte des constructions ou paysages avoisinants, le traitement minéral et végétal des voies et espaces publics et collectifs et les solutions retenues pour le stationnement des véhicules ; / (...) d) Le traitement des parties du terrain situées en limite du projet ; (...) ". Aux termes de l'article R. 441-4 du même code : " Le projet d'aménagement comprend également : 1° Un plan de l'état actuel du terrain à aménager et de ses abords faisant apparaître les constructions et les plantations existantes, les équipements publics qui desservent le terrain, ainsi que, dans le cas où la demande ne concerne pas la totalité de l'unité foncière, la partie de celle-ci qui n'est pas incluse dans le projet d'aménagement ; / 2° Un plan coté dans les trois dimensions faisant apparaître la composition d'ensemble du projet et les plantations à conserver ou à créer. ".

8. La circonstance que le dossier de demande de permis ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

9. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis d'aménager déposée par la société Progimo comportait une note de présentation décrivant l'état initial des parcelles où s'implante le projet. Cette notice comportait en outre un volet intitulé " desserte et aménagement paysager ", dans lequel figurait plusieurs vues aériennes du projet, notamment quant aux implantations des constructions projetées ainsi qu'une description de l'intégration paysagère du projet, précisant, notamment, que le projet prévoit deux espaces verts collectifs d'une surface de 449 m² et 53 m², que les lots privatifs traiteront en espace vert une superficie de 60% de la surface de leur lot. Enfin, les photographies jointes au dossier permettaient d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement, notamment des constructions avoisinantes. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les documents figurant au dossier de demande de permis de construire auraient été insuffisants, alors qu'il ressort des pièces du dossier que l'autorité administrative a été mise en mesure d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement.

En ce qui concerne l'exception d'illégalité du PLU de Péron :

10. Un requérant ne saurait utilement soutenir qu'un permis d'aménager a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal sans faire valoir que ce permis méconnaît les dispositions d'urbanisme pertinentes que l'illégalité qu'il allègue aurait pour effet de remettre en vigueur.

11. En l'espèce, Mme F... se borne à critiquer la légalité du classement du terrain d'assiette du projet en zone U sans faire valoir que les dispositions pertinentes du document d'urbanisme remis en vigueur font obstacle à la délivrance du permis d'aménager en litige. Dans ces conditions, les moyens selon lesquels le classement des terrains d'implantation du projet en zone urbaine ne serait pas compatible avec les orientations du schéma interrégional d'aménagement et de développement du massif du Jura, avec le SCOT du Pays de Gex, comme l'exige l'article L. 122-1-15 du code de l'urbanisme ainsi qu'avec les objectifs de préservation des espaces agricoles et naturels mentionnés à l'article L. 145-3 du même code de l'urbanisme doivent dès lors être écartés.

S'agissant de l'erreur manifeste d'appréciation :

12. Il ne ressort pas des pièces du dossier le projet présente des risques d'atteinte au milieu naturel en ce qu'il prévoit la pose de canalisations et le busage d'un ruisseau souterrain existant. Par ailleurs, alors que les terrains d'assiette du projet ne sont pas inclus dans le périmètre de protection patrimonial institué sur le hameau de Feigères en application de l'article L. 123-1-5 7° du code de l'urbanisme, il ne ressort pas des pièces du dossier que, du seul fait de leur nombre, les constructions induites par le permis d'aménager en litige ne s'intégreront pas au hameau déjà urbanisé de Feigères, ni au paysage environnant. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le projet engendrera une pollution lumineuse disproportionnée sur le versant de la vaste plaine agricole où il s'implante.

13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Péron, que Mme F... n'est pas fondée à demander l'annulation du permis d'aménager du 20 décembre 2016 que le maire de Péron a délivré à la société Progimo.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme F... dirigées contre la commune de Péron, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions Mme F... versera à la commune de Péron la somme de 2 000 euros.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du 22 septembre 2017 de la présidente de la première chambre du tribunal administratif de Lyon est annulée.

Article 2 : Les conclusions de Mme F... aux fins d'annuler le permis d'aménager du 20 décembre 2016 ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Mme F... versera à la commune de Péron la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... F..., à la commune de Péron et à la société Progimo.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme G... H..., présidente de chambre ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme E... D..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2019.

2

N° 17LY03791

fp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17LY03791
Date de la décision : 19/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Formes de la requête.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : GUICHARD SEGOLENE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-12-19;17ly03791 ?
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