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09/04/2013 | FRANCE | N°12LY02144

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 09 avril 2013, 12LY02144


Vu la requête, enregistrée le 7 août 2012 par télécopie et régularisée le 8 août 2012, présentée pour la commune de Talloires (74290) Haute-Savoie, représentée par son maire ;

La commune de Talloires demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904819 du tribunal administratif de Grenoble du 8 juin 2012 qui, à la demande de M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D...a annulé l'arrêté du 18 juin 2009 par lequel son maire a délivré un permis de construire à la SCI Les Ecrins ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme C...E..., M. et

Mme B...E...et M. et Mme A...D...devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner M....

Vu la requête, enregistrée le 7 août 2012 par télécopie et régularisée le 8 août 2012, présentée pour la commune de Talloires (74290) Haute-Savoie, représentée par son maire ;

La commune de Talloires demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904819 du tribunal administratif de Grenoble du 8 juin 2012 qui, à la demande de M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D...a annulé l'arrêté du 18 juin 2009 par lequel son maire a délivré un permis de construire à la SCI Les Ecrins ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D...devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D...à lui verser une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Talloires soutient que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, le projet litigieux ne méconnaît pas l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme, le terrain d'assiette de ce projet ne pouvant être regardé comme se situant dans un espace proche du rivage et la construction envisagée comme étendant ou renforçant de manière significative l'urbanisation ou comme modifiant de manière importante les caractéristiques du quartier, cette construction constituant un simple prolongement de l'urbanisation qui existe de part et d'autre de la rue André Theuriet ; que le socle comprenant les garages respecte la distance de recul imposée par l'article UA 7-1 du règlement du plan d'occupation des sols ; que la sortie de ventilation des garages constitue un bâtiment annexe indépendant qui peut bénéficier de la dérogation prévue par les dispositions de cet article ; qu'il n'est pas démontré que l'architecte des bâtiments de France aurait dû émettre un avis sur le projet ; qu'en tout état de cause, le vice de procédure serait sans incidence sur la légalité du permis de construire attaqué ; qu'en l'absence de toute extension de l'urbanisation, l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme n'imposait pas de recueillir l'accord du préfet et l'avis de la commission des sites ; que la circonstance que l'avis de l'architecte des bâtiments de France ne soit pas visé par l'arrêté attaqué est sans incidence sur la légalité de cet arrêté ; que la circonstance que l'article UA 14 du règlement du plan d'occupation des sols serait contraire à l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme n'est pas susceptible d'entraîner l'illégalité du permis litigieux ; que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement en zone UA du terrain d'assiette du projet devra être écarté, ce terrain se situant dans un secteur largement urbanisé qui se rattache au centre bourg ; que la règle posée par l'article UA 10-2-2 du règlement du plan d'occupation des sols est parfaitement respectée ; qu'enfin, l'article UA 11 du même règlement a également été respecté, dès lors que le bâtiment s'intègre dans son environnement et que la toiture répond aux dispositions du point 11-3-2 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 octobre 2012, présenté pour M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D..., qui demandent à la cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner la commune de Talloires à verser à M. C...E..., M. B...E...et M. A...D...une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D...soutiennent que la délibération du 24 avril 2008, qui a une portée générale, ne peut dès lors régulièrement habiliter le maire à agir en justice ; que contrairement à ce que prévoit cette délibération, le maire n'a jamais informé le conseil municipal de la procédure engagée au cours de la séance suivante ; que l'absence d'habilitation en première instance ne peut être régularisée en appel ; que le tribunal avait l'obligation de demander à la commune de produire la délibération habilitant le maire à défendre ; qu'ils disposent d'un intérêt à agir, étant voisins immédiats du projet ; que leur recours gracieux et leur recours contentieux ont été régulièrement notifiés ; que leur demande est donc recevable ; que le projet, qui se trouve dans le champ de visibilité d'un monument historique, était dès lors soumis à l'accord de l'architecte des bâtiments de France, lequel n'a pas été requis ; que le projet, qui se situe dans les espaces proches du rivage, aurait dès lors dû, en application de l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme, être examiné pour avis par la commission des sites et recueillir l'accord du préfet, en l'absence d'un schéma de cohérence territoriale, d'un schéma d'aménagement régional ou d'un schéma de mise en valeur de la mer ; qu'en application du même article, l'extension de l'urbanisation doit être limitée dans les espaces proches du rivage ; que la circonstance que le terrain d'assiette serait situé dans une zone urbanisée est sans incidence ; que le classement de ce terrain en zone UA, correspondant au centre historique de Talloires, est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il n'est pas situé dans les limites du centre historique de la commune mais est inclus dans un îlot faiblement urbanisé ; que, contrairement à ce qu'impose l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme, l'urbanisation de cet îlot n'est ni justifiée ni motivée par le document d'urbanisme ; que l'absence de coefficient d'occupation des sols en zone UA entraîne une méconnaissance des dispositions de cet article ; que le projet, qui entraînera une modification sensible de la densité des constructions, modifiera dès lors de manière importante les caractéristiques du secteur ; qu'en outre, il modifiera la destination de l'îlot, qui est actuellement principalement à vocation de loisirs et de tourisme ; qu'il dénaturera également fortement l'aspect naturel de la zone NAt située en bordure du lac ; que le socle sur lequel les constructions sont prévues, la sortie de ventilation des garages, laquelle ne constitue pas une annexe indépendante, et les dépassés de toiture, en trois points, ne respectent pas le recul de trois mètres imposé par l'article UA 7-1 du règlement du plan d'occupation des sols ; que l'article UA 10-2-2 de ce même règlement est également méconnu, la construction présentant une hauteur supérieure à cinq mètres alors qu'elle est distante de seulement 2,50 mètres de la limite séparative ; qu'enfin, le projet, dont les caractéristiques ne respectent pas le bâti environnant, méconnaît l'article UA 11 du règlement ; que les dépassés de toiture horizontaux ne sont pas autorisés par les dispositions de cet article ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 26 novembre 2012, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 décembre 2012 ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 décembre 2012, présenté pour la commune de Talloires, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La commune de Talloires soutient, en outre, que son maire a été régulièrement habilité par le conseil municipal ; que la circonstance que le maire n'aurait pas informé le conseil municipal des actions entreprises est sans incidence et, au demeurant, inexacte ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 décembre 2012, présenté pour l'association Lac d'Annecy environnement, qui demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner la commune de Talloires à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

L'association Lac d'Annecy environnement reprend à son compte les moyens développés par les intimés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du patrimoine ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative et notamment son article R. 613-3, en application duquel les mémoires produits les 3 et 11 janvier 2013 pour M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D..., et le mémoire produit le 7 janvier 2013 pour l'association Lac d'Annecy environnement, après la clôture de l'instruction, n'ont pas été communiqués ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2013 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Liochon, avocat de la commune de Talloires ;

1. Considérant que, par un jugement du 8 juin 2012, à la demande de M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D...le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 18 juin 2009 par lequel le maire de la commune de Talloires a délivré un permis de construire à la SCI Les Ecrins, en vue de l'édification d'un bâtiment collectif d'habitation de 12 logements sur un terrain proche du lac d'Annecy ; que cette commune relève appel de ce jugement ;

Sur l'intervention de l'association Lac d'Annecy environnement :

2. Considérant que l'association Lac d'Annecy environnement, qui est agréée en matière d'environnement et a pour objet la sauvegarde, la défense et la promotion du site du bassin du lac d'Annecy et de son environnement, a intérêt au maintien de l'annulation du permis de construire litigieux ; que son intervention est dès lors recevable ;

Sur la recevabilité de la requête :

3. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les intimés, la délibération du 24 avril 2008 du conseil municipal de la commune de Talloires habilite le maire à introduire la requête, en lui donnant délégation pour intenter les actions en justice quand un tiers conteste un arrêté du maire et pour défendre les intérêts de la commune en matière d'urbanisme ; qu'une habilitation spéciale pour introduire la présente instance n'était pas nécessaire ; que la circonstance que le maire n'aurait pas informé le conseil municipal de la présente instance au cours de la séance la plus proche du conseil, conformément à ce que prévoit la délibération du 24 avril 2008, est sans incidence sur la recevabilité de la requête ; que, par suite, M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D...ne sont pas fondés à soutenir que la requête est irrecevable ;

Sur la régularité du jugement :

4. Considérant que les intimés, qui font valoir que le tribunal avait l'obligation de demander à la commune de Talloires de produire la délibération habilitant le maire à défendre, n'ont pas intérêt à contester la régularité du jugement attaqué, qui a fait droit à leurs conclusions ; qu'au demeurant, la délibération précitée du 24 avril 2008 a bien été produite en première instance par cette commune ;

Sur la légalité de l'arrêté litigieux :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs (...) doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. / Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. / En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord du représentant de l'Etat dans le département. Cet accord est donné après que la commune a motivé sa demande et après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature (...) " ;

6. Considérant que, pour déterminer si un terrain peut être qualifié d'espace proche des rives d'un plan d'eau intérieur au sens de ces dispositions, trois critères doivent être pris en compte, à savoir la distance séparant ce terrain des rives du lac, les caractéristiques des espaces l'en séparant et les conséquences à tirer de l'existence ou de l'absence d'une covisibilité entre le terrain et le lac ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet qui a été autorisé par l'arrêté litigieux, qui présente une superficie de 1 182 m², est distant d'un peu plus de cent mètres de la rive du lac d'Annecy la plus proche, située au sud-est ; que la bande de terrain qui sépare ce terrain de ce lac est assez faiblement urbanisée ; que la rue André Theuriet, qui borde le terrain au sud, ne constitue pas une barrière susceptible d'isoler ce dernier du lac ; que la notice contenue dans le dossier de la demande de permis de construire indique que le terrain " bénéficie à son sommet de la vue sur le lac " ; que, dans ces conditions, le terrain d'assiette du projet litigieux doit être regardé comme un espace proche du lac d'Annecy au sens des dispositions précitées de l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme ;

7. Considérant que l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme a vocation à s'appliquer indépendamment du caractère urbanisé ou non de l'espace dans lequel se situe la construction envisagée ; que, toutefois, une opération qu'il est projeté de réaliser dans des espaces déjà urbanisés ne peut être regardée comme une "extension de l'urbanisation", au sens des dispositions de cet article, que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation de quartiers périphériques ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un quartier, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions ; qu'en revanche la seule réalisation dans un quartier urbain d'un ou plusieurs bâtiments, qui est une simple opération de construction, ne peut être regardée comme constituant une extension au sens de la loi ; qu'il est constant que le projet litigieux prend place dans un secteur urbanisé de la commune de Talloires ; que ce projet se situe toutefois à la limite de l'urbanisation du bourg de Talloires, dans un quartier dans lequel l'urbanisation, composée pour l'essentiel de maisons individuelles, est plus diffuse ; que ce projet, qui vise à construire un immeuble collectif d'habitation de 12 logements, va renforcer de manière significative l'urbanisation de ce quartier périphérique de la commune de Talloires ; que, par suite, contrairement à ce que soutient cette dernière, le projet constitue une extension de l'urbanisation au sens de la loi, et non une simple opération de construction ;

8. Considérant que le caractère limité de l'urbanisation, au sens des dispositions précitées de l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme, s'apprécie compte tenu de l'implantation, de l'importance, de la densité et de la destination des constructions envisagées, ainsi que des caractéristiques topographiques de la partie concernée de la commune ; que le projet en litige vise à créer un seul bâtiment, en bordure de la rue André Theuriet, qui constitue l'axe principal le long duquel le village de Talloires s'est développé ; que des constructions sont situées de chaque côté du terrain d'assiette de ce projet et en face de ce terrain, de l'autre côté de cette rue ; que certaines de ces constructions, qui comportent plusieurs logements, présentent un volume assez important ; que, dans ces conditions, même si ledit terrain se situe à la limite de la partie la plus urbanisée du village, que le projet comporte 12 logements, alors que les bâtiments voisins abritent tout au plus quelques logements, et qu'il présente une densité plus importante que celle des constructions voisines, l'extension de l'urbanisation qu'il implique doit être regardée comme présentant un caractère limité au sens des dispositions du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Talloires est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a estimé que le projet qui a été autorisé par le permis de construire attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 146-4 II du code de l'urbanisme ;

10. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article UA 7-1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Talloires : " Les constructions doivent respecter un recul minimum de 3 mètres par rapport aux limites des propriétés privées voisines. / (...) Les annexes non accolées à une construction existante, projetées sur le terrain d'assiette de celle-ci, peuvent être implantées sans condition de recul, si : / - leur hauteur ne dépasse pas 4,50 mètres au faîtage, / - la longueur cumulée de leurs façades bordant les propriétés voisines ne dépassent pas 12 mètres, sans qu'aucune façade ne dépasse 8 mètres (...) " ;

11. Considérant que la ventilation du garage souterrain est réalisée par un petit édifice dépassant du sol, qui se situe à moins d'un mètre de la limite séparative ; que, toutefois, cet édifice constitue une annexe au sens des dispositions précitées de l'article UA 7-1 du règlement ; que, par ailleurs, même s'il communique avec le garage souterrain, dont il assure la ventilation, ledit édifice n'est pas accolé au bâtiment principal ; qu'il est constant que les dimensions de l'ouvrage de ventilation respectent les dimensions maximales imposées par l'article UA 7-1 ; que, contrairement à ce que soutiennent les intimés, cet article n'impose pas nécessairement, pour qu'une annexe soit dispensée de toute condition de recul, qu'une construction préexiste sur le terrain ; que, dans ces conditions, ledit ouvrage pouvant être implanté sans condition de recul, la commune de Talloires est fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a estimé que les dispositions précitées ont été méconnues ;

12. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance comme en appel par M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D...;

13. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce qu'impose l'article L. 146-4 II précité du code de l'urbanisme, le plan d'occupation des sols de la commune de Talloires ne justifie pas l'extension limitée de l'urbanisation qui est réalisée dans la partie du territoire communal dans laquelle se situe le terrain d'assiette du projet contesté, " selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau " ; que, si en l'absence de justification de l'extension de l'urbanisation dans le document d'urbanisme, celle-ci peut néanmoins être réalisée après accord du préfet, rendu sur avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites, il n'est pas contesté qu'aucun accord n'a été demandé au préfet de la Haute-Savoie ;

14. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 621-30-1 alors applicable du code du patrimoine : " Est considéré, pour l'application du présent titre, comme étant situé dans le champ de visibilité d'un immeuble classé ou inscrit tout autre immeuble, nu ou bâti, visible du premier ou visible en même temps que lui et situé dans un périmètre de 500 mètres (...) " ; qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 621-31 du même code : " Lorsqu'un immeuble est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé au titre des monuments historiques ou inscrit, il ne peut faire l'objet, tant de la part des propriétaires privés que des collectivités et établissements publics, d'aucune construction nouvelle, d'aucune démolition, d'aucun déboisement, d'aucune transformation ou modification de nature à en affecter l'aspect, sans une autorisation préalable " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques (...), le permis de construire, (...) tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-31 du code du patrimoine dès lors que la décision a fait l'objet de l'accord de l'architecte des Bâtiments de France (...) " ;

15. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un plan annexé à un courrier adressé le 1er avril 2003 au maire de la commune de Talloires par le chef du service départemental de l'architecture et du patrimoine de la Haute-Savoie, que le projet contesté est inclus dans le périmètre de 500 mètres tracé à partir de la limite extrême d'une ancienne abbaye faisant l'objet, dans sa totalité, d'une inscription à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; qu'il n'est pas contesté que l'architecte des bâtiments de France n'a pas été consulté sur le projet, alors en outre que celui-ci, visible en même temps que ce monument historique, et ce au moins depuis le Roc de Chère et la chapelle Saint-Germain, est situé dans le champ de visibilité de ce monument ; que, par suite, l'arrêté contesté méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 621-31 du code du patrimoine et de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme ; que, contrairement à ce que soutient la commune de Talloires, cette illégalité, qui notamment affecte la compétence, est de nature, dans les circonstances de l'espèce, à avoir exercé une influence sur le sens de la décision ;

16. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Talloires n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 18 juin 2009 par lequel son maire a délivré un permis de construire à la SCI Les Ecrins ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. et Mme C...E..., M. et Mme B...E...et M. et Mme A...D..., qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, soient condamnés à payer à la commune de Talloires la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme globale de 1 500 euros au bénéfice de M. C...E..., M. B...E...et M. A...D...sur le fondement de ces mêmes dispositions ; que l'association Lac d'Annecy environnement, intervenant en défense, n'étant pas partie à la présente instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à la condamnation de la commune de Talloires à lui payer la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de l'association Lac d'Annecy environnement est admise.

Article 2 : La requête de la commune de Talloires est rejetée.

Article 3 : La commune de Talloires versera à M. C...E..., M. B...E...et M. A... D...une somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l'association Lac d'Annecy environnement présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Talloires, à M. et Mme C...E..., à M. et Mme B...E..., à M. et Mme A...D...et à l'association Lac d'Annecy environnement.

Délibéré à l'issue de l'audience du 19 mars 2013, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président,

M. Zupan, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 avril 2013.

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N° 12LY02144

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02144
Date de la décision : 09/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles générales d'utilisation du sol - Règles générales de l'urbanisme - Prescriptions d'aménagement et d'urbanisme - Régime issu de la loi du 3 janvier 1986 sur le littoral.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : LIOCHON et DURAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-04-09;12ly02144 ?
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