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18/02/2021 | FRANCE | N°19DA01544

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 18 février 2021, 19DA01544


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Leroux et Lotz Technologies a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets à lui verser la somme de 210 258 euros hors taxes, assortie de la taxe sur la valeur ajoutée applicable, des intérêts moratoires courant à compter du 12 juin 2005 et de la capitalisation de ces intérêts ainsi que de mettre à la charge du syndicat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admin

istrative.

Par un jugement n° 1601641 du 7 mai 2019, le tribunal administr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Leroux et Lotz Technologies a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets à lui verser la somme de 210 258 euros hors taxes, assortie de la taxe sur la valeur ajoutée applicable, des intérêts moratoires courant à compter du 12 juin 2005 et de la capitalisation de ces intérêts ainsi que de mettre à la charge du syndicat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1601641 du 7 mai 2019, le tribunal administratif de Lille a condamné le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets à verser à la société Leroux et Lotz Technologies une somme de 252 309,60 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 février 2016 et de la capitalisation des intérêts échus le 24 février 2017 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date, ainsi qu'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrés les 5 juillet 2019 et 18 octobre 2019, le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets, représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Leroux et Lotz Technologies devant le tribunal administratif de Lille ;

3°) de mettre à la charge de la société Leroux et Lotz Technologies la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour la société Leroux et Lotz Technologies.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte d'engagement conclu le 8 décembre 2000, le syndicat intercommunal de la région de Denain pour le retraitement des déchets hospitaliers, industriels banals et ménagers a confié à un groupement conjoint d'entreprises formé de la société Inova France, mandataire, de la société Sogea Nord et de la société d'architectes Copin, Parent, Gasnier et Gossart, la conception et la réalisation d'une unité de valorisation énergétique par production d'électricité à implanter au sein de l'usine d'incinération d'ordures ménagères de Douchy-les-Mines, dont il est le propriétaire. Dans le cadre de ce marché, la société Inova France a, par une convention conclue le 15 décembre 2000, sous-traité à la société Leroux et Lotz Technologies la fabrication et le montage de deux chaudières et d'un surchauffeur, pour un prix de 5 834 528,78 euros toutes taxes comprises. Un litige est né entre les parties lors du règlement financier du marché public précité en raison, principalement, du retard pris dans le démarrage des travaux. Par un jugement n° 0905169 du 5 février 2013, le tribunal administratif de Lille a condamné le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets, venu aux droits du syndicat intercommunal de la région de Denain pour le retraitement des déchets hospitaliers, industriels banals et ménagers, à verser à la société Inova France, en sa qualité de mandataire du groupement titulaire, une somme de 1 180 808,28 euros, toutes taxes comprises, dont 251 468,56 euros au titre du préjudice subi par la société Leroux et Lotz Technologies en raison de l'allongement de la durée d'exécution de ses prestations. Par un arrêt n° 13DA00494 du 12 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Douai, ayant pris acte de ce que la société Inova n'avait pas indemnisé la société Leroux et Lotz Technologies de ses préjudices, a réformé le jugement précité après avoir estimé que la société Inova ne pouvait prétendre, sur ce point, à aucune indemnité.

2. Dans la présente instance, le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets relève appel du jugement du 7 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille l'a condamné à verser à la société Leroux et Lotz Technologies une somme de 252 309,60 euros, toutes taxes comprises, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation des préjudices subis du fait de l'allongement de l'exécution du marché précité au cours duquel elle est intervenue en qualité de sous-traitante.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. " Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. / Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance. [...] Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée. ".

4. Les droits au paiement d'un marché à rémunération forfaitaire sont acquis lors de l'établissement du projet de décompte par le titulaire et non lors de celui du décompte général du marché par le maître d'ouvrage. La prescription quadriennale commence donc à courir à compter du 1er janvier de l'année suivant celle au cours de laquelle le projet de décompte a été établi.

5. Il résulte de l'instruction que, par une lettre en date du 25 février 2005, notifiée le 26 février 2005, la société Inova France SA a adressé au syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets un projet de décompte final incluant les surcoûts financiers exposés par le groupement d'entreprises, dont la société Inova France SA est mandataire, et ses sous-traitants et qui sont liés aux interruptions et retards qu'elle estime imputables au maître d'ouvrage pour un montant de 1 911 114,84 euros hors taxes. Cette créance intégrait celle la société Leroux-et-Lotz Technologies en sa qualité de sous-traitante. A la suite du rejet, le 26 juin 2006, de ce projet de décompte final par ledit syndicat, le mandataire du groupement d'entreprises lui a, le 8 septembre 2006, adressé un nouveau projet de décompte final incluant la révision des prix, le calcul de l'actualisation et des surcoûts financiers révisés. La prescription quadriennale a commencé à courir au 1er janvier 2007.

6. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que, le 10 août 2009, la société Inova a saisi le tribunal administratif de Lille d'une demande tendant à la condamnation du syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets à l'indemniser des préjudices en raison des retards pris dans l'exécution du marché de conception et de réalisation de l'unité de valorisation énergétique par production d'électricité, incluant ceux de la société Leroux-et-Lotz Technologies, concernant l'exécution du marché susmentionné. Le fait générateur de l'obligation de réparation sur lequel s'est fondée la société Inova étant identique à celui de l'obligation invoquée par la société Leroux-et-Lotz Technologies et cette demande ayant bien mis en cause la collectivité publique, ce recours juridictionnel a, conformément aux dispositions précitées de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968, valablement interrompu la prescription. Le jugement n° 0905169 du 5 février 2013 rendu par le du tribunal administratif de Lille a fait l'objet d'un appel devant la cour administrative d'appel de Douai qui a rendu son arrêt n° 13DA00494, le 12 décembre 2014, passé en force de chose jugée. Dans ces conditions, la demande introduite devant le tribunal administratif de Lille, le 24 février 2016, par la société Leroux et Lotz Technologies, tendant à la condamnation du syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets à l'indemniser des préjudices subis concernant ce même fait générateur n'était pas atteinte par la prescription quadriennale.

7. Il résulte de ce qui précède que le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a écarté l'exception de prescription quadriennale qu'il avait opposé et l'a condamné à verser à la société Leroux et Lotz Technologies une somme de 252 309,60 euros toutes taxes comprises en réparation des préjudices subis du fait de l'allongement de l'exécution du marché précité au cours duquel elle est intervenue en qualité de sous-traitante.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Leroux et Lotz Technologies, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le syndicat appelant, au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Leroux et Lotz Technologies en mettant à la charge du syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets une somme de 1 500 euros au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets est rejetée.

Article 2 : Le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets versera à la société Leroux et Lotz Technologies la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... pour le syndicat inter-arrondissement pour la valorisation et l'élimination des déchets et à Me B... pour la société Leroux et Lotz Technologies.

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N°19DA01544

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01544
Date de la décision : 18/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

18-04-02-05 Comptabilité publique et budget. Dettes des collectivités publiques - Prescription quadriennale. Régime de la loi du 31 décembre 1968. Interruption du cours du délai.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP CHENEAU et PUYBASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-02-18;19da01544 ?
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