Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I°) Par un arrêt n° 19BX03342 du 9 juillet 2020, la cour, statuant sur la requête de la commune du Fauga, a annulé la décision implicite du 5 octobre 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de mettre en œuvre des travaux de dépollution de la parcelle cadastrée B n° 916 sur le territoire de la commune du Fauga, a enjoint aux services de l'Etat de faire reprendre dès la notification de l'arrêt, les travaux de dépollution de cette parcelle et de les achever dans un délai d'un an à compter de cette notification, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à la commune du Fauga en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II°) Par un arrêt n° 19BX03942 du 9 juillet 2020, la cour, statuant sur la requête de la société de Labourdette, a liquidé provisoirement, à hauteur de 102 150 euros, l'astreinte fixée par l'arrêt n° 16BX00976 du 18 octobre 2016, a fixé à 1000 euros le taux journalier de l'astreinte à compter de la notification de l'arrêt et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à la société de Labourdette en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure d'exécution :
I°) Par un arrêt n° 19BX03342, 19BX03942 du 21 décembre 2021, la cour a condamné l'Etat à verser à la commune du Fauga la somme de 120 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par l'arrêt n° 19BX03342 du 9 juillet 2020 et a maintenu le taux de l'astreinte prononcée par cet arrêt à 1 000 euros par jour de retard.
Par des mémoires, enregistrés les 7 juillet 2023, 20 novembre 2023, 23 octobre 2024 et 13 janvier 2025, la commune de Fauga, représentée par Me Courrech, conclut dans le dernier état de ses écritures, à la liquidation définitive de l'astreinte prononcée par l'arrêt du 9 juillet 2020, et la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'Etat a tardé à réaliser les travaux, alors que la présence de munitions sur ce site engendrait un risque pour la population locale.
Par des mémoires, enregistrés le 3 novembre 2023, 16 septembre 2024 et 10 janvier 2025, le ministre de l'intérieur, conclut au rejet des conclusions en liquidation d'astreinte, à la suppression de l'astreinte ou, subsidiairement, à la modération de son montant.
Il fait valoir que, eu égard à la complexité du chantier, au caractère boisé et vaste du terrain, aux travaux de sécurisation et de surveillance qui ont été nécessaires, à l'absence de certitude quant à la destination du terrain et donc au niveau de dépollution exigé, au litige devant les tribunaux judiciaires entre la SNPE et la société de Labourdette, l'ampleur des découvertes par la société de dépollution pyrotechnique (18 500 cibles), la durée des procédures de commande publique, la durée des travaux était nécessairement d'environ 3 années. Un marché a été notifié le 4 juillet 2024 et l'entreprise s'est engagée à réaliser les travaux sur une durée de 8 mois. Les travaux se sont achevés le 19 décembre 2024 ainsi que cela ressort de l'attestation de dépollution pyrotechnique de la société Geomines, il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte ou subsidiairement, il y a lieu de la modérer.
II°) Par un arrêt n° 19BX03342, 19BX03942 du 21 décembre 2021, la cour a condamné l'Etat à verser à la société de Labourdette la somme de 400 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par l'arrêt n° 16BX00976 du 18 octobre 2016 au taux modifié par l'arrêt n° 19BX03942 du 9 juillet 2020, et a maintenu le taux de l'astreinte prononcée par cet arrêt à 1 000 euros par jour de retard.
Par des mémoires, enregistrés les 8 janvier 2025 et 9 janvier 2025, la société de Labourdette, représentée par Me Elfassi, conclut, dans le dernier état de ses écritures, à la liquidation définitive de l'astreinte et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que l'exécution des travaux de dépollution est terminée mais que dès lors que plus de 6 ans se sont écoulés depuis l'arrêt de la cour de 2016, il y a lieu de liquider l'astreinte pour la période du 1er décembre 2021 au 2 janvier 2025.
Par un mémoire, enregistré le 10 janvier 2025, le ministre de l'intérieur conclut au rejet des conclusions en liquidation d'astreinte, à la suppression de l'astreinte ou, subsidiairement, à la modération de son montant.
Il fait valoir que, eu égard à la complexité du chantier, au caractère boisé et vaste du terrain, aux travaux de sécurisation et de surveillance qui ont été nécessaires, à l'absence de certitude quant à la destination du terrain et donc au niveau de dépollution exigé, au litige devant les tribunaux judiciaires entre la SNPE et la société de Labourdette, l'ampleur des découvertes par la société de dépollution pyrotechnique (18 500 cibles), la durée des procédure de commande publique, la durée des travaux était nécessairement d'environ 3 années. Un marché a été notifié le 4 juillet 2024 et l'entreprise s'est engagée à réaliser les travaux sur une durée de 8 mois. Les travaux se sont achevés le 19 décembre 2024 ainsi que cela ressort de l'attestation de dépollution pyrotechnique de la société Geomines, il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte ou subsidiairement, il y a lieu de la modérer.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fabienne Zuccarello,
- les conclusions de M. Sébastien Ellie, rapporteur public,
- et les observations de Me Laporte, représentant la commune du Fauga et les observations de Me Maestle, représentant la société de Labourdette.
Vu les notes en délibéré enregistrées le 23 janvier 2025, présentées pour le ministre de l'intérieur .
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation (...)".
2. Par une convention signée le 18 novembre 2003, la commune du Fauga a confié à la société de Labourdette la réalisation d'une zone d'aménagement concerté sur une unité foncière correspondant à la parcelle cadastrée section B n° 916. Afin de réaliser ce projet, la société de Labourdette a acquis auprès de la société nationale des poudres et explosifs, le 15 décembre 2003, la parcelle B n° 916. Après la découverte dans le sol du terrain, de munitions datant de la seconde guerre mondiale, la société de Labourdette a adressé au préfet de la Haute-Garonne, le 23 août 2006, une mise en demeure de faire enlever ces munitions. Le préfet a opposé à cette demande une décision implicite de rejet que le tribunal administratif de Toulouse a annulée par un jugement n° 0702647 du 4 mai 2012 qui condamnait aussi l'Etat à verser à la société de Labourdette une somme à titre de dommages et intérêts. Par un arrêt n° 12BX01747 du 8 octobre 2013, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête de la société de Labourdette tendant à la réformation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 mai 2012. Par décision n° 373818 du 16 mars 2016, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par la société de Labourdette, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 8 octobre 2013 en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de la société aux fins d'injonction de faire procéder à la dépollution du site et a renvoyé le jugement de ces conclusions devant la cour. Statuant sur renvoi du Conseil d'Etat, la cour d'administrative d'appel de Bordeaux a rendu un arrêt n° 16BX00976 du 18 octobre 2016 rappelant qu'en application de l'article 2 du décret n° 76-225 du 4 mars 1976, il incombe à l'Etat et à lui seul de faire réaliser la dépollution du terrain. La cour a également jugé que l'annulation de la décision implicite de rejet de la demande du 23 août 2006, tendant à ce qu'il soit procédé à la dépollution du site, impliquait nécessairement que les services spécialisés du ministère de l'intérieur procèdent aux opérations de dépollution. Constatant que ces opérations n'avaient pas été engagées, la cour a enjoint au ministre de l'intérieur de faire procéder à la dépollution du site dans un délai d'un an à compter de la notification de son arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard et d'en justifier. Par un arrêt n° 19BX03942 du 9 juillet 2020, la cour, statuant sur la requête de la société de Labourdette, a liquidé provisoirement, à hauteur de 102 150 euros, l'astreinte fixée par l'arrêt n° 16BX00976 du 18 octobre 2016, a fixé à 1 000 euros le taux journalier de l'astreinte à compter de la notification de l'arrêt. Enfin, par un arrêt n° 19BX03342, 19BX03942 du 21 décembre 2021, la cour a liquidé provisoirement, à hauteur de 400 000 euros au profit de la société Labourdette, l'astreinte fixée par les arrêts n° 16BX00976 du 18 octobre 2016 et 19BX03342 du 9 juillet 2020.
3. La commune du Fauga a parallèlement adressé au préfet de la Haute-Garonne une mise en demeure du 3 août 2016, réceptionnée le 5 août, de faire procéder à la dépollution du terrain. Sa mise en demeure ayant fait l'objet d'une décision implicite de rejet, la commune du Fauga a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à l'annulation de cette décision implicite et à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de terminer les travaux de dépollution dans l'année de leur mise en œuvre. Par jugement du 11 juin 2019, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande d'annulation et a rejeté les conclusions à fin d'injonction. Par un arrêt n° 19BX03342 du 9 juillet 2020, la cour, saisie en appel par la commune du Fauga, a annulé la décision implicite du 5 octobre 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de mettre en œuvre des travaux de dépollution de la parcelle cadastrée B n° 916, a enjoint aux services de l'Etat de faire reprendre, dès la notification de l'arrêt, les travaux de dépollution de cette parcelle et de les achever dans un délai d'un an à compter de cette notification, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Enfin, par un arrêt n° 19BX03342, 19BX03942 du 21 décembre 2021, la cour a liquidé provisoirement, à hauteur de 120 000 euros au profit de la commune de Fauga, l'astreinte fixée par les arrêts n° 16BX00976 du 18 octobre 2016 et 19BX03342 du 9 juillet 2020.
4. Il y a lieu de statuer par un même arrêt sur la liquidation de ces deux astreintes, relatives à l'exécution de la même obligation.
Sur la liquidation définitive des astreintes :
5. Il résulte de l'instruction que les arrêts des 18 octobre 2016 et 9 juillet 2020 ont fait l'objet d'un commencement d'exécution à compter de la fin du mois de février 2021 et que les travaux de dépollution sont achevés depuis le 19 décembre 2024, ainsi que cela ressort de l'attestation de dépollution de la société Geomines. Si depuis la date de la précédente liquidation d'astreinte par l'arrêt de la cour du 21 décembre 2021 plus de 3 années se sont écoulées, les travaux de dépollution se sont néanmoins poursuivis à un rythme régulier. Il résulte également de l'instruction, que si l'Etat n'a pas fait preuve des diligences attendues dans un premier temps, il s'est ensuite trouvé confronté à des obstacles imprévisibles de nature à ralentir la réalisation de la dépollution. En effet, il ressort du rapport de diagnostic de dépollution pyrotechnique réalisé par la société Geomines et rendu en novembre 2022, que 18 405 anomalies ferromagnétiques susceptibles de présenter un risque pyrotechnique ont été recensées. Il résulte encore de l'instruction, que diverses découvertes inattendues sont survenues telles que puits ou citernes enterrées, sites d'enfouissements de déchets et blocs en béton armés notamment. L'Etat a également dû gérer les contraintes résultant de l'activité humaine alentour telles que la surveillance constante du site dont la sécurisation stricte était indispensable eu égard aux dangers présents, aux intrusions des habitants du voisinage, à la présence de sangliers, et à l'inondation volontaire d'une partie du site par rejet des eaux d'une nappe phréatique à proximité. Enfin, eu égard à l'étendue tant du site à dépolluer qu'au volume de déchets métalliques à évacuer, les opérations ont nécessité la création sur place, d'un centre de tri des déchets, d'un site de stockage et destruction des munitions ainsi que d'une base de vie.
6. Dans ces conditions, alors que l'exécution des travaux est achevée, il y a lieu de procéder à la liquidation définitive des astreintes prononcées par les arrêts de la cour en procédant à une modération de leurs montants.
7. S'agissant de l'astreinte prononcée par les arrêts n° 16BX00976 et modifiée par l'arrêt n° 19BX03942, elle s'établirait à la somme de 1 115 000 euros correspondant, pour la période courant du 30 novembre 2021, date à laquelle l'arrêt de la Cour du 21 décembre 2021 a arrêté la précédente liquidation de l'astreinte, au 19 décembre 2024, date à laquelle les travaux ont été achevés, à 1 115 jours au taux journalier de 1000 euros. Il en va de même s'agissant de l'astreinte au taux journalier de 1 000 euros fixée par l'arrêt n° 19BX03342 du 9 juillet 2019, l'astreinte s'établirait pour la même période à la même somme de 1 115 000 euros. Toutefois, pour tenir compte des éléments mentionnés ci-dessus au point 5. démontrant l'extrême complexité des opérations et eu égard à l'exécution désormais achevée de la dépollution par les autorités de l'Etat, il y a lieu de modérer l'astreinte prononcée antérieurement pour cette dernière période du 30 novembre 2021 au 19 décembre 2024 et de condamner l'Etat à verser à la commune du Fauga une somme limitée à 100 000 euros et à verser à la société de Labourdette une somme limitée à 100 000 euros, sans préjudice des liquidations provisoires d'astreintes déjà intervenues.
8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la société de Labourdette et la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Fauga au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : L'Etat versera à la société de Labourdette la somme de 100 000 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte prononcée par l'arrêt n° 16BX00976 du 18 octobre 2016 et modifié par l'arrêt n° 19BX03942 du 9 juillet 2019.
Article 2 : L'Etat versera à la commune du Fauga la somme de 100 000 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte prononcée par l'arrêt n° 19BX03342 du 9 juillet 2019.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la société de Labourdette et la somme de 1500 euros à la commune de Fauga au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société en nom collectif de Labourdette, à la commune du Fauga, au ministre de la transition écologique et solidaire, au ministre de l'intérieur et à la Société nationale des poudres et explosifs.
Il en sera adressé copie au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière, en application de l'article R. 921-7 du code de justice administrative.
Copie pour information en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Fabienne Zuccarello, présidente,
M. Nicolas Normand, président assesseur,
Mme Clémentine Voillemot, première conseillère,
Lu en audience publique, le 4 février 2025.
Le président-assesseur,
Nicolas Normand
La présidente-rapporteure,
Fabienne Zuccarello
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX03342, 19BX03942