Vu la requête enregistrée le 5 juillet 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 9 juillet 2012, présentée pour la SNC de Labourdette, dont le siège social est situé 109 avenue de Lespinet à Toulouse (31400), représentée par son représentant légal, par Me Salesse, avocat ;
La SNC de Labourdette demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 0702647 du 4 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a fixé à la somme de 110 640 euros, qu'elle estime insuffisante, la réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'état du terrain acquis par elle au sein de la zone d'aménagement concerté de la commune de Fauga ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme, augmentée des intérêts moratoires jusqu'à son règlement, de 2 339 634 euros hors taxe, correspondant à une évaluation provisoire de son préjudice au 31 décembre 2007 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le décret n° 76-225 du 4 mars 1976 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2013 :
- le rapport de M. Jean-Michel Bayle, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;
- les observations de Me Serdan, avocat de la SNC de Labourdette ;
1. Considérant que, par délibération du 6 juin 2003, le conseil municipal de Le Fauga a créé une zone d'aménagement concerté sur une unité foncière de 49 ha 34 a 35 ca, cadastrée section B n° 916, dont l'aménagement et l'équipement ont été confiés à la SNC de Labourdette par convention du 18 novembre 2003 ; que, par acte du 15 décembre 2003, la SNC de Labourdette a acquis ce terrain à la société anonyme " Société nationale des poudres et explosifs " (SNPE), à qui il avait été apporté par l'Etat le 1er décembre 1972 et qu'elle a utilisé pour une activité de stockage d'explosifs jusqu'en 1994 ; qu'à la suite de la découverte de munitions datant de la deuxième guerre mondiale au cours de travaux de terrassement, le 25 mars 2005, le maire de Le Fauga a interdit l'accès au terrain en cause, par arrêté du 30 mars 2005 ; que cette interdiction n'a été levée par arrêté du maire du 8 décembre 2005 que pour le personnel de la société propriétaire et pour tout intervenant dans le cadre de la gestion de la dépollution du site ; que la SNC de Labourdette n'a pu reprendre les travaux d'aménagement et d'équipement de la zone d'aménagement concerté, dans laquelle elle envisageait la création de 164 lots à bâtir ainsi que la construction de 23 maisons individuelles groupées et d'une résidence pour séniors ; qu'elle a demandé au préfet de la Haute-Garonne, par lettre du 23 août 2006, de faire procéder à la dépollution du site ; qu'à défaut de réponse expresse, la SNC de Labourdette a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du préfet de la Haute-Garonne et à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 2 339 634 euros hors taxe en réparation de divers préjudices, évalués au 31 décembre 2007, qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de cette décision ; que, par jugement du 4 mai 2012, le tribunal administratif a, d'une part, annulé la décision implicite par laquelle le préfet a rejeté la demande de dépollution, d'autre part, estimant que les entreprises qui étaient intervenues sur le chantier pour le compte de la SNC de Labourdette avaient contribué au retard à la réalisation de la dépollution, a admis la responsabilité de l'Etat seulement à hauteur de 50 % des préjudices dont il était demandé réparation, préjudices qu'il a évalués au montant total de 221 280 euros ; que la SNC de Labourdette demande la réformation de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses conclusions de plein contentieux ;
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la responsabilité :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 76-225 du 4 mars 1976 : " Sur l'ensemble du territoire national, la recherche, la neutralisation, l'enlèvement et la destruction des munitions, mines, pièges, engins et explosifs sont de la compétence : / Du ministre de l'intérieur, en tout temps, sur terrain civil, sous réserve des dispositions des articles 3 et 4 du présent décret... " ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise réalisée le 9 mai 2005, diligentée par la société " Société nationale des poudres et explosifs ", et il n'est d'ailleurs pas contesté par le ministre que le sol du terrain appartenant à la société requérante contient des munitions de guerre d'origine allemande et d'origine française, notamment des bombes, divers obus et munitions pour mortiers, des grenades à fusil et des fusées ; qu'eu égard à la nature de ces munitions et engins explosifs, le nettoyage du site relevait de la compétence des services de l'Etat, par application de l'article 2 du décret précité ; que, par suite, le refus du préfet de la Haute-Garonne de faire procéder à la dépollution pyrotechnique du terrain constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
4. Considérant qu'il résulte toutefois des éléments au dossier que le refus de l'autorité administrative trouve son fondement dans le coût très élevé d'une opération de dépollution compatible avec le projet d'aménagement, coût évalué à une somme globale de 3 200 000 euros par la SAS Pyrotechnis le 5 avril 2006 ; que, selon le rapport du chef du centre interdépartemental de déminage de Toulouse du 3 mai 2005 comme le devis établi par la SAS Pyrotechnis, les opérations de dépollution ont été rendues plus complexes et plus onéreuses de manière significative du fait de la dispersion des munitions et engins explosifs lors de l'arasement des merlons sous lesquels ils étaient enterrés, par les entreprises qui sont intervenues sur le site pour le compte de la SNC de Labourdette ; que, compte tenu du nombre de ces munitions et engins, initialement concentrés sous les merlons, les préposés n'ont pu ignorer leur présence, ainsi que l'a révélé d'ailleurs la pose d'une conduite neuve sur des obus mis à jour lors du creusement de la tranchée ; qu'eu égard aux conséquences du comportement de ces entreprises sur le coût de la dépollution, coût à l'origine du refus de l'autorité administrative, les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de droit en estimant que l'imprudence ou la négligence des contractants de la SNC de Labourdette étaient de nature à exonérer partiellement l'Etat de sa responsabilité ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'ils aient fait une appréciation excessive de la part de responsabilité qui demeure à charge de la SNC en la fixant à 50 % ;
En ce qui concerne les préjudices :
5. Considérant, en premier lieu, que la SNC de Labourdette soutient que, même si l'opération d'aménagement était menée à terme, seraient définitivement perdues les sommes de 269 000 euros hors taxe, de 43 000 euros hors taxe, de 44 000 euros hors taxe, de 49 000 euros hors taxe et de 375 000 euros hors taxe, correspondant respectivement à des frais financiers, arrêtés au 30 décembre 2006, à des dépenses de publicité, à des frais d'assurances et autres, au montant de travaux d'appui pour les premières investigations et aux frais d'ingénierie nécessaires pour relancer l'opération ; que, toutefois, les éléments au dossier ne permettent pas de relier les frais financiers invoqués, au demeurant non justifiés par une convention de prêt, à la réalisation de l'opération en cause ; que les dépenses de constitution de dossier comme les frais d'ingénierie pour la réalisation de l'aménagement ne peuvent être regardés comme ayant été exposés en pure perte ; que la SNC de Labourdette, dont l'activité a perduré et qui est demeurée propriétaire de l'unité foncière, ne saurait, en tout état de cause, réclamer le remboursement des taxes professionnelles et des taxes foncières auxquelles elle a été assujettie ; que, pour les mêmes motifs, elle ne peut prétendre à une indemnisation des dépenses d'assurance ; qu'il n'est pas justifié de frais d'ingénierie pour relancer l'opération d'aménagement et d'équipement de la zone d'aménagement concerté ; qu'il n'est pas établi par les pièces produites que la SNC de Labourdette aurait versé à l'entreprise Sesen la somme de 889 354 euros hors taxe et à l'entreprise Appia celle de 449 000 euros hors taxe ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC de Labourdette n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a arrêté à la somme de 110 640 euros le montant de la réparation qui lui est due par l'Etat ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont la SNC de Labourdette demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête susvisée présentée pour la SNC de Labourdette est rejetée.
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No 12BX01747