Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013.
Par un jugement n° 1800982 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif d'Orléans, d'une part, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête à concurrence du dégrèvement de 16 221 euros accordé en cours d'instance, d'autre part, a réduit la base d'imposition sur le revenu assignée à M. et Mme A... au titre de l'année 2012 d'une somme de 6 101 euros, a déchargé ces derniers, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 dans la mesure de cette réduction de la base d'imposition et, enfin, a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour avant cassation :
Par une requête, enregistrée le 31 mars 2020, M. et Mme A..., représentés par
Me Héry, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;
2°) de prononcer la décharge totale des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à leur charge, soit 61 051 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure d'imposition est irrégulière, en raison de l'absence d'obligation de la société à responsabilité limitée (SARL) La Lavandière de remettre au vérificateur des documents comptables informatisés, de son absence d'information à la suite de la mise en œuvre de la procédure de traitement informatique visée à l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, de l'application indue de la taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que du détournement de procédure que constitue la vérification de la comptabilité de la SARL ;
- le rejet de la comptabilité est entaché d'une grave irrégularité tirée de ce que l'administration a induit en erreur la SARL La Lavandière quant à l'étendue de ses obligations ;
- à aucun moment l'administration fiscale n'a établi que la SARL La Lavandière a, au cours des années 2012, 2013 et 2014, dissimulé des recettes ;
- la méthode de reconstitution des recettes de la SARL La Lavandière utilisée par l'administration est viciée ;
- les indemnités de déplacement versées par la SARL La Lavandière, au profit de son dirigeant et associé M. A..., répondaient aux conditions prévues par la législation pour être admises en déduction du résultat fiscal ;
- les factures de gaz et d'électricité de la maison de Cangey concernent des garages servant de bâtiments de stockage et de réparation à une trentaine de machines et constituent des frais professionnels ;
- les apports en compte courant d'associés effectués par M. A... sous forme de liquidités ne constituent pas un passif injustifié.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour, d'une part, de rejeter la requête et, d'autre part, par la voie de l'appel incident, d'annuler les articles 2 et 3 du jugement attaqué et de prononcer en conséquence le rétablissement de la somme de 5 748 euros, droits et pénalités compris, au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2012.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés ;
- la diminution du profit de taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de 6 101 euros conduit à diminuer à due concurrence la cascade de taxe sur la valeur ajoutée, ce qui n'entraîne aucune modification dans le résultat net imposable rectifié, ce qui doit emporter le rétablissement de l'imposition des revenus industriels et commerciaux de M. et Mme A... sur un bénéfice imposable de 158 214 euros avant majoration de 1,25.
Par un arrêt n° 20NT01163 du 7 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a prononcé la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu dus au titre de l'année 2013, résultant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour les mois d'avril, mai, juillet, août, octobre et novembre 2013 réclamés à la société La Lavandière et inclus dans la détermination de son bénéfice imposable par le biais du profit sur le Trésor, rejeté le surplus des conclusions d'appel et, sur appel incident du ministre de l'économie, des finances et de la relance, remis à la charge de M. et Mme A... les suppléments d'impôt sur le revenu dus au titre de l'année 2012.
Par une décision n° 458988 du 17 octobre 2022 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé les articles 1er et 4 de l'arrêt du 7 octobre 2021 en tant qu'ils portent sur l'année 2013, puis a renvoyé dans cette mesure devant la cour l'affaire, qui porte désormais le n° 22NT03363.
Procédure devant la cour après cassation :
Par un mémoire enregistré le 12 janvier 2023, le ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Le ministre soutient que la décharge d'une partie des rappels de taxe sur la valeur ajoutée opérés au titre de l'année 2013 ne modifie pas le bénéfice industriel et commercial net imposable rectifié de la SARL La Lavandière imposable à l'impôt sur le revenu des époux A... dès lors que la diminution du profit de taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de 6 467 euros conduit automatiquement à diminuer à due concurrence du même montant la cascade de taxe sur la valeur ajoutée, ce qui n'entraîne donc aucune modification dans le résultat net imposable rectifié, qui est toujours en l'espèce de 8 699 euros.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Viéville,
- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... sont associés, à hauteur de 50 % chacun, de la SARL La Lavandière. Celle-ci a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a rejeté sa comptabilité et lui a notifié des rehaussements de ses bases imposables au titre des exercices clos les 31 décembre 2012 et 31 décembre 2013, imposables au titre de l'imposition à l'impôt sur le revenu de M. et Mme A..., et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014. Sur la base de ces redressements, l'administration a rectifié les bénéfices industriels et commerciaux de M. et Mme A.... Par un jugement du 28 janvier 2020, le tribunal administratif d'Orléans a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer partiel à concurrence d'un dégrèvement accordé en cours d'instance et, d'autre part, partiellement déchargé M. et Mme A... de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012. Par un arrêt du 7 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a déchargé les intéressés des suppléments d'impôt sur le revenu résultant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour les mois d'avril, mai, juillet, août, octobre et novembre 2013 réclamés à la SARL La Lavandière, qui avaient été inclus dans la détermination de leur bénéfice imposable par le biais du profit sur le Trésor, rejeté le surplus des conclusions de leur appel et, sur appel incident du ministre de l'économie, des finances et de la relance, remis à leur charge les suppléments d'impôt sur le revenu dus au titre de l'année 2012 et, réformé le jugement en tant qu'il était contraire à son arrêt. Par une décision n° 458988 du 17 octobre 2022 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé les articles 1er et 4 de l'arrêt de la cour du 7 octobre 2021, puis a renvoyé dans cette mesure l'affaire devant la cour.
2. D'une part, aux termes de l'article 287 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration. / 2. Les redevables soumis au régime réel normal d'imposition déposent mensuellement la déclaration visée au 1 indiquant, d'une part, le montant total des opérations réalisées, d'autre part, le détail des opérations taxables. La taxe exigible est acquittée tous les mois. / Ces redevables peuvent, sur leur demande, être autorisés, dans des conditions qui sont fixées par arrêté du ministre de l'économie et des finances, à disposer d'un délai supplémentaire d'un mois. / Lorsque la taxe exigible annuellement est inférieure à 4 000 euros, ils sont admis à déposer leurs déclarations par trimestre civil (...) ". Il résulte de ces dispositions que le seuil de taxe exigible de 4 000 euros en dessous duquel un redevable est admis à déposer ses déclarations par trimestre civil, par exception à l'obligation de déclaration mensuelle, s'apprécie au début de chaque trimestre par rapport au montant total de la taxe exigible les quatre trimestres civils précédents.
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ; (...) ".
4. Il n'est pas contesté que la société a déposé, au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013, des déclarations trimestrielles de taxe sur la valeur ajoutée. Le service a estimé, dans la proposition de rectification du 16 décembre 2015, que la SARL La Lavandière ne respectait plus, depuis le 2ème trimestre 2013, la condition du plafond de 4 000 euros de taxe sur la valeur ajoutée exigible annuellement en application de l'article 287 du code général des impôts et devait, par suite, déposer des déclarations mensuelles à compter de cette date, soit le mois d'avril 2013. Cependant, il résulte de l'instruction que le seuil de 4 000 euros n'a été atteint qu'au cours du deuxième trimestre 2013. Le seuil de taxe exigible de 4 000 euros qui s'apprécie au début de chaque trimestre par rapport au montant total de la taxe exigible sur les quatre trimestres civils précédents, ne permettait de mettre en œuvre la procédure de taxation d'office qu'à compter du mois de juillet 2013, c'est-à-dire au début du trimestre au cours duquel la SARL La Lavandière aurait dû constater le dépassement du seuil de taxe exigible au cours des quatre trimestres précédents et déposer mensuellement ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, M. et Mme A... sont seulement fondés à soutenir que la procédure de taxation d'office a été appliquée à tort pour les mois d'avril et de mai 2013 et qu'ils ne sont pas redevables d'un supplément d'imposition à l'impôt sur le revenu correspondant au rappel de taxe sur la valeur ajoutée notifié à la SARL La Lavandière pour les mois d'avril et de mai 2013.
5. Toutefois, aux termes de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales : " En cas de vérification simultanée des taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées, de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, le supplément de taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées afférent à un exercice donné est déduit, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, des résultats du même exercice, sauf demande expresse des contribuables, formulée dans le délai qui leur est imparti pour répondre à la proposition de rectification. (...) Les demandes que les contribuables peuvent présenter au titre des troisième et quatrième alinéas doivent être faites au plus tard dans le délai de trente jours consécutif à la réception de la réponse aux observations prévue à l'article L. 57 ou, à défaut, d'un document spécifique les invitant à formuler lesdites demandes. (...) ".
6. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification adressée à la SARL La Lavandière que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée notifiés à cette société au titre des mois d'avril et de mai 2013 ont été déduits, en application des dispositions de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales rappelées ci-dessus, du résultat imposable de l'exercice auquel ils se rapportent. La société vérifiée n'a en effet pas renoncé, dans le délai de trente jours à compter de la réception de la proposition de rectification, au bénéfice de la déduction en cascade des rappels de taxe sur la valeur ajoutée prévue par les dispositions de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales. Ainsi, la réduction à concurrence de 6 467 euros du profit sur le trésor correspondant au rappel de taxe sur la valeur ajoutée notifié à la SARL La Lavandière pour les mois d'avril et de mai 2013 a correspondu, en application de la cascade de taxe sur la valeur ajoutée, à la réduction du même montant de la taxe sur la valeur ajoutée déduite du bénéfice industriel et commercial pour la détermination de l'assiette de l'impôt sur le revenu. Par suite, le bénéfice industriel et commercial rectifié de la SARL La Lavandière imposable à l'impôt sur le revenu des époux A... de l'année 2013 n'a pas été modifié. Dès lors, les conclusions à fins de décharge de M. et Mme A... doivent être rejetées.
7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 4 du jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus de leur demande.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Mme C... D... épouse A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Penhoat, premier conseiller,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2023.
Le rapporteur
S. VIÉVILLELe président de chambre
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22NT0336302
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