Vu la procédure suivante :
M. I... E... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) la somme de 753 322,68 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis au centre hospitalier d'Aurillac. Par un jugement n° 1601454 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18LY03992 du 9 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par M. E... contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 9 septembre et 10 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. E... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteure publique.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. E... et à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une endartériectomie de la carotide droite pratiquée en juin 2005 au centre hospitalier d'Aurillac, M. E... a été atteint d'un accident vasculaire cérébral dont lui sont demeurées de graves séquelles invalidantes. Il a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande tendant à la réparation de ses préjudices par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de la solidarité nationale, en invoquant la survenance d'un accident médical non fautif. Il se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 9 juillet 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel dirigé contre le jugement du 18 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.
2. Aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. " L'article D. 1142-1 du même code définit le seuil de gravité prévu par ces dispositions.
3. Il résulte de ces dispositions que l'ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation de dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état. La condition d'anormalité du dommage prévue par ces dispositions doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible. Pour apprécier le caractère faible ou élevé du risque dont la réalisation a entraîné le dommage, il y a lieu de prendre en compte la probabilité de survenance d'un événement du même type que celui qui a causé le dommage et entraînant une invalidité grave ou un décès.
4. Il résulte des termes de son arrêt que, pour rejeter les conclusions tendant à l'indemnisation par l'ONIAM au titre de la solidarité nationale, la cour administrative d'appel a jugé que la survenance du dommage subi par M. E... ne présentait pas une probabilité faible au sens des règles énoncées au point précédent, dès lors qu'il résultait des indications données par les experts que le risque d'un accident vasculaire cérébral post-opératoire immédiat chez les patients atteints, comme en l'espèce, d'une sténose carotidienne symptomatique, était de l'ordre de 5 %, et qu'en outre, ce risque était légèrement plus important chez M. E... en raison de l'état initial du patient. En retenant qu'une telle probabilité, qui, appréciée dans les conditions rappelées au point précédent, n'était pas inférieure ou égale à 5%, ne présentait pas le caractère d'une probabilité faible, de nature à justifier la mise en œuvre de la solidarité nationale, elle n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de qualification juridique.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Il y a lieu, par suite, de rejeter son pourvoi, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par l'ONIAM.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. E... ainsi que les conclusions de l'ONIAM présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. I... E... et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Délibéré à l'issue de la séance du 20 octobre 2021 où siégeaient : M. Christophe Chantepy, président de la section du contentieux, présidant ; M. Denis Piveteau, président de chambre ; Mme N... J..., M. M... B..., Mme F... L..., M. D... H..., M. A... K... et M. Jean-Dominique Langlais, conseillers d'Etat et M. Alain Seban, conseiller d'Etat, rapporteur.
Rendu le 30 novembre 2021.
Le président :
Signé : M. Christophe Chantepy
Le rapporteur :
Signé : M. Alain Seban
Le secrétaire :
Signé : M. C... G...