Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 à 2007. Par un jugement n° 1405093 du 17 mars 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 16BX01622 du 27 septembre 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a prononcé la décharge des impositions en litige.
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 12 novembre 2018 et le 15 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Christelle Thomas, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Zribi et Texier, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une proposition de rectification en date du 9 février 2012, l'administration a mis à la charge de M. et Mme A... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2003 à 2007 à raison de rehaussements opérés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Elle a fait application du délai spécial de reprise prévu à l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, alors en vigueur, au motif que l'insuffisance d'imposition en litige, relative à l'absence de déclaration des sommes créditées sur un des comptes bancaires ouverts au nom de M. A..., qu'elle a regardées comme provenant de détournements de fonds opérés par ce dernier, avait été révélée par l'instance ouverte en 2011 contre M. A... devant le tribunal de grande instance de Bordeaux. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 27 septembre 2018 par lequel la cour administrative de Bordeaux a prononcé la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2003 à 2007 à raison de ce redressement.
2. En vertu du premier alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, le droit de reprise de l'administration s'exerce, pour l'impôt sur le revenu, jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Toutefois, aux termes de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 188 C du même livre : " Même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ". Des insuffisances ou omissions d'imposition ne peuvent pas être regardées comme révélées par une instance devant les tribunaux au sens de cet article lorsque l'administration dispose d'éléments suffisants lui permettant, par la mise en oeuvre des procédures d'investigation dont elle dispose, d'établir ces insuffisances ou omissions d'imposition dans le délai normal de reprise prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'occasion d'un contrôle des déclarations souscrites par M. et Mme A... au titre de l'impôt sur la fortune, l'administration fiscale a eu connaissance, en 2007, de ce que M. A... était titulaire d'un compte au Crédit mutuel et a été informée du solde de ce compte au 1er janvier des années 2003 à 2006. En en déduisant que l'administration disposait, dès cette date, d'éléments qui lui auraient permis, en mettant en oeuvre ses pouvoirs de contrôle et d'investigation, de connaître l'origine et l'utilisation des fonds portés au crédit de ce compte et d'ainsi procéder aux rectifications litigieuses dans le délai normal de reprise, sans rechercher si ces informations, alors qu'elles ne pouvaient porter que sur le solde des comptes bancaires du contribuable au 1er janvier des années d'imposition contrôlées et non sur les opérations réalisées sur ces comptes dès lors qu'était en cause un contrôle en matière d'impôt de solidarité sur la fortune, étaient suffisantes pour soupçonner l'absence de déclaration des sommes figurant sur ce compte, la cour administrative d'appel de Bordeaux a entaché son arrêt d'erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DECIDE :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 27 septembre 2018 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. B... A....