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27/09/2018 | FRANCE | N°16BX01622

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 27 septembre 2018, 16BX01622


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de lui accorder la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2003 à 2007.

Par un jugement n° 1405093 du 17 mars 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 13 mai 2016 et le 26 juin 2017, M. A..., représenté par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du

tribunal administratif de Bordeaux du 17 mars 2016 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de lui accorder la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2003 à 2007.

Par un jugement n° 1405093 du 17 mars 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 13 mai 2016 et le 26 juin 2017, M. A..., représenté par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 17 mars 2016 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration ne pouvait imposer les résultats d'une prétendue activité relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux sans procéder à une vérification de comptabilité ; l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales est inapplicable au cas d'espèce, la prétendue activité n'étant pas occulte : d'une part, l'administration était informée depuis 2007 de l'existence du compte " Coto de Astudillo " et des sommes ayant transité par ce compte, d'autre part, le contribuable pouvait légitimement penser qu'il n'avait pas à déclarer une activité imposable puisque son rôle se bornait à centraliser sur ce compte les sommes ayant servi au fonctionnement d'un " club " de chasse au bénéfice d'un ensemble de chasseurs, enfin des soi-disant détournements de fonds ne constituent pas une activité ;

- l'administration n'a pu légalement procéder à l'imposition des sommes créditées sur ledit compte bancaire sans corroborer les éléments recueillis au moyen de l'exercice de son droit de communication par des éléments propres à la situation du contribuable, notamment son train de vie ;

- l'administration a eu connaissance dès 2007, dans le cadre d'un contrôle au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune, de l'existence du compte " Coto de Astudillo " ainsi que des sommes portées sur ce compte qui sont à l'origine des rehaussements ; elle n'a pas obtenu par l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire les relevés afférents à ce compte, relevés qui ont été produits sept mois auparavant par le contribuable dans le cadre de l'ESFP ; dès lors, les omissions ou insuffisances d'imposition n'ont pas été révélées par l'instance judiciaire, ce qui fait obstacle à ce que l'administration puisse se prévaloir du droit de reprise étendu prévu par l'article L. 170 du livre des procédures fiscales ; la prescription est donc acquise pour les années 2003 à 2007 en litige, la proposition de rectification étant du 9 février 2012 ;

- les sommes créditées sur le compte " Coto de Astudillo " ne sont pas imposables : ces sommes ont seulement transité par ce compte, créé par le contribuable en tant que simple intermédiaire, en vue d'assurer le financement des dépenses de fonctionnement du domaine de chasse géré par une autre personne, et ce, dans un cadre purement privé ; ces sommes correspondent à des versements librement consentis par des personnes privées et non à des détournements de fonds ;

- à supposer même que ces sommes soient imposables, elles ne pourraient être imposées, s'agissant d'une activité d'entremise en matière de chasse ou de co-exploitation d'un domaine de chasse, que dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et non dans celle des bénéfices non commerciaux ;

- seul le bénéfice net étant imposable, il convient en tout état de cause de déduire des sommes créditées sur le compte les dépenses ayant permis le fonctionnement de la chasse, dépenses indiquées par le gestionnaire du domaine lui-même ;

- la majoration de 10 % prévue par l'article 1758 A du code général des impôts ne s'appliquant qu'à des droits supplémentaires, elle ne peut s'appliquer à des impositions initiales établies dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

Par des mémoires enregistrés les 21 octobre 2016 et 12 juillet 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués par M. A...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 9 juin 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 17 juillet 2017 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.D...,

- les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public,

- et les observations de Me E...et de MeC..., représentant M. A..., qui a lui-même présenté des observations.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti avec son épouse au titre des années 2003 à 2007 à raison de rehaussements opérés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Ces rehaussements correspondent à des sommes créditées sur un des comptes bancaires dont était titulaire le contribuable au Crédit mutuel, sommes que l'administration a regardées comme provenant de détournements de fonds.

2. En vertu du premier alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, le droit de reprise de l'administration s'exerce, pour l'impôt sur le revenu, jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Toutefois, aux termes de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux années litigieuses, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 188 C du même livre : " Même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ".

3. Des insuffisances ou omissions d'imposition ne peuvent pas être regardées comme révélées par une instance devant les tribunaux au sens de cet article lorsque l'administration dispose d'éléments suffisants lui permettant, par la mise en oeuvre des procédures d'investigations dont elle dispose, d'établir ces insuffisances ou omissions d'imposition dans le délai normal de reprise prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales. Il en va également ainsi lorsque, à la date à laquelle l'administration dispose de ces informations, le délai prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales est expiré et qu'elle n'est plus en mesure, sur ce seul fondement, de réparer les insuffisances et omissions d'imposition.

4. Il résulte de l'instruction que M. A...et son épouse ont fait l'objet en 2007 d'un contrôle de leurs déclarations au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune. A l'occasion de ce contrôle, le vérificateur a notamment adressé aux contribuables une demande de renseignements, datée du 20 février 2007, portant sur l'ensemble des comptes bancaires dont ils étaient titulaires. Parmi les comptes mentionnés dans cette demande figurait celui sur lequel étaient créditées les sommes que l'administration a qualifiées par la suite de détournements de fonds. L'administration, qui avait ainsi, dès 2007, connaissance de ce que M. A...était titulaire de ce compte et qui l'avait interrogé sur son utilisation, disposait dès cette époque d'éléments qui lui auraient permis, en mettant en oeuvre ses pouvoirs de contrôle et d'investigation, de connaître l'origine et l'utilisation des fonds portés au crédit de ce compte, en provenance de diverses entreprises, et de déterminer, le cas échéant, le caractère imposable de ces sommes au regard de l'impôt sur le revenu. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration n'aurait pu procéder aux redressements litigieux dans le délai normal de reprise et que les insuffisances d'imposition à l'origine de ces redressements ont été révélées, au sens des dispositions précitées de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, par la procédure judiciaire engagée à l'encontre de M. A...en 2011. Par suite, l'administration ne peut se prévaloir de ces dispositions. Le délai normal de reprise étant expiré pour les années 2003 à 2007 en litige lorsque la proposition de rectification du 9 février 2012, premier acte interruptif de prescription, a été adressée aux contribuables, M. A...est fondé à demander la décharge des impositions contestées.

5. Il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'allouer une somme de 1 500 euros à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 17 mars 2016 est annulé.

Article 2 : Il est accordé décharge à M. et Mme A...des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2003 à 2007.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 30 août 2018 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 27 septembre 2018.

Le président-assesseur,

Laurent POUGETLe président-rapporteur,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N° 16BX01622


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01622
Date de la décision : 27/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-04 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Prescription.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Aymard DE MALAFOSSE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : FIDAL MERIGNAC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-09-27;16bx01622 ?
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