La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/03/2006 | FRANCE | N°269441

France | France, Conseil d'État, 1ere et 6eme sous-sections reunies, 08 mars 2006, 269441


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juillet et 27 octobre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, dont le siège est Centre de gestion des pensions, rue du Vergne à Bordeaux cedex (33059) ; la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 8 avril 2004 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé sa décision du 25 mars 2003 rejetant la demande de M. Christian X tendant à la révision de sa pension de retraite afin de bénéfici

er d'une année de bonification d'ancienneté par enfant au titr...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juillet et 27 octobre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, dont le siège est Centre de gestion des pensions, rue du Vergne à Bordeaux cedex (33059) ; la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 8 avril 2004 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé sa décision du 25 mars 2003 rejetant la demande de M. Christian X tendant à la révision de sa pension de retraite afin de bénéficier d'une année de bonification d'ancienneté par enfant au titre du b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité de Rome instituant la Communauté économique européenne, devenue la Communauté européenne, notamment son article 141 ;

Vu le traité sur l'Union européenne et les protocoles qui y sont annexés ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu l'ordonnance n° 45 ;993 du 17 mai 1945 ;

Vu la loi n° 2003 ;775 du 21 août 2003 ;

Vu le décret n° 65 ;773 du 9 septembre 1965 ;

Vu le décret n° 2003 ;1306 du 26 décembre 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Michel Delpech, chargé des fonctions de Maître des requêtes,

- les observations de Me Odent, avocat de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS,

- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le régime de retraite des fonctionnaires territoriaux n'est pas régi par le code des pensions civiles et militaires de retraite mais par le décret du 9 septembre 1965 auquel s'est substitué, à compter du 1er janvier 2004, le décret du 26 décembre 2003 ; que, par suite, en se fondant sur les dispositions du b) de l'article L. 12 de ce code pour estimer que la décision refusant à M. X le bénéfice d'une année d'ancienneté par enfant était entachée d'illégalité, le tribunal administratif de Montpellier a entaché son jugement d'une erreur de droit ; qu'il suit de là que la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS est fondée à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne : « 1. Chaque Etat membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. 2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d'une même unité de mesure ; b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail » ; que les pensions servies par le régime français de retraite des fonctionnaires, notamment celles servies aux fonctionnaires territoriaux, entrent dans le champ d'application de ces stipulations ; que, nonobstant les stipulations de l'article 6, paragraphe 3, de l'accord annexé au protocole n° 14 sur la politique sociale joint au traité sur l'Union européenne, le principe de l'égalité des rémunérations s'oppose à ce qu'une bonification, pour le calcul d'une pension de retraite, accordée aux personnes qui ont assuré l'éducation de leurs enfants, soit réservée aux femmes, alors que les hommes ayant assuré l'éducation de leurs enfants seraient exclus du bénéfice de cette mesure ;

Considérant que le 3° du I de l'article 11 du décret du 9 septembre 1965, pris sur le fondement de l'ordonnance du 17 mai 1945, instituait, pour le calcul de la pension des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), une bonification d'ancienneté d'un an par enfant ; que les dispositions de ce décret selon lesquelles le bénéfice de cette bonification était réservé aux « femmes fonctionnaires » étaient incompatibles avec le principe de l'égalité des rémunérations rappelé ci ;dessus ; que ces dispositions ont toutefois été remplacées, par l'effet du I de l'article 48 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, rendu applicable, en vertu de l'article 40 de la même loi, aux fonctionnaires affiliés à la CNRACL, par un dispositif accordant une bonification d'un an par enfant aux fonctionnaires des deux sexes, à condition qu'ils aient interrompu leur activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ;

Considérant, en second lieu, que le II de l'article 48 de la loi précitée, également applicable aux fonctionnaires affiliés à la CNRACL en vertu de l'article 40 de cette même loi, a prévu que les nouvelles règles définies au I de l'article 48 s'appliqueraient aux pensions liquidées à compter du 28 mai 2003 ; qu'il est constant que la pension de M. X a été liquidée à compter du 1er décembre 2003 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X, qui ne soutient pas satisfaire aux conditions d'interruption d'activité prévues au I de l'article 48 et au 2° du I de l'article 15 du décret du 26 décembre 2003, n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision en date du 25 mars 2003 par laquelle le directeur général de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS lui a refusé le bénéfice de bonification d'ancienneté d'un an par enfant au titre de la pension de la CNRACL qui a été liquidée à compter du 1er décembre 2003 ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 8 avril 2004 est annulé.

Article 2 : La demande de M. X visant à l'annulation de la décision du directeur général de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS du 25 mars 2003 est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, à M. Christian X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 08 mar. 2006, n° 269441
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Michel Delpech
Rapporteur public ?: M. Devys
Avocat(s) : ODENT

Origine de la décision
Formation : 1ere et 6eme sous-sections reunies
Date de la décision : 08/03/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 269441
Numéro NOR : CETATEXT000008245514 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-03-08;269441 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award