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03/02/2010 | FRANCE | N°08-18196

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 03 février 2010, 08-18196


Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 1304 et 2262 du code civil, ce dernier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;
Attendu que la nullité d'un testament-partage incluant des biens dont l'ascendant n'a pas la propriété et la libre disposition, qui ne peut être invoquée que par ceux dont les intérêts particuliers ont été atteints, est une nullité relative soumise à la prescription abrégée du premier de ces textes ;
Attendu que Paul-Toussaint X... est décédé le 9 avril 1987, en laissant pour lui succéder s

on épouse, Nicoletta Y..., avec laquelle il était marié sous le régime de la ...

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 1304 et 2262 du code civil, ce dernier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;
Attendu que la nullité d'un testament-partage incluant des biens dont l'ascendant n'a pas la propriété et la libre disposition, qui ne peut être invoquée que par ceux dont les intérêts particuliers ont été atteints, est une nullité relative soumise à la prescription abrégée du premier de ces textes ;
Attendu que Paul-Toussaint X... est décédé le 9 avril 1987, en laissant pour lui succéder son épouse, Nicoletta Y..., avec laquelle il était marié sous le régime de la communauté de meubles et acquêts, et les quatre enfants issus de leur union, Marie-Dominique, Robert, Jeanine et Paulette et en l'état d'un testament-partage du 24 juin 1985, rectifié le 13 novembre 1985, attribuant, notamment, à Robert et Jeanine la maison familiale ainsi que des parcelles de terres, à Marie-Dominique et Paulette la somme de 15 244, 90 euros chacune et à Paulette un terrain " de sa mère " ; que Nicoletta Y..., veuve X..., est décédée le 16 juillet 1990 en l'état d'un testament authentique du 23 juin 1986 léguant à Paulette une parcelle de terre ; qu'un jugement du 3 octobre 2000 a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions de Paul-Toussaint X... et de Nicoletta Y..., veuve X... ; que Robert X... est décédé sans postérité le 9 février 2004 en l'état d'un testament olographe instituant sa soeur Jeanine légataire universelle ; que Mmes Marie-Dominique X..., épouse Y... et Paulette X..., épouse Y..., ont invoqué la nullité du testament-partage incluant des deniers communs et un bien appartenant en propre à leur mère ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale invoquée par Mme Jeanine X..., l'arrêt attaqué énonce que l'article 1304 du code civil n'est pas applicable à l'action en nullité d'un testament-partage, laquelle est soumise à la prescription trentenaire ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a, par refus d'application du premier et fausse application du second, violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen et sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a infirmé le jugement ayant validé le testament-partage de Paul-Toussaint X... en date des 24 juin et 13 novembre 1985, rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en nullité du testament-partage, dit que le testament de Paul Toussaint X... des 24 juin et 13 novembre 1985 est nul et qu'il ne peut recevoir exécution, l'arrêt rendu le 21 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bastia, autrement composée ;
Condamne Mmes Marie Dominique X..., épouse Y..., et Mme Paulette X..., épouse Y..., aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux conseils pour Mme Jeannine X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en nullité du testament partage de Paul-Toussaint X... en date des 24 juin 1985 et 13 novembre 1985 ;
AUX MOTIFS QUE Marie-Dominique X... épouse Y... soutient que le testament-partage de Paul-Toussaint X... en date des 24 juin 1985 et 13 novembre 1985 est nul ; que Jeanine lui oppose la prescription quinquennale de l'action en nullité ; mais que l'article 1304 du Code civil qui dispose que dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans, n'est pas applicable à l'action en nullité d'un testament partage, laquelle est soumise à la prescription trentenaire ; que la fin de non-recevoir tirée de la prescription doit donc être rejetée ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'action en nullité d'un testament partage, comme celle de tout testament, se prescrit par cinq ans lorsqu'elle est relative et par trente ans lorsqu'elle est absolue ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel ne pouvait donc se borner à affirmer que l'action en nullité entachait un testament partage pour écarter la prescription quinquennale au profit de la prescription trentenaire sans préciser la nature de la nullité prétendument encourue ; que la Cour d'appel a ainsi privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1304 et 2262 (dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008) du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que la nullité alléguée du testament-partage de feu Paul-Toussaint X... trouvait prétendument sa cause dans les attributions faites à Marie-Dominique et Paulette de sommes d'argent, déclarées biens communs, et à Paulette, d'un terrain « de sa mère » ; que la nullité encourue était donc une nullité relative de protection d'intérêts privés soumise à la prescription quinquennale ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 1304 du Code civil par refus d'application et l'article 2262 (dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008) du même Code par fausse application.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré nul le testament partage de Paul-Toussaint X... en date des 24 juin 1985 et 13 novembre 1985 ;
AUX MOTIFS QUE, par testament partage des 24 juin 1985 et 13 novembre 1985, Paul-Toussaint X... avait notamment attribué à Robert et Jeanine la maison d'habitation sise..., commune de Serra di Fiumorbo, ainsi que des parcelles de terre, Marie-Dominique et Paulette devant recevoir chacune en contrepartie la somme de 15. 244, 90 € et cette dernière recevant en outre un terrain appartenant à sa mère ; qu'il avait précisé que ledit testament aurait effet au jour du décès du dernier survivant des époux (arrêt, p. 4 alinéa 1er) ; qu'il ressort du rapport d'expertise que les époux X...
Y... étaient mariés sous le régime de la communauté des meubles et acquêts et que « la masse indivise partageable comprend un actif immobilier propre à l'époux et un actif mobilier commun » ; que, dans son testament partage des 24 juin 1985 et 13 novembre 1985, Paul – Toussaint X... a partagé certains des immeubles entre ses enfants mais qu'il a aussi notamment dit que ses filles Marie Dominique et Paulette, exclues du partage de la maison familiale, seraient « dédommagées chacune par une somme d'argent de dix millions de centimes » et que Paulette serait « compensée sur les terrains de sa mère » ; que le testament partage litigieux inclut des meubles communs et des biens propres de l'épouse non définis, alors que la faculté accordée aux ascendants de faire par anticipation le partage de leur succession est limitée aux biens dont chacun d'eux a la propriété et la libre disposition ; que dès lors ce testament partage est nul et ne peut recevoir exécution ; (…) ; que Jeanine X... produit aux débats un testament authentique de Nicoletta Y... épouse X..., daté du 23 juin 1986, et par lequel celle-ci lègue à titre particulier à sa fille Paulette une parcelle de terre sise sur le territoire de la commune de Serra di Fiumorbo, lieudit ..., cadastrée section B n° 477 ; mais que les parties ne concluent pas sur cette pièce en contradiction avec les conclusions du rapport d'expertise selon lequel la parcelle dont s'agit aurait été un bien propre de feu Paul-Toussaint X... ; que l'exécution de ce testament, non réclamée, ne doit donc pas être ordonnée (arrêt, p. 5) ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QUE la Cour d'appel ne pouvait retenir que la clause du testament partage de Paul-Toussaint X... des 24 juin 1985 et 13 novembre 1985 stipulant que Paulette serait « compensée sur les terrains de sa mère » était nulle, sans s'expliquer sur la volonté clairement exprimée par cette dernière, Nicoletta Y... épouse X..., d'avantager Paulette par un legs d'une parcelle déterminée, aux termes du testament authentique du 23 juin 1986, venant ainsi compléter le testament partage de son mari ou, en toute hypothèse, si la propriété de la parcelle litigieuse s'avérait être celle de son mari, sur la volonté évidente de ce dernier d'en allotir Paulette ; que la Cour d'appel a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles 1071, 1075 et 1079 du Code civil ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE l'héritier légataire, en vertu de la saisine légale, n'a pas à demander la délivrance de son legs ; qu'en l'espèce, il importait dès lors peu que l'exécution du testament authentique du 23 juin 1986 n'ait pas été réclamée en justice par sa bénéficiaire, Paulette X..., épouse Y..., partie défaillante dans l'instance en nullité du seul testament partage de Paul-Toussaint X... des 24 juin 1985 et 13 novembre 1985 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 1004 du Code civil ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE, si le testament partage constitue avant tout un partage, il constitue aussi une libéralité en faveur de ses bénéficiaires, lesquels sont à la fois héritiers et légataires ; que l'ascendant peut donc librement disposer aussi en leur faveur de sa part dans la communauté dans les conditions prévues à l'article 1423 du Code civil ; qu'en l'espèce, en affirmant le contraire et en déclarant en conséquence nulle la clause stipulant que Marie-Dominique et Paulette, exclues du partage de la maison familiale, seraient « dédommagées chacune par une somme d'argent de dix millions de centimes » qui était à prendre sur les biens communs, la Cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles 1021, 1075, 1079 et 1423 du Code civil ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE le testament partage a pour objet de répartir les biens selon la volonté de l'ascendant testateur et que, seules, doivent en être déclarées nulles les conditions impossibles ou contraires aux lois et aux bonnes moeurs ; qu'en ne recherchant pas si, nonobstant la nullité éventuelle des conditions stipulées en faveur de Marie-Dominique et Paulette, il y avait lieu de faire produire effet à la volonté principale de Paul-Toussaint X..., clairement exprimée le 24 juin 1985 et à nouveau réitérée le13 novembre 1985, d'allotir Jeanine X... de la maison familiale, la Cour d'appel a violé les articles 1075 et 900 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-18196
Date de la décision : 03/02/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

TESTAMENT-PARTAGE - Objet - Bien dont le testateur a la propriété et la libre disposition - Portée

PRESCRIPTION CIVILE - Prescription quinquennale - Article 1304, alinéa 1er, du code civil - Domaine d'application - Nullité d'un testament-partage incluant des biens dont l'ascendant n'a pas la propriété et la libre disposition

La nullité d'un testament-partage incluant des biens dont l'ascendant n'a pas la propriété et la libre disposition, qui ne peut être invoquée que par ceux dont les intérêts particuliers ont été atteints, est une nullité relative soumise à la prescription abrégée de l'article 1304 du code civil


Références :

ARRET du 21 mai 2008, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile 1, 21 mai 2008, 06/366
articles 1304 et 2262 du code civil, ce dernier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 21 mai 2008

Sur l'application de l'article 1304, alinéa 1er, à d'autres actes unilatéraux, à rapprocher :1re Civ., 11 janvier 2005, pourvoi n° 01-13133, Bull. 2005, I, n° 23 (cassation). Sur le régime de la prescription applicable à un testament-partage, en sens contraire :Civ., 25 novembre 1857, Bull. 1857, n° 84 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 03 fév. 2010, pourvoi n°08-18196, Bull. civ. 2010, I, n° 35
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, I, n° 35

Composition du Tribunal
Président : M. Pluyette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Legoux
Rapporteur ?: Mme Bignon
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.18196
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