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22/06/2023 | FRANCE | N°22PA00728

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 22 juin 2023, 22PA00728


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 24 février 2021 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a ordonné son transfert de la maison centrale de Clairvaux vers le centre pénitentiaire de Lille Sequedin.

Par un jugement n° 2110556/6-2 du 14 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 février 2022, le garde des sceaux, ministre de la jus

tice demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2110556/6-2 du 14 décembre 2021 du tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 24 février 2021 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a ordonné son transfert de la maison centrale de Clairvaux vers le centre pénitentiaire de Lille Sequedin.

Par un jugement n° 2110556/6-2 du 14 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 février 2022, le garde des sceaux, ministre de la justice demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2110556/6-2 du 14 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la requête de M. A....

Il soutient que :

- il était compétent pour prendre la décision contestée en application de l'article D. 300 du code de procédure pénale dès lors qu'il s'agit d'un transfèrement administratif ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 février 2023, M. A..., représenté par Me Ciaudo, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du garde des sceaux, ministre de la justice, le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 décembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- la loi du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gobeill,

- et les conclusions de M. Doré, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 24 février 2021, le garde des sceaux, ministre de la justice, a affecté M. A..., auparavant détenu à la maison centrale de Clairvaux, au centre pénitentiaire de Lille Sequedin dans son quartier maison d'arrêt. Le garde des sceaux, ministre de la justice relève appel du jugement du 14 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris, saisi à cette fin par M. A..., a annulé cette décision.

2. Aux termes des dispositions de l'article D. 82 du code de procédure pénale dans sa version alors en vigueur : " L'affectation peut être modifiée soit à la demande du condamné, soit à la demande du chef de l'établissement dans lequel il exécute sa peine. / La décision de changement d'affectation appartient au ministre de la justice, dès lors qu'elle concerne : / 1° Un condamné dont il a décidé l'affectation dans les conditions du deuxième alinéa de l'article D. 80 et dont la durée de l'incarcération restant à subir est supérieure à trois ans, au jour où est formée la demande visée au premier alinéa ; / 2° Un condamné à raison d'actes de terrorisme tels que prévus et réprimés par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal ; / 3° Un condamné ayant fait l'objet d'une inscription au répertoire des détenus particulièrement signalés, prévu par l'article D. 276-1. / Le directeur interrégional des services pénitentiaires est compétent pour décider du changement d'affectation des autres condamnés. / L'affectation ne peut être modifiée que s'il survient un fait ou un élément d'appréciation nouveau. ". Aux termes de l'article D. 290 du même code dans sa version alors en vigueur : " Le transfèrement consiste dans la conduite d'un détenu sous surveillance d'un établissement à un autre établissement pénitentiaire. / Cette opération comporte la radiation de l'écrou à l'établissement de départ et un nouvel écrou à l'établissement pénitentiaire de destination sans que la détention subie soit pour autant considérée comme interrompue. ". Aux termes de l'article D. 300 du même code dans sa version alors en vigueur : " Le ministre de la justice ordonne les transfèrements de caractère administratif, c'est-à-dire les transfèrements autres que ceux visés aux articles D. 297 à D. 299. / La compétence du ministre de la justice est exclusive en ce qui concerne : / 1° Le transfèrement à titre administratif de tout détenu d'une région pénitentiaire à une autre ; / 2° Les transfèrements vers ou à partir d'une maison centrale ou d'un quartier maison centrale. (...) ".

3. Pour annuler la décision contestée, les premiers juges ont relevé qu'elle était entachée d'incompétence dès lors qu'elle avait été prise par le ministre de la justice alors qu'aucune des conditions prévues du 1° au 3° de l'article D. 82 du code de procédure pénale n'étaient réunies.

4. Si le garde des sceaux, ministre de la justice se prévaut en appel, après avoir en première instance invoqué les dispositions de l'article D. 80 du code de procédure pénale dans leur version alors en vigueur, inapplicables en l'espèce dès lors qu'elles sont relatives à une décision d'affectation et non à une décision de changement d'affectation, des dispositions de l'article D. 300 du même code relatives au transfèrement des détenus, il ressort cependant des pièces du dossier et notamment des mentions de la décision, que cette dernière, qui vise " une demande de changement d'affectation " à l'initiative de la direction de l'établissement, entrait dès lors dans les prévisions de l'article D. 82 du code de procédure pénale, inséré dans le paragraphe 4 (" Changements d'affectation ") de la section 2 (" de la procédure d'orientation et d'affectation des condamnés ") du chapitre II (" de la détention ") du livre V (" des procédures d'exécution ") de la partie réglementaire dudit code dans sa version alors applicable, et non dans celles de l'article D. 300. Dès lors que les conditions prévues à l'article D. 82 prévoyant que la décision doit être prise par le ministre de la justice n'étaient en l'espèce pas réunies comme l'a relevé le jugement sans être contesté sur ce point, c'est à bon droit que les premiers juges se sont fondés sur le motif rappelé au point 3 du présent arrêt pour annuler la décision contestée.

5. Il résulte de tout ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 24 février 2021 affectant M. A... au centre pénitentiaire de Lille Sequedin.

Sur les frais liés au litige :

6. M. A... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut par suite se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Ciaudo, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat (ministère de la justice), le versement à M. A... de la somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du garde des sceaux, ministre de la justice est rejetée.

Article 2 : L'Etat (ministère de la justice) versera la somme de 1 500 euros à Me Ciaudo, avocat de M. A..., en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Ciaudo renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M.Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2023.

Le rapporteur, Le président,

J.-F. GOBEILL J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00728


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00728
Date de la décision : 22/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : AARPI THEMIS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-22;22pa00728 ?
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