Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, par deux demandes distinctes, l'annulation de la décision du 4 octobre 2019 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Sud-Ouest a refusé de faire droit à sa demande de renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée et de la délibération du 27 novembre 2019 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 4 octobre 2019, et à ce qu'il soit enjoint au Conseil national des activités privées de sécurité de faire droit à sa demande de délivrance d'une carte professionnelle en qualité d'agent de sécurité privée.
Par un jugement n°s 1905746-2000027 du 23 septembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté pour irrecevabilité la demande en annulation de la décision du 4 octobre 2019, a annulé la délibération du 27 novembre 2019 du Conseil national des activités privées de sécurité et lui a enjoint de réexaminer la demande de M. D... tendant au renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 octobre 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux puis réenregistrée le 1er mars 2022, le Conseil national des activités privées de sécurité, représenté par Me Claisse, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n°s 1905746, 2000027, du 23 septembre 2021 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il annule la délibération du 27 novembre 2019 du Conseil national des activités privées de sécurité et lui enjoint de réexaminer la demande de M. D... tendant au renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée.
2°) de mettre à la charge de M. D... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors qu'il n'est pas établi que, comme l'impose l'article R 741-7 du code de justice administrative, la minute du jugement contesté ait été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur ainsi que la greffière d'audience ;
- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 611-1 et L. 612-20 du code de la sécurité intérieure dès lors que le comportement de M. D... est manifestement incompatible avec les exigences posées par ces dispositions ; en effet, les agissements qui lui sont reprochés doivent être pris en compte au regard de l'article L. 631-5 du code de la sécurité intérieure qui impose aux acteurs de la sécurité privée de s'abstenir même en dehors de l'exercice de leur profession de tout acte, manœuvre ou comportement de nature à la déconsidérer ; les faits de violence sont incompatibles avec l'exercice de l'activité d'agent de sécurité privée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2022, M. D..., représenté par Me Maamouri, conclut au rejet de la requête du Conseil national des activités privées de sécurité et à ce qu'il soit mis à sa charge le paiement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
M. D... soutient que :
- la requête d'appel est irrecevable, faute de décision prise par le collège du Conseil national des activités privées de sécurité d'interjeter appel ;
- par ailleurs, les moyens invoqués par le Conseil national des activités privées de sécurité ne sont pas fondés.
La minute du jugement a été produite le 5 octobre 2022 par le tribunal administratif de Toulouse et a été communiquée aux parties.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... C...,
- les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Ricci substituant Me Claisse représentant le Conseil national des activités privées de sécurité.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... D... a sollicité, le 11 avril 2019, le renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée, dont le terme était fixé au 10 juillet 2019. Par une lettre du 2 juillet 2019, la commission locale d'agrément et de contrôle Sud-Ouest a informé l'intéressé de ce qu'elle était susceptible de rejeter sa demande en raison de deux mentions figurant dans le fichier de traitement des antécédents judiciaires. En dépit des observations présentées par M. D..., cette commission a refusé de faire droit à sa demande de renouvellement de sa carte professionnelle par une décision du 4 octobre 2019. Le 7 octobre 2019, l'intéressé a saisi la commission nationale d'agrément du Conseil national des activités privées de sécurité d'un recours administratif préalable obligatoire. Par une délibération du 27 novembre 2019, notifiée le 13 décembre suivant, le Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif préalable et a confirmé la décision de refus de renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée. M. D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, par deux demandes distinctes, l'annulation des décisions précitées des 4 octobre et 27 novembre 2019 portant rejet de sa demande de délivrance d'une carte professionnelle et à ce qu'il soit enjoint au Conseil national des activités privées de sécurité de lui délivrer la carte professionnelle sollicitée. Par un jugement du 23 septembre 2021 le tribunal administratif de Toulouse a rejeté pour irrecevabilité la demande en annulation de la décision du 4 octobre 2019, a annulé la délibération du 27 novembre 2019 du Conseil national des activités privées de sécurité et lui a enjoint de réexaminer la demande de M. D... tendant au renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
2. Le Conseil national des activités privées de sécurité doit être regardé comme demandant la réformation du jugement du 23 septembre 2021 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il annule sa délibération du 27 novembre 2019 et lui enjoint de réexaminer la demande de M. D... tendant au renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée.
Sur la régularité du jugement :
3. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". En l'espèce, il résulte de l'instruction que la minute du jugement contesté a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur ainsi que la greffière d'audience. Par suite, le moyen soulevé tiré du caractère irrégulier du jugement contesté, faute de signatures de la minute, manque en fait et doit donc être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure, dans sa version applicable : " Nul ne peut être employé ou affecté pour participer à une activité mentionnée à l'article L. 611-1 :... / 2° S'il résulte de l'enquête administrative, ayant le cas échéant donné lieu à consultation, par des agents du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l'État territorialement compétent et individuellement désignés, des traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification, que son comportement ou ses agissements sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'État et sont incompatibles avec l'exercice des fonctions susmentionnées ; (...) ".
5. Pour rejeter la demande de délivrance de carte professionnelle à M. D..., le Conseil national des activités privées de sécurité s'est principalement fondé sur la circonstance selon laquelle l'intéressé avait été mis en cause, d'une part, pour des faits de violence sans incapacité sur un mineur de quinze ans par un ascendant commis du 1er janvier 2015 au 1er décembre 2016, lesquels ont fait l'objet d'un rappel à la loi, et, d'autre part, pour des faits de violences habituelles suivies d'incapacité n'excédant pas huit jours sur conjoint commis le 27 septembre 2016. Le Conseil national des activités privées de sécurité a considéré que " ces faits graves et réitérés, révélaient une absence de maîtrise de soi ainsi qu'un comportement de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ". Il a dès lors estimé que le comportement de M. D... était incompatible avec l'exercice des fonctions d'agent de sécurité privée lesquelles ne peuvent être confiées qu'à des professionnels présentant une " moralité et une attitude exemplaire ", l'intéressé ayant par ailleurs déjà été condamné en 2007 et 2009 à des peines de 300 et 500 euros d'amendes pour avoir circulé avec un véhicule sans être titulaire du permis de conduire et sans assurance, ce qui traduit " la persistance d'un comportement transgressif " .
6. En premier lieu, en ce qui concerne les faits de violence sur mineur, il ressort de l'enquête complémentaire des services de police que sur la base des déclarations de son enfant mineur, placé en institut thérapeutique, éducatif et pédagogique, M. D... a reconnu qu'il avait, lors de la période 2015/2016, donné quelques fessées à son fils pour le punir et qu'il avait pu avoir envers celui-ci un langage inadapté en lui proférant des insultes et en le rabaissant au sujet de ses résultats scolaires.
7. En deuxième lieu, il ressort également de cette enquête complémentaire que M. D... a reconnu avoir le 16 septembre 2016, lors d'une dispute, donné une gifle à sa concubine .
8. Les faits précités reprochés à l'intimé en dépit de leur gravité, dataient de plus de trois ans à la date de la décision en litige. Ils ont uniquement donné lieu à un rappel à la loi et à une injonction de suivre un stage de sensibilisation, à laquelle l'intéressé a déféré, et ils n'ont été suivis d'aucun autre fait répréhensible. Les faits en question, dont les mentions ont été effacées du fichier de " traitement d'antécédents judiciaires " sur décision du procureur de la République du 14 octobre 2019, ne pouvaient, ainsi que l'ont considéré à bon droit les premiers juges, être regardés comme caractérisant un comportement incompatible avec l'exercice des fonctions d'agent de sécurité privée qui étaient assurées de façon continue depuis 2004 par M. D....
9. En troisième lieu, si la délibération du 27 novembre 2019 est également fondée sur des faits de conduite sans permis de conduire et sans assurance de M. D... lui ayant valu des amendes de 300 et 500 euros, compte tenu, en tout état de cause, de leur caractère ancien, ces faits ne pouvaient, ainsi que l'ont considéré à bon droit les premiers juges, justifier le refus de renouvellement de la carte professionnelle de l'intéressé.
10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête, que le Conseil national des activités privées de sécurité n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé sa délibération du 27 novembre 2019 et lui a enjoint de réexaminer la demande de M. D... tendant au renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. M. D... n'étant pas dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions présentées à son encontre par le Conseil national des activités privées de sécurité sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions au profit de M. D... .
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du Conseil national des activités privées de sécurité est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. D... sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Conseil national des activités privées de sécurité et à M. B... D...
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 décembre 2022.
Le rapporteur
P. C...
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21TL23958
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