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23/03/2022 | FRANCE | N°21PA02809

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 23 mars 2022, 21PA02809


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes distinctes, M. C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 29 août 2019 par laquelle la directrice générale du centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP) a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste et d'enjoindre au CASVP de le réintégrer, d'autre part, d'annuler le titre de recette d'un montant de 1 422,76 euros émis à son encontre le 25 mai 2019 par le CASVP et de prononcer la décharge de l'obligation de payer l

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes distinctes, M. C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 29 août 2019 par laquelle la directrice générale du centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP) a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste et d'enjoindre au CASVP de le réintégrer, d'autre part, d'annuler le titre de recette d'un montant de 1 422,76 euros émis à son encontre le 25 mai 2019 par le CASVP et de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme correspondante, et, enfin, d'annuler la décision du 19 mai 2020 par laquelle le CASVP a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son état de santé, ainsi que des congés maladie pris en conséquence depuis le 25 avril 2016.

Par un jugement nos 1923290/2-1, 2005037/2-1, 2010517/2-1 du 30 mars 2021, le Tribunal administratif de Paris, après avoir joint les trois requêtes, a annulé la décision du 19 mai 2020 par laquelle le CASVP a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'état de santé de M. A..., ainsi que des congés maladie pris en conséquence depuis le 25 avril 2016, enjoint au CASVP de soumettre à la commission départementale de réforme la demande de reconnaissance d'imputabilité de M. A..., et rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 mai 2021 et le 13 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Arvis, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1923290/2-1, 2005037/2-1, 2010517/2-1 du 30 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté le surplus de ses demandes ;

2°) d'enjoindre au centre d'action sociale de la ville de Paris de le réintégrer dans un poste compatible avec son état de santé, dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de le décharger de l'obligation de payer la somme de 1 422,76 euros ;

4°) de mettre à la charge du centre d'action sociale de la ville de Paris le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne la demande relative à sa radiation des cadres ;

- le jugement est entaché d'une omission à statuer sur le moyen tiré de l'incompétence de la signataire du titre de recettes du 27 février 2020 ;

- son état de santé n'a pas été examiné par le comité médical ni par un médecin agréé, ce qui l'a privé d'une garantie ;

- il n'était pas médicalement apte à la reprise de ses fonctions au mois d'août 2019 ;

- les premiers juges se sont contredits en considérant à la fois que M. A... n'était pas en congé de maladie le 29 août 2019, et qu'il avait épuisé ses droits à congés de maladie à compter du 1er décembre 2019 ;

- le titre de recettes n'a pas été signé en méconnaissance des dispositions de L. 1617-5, 4° du code général des collectivités territoriales et de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le titre de recettes est dépourvu de base légale dès lors qu'il n'avait pas épuisé ses droits à congé de maladie au mois de décembre 2019.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2021, le centre d'action sociale de la ville de Paris, représenté par Me Grimaldi, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement la somme de 1 500 euros soit mis à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

- les observations de Me Arvis, avocat de M. A...,

- et les observations de Me Belahouane, avocate du centre d'action sociale de la ville de Paris.

Une note en délibéré, enregistrée le 4 mars 2022, a été présentée pour le centre d'action sociale de la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., agent social de 2e classe au centre d'action sociale de la ville de Paris, a été placé en congé maladie le 25 avril 2016, puis en disponibilité d'office pour raison de santé du 25 avril 2017 jusqu'à la date effective de sa reprise, par un arrêté du 23 novembre 2017. Par un courrier recommandé avec accusé de réception du 24 mai 2019, le CASVP l'a mis en demeure de reprendre ses fonctions à la suite de l'avis médical en date du 3 mai 2019 du médecin statutaire du centre d'action social de la mairie de Paris qui estimait qu'" il était apte à la fonction publique ". L'intéressé a de nouveau été mis en demeure par courrier du 23 août 2019 dont il a accusé réception le 24 août 2019 de reprendre son poste sous 48 heures sous peine de faire l'objet d'une mesure de radiation des cadres. En l'absence de reprise de ses fonctions, il a été radié des cadres pour abandon de poste par un arrêté de la directrice adjointe du centre d'action sociale de la ville de Paris du 29 août 2019. Par un jugement n° 1821375 du 25 juin 2019, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 23 novembre 2017 plaçant M. A... en disponibilité d'office pour raison de santé. Par une ordonnance n° 1923344 du 5 décembre 2019 du juge des référés, l'arrêté de radiation des cadres du 29 août 2019 a été suspendu et M. A... a été réintégré dans ses fonctions d'agent social à la résidence services " Maine " à titre provisoire à partir du 18 décembre 2019. Ensuite, par une décision du 19 mai 2020 le CASVP a rejeté la demande de M. A... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de son état de santé et des congés maladie pris depuis le 25 avril 2016. Enfin, le CASVP a émis le 27 février 2020 un titre de recette pour le recouvrement du traitement perçu par M. A... au titre du mois de janvier 2020. Par trois requêtes distinctes A... a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 29 août 2019 prononçant sa radiation des cadres pour abandon de poste et d'enjoindre au CASVP de le réintégrer, d'autre part, d'annuler le titre de recette du 27 février 2020 et de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme correspondante, et, enfin, d'annuler la décision du 19 mai 2020. M. A... fait appel du jugement par lequel le tribunal, après avoir joint ces trois requêtes et annulé la décision de refus d'imputabilité du 19 mai 2020, a rejeté sur surplus de ses demandes.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. A... avait soulevé en première instance le moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que la signataire du titre de recettes émis à son encontre le 27 février 2020 ne bénéficiait pas d'une délégation pour ce faire. En omettant de répondre à ce moyen, les premiers ont entaché d'irrégularité le jugement attaqué en tant qu'il statue sur les conclusions, divisibles, par lesquelles M. A... demandait l'annulation de ce titre de recettes et la décharge de l'obligation de payer la somme correspondante.

3. Il y a donc lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris et tendant à l'annulation du titre de recettes du 27 février 2020 et à la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 422,76 euros et, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions de sa requête d'appel.

Sur la légalité de la décision de radiation des cadres :

4. Aux termes de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 : " Le comité médical est chargé de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les questions médicales soulevées par l'admission des candidats aux emplois publics, l'octroi et le renouvellement des congés de maladie et la réintégration à l'issue de ces congés, lorsqu'il y a contestation. / Il est consulté obligatoirement pour : (...) /e) L'aménagement des conditions de travail du fonctionnaire après congé de maladie ou disponibilité d'office ; (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier qu'en exécution de l'annulation, prononcée pour un motif de procédure par le jugement du 25 juin 2019, de la décision plaçant M. A... en position de disponibilité d'office pour raison de santé, le CASVP a de nouveau placé M. A... en position de disponibilité d'office à titre rétroactif, pour la période du 25 avril 2017 au 25 juin 2019, par un arrêté du 28 juin 2021. Dans ces conditions, à la date du 24 août 2019, M. A... se trouvait en position de retour de disponibilité d'office et ne pouvait dès lors, en application des dispositions précitées, être mis en demeure de rejoindre son poste sans que le comité médical ait été préalablement consulté. Ce défaut de consultation constituant pour M. A... une garantie dont il a été privé, le requérant est fondé à soutenir que la décision prononçant sa radiation des cadres a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Compte tenu du motif retenu, l'annulation de la décision prononçant la radiation des cadres de M. A... implique seulement que celui-ci soit réintégré dans le poste qu'il occupait préalablement à cette décision de radiation. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au CASVP de procéder à cette réintégration dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur le titre de recettes du 27 février 2020 :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. ". Aux termes du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dispose que : " Quelle que soit sa forme, une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressée au redevable. (...) En application de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation. ". Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif adressé au redevable doit mentionner les nom, prénom et qualité de la personne qui l'a émis et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier en cas de contestation que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur.

8. Il ressort des pièces produites en appel par le CASVP que, par un arrêté publié le 21 février 2020, Mme B..., qui a signé le titre de recettes en litige, a reçu délégation pour signer tout " état de liquidation des indus agents ". Par suite le moyen tiré de l'incompétence du signataire du titre de recettes, qui comportait par ailleurs les nom, prénom et qualité de son signataire, doit être écarté.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Dans les conditions prévues pour chaque catégorie d'entre elles, les recettes sont liquidées avant d'être recouvrées. La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette des redevables. Les recettes sont liquidées pour leur montant intégral, sans contraction avec les dépenses. "

10. Le titre de recette du 27 février 2020 comporte la mention " Paie de janvier 2020 intégralement perçue à tort (droits à la maladie épuisés depuis le 1er décembre 2019) " et comporte ainsi les indications suffisantes permettant au débiteur de comprendre son mode de calcul, et de contester le principe de la dette ainsi que son montant. M. A... n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il méconnaîtrait les dispositions précitées faute de mentionner ses bases de liquidation.

11. En troisième lieu il est constant qu'en application des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, M. A... avait épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire le 25 avril 2017, à l'issue d'une période de douze mois consécutifs. Par suite, sa réintégration intervenue en exécution du jugement ayant annulé son placement en disponibilité d'office à compter du 25 avril 2017 ne pouvait légalement être prononcée sous le régime du congé de maladie ordinaire et l'intéressé a été régulièrement placé de nouveau en position de disponibilité d'office, rétroactivement à compter du 25 avril 2017 et jusqu'au 25 juin 2019. En conséquence de l'annulation de sa radiation des cadres prononcée au point 5 du présent arrêt, M. A... se trouvait nécessairement, faute de toute autre position régulière possible, en position de prolongement de sa disponibilité d'office à compter du 29 août 2019, la décision de réintégration prononcée le 18 décembre 2018 étant à cet égard sans incidence. Par suite, cette position de disponibilité sans service fait s'opposant au versement de son traitement, le CASVP était fondé à lui réclamer, par le titre de recette en litige, le reversement du traitement du mois de janvier 2019 indument perçu.

12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de ce titre de recette et la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 422,76 euros.

Sur les frais liés à l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le CASVP demande à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge du CASVP une somme de 1 500 euros à verser à M. A... sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er et 3 du jugement nos 1923290/2-1, 2005037/2-1, 2010517/2-1 du 30 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris sont annulés.

Article 2 : La décision du CASVP du 29 août 2019 prononçant la radiation des cadres pour abandon de poste de M. A... est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au CASVP de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à la réintégration de M. A... sur le poste qu'il occupait préalablement à sa radiation des cadres.

Article 4 : La demande de M. A... tendant à l'annulation du titre de recettes émis par le CASVP le 27 février 2020 ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 5 : Le CASVP versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions du CASVP présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au centre d'action sociale de la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2022.

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGISLa République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA02809


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02809
Date de la décision : 23/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-04 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Abandon de poste.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : SCP ARVIS et KOMLY-NALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-23;21pa02809 ?
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