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29/04/2021 | FRANCE | N°21LY00068

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 29 avril 2021, 21LY00068


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 mai 2020 du préfet de l'Ain portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la cessation de l'état d'urgence sanitaire, interdiction de retour en France d'un an et désignation du pays de renvoi et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire.

Par un jugement n° 2005119 du 10 décembre 2020, ce tribunal a fait droit à s

a demande.

Procédure devant la cour

I. Par une requête enregistrée le 8 janvier 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 mai 2020 du préfet de l'Ain portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la cessation de l'état d'urgence sanitaire, interdiction de retour en France d'un an et désignation du pays de renvoi et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire.

Par un jugement n° 2005119 du 10 décembre 2020, ce tribunal a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

I. Par une requête enregistrée le 8 janvier 2021 sous le n° 2100068, le préfet de l'Ain demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a jugé qu'il avait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que la situation de l'intéressé ne répondait pas à des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par M. C..., tirés de l'insuffisante motivation du refus de titre de séjour, du défaut d'examen complet de sa situation personnelle, de la méconnaissance du droit d'être entendu, de l'illégalité de la décision portant interdiction de retour par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de ce qu'il a fait une inexacte application du III de l'article L. 511-1 du code de justice administrative ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas produit d'observations.

II. Par une requête enregistrée le 8 janvier 2021 sous le n° 21LY00079, le préfet de l'Ain demande à la cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 2005119 du tribunal administratif de Lyon du 10 décembre 2020.

Il soutient que les moyens qu'il soulève dans la requête au fond sont sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.

La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les observations de Me B..., pour M. C... ;

Et avoir pris connaissance des notes en délibéré enregistrées le 1er avril 2021 présentées pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. Il y a lieu de joindre, pour qu'il y soit statué par un même arrêt, les requêtes visées ci-dessus qui sont dirigées contre le même jugement.

2. M. D... C..., ressortissant albanais né le 24 août 1999, est entré en France le 16 octobre 2015. Il a été confié à l'aide sociale à l'enfance du département de l'Ain. A sa majorité, il a demandé une carte de séjour temporaire sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de l'Ain a rejeté sa demande le 4 décembre 2017 et lui a fait obligation de quitter le territoire français. La légalité de ces décisions a été confirmée en dernier lieu par un arrêt de la cour du 28 mars 2019. M. C..., qui s'est maintenu sur le territoire français, a sollicité le 30 janvier 2020 auprès de la même préfecture la régularisation de sa situation administrative. Par un arrêté du 11 mai 2020, le préfet de l'Ain a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la cessation de l'état d'urgence sanitaire à destination de l'Albanie en cas d'exécution d'office et lui a interdit de retourner en France pendant une durée d'un an. Par un jugement du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de l'Ain de délivrer à M. C... une carte de séjour portant la mention "salarié". Le préfet demande l'annulation de ce jugement par sa requête n° 21LY00068 et qu'il soit sursis à son exécution par sa requête n° 21LY00079.

Sur la requête 21LY00068 :

3. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...). ".

4. M. C... s'est prévalu à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour de ce qu'à l'issue d'un contrat d'apprentissage de maçon et de l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle, l'entreprise qui l'avait employé en qualité d'apprenti avait souhaité l'embaucher par contrat à durée indéterminée pour un emploi d'ouvrier manoeuvre. Ces éléments ne suffisent pas à caractériser des circonstances exceptionnelles particulières justifiant son admission au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que, par ailleurs, il est célibataire et dépourvu d'attaches familiales en France, ses parents et son frère résidant en Albanie. Le préfet de l'Ain est dès lors fondé à soutenir qu'il ne justifiait pas de l'existence de motifs particuliers de nature à fonder sa régularisation exceptionnelle sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité. C'est dès lors à tort que le tribunal s'est fondé sur un tel motif pour annuler son arrêté.

5. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C....

6. Dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... aurait demandé au préfet de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet, qui s'est prononcé au regard du fondement sur lequel reposait la demande de titre de séjour de l'intéressé, n'aurait pas procédé à un examen complet de sa situation et aurait omis de motiver sa décision au regard de ces dispositions. Il ne peut par ailleurs utilement soutenir qu'il aurait méconnu ce texte.

7. Compte tenu de la situation privée et familiale de M. C... décrite au point 4, le préfet de l'Ain n'a pas entaché le refus de titre de séjour d'erreur d'appréciation quant à ses conséquences sur celle-ci, ni méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de ce refus sur sa situation personnelle.

8. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement et d'interdiction de retour sur le territoire français. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu est ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et l'interdiction de retour sur le territoire français. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... n'aurait pas eu la possibilité, pendant l'instruction de sa demande de titre de séjour, de faire état de tous éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle susceptibles d'influer sur le contenu des décisions subséquentes à la décision se prononçant sur cette demande. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en lui interdisant de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne, selon lequel toute personne a le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement, doit être écarté.

9. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du même code : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...). ".

10. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 2, 4 et 8, l'interdiction de retour n'est pas illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et le préfet de l'Ain, en prenant cette mesure à l'encontre de M. C..., qui ne justifie d'aucune circonstance humanitaire particulière, et en fixant la durée de l'interdiction à un an, n'a pas fait une inexacte application des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Ain est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 11 mai 2020. En conséquence, ce jugement doit être annulé et la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Lyon doit être rejetée.

Sur la requête n° 21LY00079 :

12. Le présent arrêt statuant sur l'appel présenté contre le jugement n° 2005119 du tribunal administratif de Lyon, les conclusions de la requête n° 21LY00079 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont ainsi privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21LY00079.

Article 2 : Le jugement n° 2005119 du tribunal administratif de Lyon du 10 décembre 2020 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. D... C... et à Me B.... Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme A..., président assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2021.

A...

2

N° 21LY00068 - N° 21LY00079


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00068
Date de la décision : 29/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : PAQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-29;21ly00068 ?
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