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08/04/2021 | FRANCE | N°20VE00288

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 08 avril 2021, 20VE00288


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Auvers-sur-Oise a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 19 décembre 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé la carence de la commune d'Auvers-sur-Oise en application de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, a fixé à 300% le taux de majoration du prélèvement par logement manquant à compter du 1er janvier 2018 pour une durée de trois ans, a transféré à l'Etat l'exercice du droit de préemption urbain et le

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Auvers-sur-Oise a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 19 décembre 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé la carence de la commune d'Auvers-sur-Oise en application de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, a fixé à 300% le taux de majoration du prélèvement par logement manquant à compter du 1er janvier 2018 pour une durée de trois ans, a transféré à l'Etat l'exercice du droit de préemption urbain et les droits de réservation des logements actuels et futurs prévus à l'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation.

Par un jugement n° 1801810 du 7 janvier 2020, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 13 janvier 2020, 12 novembre 2020 et 4 mars 2021, la commune d'Auvers-sur-Oise, représentée par Me C..., avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune d'Auvers-sur-Oise soutient que :

- le jugement est irrégulier du fait de son insuffisante motivation ;

- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs en ce qu'il a jugé qu'il reconnait que le mandat de la nouvelle municipalité n'a commencé qu'en 2014 tout en objectant que les objectifs de production de logements sociaux n'ont pas été contestés en temps utiles ;

- l'arrêté litigieux, qui constitue une sanction dans son article 2, n'est pas motivé ;

- le taux de majoration appliqué n'a pas été soumis au contradictoire ;

- rien dans la motivation de l'arrêté litigieux ne permet d'établir que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de la commune au regard du taux de majoration retenu ;

- le préfet a commis une erreur d'appréciation en constatant l'état de carence de la commune dès lors que la situation est pour la plus large part imputable à la municipalité précédente, que des contraintes géographiques, architecturales et urbanistiques fortes pèsent sur les projets de construction, que le coût du foncier est important et que l'adoption du PLU n'a pas eu pour objet ou pour effet de limiter la construction de logements sociaux ;

- le préfet a appliqué une grille illégale pour appliquer un coefficient de 4 pour la majoration retenue ;

- compte tenu des difficultés indiquées par les bailleurs sociaux eux-mêmes, la mesure litigieuse est largement disproportionnée.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la loi du 18 janvier 2013 ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., substituant Me C... pour la commune d'Auvers-sur-Oise.

Considérant ce qui suit :

1. La commune d'Auvers-sur-Oise relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise en date du 19 septembre 2017 pris en application de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitat et fixant à 300% le taux de majoration du prélèvement par logement manquant à compter du 1er janvier 2018 pour une durée de trois ans.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Les premiers juges ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de l'absence de motivation spécifique du montant de la majoration appliquée en indiquant au point 5 du jugement attaqué que ce montant n'avait pas à être " justifié spécifiquement ". Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le fond du litige :

3. Aux termes de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation : " Les dispositions de la présente section s'appliquent aux communes dont la population est au moins égale à 1 500 habitants en Ile-de-France et 3 500 habitants dans les autres régions qui sont comprises, au sens du recensement général de la population, dans une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, et dans lesquelles le nombre total de logements locatifs sociaux représente, au 1er janvier de l'année précédente, moins de 20 % des résidences principales (...) ". Aux termes de l'article L. 302-7 du même code : " A compter du 1er janvier 2002, il est effectué chaque année un prélèvement sur les ressources fiscales des communes visées à l'article L. 302-5 (...) ". Aux termes de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation : " Lorsque, dans les communes soumises aux obligations définies aux I et II de l'article L. 302-5, au terme de la période triennale échue, le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser en application du I de l'article L. 302-8 n'a pas été atteint ou lorsque la typologie de financement définie au III du même article L. 302-8 n'a pas été respectée, le représentant de l'Etat dans le département informe le maire de la commune de son intention d'engager la procédure de constat de carence. Il lui précise les faits qui motivent l'engagement de la procédure et l'invite à présenter ses observations dans un délai au plus de deux mois. ". Aux termes de l'article 26 de la loi du 18 janvier 2013 : " III. - Pour les communes faisant l'objet de l'arrêté mentionné au I ainsi que de l'arrêté mentionné au II du présent article, le représentant de l'Etat dans le département peut, en fonction des critères mentionnés au second alinéa du même II, augmenter, après avis de la commission mentionnée au I de l'article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation, le taux de majoration de telle sorte que le prélèvement majoré puisse atteindre jusqu'à cinq fois le montant du prélèvement mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 302-7 du même code. Le prélèvement majoré ne peut excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune. Ce plafond est porté à 7,5 % pour les communes dont le potentiel fiscal par habitant est supérieur ou égal à 150 % du potentiel fiscal médian par habitant sur l'ensemble des communes soumises au prélèvement défini au même article L. 302-7.".

4. En jugeant qu'une nouvelle majorité municipale avait été élue en 2014 mais que ce changement n'était pas de nature à délier la commune des objectifs fixés antérieurement conformément aux textes en vigueur, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'une contradiction.

5. La majoration du prélèvement prévu à l'article L. 302-7 du code de l'habitation et de la construction a le caractère d'une sanction et doit être motivée. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué que celui-ci vise les textes dont il fait l'application et détaille les éléments de fait et de droit constitutifs de la situation de la commune d'Auvers-sur-Oise permettant d'en exercer une critique utile. Le montant de la majoration n'a pas à faire l'objet d'une justification spécifique. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté litigieux et, en particulier, l'absence de justification du montant de la majoration appliquée, doit être écarté.

6. Il ressort des pièces du dossier que la commune d'Auvers-sur-Oise a répondu par un courrier daté du 10 mars 2017 à l'information communiquée par le préfet suivant laquelle il envisageait de mettre en oeuvre la procédure de carence prévue par les dispositions précitées du code de la construction et de l'habitation du fait du défaut de réalisation des objectifs de la commune de constructions de logements sociaux pour la période triennale 2014-2016. La commission départementale instituée à l'article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation s'est réunie le 28 avril 2014. Le compte rendu de cette réunion dont la commune ne conteste pas avoir eu communication indique que la commune est susceptible de voir multiplié par quatre le montant du prélèvement auquel elle est assujettie au titre de l'article L. 302-7 précité. Il ne ressort pas des termes de l'arrêté litigieux que le montant de la majoration retenu par le préfet aurait reposé sur des éléments autres que ceux retenus pour constater la carence de la commune. Par suite, la commune n'est pas fondée à soutenir que la procédure suivie à son encontre n'aurait pas revêtu un caractère contradictoire.

7. Il n'est pas contesté que la commune d'Auvers-sur-Oise n'a réalisé que 24 des 131 logements sociaux qu'elle s'était engagée à construire au titre de l'objectif fixé pour la période triennale 2014-2016, soit un taux de 18,32%. Pour démontrer que la majoration qui lui a été appliquée par l'arrêté en litige est entachée d'une erreur d'appréciation, la commune se prévaut du changement de majorité municipale, de contraintes géographiques, architecturales et urbanistiques et du coût des acquisitions foncières. L'alternance politique réalisée en 2014 au sein du conseil municipal n'est pas de nature à exonérer la commune de son obligation de remplir les objectifs définis en application de la loi par la municipalité précédente ni à justifier l'absence de réalisation des objectifs pour la période en cause qui a relevé en totalité de la responsabilité de la nouvelle majorité municipale. La commune d'Auvers-sur-Oise ne justifie pas en l'état de ses écritures d'impossibilités de construire liée à la géographie particulière de la commune. Si la commune soutient que la construction de 71 logements est bloquée par l'architecte des bâtiments de France et que la construction de logements sociaux est rendue difficile par la protection qui s'attache aux paysages et au bâti dans le Parc national du Vexin, cette circonstance ne peut justifier le taux particulièrement bas de réalisation des objectifs en cause définis en connaissance de ces contraintes, faute de précisions et de justifications circonstancées à propos des contraintes alléguées issues des règles d'urbanisme opposables aux projets de construction des logements sociaux. La commune ne justifie pas non plus de projets précis qui auraient été retardés ou rendus impossibles du fait du porté à connaissance adressé par le préfet au sujet d'une usine Veolia située à proximité de la commune. La commune n'explicite pas davantage la différence du coût des acquisitions foncières sur son territoire par rapport à des communes comparables du département du Val-d'Oise. Enfin, la commune ne démontre pas que le préfet aurait commis une erreur de fait en énonçant que le plan local d'urbanisme limite l'extension urbaine et ne permet pas la construction de logements nouveaux en se prévalant sans plus de précision de l'existence d'une zone UE urbaine mixte. Ainsi, contrairement à ce que soutient la commune d'Auvers-sur-Oise l'arrêté litigieux ne peut être regardé comme entaché d'une erreur d'appréciation.

8. Le préfet du Val-d'Oise ne conteste pas l'existence d'une grille d'analyse régionale jointe à l'instruction du préfet de la région Ile-de-France du 29 mars 2017. Toutefois, il ne ressort pas des termes de l'arrêté litigieux que le préfet du Val-d'Oise se serait cru lié par cette grille pour définir le taux de majoration appliqué à la commune d'Auvers-sur-Oise sans prendre en compte les éléments et la situation propres à la commune.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Auvers-sur-Oise n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Auvers-sur-Oise est rejetée.

2

N° 20VE00288


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00288
Date de la décision : 08/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-04 Collectivités territoriales. Commune. Finances communales.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: M. BOUZAR
Avocat(s) : SELARL CABINET GENTILHOMME

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-04-08;20ve00288 ?
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