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06/07/2021 | FRANCE | N°20PA04187

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 06 juillet 2021, 20PA04187


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association française des courtiers et prestataires de services d'investissement (AFCoPSI) a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite, née le 10 septembre 2018, par laquelle le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a refusé d'engager une procédure de sanction sur le fondement de l'article L. 222-16-1 du code de la consommation à l'encontre des éditeurs de services télévisuels M6 et BeIN.

Par jugement n° 182061

1/2-3 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé cette décis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association française des courtiers et prestataires de services d'investissement (AFCoPSI) a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite, née le 10 septembre 2018, par laquelle le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a refusé d'engager une procédure de sanction sur le fondement de l'article L. 222-16-1 du code de la consommation à l'encontre des éditeurs de services télévisuels M6 et BeIN.

Par jugement n° 1820611/2-3 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé cette décision implicite et a enjoint à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de mettre en oeuvre ses pouvoirs de sanction à l'encontre des deux éditeurs de services de télévision M6 et BeIN, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 23 décembre 2020 et 22 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la Cour d'annuler le jugement

n° 1820611/2-3 du 12 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a, à son article 2, enjoint à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de mettre en oeuvre ses pouvoirs de sanction à l'encontre des deux éditeurs de services de télévision M6 et BeIN, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Il soutient que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en jugeant que l'article L. 911-1 du code de justice administrative lui permettait d'enjoindre à la DGCCRF de mettre en oeuvre ses pouvoirs de sanction contre les opérateurs dans un délai de deux mois et que la motivation du jugement ne contient aucun élément permettant de fonder cet article 2 du dispositif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2021, l'Association française des courtiers et prestataires de services d'investissement (AFCoPSI), représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 24 février 2021, l'AFCoPSI, représentée par Me B..., demande à la Cour de prendre les mesures impliquées par l'exécution du jugement n° 1820611/2-3 du 12 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code monétaire et financier ;

- le code de la consommation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,

- et les observations de Me B..., avocat de l'Association française des courtiers et prestataires de services d'investissement.

Considérant ce qui suit :

1. Par lettre du 2 juillet 2018 reçue le 10 juillet suivant, l'Association française des courtiers et prestataires de services d'investissement (AFCoPSI) a saisi la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) du ministère de l'économie, des finances et de la relance d'une demande de sanction, en application de l'article L. 222-16-1 du code de la consommation, à l'encontre des éditeurs de services de communication audiovisuelle M6 et BeIN, en indiquant que lors de la diffusion sur ces deux chaînes, le 16 mai 2018, du match de football opposant l'Olympique de Marseille à l'Atlético Madrid, les joueurs de cette dernière équipe arboraient sur leur maillot le logo de la société Plus500, prestataire de services d'investissement proposant des contrats financiers dont la publicité est interdite par l'article L. 533-12-7 du code monétaire et financier. Par jugement n° 1820611/2-3 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite de rejet née le 10 septembre 2018 qui lui a été opposée et a enjoint à la DGCCRF de mettre en oeuvre ses pouvoirs de sanction à l'encontre des deux éditeurs de services de télévision M6 et BeIN, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement en tant qu'il a, à son article 2, enjoint à la DGCCRF de mettre en oeuvre ses pouvoirs de sanction à l'encontre des deux éditeurs de services de télévision M6 et BeIN, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ".

3. D'autre part, le code de la consommation définit au sein de son livre V les pouvoirs d'enquête et les suites données aux contrôles effectués par les agents habilités et prévoit au sein de son titre Ier les procédures de recherche et constatation puis définit au titre II les mesures qui peuvent être prises suite à ces contrôles. Ainsi, les agents habilités peuvent en application des dispositions du chapitre Ier de ce titre I prendre des mesures de police administrative parmi lesquelles figurent à la section 1 les injonctions de mise en conformité et en application du chapitre II des sanctions administratives. Ainsi, aux termes de l'article L. 522-1 du code de la consommation : " L'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation est l'autorité compétente pour prononcer les amendes administratives sanctionnant les manquements aux dispositions mentionnées aux articles L. 511-5, L. 511-6 et L. 511-7 et l'inexécution des mesures d'injonction relatives à des manquements constatés avec les pouvoirs mentionnés aux mêmes articles ". Or l'article L. 511-5 du code de la consommation précise que " Les agents sont habilités à rechercher et à constater les infractions ou les manquements aux dispositions suivantes : (...) 3° Les chapitres Ier, II et III du titre II du livre II ". L'article L. 222-16-1 qui figure dans la partie législative du code de la consommation au livre II du titre II du chapitre II prévoit à la section 5 que " La publicité, directe ou indirecte, adressée par voie électronique à des clients susceptibles d'être non professionnels, notamment des clients potentiels, relative à la fourniture de services d'investissement portant sur les contrats financiers définis à l'article L. 533-12-7 du code monétaire et financier est interdite. / (...) / Est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 100 000 € : / 1° Tout annonceur, à l'exception des prestataires de services d'investissement mentionnés au même article L. 533-12-7 et des conseillers en investissements financiers mentionnés à l'article L. 541-9-1 du même code, qui diffuse ou fait diffuser une publicité interdite en application du présent article (...) / 6° Toute personne diffusant une publicité interdite en application du présent article. / L'amende est prononcée dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre V du présent code ".

4. Il résulte ainsi de la combinaison des dispositions précitées du code de la consommation que lorsque les agents habilités précités constatent des infractions lors des contrôles qu'ils effectuent ils disposent d'un pouvoir d'appréciation dans les suites qu'ils souhaitent donner à ces constatations et qu'ils peuvent notamment infliger une amende lorsque la loi leur donne ce pouvoir.

5. Par suite, l'annulation par le jugement n° 1820611/2-3 du 12 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris de la décision implicite, née le 10 septembre 2018, par laquelle le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a refusé d'engager une procédure de sanction sur le fondement de l'article L. 222-16-1 du code de la consommation à l'encontre des éditeurs de services télévisuels M6 et BeIN implique nécessairement, seulement, que les agents habilités donnent une suite à l'infraction à l'article L. 533-12-7 du code monétaire et financier qui a été commise qui peut prendre la forme, en application du livre V du code de la consommation, soit d'une mesure de police administrative prévue par les dispositions du chapitre Ier du titre I, soit d'une sanction administrative en application du chapitre II du même titre. Il s'en suit que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont enjoint à la DGCCRF, à l'article 2 du jugement attaqué, de mettre en oeuvre ses pouvoirs de sanction à l'encontre des deux éditeurs de services de télévision M6 et BeIN, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

6. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à demander l'annulation de l'article 2 du jugement n° 1820611/2-3 du 12 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris.

7. Il y a lieu, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée devant le tribunal administratif par l'AFCoPSI en vue du prononcé d'une injonction suite à l'annulation de la décision implicite du 10 septembre 2018 du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de versement de traitements.

Sur conclusions à fin d'injonction présentées par l'AFCoPSI en première instance, et sur ses conclusions d'appel relatives à l'exécution du jugement attaqué :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été indiqué au point 5 du présent arrêt que l'annulation, par l'article 1er du jugement n° 1820611/2-3 du 12 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris, de la décision implicite du 10 septembre 2018 du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de versement de traitements implique seulement qu'il soit enjoint à la DGCCRF de réexaminer la demande présentée par l'AFCoPSI tendant à l'engagement d'une procédure de sanction sur le fondement de l'article L. 222-16-1 du code de la consommation à l'encontre des éditeurs de services télévisuels M6 et BeIN, et de prendre une décision expresse sur cette demande dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

9. En second lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que l'AFCoPSI n'est, en tout état de cause, pas fondée à demander à la Cour de prendre les mesures impliquées par l'exécution du jugement n° 1820611/2-3 du 12 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à l'AFCoPSI la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1820611/2-3 du tribunal administratif de Paris du

12 novembre 2020 est annulé.

Article 2 : Il est enjoint à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de réexaminer la demande présentée par l'Association française des courtiers et prestataires de services d'investissement tendant à l'engagement d'une procédure de sanction sur le fondement de l'article L. 222-16-1 du code de la consommation à l'encontre des éditeurs de services télévisuels M6 et BeIN, et de prendre une décision expresse sur cette demande dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions présentées par l'Association française des courtiers et prestataires de services d'investissement sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à l'Association française des courtiers et prestataires de services d'investissement.

Copie en sera adressée à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme A..., première conseillère,

- Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2021.

La rapporteure,

A. A...

La présidente,

H. VINOT

La greffière,

C. POVSE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA04187


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA04187
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-07-01-03-02-03 Procédure. Pouvoirs et devoirs du juge. Questions générales. Conclusions. Conclusions irrecevables. Demandes d'injonction.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : CABINET BARDON et DE FAY

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-07-06;20pa04187 ?
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