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13/10/2022 | FRANCE | N°20NC02191

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 13 octobre 2022, 20NC02191


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer en, droits et pénalités, la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) DV Négoce a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui

ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

Par un ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer en, droits et pénalités, la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) DV Négoce a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

Par un jugement n°s 1800830 et 1800834 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 juillet 2020 et un mémoire enregistré le 21 septembre 2021, M. C... et l'EURL DV Négoce, représentés par Me Grimpret, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de les décharger des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les vérifications de comptabilité dont ils ont fait l'objet ont débuté avant l'avis de vérification de comptabilité en violation de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales en ce que la brigade de contrôle et de recherches a procédé à un contrôle de la facturation dans le cadre d'un droit d'enquête entre le 7 et le 27 octobre 2016 lequel a constitué, outre un contrôle de la facturation, une constatation des éléments physiques d'exploitation et un examen critique de la comptabilité ;

- la paille défibrée est un aliment du bétail et des animaux au sens de l'article 278 bis du code général des impôts, la circonstance qu'elle pourrait servir à un autre usage, tel la litière, ne pouvant l'exclure du taux intermédiaire de 10 % ; le défibrage ayant au demeurant pour effet de la rendre plus digeste pour les animaux ; la doctrine administrative qualifiant la paille d'aliment, a fortiori la paille défibrée doit être qualifiée d'aliment ;

- c'est à tort que l'administration, suivie par le jugement attaqué, subordonne le bénéfice du taux intermédiaire à la justification que la paille défibrée a bien été destinée à l'alimentation animale alors que le texte de l'article 278 bis et la doctrine administrative elle-même n'en font pas une condition ; au demeurant s'agissant d'une question connexe la doctrine administrative exclut expressément l'exigence d'une preuve de la destination du produit ; une telle preuve de l'utilisation finale est impossible pour le vendeur ;

- la paille défibrée bénéficie en tout état de cause du taux intermédiaire en sa qualité de produit agricole non transformé au sens du 3° de l'article 278 bis du code général des impôts ; c'est à tort que l'administration et le jugement ont considéré que le défibrage constitue une transformation, le procédé de défibrage, qui n'est qu'un traitement mécanique, ne modifiant pas la substance du produit au sens de la jurisprudence du Conseil d'Etat.

Par des mémoires en défense enregistrés le 25 janvier 2021et le 29 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Grimpret représentant les requérants.

Une note en délibéré, enregistrée le 22 septembre 2022, a été présentée pour l'EURL DV Négoce et M. C....

Considérant ce qui suit :

1. La société EURL DV Négoce, dont l'associé unique est M. B... C..., exerce une activité d'achat-revente de paille et fourrage depuis le 7 juin 1999. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er juillet 2013 au 30 avril 2017 à l'issue de laquelle l'administration a porté à sa connaissance selon la procédure contradictoire de rectification, par une proposition de rectification du 2 août 2017, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée. A la suite des observations de la société, ces rappels ont été maintenus par lettre du 2 octobre 2017. Les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée ayant été mis en recouvrement au cours de l'année 2018, la société les a contestés par une réclamation préalable ayant donné lieu à une décision de rejet du 29 mars 2018. M. C... est exploitant agricole et produit de la paille et du fourrage. Son activité a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 à l'issue de laquelle l'administration fiscale a porté à sa connaissance, selon la procédure contradictoire de rectification, par une proposition de rectification du 1er juin 2017, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée. A la suite des observations de l'intéressé, ces rappels ont été maintenus par lettre du 31 juillet 2017. Ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ayant été mis en recouvrement au cours de l'année 2018, M. C... les a contestés par une réclamation préalable laquelle a été rejetée par une décision du 29 mars 2018. M. C... et l'EURL DV Négoce relèvent appel du jugement du 16 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires.

Sur la régularité de la procédure :

2. Aux termes de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales : " Pour rechercher les manquements aux règles de facturation auxquelles sont soumis les assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée en application du code général des impôts ainsi qu'aux dispositions adoptées par les Etats membres pour l'application des articles 217 à 248 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, les agents des impôts ayant au moins le grade de contrôleur peuvent se faire présenter les factures, la comptabilité matière ainsi que les livres, les registres et les documents professionnels pouvant se rapporter à des opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation et procéder à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ". Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 80 H du même livre : " Les constatations du procès-verbal ne peuvent être opposées à cet assujetti ainsi qu'aux tiers concernés par la facturation que dans le cadre des procédures de contrôle mentionnées à l'article L. 47 au regard des impositions de toute nature et de la procédure d'enquête prévue à l'article L. 80 F ". Aux termes enfin de l'article L. 47 du même livre : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu, une vérification de comptabilité ou un examen de comptabilité ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ou par l'envoi d'un avis d'examen de comptabilité./ Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix./ L'avis informe le contribuable que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié peut être consultée sur le site internet de l'administration fiscale ou lui être remise sur simple demande ".

3. Il résulte des dispositions ci-dessus reproduites que les agents habilités de l'administration fiscale peuvent enquêter sur les manquements aux règles de facturation en matière de taxe sur la valeur ajoutée sans avoir à mettre en œuvre la procédure prévue à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales. Conformément au dernier alinéa de l'article L. 80 H, le service peut se fonder sur les éléments recueillis dans le cadre de cette enquête pour procéder à une vérification de comptabilité dans les conditions prévues, notamment, par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales.

4. Il résulte de l'instruction que l'EURL DV Négoce a fait l'objet d'un droit d'enquête entre le 7 et le 27 octobre 2016, date du procès-verbal de clôture. Il ressort des énonciations de ce procès-verbal que les agents de la brigade de contrôle et de recherche ne se sont pas livrés au cours de cette procédure à un examen critique de la comptabilité par rapport aux pièces justificatives et aux déclarations fiscales souscrites. Le service vérificateur lui a ensuite notifié le 1er juin 2017 un avis de vérification de comptabilité comportant les mentions prévues par les dispositions ci-dessus reproduites de l'article L. 47 du livre des procédures. Par suite, l'EURL DV Négoce et M. C..., à supposer même que ce dernier puisse utilement invoquer ce moyen, ne sont pas fondés à soutenir que l'administration fiscale aurait méconnu les garanties reconnues aux contribuables en cas de vérification de comptabilité en procédant à l'enquête ci-dessus analysée.

Sur le bien-fondé des impositions :

5. Aux termes de l'article 278 du code général des impôts : " Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 20 % ". Il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu de l'instruction, si les recettes réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée ou dans celui du taux normal de cette taxe, eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ses opérations. Toutefois, l'article 268 bis du code général des impôts, applicable aux périodes litigieuses, prévoyait que lorsqu'une personne effectue concurremment des opérations se rapportant à plusieurs des catégories prévues aux articles du chapitre consacré à la taxe sur la valeur ajoutée, son chiffre d'affaires est déterminé en appliquant à chacun des groupes d'opérations les règles fixées par ces articles. S'agissant notamment d'un redevable soutenant réaliser des opérations relevant de taux d'imposition différents, lorsqu'il n'est pas à même d'établir la part de son chiffre d'affaires se rattachant à chaque taux d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, il est passible du taux le plus élevé.

6. Il résulte de l'instruction que M. C... et l'EURL DV Négoce réalisent des livraisons de paille défibrée qu'ils ont soumises au taux intermédiaire de taxe sur la valeur ajoutée prévu par les 3 et 4 de l'article 278 bis du code général des impôts. Il résulte de l'instruction que le défibrage de la paille consiste à lui faire subir un traitement mécanique afin de la dépoussiérer, de la réduire en brins courts et de la délignifier tout en occasionnant un éclatement de la cuticule qui enrobe les tissus lignifiés.

7. En premier lieu, le 4° de l'article 278 bis du code général des impôts prévoit la perception au taux intermédiaire de la taxe sur la valeur ajoutée pour les opérations notamment de vente des " Aliments simples ou composés utilisés pour la nourriture du bétail, des animaux de basse-cour (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'outre les conditions relatives à la nature même des produits, le bénéfice du taux intermédiaire est également subordonné à des conditions de destination. La notion d'aliments simples ou composés s'entend de toute matière première destinée à couvrir les besoins physiologiques de l'animal, consommable en l'état ou bien mélangée à d'autres aliments, présentée sous forme solide ou liquide et capable ou non de suffire à elle seule à assurer la ration journalière de l'animal.

8. Il résulte de l'instruction et il ressort notamment du site internet de la société DV Négoce que la paille défibrée est destinée de manière prépondérante à la réalisation de la litière des animaux d'élevage. De telles livraisons ne relèvent pas du taux intermédiaire prévu par le 4) de l'article 278 bis du code général des impôts. Ce n'est que de manière marginale qu'elle peut servir à l'alimentation du bétail, le traitement qu'elle a subi la rendant certes plus digeste mais n'a pas pour effet d'améliorer la valeur nutritive de la paille. Si les requérants ont pu ainsi vendre de la paille défibrée destinée par certains de leurs clients à l'alimentation du bétail, pouvant relever à ce titre du taux prévu par le 4° de l'article 278 bis, ils n'en justifient pas dans les conditions rappelées au point 5 ci-dessus, leurs factures n'en faisant pas mention et pas davantage leur comptabilité. Par suite, les requérants, qui ne sauraient utilement soutenir que la preuve de l'usage fait par leurs clients de la paille défibrée qu'ils leur livrent ne leur incombe pas, ne sont pas fondés à soutenir que les opérations qu'ils réalisent relèvent du taux intermédiaire prévu par le 4° de l'article 278 bis du code général des impôts.

9. En second lieu, le 3° de l'article 278 bis du code général des impôts prévoit la perception au taux intermédiaire de la taxe sur la valeur ajoutée pour les opérations notamment de vente des " Produits d'origine agricole (...) n'ayant subi aucune transformation ". L'article 79 de la loi 2015-1786 du 29 décembre 2015, applicable aux opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2016, a modifié cet article en réservant l'application de ce taux intermédiaire aux produits agricoles n'ayant subi aucune transformation et normalement destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ou dans la production agricole. La transformation de produits agricoles au sens de ces dispositions s'entend, pour les produits d'origine agricole, de toute opération modifiant substantiellement ces produits ou leur présentation par rapport à leur état d'origine au moyen d'une part importante de main d'œuvre ou, le cas échéant, d'un procédé technologique.

10. Il résulte de l'instruction et il ressort notamment du site internet de la société DV Négoce que le défibrage de la paille se distingue d'une simple opération de broyage et a pour effet de modifier la substance du produit dans les conditions et au moyen d'un appareillage mécanique analysés au point 6 ci-dessus. Un tel procédé doit s'analyser en une première transformation de la paille de nature à exclure la paille défibrée du bénéfice du taux intermédiaire prévu par le 3° de l'article 278 bis du code général des impôts.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... et l'EURL DV Négoce ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes. Par suite, leur requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... et de l'EURL DV Négoce est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., l'EURL DV Négoce et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 20NC02191

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02191
Date de la décision : 13/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL DE DIJON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-10-13;20nc02191 ?
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