Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SARL Alpes Bâti Décor a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1704988 du 31 août 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2020, et un mémoire non communiqué, enregistré le 22 mars 2022, la SARL Alpes Bâti Décor, représentée par Me Tournoud, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;
- la méthode d'évaluation utilisée par l'administration pour établir qu'elle n'aurait pas déclaré la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'ensemble des recettes encaissées est insuffisamment précise car elle ne permet pas d'identifier les opérations imposables et les encaissements correspondants.
Par un mémoire, enregistré le 11 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la société appelante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 14 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 14 avril 2022 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lesieux, première conseillère,
- les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique,
- et les observations de Me Hakkar, représentant la SARL Alpes Bâti Décor ;
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Alpes Bâti Décor, entreprise générale du bâtiment, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, étendue au 31 décembre 2015 en matière de taxe sur le chiffre d'affaires, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a notamment taxé à la taxe sur la valeur ajoutée des recettes omises reconstituées à partir des encaissements bancaires. Elle a en conséquence notifié à la SARL Alpes Bâti Décor, selon la procédure contradictoire, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 auxquels ont été appliqués des intérêts de retard et la majoration pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. La SARL Alpes Bâti Décor relève appel du jugement du 31 août 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue à l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compte de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.
3. La proposition de rectification du 13 juin 2016 adressée à la SARL Alpes Bâti Décor comporte, s'agissant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée collectée, l'indication de l'impôt concerné ainsi que celle de la période et des bases d'imposition retenues, et cite l'article 256, l'article 266 ainsi que le c) du 2 de l'article 269 du code général des impôts. Elle précise que la SARL a exercé, au cours de la période vérifiée, une activité de rénovation générale, peinture et revêtement des sols. Par ailleurs, cette proposition de rectification, pour justifier le redressement, mentionne que le service a constaté, après avoir reconstitué les encaissements à partir des comptes bancaires de la société et rapproché le chiffre d'affaires déclaré du montant total de ces encaissements, une omission de recettes taxables à la taxe sur la valeur ajoutée. Elle renvoie à des tableaux reproduits en annexes 1, 2 et 3 comportant la liste des opérations inscrites au compte " 411 - Clients ", prises en compte par le service pour la reconstitution des encaissements réellement effectués et précisant la date de l'opération, son libellé et son montant. Les éléments ainsi portés à la connaissance de la SARL Alpes Bâti Décor étaient suffisants pour permettre à cette dernière de formuler utilement des observations sur les rappels envisagés. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification doit donc être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. - Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) IV. - 1° Les opérations autres que celles qui sont définies au II, notamment (...) les travaux immobiliers (...) sont considérés comme des prestations de services (...) ". Aux termes de l'article 269 de ce code : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : / a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué (...) 2. La taxe est exigible : / a) Pour les livraisons et les achats visé au a du 1 (...) lors de la réalisation du fait générateur (...) c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits (...) ".
5. En l'absence de remise en cause du caractère régulier, sincère et probant de la comptabilité, l'administration fiscale ne peut, pour apporter la preuve qui lui incombe de ce que la société n'aurait pas déclaré la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'ensemble des recettes encaissées, recourir à une méthode d'évaluation moins précise que les écritures comptabilisées. Il lui est en revanche loisible de procéder à des tests de cohérence des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée en les rapprochant d'autres éléments tirés de la comptabilité de la société, tels que les soldes des produits et ceux des comptes clients, corrigés de leur variation entre l'ouverture et la clôture de la période considérée.
6. Il résulte de l'instruction, en particulier de la proposition de rectification du 13 juin 2016, que l'administration, qui a relevé certaines irrégularités affectant la comptabilité, ne l'a pas pour autant écartée. Pour établir les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, pour des montants de 13 469 euros, 7 590 euros et 6 056 euros au titre respectivement des périodes correspondant aux exercices clos en 2013, 2014 et 2015, l'administration s'est appuyée sur les encaissements enregistrés sur les comptes bancaires de la société ainsi que sur le compte " 411 - clients " de la société et a comparé le résultat ainsi obtenu à celui déclaré par la SARL Alpes Bâti Décor en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Contrairement aux affirmations de la société appelante, il résulte de l'instruction que l'administration fiscale n'a pas pris en compte l'ensemble des crédits figurant sur ses comptes bancaires mais a retenu les seuls encaissements se rapportant à l'activité de prestation de services qu'elle exerçait durant la période vérifiée, à savoir une activité de rénovation générale, peinture et revêtements des sols, en indiquant le libellé de chaque opération, ainsi qu'une somme de 5 000 euros correspondant à la vente d'un véhicule de marque Land Rover, le 6 mai 2013, pour laquelle la taxe sur la valeur ajoutée était exigible à la date de la livraison du bien. En outre, la confrontation de chaque encaissement au compte " 411 - Clients " a permis à l'administration de connaître le taux de taxe sur la valeur ajoutée auquel la somme en cause devait être soumis. Il en résulte que le moyen tiré de l'imprécision de la méthode employée par l'administration pour évaluer le montant de la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la période vérifiée doit être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que la SARL Alpes Bâti Décor n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. En conséquence, les conclusions présentées en appel au titre des frais du litige doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Alpes Bâti Décor est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Alpes Bâti Décor et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 5 mai 2022 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Lesieux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 juin 2022.
La rapporteure,
S. LesieuxLe président,
D. Pruvost
La greffière,
M.-A.... Pillet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY02868