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25/02/2021 | FRANCE | N°20LY00613

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 25 février 2021, 20LY00613


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Bastia, d'une part, d'annuler les arrêtés n°s 17-0109-BRH du 22 septembre 2017, 17-011-BRH du 30 octobre 2017, 17-0152-BRH du 29 novembre 2017, 17-0164-BRH du 26 décembre 2017 et n° 18-0019-BRH du 13 février 2018 par lesquels le préfet de la Corse-du-Sud l'a placée puis maintenue en congés de maladie ordinaire du 11 janvier 2017 au 2 mars 2018, à mi traitement du 11 avril 2017 au 10 janvier 2018 puis du 27 janvier 2018 au 2 mars 2018, ensemble les deux a

rrêtés n° 18-0006-BRH du 11 janvier 2018 par lesquels le préfet de la Cor...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Bastia, d'une part, d'annuler les arrêtés n°s 17-0109-BRH du 22 septembre 2017, 17-011-BRH du 30 octobre 2017, 17-0152-BRH du 29 novembre 2017, 17-0164-BRH du 26 décembre 2017 et n° 18-0019-BRH du 13 février 2018 par lesquels le préfet de la Corse-du-Sud l'a placée puis maintenue en congés de maladie ordinaire du 11 janvier 2017 au 2 mars 2018, à mi traitement du 11 avril 2017 au 10 janvier 2018 puis du 27 janvier 2018 au 2 mars 2018, ensemble les deux arrêtés n° 18-0006-BRH du 11 janvier 2018 par lesquels le préfet de la Corse-du-Sud a rejeté sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service de sa maladie, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie avec toutes les conséquences pécuniaires qui s'y attachent.

Par jugement n°s 1701297, 1800024, 1800149, 1800295, 1800305, 1800422 lu le 3 octobre 2019, le tribunal a fait droit à ces demandes.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 19 novembre 2019 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, le ministre de l'intérieur demande à cette juridiction d'annuler ce jugement et de rejeter les demandes de Mme E....

Vu l'ordonnance n°s 436508, 436512, 436515 du 20 janvier 2020 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'État a attribué le jugement de la requête à la cour administrative d'appel de Lyon ;

La présente requête a été réenregistrée au greffe de la cour de céans, le 13 février 2020, sous le n° 20LY00613.

Le ministre de l'intérieur soutient que :

- les moyens qu'il invoque en cause d'appel sont de nature à entraîner l'annulation du jugement attaqué et le rejet des demandes présentées au tribunal par Mme E... ;

- à cet égard, le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé et fait droit à des demandes qui relevaient d'un non-lieu à statuer, les arrêtés litigieux portant placement en congés de maladie ayant été retirés en cours d'instance ;

- le moyen tiré du défaut de motivation des arrêtés n° 18-0006-BRH du 11 janvier 2018 manque en fait ;

- les circonstances de l'espèce permettent d'établir que la maladie de Mme E... provient de cause étrangère au service.

Par mémoire enregistré le 11 août 2020, Mme E..., représentée par Me Leturcq, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'État d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucun moyen de la requête n'est fondé ;

- l'arrêté du 11 janvier 2018 est insuffisamment motivé ;

- le 11 janvier 2017 a eu lieu un accident de service imputable au service, suivi d'une maladie professionnelle.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Djebiri, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me Augoyard, substituant Me Leturcq, pour Mme E... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., attachée principale d'administration employée au sein de la préfecture de la Corse-du-Sud, a transmis à son administration une déclaration d'accident du travail survenu le 11 janvier 2017. Par quatre arrêtés en date des 22 septembre 2017, 30 octobre 2017, 29 novembre 2017 et 26 décembre 2017, le préfet de la Corse-du-Sud a placé initialement Mme E... en congé pour maladie ordinaire à plein traitement du 11 janvier au 10 avril 2017, puis à demi-traitement pour la période allant du 11 avril 2017 au 10 janvier 2018 et de nouveau à plein traitement du 11 janvier au 26 janvier 2018. Par des arrêtés du 11 janvier 2018, le préfet de la Corse-du-Sud a refusé de reconnaître sa pathologie comme imputable au service puis, par un arrêté du 13 février 2018, a prolongé son placement en congés de maladie ordinaire à demi-traitement pour la période allant du 27 janvier 2018 au 2 mars 2018. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Bastia a fait droit aux demandes de Mme E... d'annulation des arrêtés en litige et de reconnaissance d'imputabilité au service de sa maladie.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'instruction que, par arrêté n° 18-0144-BRH du 30 octobre 2018, le préfet de la Corse-du-Sud a retiré les arrêtés n°s 17-0109-BRH du 22 septembre 2017, 17-0117-BRH du 30 octobre 2017, 17-0152-BRH du 29 novembre 2017, 17-0164-BRH et du 26 décembre 2017 plaçant puis maintenant Mme E... en congés de maladie ordinaire du 11 janvier 2017 au 26 janvier 2018 (à mi traitement du 11 avril 2017 au 10 janvier 2018). Il a, pour la totalité de la période, placé celle-ci en congés de longue maladie puis de longue durée avec maintien du plein traitement. Par ce même arrêté, il a retiré l'arrêté n° 18-00019 BRH du 13 février 2018 accordant une prolongation de congé de maladie ordinaire du 27 janvier 2018 au 2 mars 2018, et a placé Mme D... en congé de longue durée du 11 janvier 2018 au 31 mai 2018 en précisant dans son article 3 " pendant ces périodes Mme E... conserve le bénéfice de l'intégralité de son traitement indiciaire, de l'indemnité de résidence ainsi que du supplément familial de traitement ". Alors qu'il n'est pas contesté en défense que cet arrêté, portant retrait des arrêtés antérieurs en tant qu'ils ne permettaient pas à Mme E... de bénéficier d'un plein traitement pendant les périodes de congés de maladie en cause, était devenu définitif avant que le tribunal ne statue, le jugement attaqué, qui n'a pas prononcé de non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins d'annulation dirigées contre ces cinq arrêtés ainsi que les demandes d'injonction en rétablissement de plein traitement y afférents, est donc irrégulier et doit être annulé dans cette mesure.

3. Il y a lieu pour la cour d'évoquer les conclusions en cause et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur la légalité des arrêtés du 11 janvier 2018 :

4. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, dans sa rédaction applicable au 11 janvier 2017, date de manifestation de la pathologie dont souffre Mme E... : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ".

5. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. Doit être regardé comme un accident un événement précisément déterminé et daté, caractérisé par sa violence et sa soudaineté, à l'origine de lésions ou d'affections physiques ou psychologiques qui ne trouvent pas leur origine dans des phénomènes à action lente ou répétée auxquels on ne saurait assigner une origine et une date certaines.

6. Mme E... soutient que les troubles dont elle souffre sont imputables à la notification de son changement de poste qu'il lui a été faite. Toutefois, la notification d'une affectation sur un poste qui n'était pas l'un de ceux pour lesquels Mme E... avait manifesté sa préférence, mais qui lui avait été désigné de longue date après concertation, ne présente aucun caractère de soudaineté et relève du fonctionnement normal du service. Il suit de là que pour être imputée au service, la pathologie non accidentelle qui s'est manifestée à compter du 11 janvier 2017 doit avoir été provoquée ou aggravée par les conditions d'exécution du service.

7. Les éléments qu'elle produit ne permettent pas d'établir que son état de santé, aurait un lien direct, certain et déterminant avec ses conditions de travail. En particulier Mme E... n'établit pas l'existence de circonstances particulières à la préfecture de la Corse-du-Sud susceptibles d'expliquer objectivement le développement d'une pathologie psychique au long cours.

8. C'est, dès lors, à tort que les premiers juges se sont fondés, pour annuler les deux arrêtés n° 18-0006-BRH du 11 janvier 2018 et enjoindre à l'administration de retenir l'imputabilité au service de la maladie ayant justifié les congés pris à compter du 11 janvier 2017 ainsi qu'à la prise en charge des frais médicaux exposés à partir de la même date, sur le motif tiré de ce que le préfet avait commis une erreur d'appréciation en ne reconnaissant pas l'imputabilité au service de son état de santé.

9. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme E... tant devant le tribunal administratif de Bastia qu'en appel.

10. Les arrêtés en litige, qui visent les lois n° 83-634 du 13 juillet 1983 et n° 84-16 du 11 janvier 1984 ainsi que les éléments de l'enquête administrative, exposent les raisons pour lesquelles il a été considéré que l'imputabilité au service de son état de santé n'était pas établie, et comportent ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré d'une motivation insuffisante doit, dès lors, être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé ses arrêtés du 11 janvier 2018 et à demander l'annulation de ce jugement et le rejet des demandes de première instance de Mme E....

Sur les conclusions relatives aux frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mise à charge de l'État qui n'est pas la partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions de Mme E... en ce sens doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°s 1701297, 1800024, 18000149, 18000295, 18000305, 18000422 du tribunal administratif de Bastia du 9 octobre 2019 est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des demandes de Mme E... tendant à l'annulation des arrêtés des 22 septembre 2017, 30 octobre 2017, 29 novembre 2017, 26 décembre 2017 et 13 février 2018 ainsi que les demandes d'injonction en rétablissement de plein traitement y afférents.

Article 3 : Le surplus des conclusions des demandes de Mme E... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme C... E....

Délibéré après l'audience du 4 février 2021 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président ;

Mme Djebiri, premier conseiller ;

Mme Burnichon, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 février 2021.

N° 20LY00613 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00613
Date de la décision : 25/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : SHIRLEY LETURCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-25;20ly00613 ?
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