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03/03/2022 | FRANCE | N°20LY00040

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 03 mars 2022, 20LY00040


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL New Asia a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer :

- la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes ;

- la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 11 octobre 2008 au 31 décembre 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 17210

68-1827563 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL New Asia a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer :

- la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes ;

- la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 11 octobre 2008 au 31 décembre 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1721068-1827563 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 janvier 2020 et 13 novembre 2020, la SARL New Asia, représentée par Me Tournoud, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 novembre 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.

Elle soutient que :

- c'est à tort que l'administration a refusé de donner suite à la saisine de l'interlocuteur départemental, demandée par la lettre du 16 août 2013 avant la mise en recouvrement des impositions en litige ;

- l'administration a méconnu la portée de l'obligation générale de loyauté de l'action administrative en s'engageant avant la mise en recouvrement à accorder au contribuable des délais de paiements de trente-six mois, pour se défaire de cette promesse, unilatéralement après la mise en recouvrement ;

- l'avis de mise en recouvrement n° 140100023 relatif aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ne permet pas de comprendre en quoi la portée du litige soumis à la commission départementale a été réduite, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, à 88 748 euros (69874 + 18874), alors qu'elle avait été arrêtée à 137 180 euros en droits après la réponse aux observations du contribuable du 5 avril 2012 qui a confirmé intégralement le montant de 137 180 euros annoncé par la proposition de rectification du 20 décembre 2011, méconnaît l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales ;

- d'une part, la commission n'a pas entériné les bases d'imposition notifiées par le service, et d'autre part, le service n'a pas établi les impositions en litige conformément à l'avis de la commission ; dès lors, en application de l'article L 192 du livre des procédures fiscales, l'administration supporte la charge de la preuve du bien-fondé des impositions en litige ;

- la conduite du calcul de la reconstitution devait, pour bénéficier d'une précision suffisante, tenir compte d'une pondération de la consommation en fonction du nombre de repas servis en semaine ou le week-end, matin et soir, dans la mesure où les constantes retenues sont différentes chacun de ces jours-là ; de plus la reconstitution ne tient pas compte de l'existence d'une partie bar et d'un taux de perte de 12 % au titre de l'exercice clos en 2010 ; ainsi, elle est radicalement viciée dans son principe.

Par des mémoires enregistrés les 11 juin 2020 et 14 décembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la transaction signée avec la société, le 3 janvier 2014 a nécessairement mis fin à la procédure de rectification contradictoire et la demande de recours hiérarchique de second niveau est devenue sans objet ; de plus, la requérante ne produit aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquelles l'administration aurait conclu la transaction en sachant qu'elle allait la dénoncer, dans le but de la priver de la possibilité de saisir l'interlocuteur départemental ;

- l'avis de mise en recouvrement adressé à la requérante renvoyant à la fois à la proposition de rectification du 20 décembre 2011 et au courrier du 3 janvier 2014 l'informant du montant final des rehaussements respecte les dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales ;

- il appartient à la requérante d'établir l'exagération des sommes en litige ;

- la requérante n'établit pas que la méthode du vérificateur aboutit à des montants incompatibles avec la réalité et les possibilités de l'exploitation, et par suite que la reconstitution serait viciée dans son principe.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- les observations de Me Hakkar, représentant la SARL New Asia ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 février 2022, présentée pour la SARL New Asia ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL New Asia qui exerce une activité de restauration asiatique a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 7 mai 2008 au 31 décembre 2010. Par une proposition de rectification du 20 décembre 2011, l'administration a rejeté sa comptabilité, a procédé à une reconstitution de son chiffre d'affaires et lui a notifié des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2009 et 2010, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er octobre 2008 au 31 décembre 2010, ainsi que des pénalités correspondantes. La SARL New Asia relève appel du jugement du 19 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités dont elles ont été assorties.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'après avoir exercé un recours hiérarchique auprès de l'inspecteur principal, par un courrier du 16 août 2013, la SARL New Asia a informé l'administration qu'elle confirmait ses propositions de règlement amiable du conflit tout en indiquant que " s'il devait s'avérer que notre désaccord persiste, de bien vouloir soumettre ce dossier à l'interlocuteur départemental ". Le 3 janvier 2014, la SARL New Asia a conclu avec l'administration un contrat de transaction par lequel elle reconnaît " le bien-fondé et la régularité de l'imposition visée (impôt en principal, pénalités et intérêts) et renonce à engager toute action contentieuse concernant cette imposition ". Cette transaction a mis fin à la procédure contradictoire de redressement et sa non-exécution n'a pas eu pour effet de rouvrir cette procédure contradictoire. Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration n'était pas tenue de donner suite à sa demande de saisine de l'interlocuteur départemental. Enfin, la requérante n'est pas plus fondée à soutenir que l'administration aurait dû lui permettre de saisir l'interlocuteur départemental à la suite du rejet implicite de sa demande de transaction qui serait né du silence gardé à l'expiration du délai mentionné par les dispositions de l'article 2 du décret n° 2001-907 du 3 octobre 2001 pris pour l'application au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie de l'article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, dès lors, ainsi qu'il a été dit, que l'administration a accepté la transaction demandée.

3. En deuxième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait méconnu son obligation générale de loyauté notamment en concluant la transaction tout en sachant qu'elle allait la dénoncer dans le but de priver la requérante de saisir l'interlocuteur départemental.

4. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. (...) ". Aux termes de l'article R 256-1 du même livre : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. (...) Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications ".

5. Il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement du 28 janvier 2014 se réfère à la proposition de rectification du 20 décembre 2011 d'où les redressements sont issus, à la réponse aux observations du contribuable du 5 avril 2012 qui l'a suivie, à la notification de l'avis de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 18 avril 2013 l'informant du montant des droits mis à sa charge et à la lettre d'information du 3 janvier 2014 qui fait suite à l'entretien qui s'est déroulé avec le supérieur hiérarchique du vérificateur et à l'issue duquel les montants des droits, intérêts de retard et majorations ont été réduits et qui correspondent à ceux mis finalement en recouvrement. Ainsi, et alors même que cet avis de mise en recouvrement n'a pas fait référence au document intermédiaire en date du 10 septembre 2012 qui a informé la société d'une modification à la baisse des droits et pénalités, à la suite d'une erreur dans la proposition de rectification du 20 décembre 2011 au niveau du tableau des conséquences financières en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2010, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions précitées ont été méconnues.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. / Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69. ".

7. Ainsi que le fait valoir la requérante qui ne conteste pas le rejet de sa comptabilité en raison de graves irrégularités, il résulte de l'instruction que les impositions en litige n'ont pas été établies conformément, à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, dès lors que l'administration s'est écartée de cet avis au demeurant à l'avantage de la société. Dans ces conditions, la preuve de l'exagération des impositions en litige incombe à l'administration.

8. En second lieu, pour reconstituer le chiffre d'affaire de l'ensemble de l'activité exercée par la SARL New Asia, l'administration a utilisé la méthode dite " des liquides " en déterminant le rapport existant entre le chiffre d'affaires correspondant à la vente des liquides et le chiffre d'affaires total à partir des données figurant sur les tickets " Z " pour chaque exercice en litige.

9. Si la requérante fait valoir que les ratios ainsi obtenus ne tiennent pas compte de la variation du prix des menus entre les jours de la semaine, les jours de week-end et les jours fériés, ainsi que de la différence du nombre de repas servis entre ces différents jours, elle n'apporte pas plus en appel qu'en première instance, d'élément permettant d'établir que ces ratios ne seraient pas représentatifs de la réalité de son activité, et qu'ils auraient dû être pondérés. Elle n'apporte pas plus d'élément permettant d'établir qu'elle aurait une activité " bar " que le vérificateur aurait omis de prendre en compte dans la détermination de ces ratios. Enfin, si la requérante demande que le taux de perte de 12 % retenu au titre de l'exercice clos en 2009, soit également retenu pour l'exercice clos en 2010, elle n'apporte aucun élément permettant de justifier le bien-fondé de sa demande alors que par un courrier adressé le 11 juillet 2013, à l'inspecteur principal des finances publiques, elle a demandé expressément que le taux de 8 % soit retenu au titre de cet exercice. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration, qui supporte la charge de la preuve, aurait appliqué une méthode de reconstitution ne tenant pas compte des conditions réelles d'exploitation de la société, et devant ainsi être regardée comme viciée dans son principe ou excessivement sommaire.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL New Asia n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL New Asia est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL New Asia et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 3 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 mars 2022.

2

N° 20LY00040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00040
Date de la décision : 03/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Pouvoirs du juge fiscal.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : ARBOR TOURNOUD PIGNIER WOLF

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-03;20ly00040 ?
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