Vu la procédure suivante :
Par un arrêt du 3 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Douai, saisie de la requête présentée par M. B... F... et autres, après avoir relevé que le moyen tiré de l'incompétence des auteurs de la délibération du 30 septembre 2014 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune d'Hazebrouck était de nature à entacher d'illégalité cette délibération et après avoir écarté l'ensemble des autres moyens, a sursis à statuer sur la légalité de cette délibération jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la notification de cet arrêt pour permettre à la communauté de communes de Flandre intérieure de prendre une nouvelle délibération régularisant ce vice.
Par un mémoire enregistré le 15 janvier 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 15 février 2021, non communiqué, M. F... et autres, représentés par Me K... J..., demandent à la cour :
1°) de surseoir à statuer sur leur demande d'annulation du jugement du 11 juillet 2016 du tribunal administratif de Lille et de la délibération du 30 septembre 2014 ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler la délibération du 15 décembre 2020 de la communauté de communes de Flandre intérieure qui a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune d'Hazebrouck ;
3°) de mettre à la charge de la communauté de communes de Flandre intérieure la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller,
- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,
- et les observations de M. K... F..., et de Me G... C..., représentant la communauté de communes de Flandre Intérieure et la commune d'Hazebrouck.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. Par un arrêt du 3 novembre 2020, la cour a prononcé un sursis à statuer sur la légalité de la délibération du 30 septembre 2014 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune d'Hazebrouck jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois imparti à la communauté de communes de Flandre intérieure pour permettre la régularisation de cette délibération. Par des pièces enregistrées les 23 décembre 2020 et 11 janvier 2021, la communauté de communes de Flandre intérieure et la commune d'Hazebrouck ont produit la délibération du 15 décembre 2020 régularisant celle du 30 septembre 2014. Les appelants demandent à ce qu'il soit sursis à statuer sur leur demande et, à titre subsidiaire, l'annulation de la délibération du 15 décembre 2020.
Sur les conclusions à fin de sursis à statuer :
2. Même si un pourvoi en cassation a été formé à l'encontre de l'arrêt du 3 novembre 2020, il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, de faire droit à ces conclusions.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Aux termes de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme : " Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre un schéma de cohérence territoriale, un plan local d'urbanisme ou une carte communale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'une illégalité entachant l'élaboration ou la révision de cet acte est susceptible d'être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation et pendant lequel le document d'urbanisme reste applicable, sous les réserves suivantes : / 1° En cas d'illégalité autre qu'un vice de forme ou de procédure, pour les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité est susceptible d'être régularisée par une procédure de modification prévue à la section 6 du chapitre III du titre IV du livre Ier et à la section 6 du chapitre III du titre V du livre Ier ; / 2° En cas d'illégalité pour vice de forme ou de procédure, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité a eu lieu, pour les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme, après le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables. / Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / Si, après avoir écarté les autres moyens, le juge administratif estime que le vice qu'il relève affecte notamment un plan de secteur, le programme d'orientations et d'actions du plan local d'urbanisme ou les dispositions relatives à l'habitat ou aux transports et déplacements des orientations d'aménagement et de programmation, il peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce ".
4. Il résulte de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme que les parties à l'instance ayant donné lieu à la décision de sursis à statuer en vue de permettre la régularisation de l'acte attaqué ne peuvent contester la légalité de l'acte pris par l'autorité administrative en vue de cette régularisation que dans le cadre de cette instance. Elles peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices affectant sa légalité externe et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant-dire droit. Elles ne peuvent soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse d'un moyen déjà écarté par la décision avant-dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.
En ce qui concerne l'adoption d'un plan local d'urbanisme intercommunal :
5. Si les appelants soutiennent que la régularisation sur le fondement de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme n'est plus possible dès lors que, par une délibération du 27 janvier 2020, la communauté de communes de Flandre intérieure a adopté un plan local d'urbanisme intercommunal, il résulte de ce qui a été dit au point précédent, en tout état de cause, qu'un tel moyen est sans influence sur la légalité de la délibération de régularisation.
En ce qui concerne l'article L. 123-1-1 du code de l'urbanisme :
6. Pour la même raison, le moyen tiré de ce que la délibération du 15 décembre 2020 méconnaît l'article L. 123-1-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur au 30 septembre 2014, au motif qu'elle intervient plus de deux ans après l'intégration de la commune d'Hazebrouck au sein de la communauté de communes, est inopérant.
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'arrêté du 30 mai 2013 :
7. L'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. S'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte.
8. À l'appui de leur demande d'annulation de la délibération du 15 décembre 2020, les appelants se prévalent, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'arrêté du 30 mai 2013 par lequel le préfet du Nord a créé la communauté de communes de Flandre intérieure en y rattachant d'office la commune d'Hazebrouck.
9. Ils invoquent uniquement l'inconstitutionnalité du rattachement d'office d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale, qui a été, selon eux, prononcée par la décision du Conseil constitutionnel n° 2014-391 du 25 avril 2014. Les appelants ont ainsi entendu poser une question prioritaire de constitutionnalité des paragraphes II et III de l'article 60 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010, sur le fondement duquel l'arrêté du 30 mai 2013 a été pris.
10. Aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 : " Devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation, le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé ". La demande n'ayant pas été présentée dans un écrit distinct et motivé est donc irrecevable.
11. En tout état de cause, si par sa décision du 25 avril 2014, le Conseil constitutionnel a prononcé l'inconstitutionnalité de l'article L. 5210-1-2 du code général des collectivités territoriales au motif que, dès lors que cet article ne prévoyait ni la prise en compte du schéma départemental de coopération intercommunale préalablement établi pour décider du rattachement d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale ni aucune consultation des conseils municipaux intéressés par ce rattachement et en particulier du conseil municipal de la commune dont le rattachement est envisagé, il portait à la libre administration des communes une atteinte manifestement disproportionnée, le paragraphe II de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 prévoyait une telle consultation et la prise en compte du schéma départemental. Par sa décision n° 2013-315 du 26 avril 2013, le Conseil constitutionnel a d'ailleurs déclaré que le paragraphe III de ce même article 60 était conforme à la Constitution. La question soulevée est, dans ces conditions, dépourvue de caractère sérieux.
En ce qui concerne la compétence de la communauté de communes :
12. La compétence de l'auteur de l'acte de régularisation doit être appréciée à la date à laquelle cet acte est adopté et non à la date de l'acte à régulariser.
13. Par sa décision n° 419349 du 12 février 2020, le Conseil d'Etat a jugé que " un nouvel arrêté du préfet du Nord du 11 décembre 2015, entré en vigueur le 1er janvier 2016, procède, après avoir constaté que les membres de la communauté de communes de Flandre intérieure ont défini l'intérêt communautaire attaché aux compétences exercées par la communauté de communes de Flandre intérieure et décidé de lui transférer les compétences afférentes, à l'élargissement du périmètre des compétences de cette communauté de communes. Celle-ci exerce désormais, au titre des compétences obligatoires, la compétence en matière de plan local d'urbanisme intercommunal ".
14. Il résulte de ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté du 15 décembre 2020 de la communauté de communes de Flandre intérieure, approuvant le plan local d'urbanisme de la commune d'Hazebrouck, a été pris par une autorité incompétente en méconnaissance des articles L. 5214-16 et L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, prévoyant respectivement les compétences des communautés de communes, et notamment la définition des compétences d'intérêt communautaire, ainsi que les conditions de fusion des établissements publics de coopération intercommunale.
En ce qui concerne l'information des membres de l'assemblée délibérante :
15. Aux termes de l'article L. 5211-1 du code général des collectivités territoriales : " Les dispositions du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au fonctionnement du conseil municipal sont applicables au fonctionnement de l'organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre. (...) Pour l'application des articles L. 2121-11 et L. 2121-12, ces établissements sont soumis aux règles applicables aux communes de 3 500 habitants et plus (...) ". L'article L. 2121-12 du même code dispose : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal ".
16. Le défaut d'envoi, avec la convocation aux réunions de l'assemblée délibérante d'un établissement public de coopération intercommunale, de la note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour prévue à l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le président de cette assemblée n'ait fait parvenir à ses membres, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.
17. Il ressort des pièces du dossier que la note explicative de synthèse, qui mentionnait le contexte de la régularisation de la délibération adoptant le plan local d'urbanisme d'Hazebrouck, nécessaire après l'arrêt de la cour du 3 novembre 2020, comportait les éléments suffisants pour permettre aux membres de l'assemblée délibérante d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de la mesure de régularisation envisagée, alors même que n'ont pas été rapportés dans cette note le parti retenu par le projet de plan, le sens de l'avis du commissaire-enquêteur et les modifications apportées au projet après l'enquête publique, tous éléments qui avaient déjà été soumis à l'assemblée délibérante. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 5211-1 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.
18. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le vice retenu par la cour en son arrêt du 3 novembre 2020 a été régularisé, d'autre part, que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 11 juillet 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 30 septembre 2014 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune d'Hazebrouck, régularisée par la délibération du 15 décembre 2020 de la communauté de communes de Flandre intérieure.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
19. D'une part, les conclusions présentées par les appelants, partie perdante, sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées.
20. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la communauté de communes de Flandre intérieure et de la commune d'Hazebrouck les frais exposés par elles dans la présente instance et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F... et autres est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la communauté de communes de Flandre intérieure et de la commune d'Hazebrouck présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me K... J... pour M. B... F..., Mme D... F..., M. E... F..., Mme I... A... et M. H... A..., à la communauté de communes de Flandre Intérieure et à la commune d'Hazebrouck et à la ministre de la transition écologique.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Nord.
N°20DA00261
2