Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) MC Legal et Me C..., agissant en qualité de mandataire judiciaire de la société MC Legal, ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle la société a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2013, ainsi que des intérêts de retard correspondants.
Par un jugement n° 1700859 du 22 janvier 2019, le Tribunal administratif de Paris, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les intérêts de retard, dégrevés en cours d'instance, a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 mars 2019 et un mémoire en réplique enregistré le 12 novembre 2019, la société MC Legal et Me C..., agissant en qualité de mandataire judiciaire de la société MC Legal, représentés par Me B..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700859 du Tribunal administratif de Paris en date du 22 janvier 2019 en tant qu'il est défavorable à la société MC Legal ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle la société MC Legal a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que la société MC Legal a été privée de la possibilité d'effectuer un recours auprès du supérieur hiérarchique du vérificateur, en méconnaissance de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ;
- il n'est nulle part spécifié un délai ou une chronologie quelconque pour saisir le supérieur hiérarchique ;
- dans la réponse aux observations du contribuable, l'administration a indiqué qu'un rendez-vous avec le supérieur hiérarchique allait être proposé par courrier séparé ;
- le courrier du 1er octobre 2015 adressé à tort à Me C... ne propose pas un réel entretien ; aucune proposition d'entretien n'a été adressée au gérant, dont la qualité de représentant de la société n'avait pas été contestée ;
- l'avis de vérification mentionnait la possibilité de saisir l'inspecteur départemental en cas de difficultés en cours de vérification ;
- l'administration et la Cour administrative d'appel de Paris ont précédemment admis que la valeur du fonds de clientèle pouvait être estimée au montant du chiffre d'affaires annuel ;
- l'administration ne peut pas revenir sur son appréciation sans méconnaître l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
- le fait de comptabiliser une provision pour dépréciation du fonds de commerce est admise depuis une circulaire du 3 mai 2017 référencée BOIBIC-PROV-40-10 n°70 ;
- la provision pour dépréciation résulte bien d'une baisse importante du chiffre d'affaires accompagnée d'une baisse notable des bénéfices, dans le contexte d'un départ à la retraite de son gérant.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société MC Legal ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ;
- la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) MC Legal, société d'avocats, a été placée en redressement judiciaire par un jugement du Tribunal de grande instance de Paris en date du 2 juillet 2015, qui a également désigné Me C... en qualité de mandataire judiciaire. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2013 à l'issue de laquelle le service a mis à sa charge une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2013, assortie des intérêts de retard. Par un jugement en date du 22 janvier 2019, le Tribunal administratif de Paris, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les intérêts de retard dont l'administration avait prononcé le dégrèvement en cours d'instance, a rejeté les conclusions de leur demande tendant à la décharge de cette imposition. La société MC Legal et Me C..., en qualité de mandataire judiciaire de la société, font appel de ce jugement en tant qu'il leur est défavorable.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans la rédaction applicable à l'espèce : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ". Le paragraphe 5 du chapitre III de la même charte indiquait aux contribuables que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...). Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ". Ces dispositions assurent au contribuable qui en fait la demande la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur puis avec l'interlocuteur départemental dans les conditions qu'elles précisent.
3. Il résulte de l'instruction que, dans ses observations du 1er septembre 2015 en réponse à la proposition de rectification du 3 juillet 2015, la société MC Legal a sollicité un entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur. Dans sa réponse à ces observations, le service a informé la société qu'un rendez-vous avec le supérieur hiérarchique allait lui être proposé par un courrier séparé et, par un courrier du 1er octobre 2015 dont une copie a été adressée au gérant de la société MC Legal, l'administration a proposé un rendez-vous le 19 octobre 2015 au mandataire judiciaire. Par un courrier du 7 octobre 2015, celui-ci a informé l'administration qu'il n'avait pas qualité pour représenter la société dont le dirigeant n'avait pas été dessaisi et a précisé que celui-ci " se présentera en personne, ou se fera représenter " au rendez-vous fixé le 19 octobre 2015. Enfin, par un courrier du 26 octobre 2015 adressé au représentant légal de la société, le service a relevé que celui-ci n'avait pas répondu au courrier du 1er octobre 2015 dont il avait reçu une copie, qu'il ne s'était pas présenté au rendez-vous du 19 octobre 2015.
4. D'une part, si la société MC Legal fait valoir que, l'avis de vérification qui lui a été adressé mentionnait que " Si vous rencontrez des difficultés dans le déroulement et lors de la conclusion de cette vérification, vous pouvez vous adresser à l'inspecteur principal des finances publiques dont les coordonnées suivent (...) ", elle ne justifie d'aucune demande de rencontre avec le supérieur hiérarchique du vérificateur exprimée au cours de la vérification de comptabilité, dont la fin est matérialisée par la notification de la proposition de rectification.
5. D'autre part, l'administration a, malgré le caractère prématuré de la demande d'entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur formulée par la société MC Legal en réponse à la proposition de rectification, fixé un rendez-vous pour lui permettre de bénéficier d'un entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur. Si le courrier du 1er octobre 2015 a été adressé par erreur au mandataire judiciaire, le gérant de la société MC Legal, qui ne pouvait ignorer qu'il était le représentant légal de la société, a été informé du rendez-vous fixé et a été ainsi mis en mesure de bénéficier d'un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur. Dans ces conditions, alors que le représentant légal de la société requérante n'a répondu ni au courrier du 1er octobre 2015, ni à celui du 26 octobre 2015, elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de cette garantie.
Sur le bien-fondé des impositions :
6. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, (...), notamment: / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient effectivement été constatées dans les écritures de l'exercice (...) ". Aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au code général des impôts : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de matière irréversible, notamment les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donne lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts ". Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise qui constate, par suite d'évènements en cours à la clôture de l'exercice, une dépréciation non définitive d'un élément de son actif immobilisé, peut, alors même que celui-ci est amortissable, constituer une provision dont le montant ne peut excéder, à la clôture de l'exercice, la différence entre la valeur nette comptable et la valeur probable de réalisation de l'élément dont il s'agit, à la condition notamment que le mode de calcul de la provision soit propre à exprimer avec une approximation suffisante le montant probable de cette dépréciation.
7. Pour justifier la provision pour dépréciation de 196 033 € constituée à la clôture de l'exercice 2013, la société requérante invoque une baisse du chiffre d'affaires depuis 2007, accentuée par le départ à la retraite de son gérant le 1er juillet 2010 et fait valoir que ce montant a été déterminé par la différence entre la valeur estimée du fonds basée sur le chiffre d'affaires de l'exercice 2013 et la valeur d'origine du fonds. Toutefois, à la clôture de l'exercice 2013, le chiffre d'affaires et le bénéfice avant déduction de la provision étaient supérieurs à ceux des deux années précédentes. Une dépréciation du fonds de commerce à cette date n'est donc pas établie par la société requérante.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la société MC Legal n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société MC Legal et de Me C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée MC Legal, à Me C..., agissant en qualité de mandataire judiciaire de la société MC Legal et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 25 juin 2020, à laquelle siégeaient :
M. Formery, président de chambre,
Mme Poupineau, président-assesseur,
M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juillet 2020.
Le président,
S.-L. FORMERY
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA01080