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28/02/2020 | FRANCE | N°19NT00588

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 28 février 2020, 19NT00588


Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 6 février 2019, 14 août 2019 et 4 octobre 2019, l'association Bien vivre à la campagne, M. P... AF..., M. AS... H... et Mme AP... AJ..., M. AG... Q..., M. Z... T..., M. L... AD...,

M. AR... AB..., M. AH... K... et Mme AM... X...-K..., Mme AN... N... et M. C... AU..., M. AR... U..., M. et Mme O... et AV... AW..., M. et Mme AL... et AX... BA..., M. AO... X..., M. et Mme S... et AY... AZ..., M. I... G..., M. AR... AQ..., M. A... W...,

M. AK... AE... et Mme V

... AI..., M. D... E... et Mme AT... F... et la société pour la protection des ...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 6 février 2019, 14 août 2019 et 4 octobre 2019, l'association Bien vivre à la campagne, M. P... AF..., M. AS... H... et Mme AP... AJ..., M. AG... Q..., M. Z... T..., M. L... AD...,

M. AR... AB..., M. AH... K... et Mme AM... X...-K..., Mme AN... N... et M. C... AU..., M. AR... U..., M. et Mme O... et AV... AW..., M. et Mme AL... et AX... BA..., M. AO... X..., M. et Mme S... et AY... AZ..., M. I... G..., M. AR... AQ..., M. A... W...,

M. AK... AE... et Mme V... AI..., M. D... E... et Mme AT... F... et la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, représentés par Me R..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2018 par lequel le préfet du Morbihan a délivré à la société d'exploitation du parc éolien du Moulin neuf une autorisation unique pour la réalisation d'un parc éolien dit " du Moulin neuf " sur la commune de Malansac ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 1 500 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable dès lors que leur recours a été notifié à l'auteur et au bénéficiaire de l'acte attaqué et qu'ils ont intérêt pour agir ;

- il appartiendra à la préfecture de justifier que le secrétaire général avait compétence pour signer l'arrêté en litige ;

- l'article R. 122-7 du code de l'environnement a été méconnu ;

- le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur n'ont pas été suffisamment motivées ;

- l'étude d'impact était insuffisante s'agissant de son état initial, de la prise en compte des habitations situées à proximité du projet, des effets sonores du projet éolien, de l'impact environnemental du raccordement au poste source et de l'existence d'une zone humide ;

- la demande fait totalement fi de la qualité des paysages situés aux alentours alors même que le projet est susceptible de leur porter atteinte ;

- le règlement du plan local d'urbanisme de Malansac, qui a intégré la nécessité de protéger le site exceptionnel Natura 2000 de la vallée de l'Arz, n'a pas été respecté ;

- l'autorisation accordée l'a été au mépris des dispositions des articles L. 511-1 et

L. 512-1 du code de l'environnement ;

- le projet est de nature à porter atteinte à la préservation de la faune ;

- le dossier de demande d'autorisation unique était insuffisant au regard des dispositions des articles L. 323-11 et R. 323-40 du code de l'énergie.

Par lettre enregistrée le 11 mars 2019, M. AS... H... a été désigné, par son mandataire, Me Collet, représentant unique, destinataire de l'arrêt à venir.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 4 avril 2019, Mme L... B..., représentée par Me Collet, demande à la cour d'admettre son intervention volontaire, et en conséquence d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2018 par lequel le préfet du Morbihan a délivré à la société d'exploitation du parc éolien du Moulin neuf une autorisation unique pour la réalisation d'un parc éolien dit " du Moulin neuf " sur la commune de Malansac.

Elle indique que son intervention est recevable qu'elle s'associe aux moyens développés par l'association bien vivre à la campagne et autres dans l'instance n°19NT00588.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 juin 2019, 10 septembre 2019 et 31 octobre 2019, la société d'exploitation du parc éolien du Moulin neuf, représentée par Me Elfassi, conclut au rejet de la requête et demande que soit fixée une date au-delà de laquelle des moyens nouveaux ne pourront plus être invoqués par les requérants et que soit mise à la charge de chacun des requérants la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'il n'est pas établi par les requérants que les formalités obligatoires prévues à l'article 25 du décret n° 2014-450 ont été accomplies et que les requérants ne démontrent pas un intérêt à agir contre l'acte attaqué ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les requérants personnes physiques n'ont pas intérêt à agir contre l'acte attaqué ;

- les moyens soulevés à l'encontre de la convention ne sont pas fondés ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Guen, représentant les requérants, et de Me Berges représentant la société d'exploitation du parc éolien du Moulin neuf.

Considérant ce qui suit :

1. Par une demande déposée et jugée complète le 28 décembre 2016, la " société d'exploitation du parc éolien du Moulin Neuf " (S.E.P.E du Moulin Neuf) a sollicité une autorisation unique d'exploiter, dans la commune de Malansac, une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent regroupant trois aérogénérateurs d'une puissance maximale de 6,9 MW et un poste de livraison. Le préfet du Morbihan a prescrit l'enquête publique le 11 avril 2018, laquelle s'est déroulée entre les 7 mai et 8 juin suivants. Le préfet du Morbihan a fait droit à la demande de la S.E.P.E du Moulin Neuf le 5 octobre 2018 par une autorisation unique tenant lieu d'autorisation d'exploiter au titre de l'article L. 512-1 du code de l'environnement, de permis de construire au titre de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme et d'approbation au titre de l'article L. 323-11 du code de l'énergie. M. H... et autres demandent l'annulation de cet arrêté.

Sur l'intervention de Mme B... :

2. Il résulte de l'instruction que la propriété de Mme B... est située à 1 800 mètres du projet litigieux. En outre, elle fait état de ce que ce projet engendrera pour elle des nuisances sonores et une dépréciation de sa propriété et elle produit son attestation de propriété. Il suit de là que l'intervention de Mme B... est recevable.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les règles de procédure :

3. En premier lieu, le moyen tiré de ce que le secrétaire général de la préfecture du Morbihan n'était pas compétent pour signer l'arrêté en litige doit être écarté comme manquant en fait, au vu de la délégation de signature du 3 avril 2018 publiée au recueil des actes administratifs le même jour.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 122-7 du code de l'environnement : " (...) L'avis de l'autorité environnementale, dès son adoption, ou l'information relative à l'absence d'observations émises dans le délai, est mis en ligne sur internet. L'autorité compétente transmet, dès sa réception, les avis des autorités mentionnées au V de l'article L. 122-1 au maître d'ouvrage. Les avis ou l'information relative à l'absence d'observations émises dans le délai est joint au dossier d'enquête publique ou de la procédure équivalente de consultation du public prévue par un texte particulier. (...) ". Il résulte de l'instruction, d'une part, que l'avis de l'autorité environnementale a été publié sur le site internet de la préfecture du Morbihan le 4 mai 2018 et, d'autre part, qu'un employé de la mairie de Malansac a attesté, lors de la réception du dossier soumis à enquête publique, que ce dernier comprenait l'avis de l'autorité environnementale. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 122-7 du code de l'environnement manque en fait et doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...) ". Si en l'espèce, le commissaire enquêteur a repris, en partie, des éléments communiqués par le maître d'ouvrage, il doit être regardé comme ayant indiqué les éléments qu'il estimait de nature à répondre aux interrogations du public. Il a indiqué à la page 11 de son avis que " les zones de développement éolien (ZDE) ne sont plus en vigueur ; elles ont été supprimées en 2013 par la loi Brottes. Le schéma régional éolien n'est qu'un guide. Il n'y a pas d'obligation de conformité. Le schéma régional éolien breton a été annulé par un jugement du Tribunal Administratif de Rennes du 23 octobre 2015. ". Dès lors, le public n'a pas été induit en erreur sur la portée juridique des documents précités. S'agissant de la réponse du commissaire enquêteur apportée aux observations relatives à la dépréciation immobilière des maisons à proximité du projet, elle figure à la page 35 de son avis et est suffisamment précise. Concernant la réponse apportée aux observations s'agissant des dangers liés au projet, elle figure aux pages 32 et 55 de l'avis. Si le commissaire enquêteur se réfère à l'étude de dangers, il doit être regardé comme ayant considéré que les conclusions de l'étude étaient réalistes et n'avaient pas à être remises en cause. Enfin, si le tableau de synthèse du rapport indique, à tort, que l'avis de la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France était réservé, la page 7 de l'avis indique clairement qu'il s'agissait d'un avis défavorable. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article

R. 123-19 du code de l'environnement ne peut qu'être écarté.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. II. - En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : (...) 3° Une description des aspects pertinents de l'état actuel de l'environnement, dénommée "scénario de référence", et de leur évolution en cas de mise en oeuvre du projet ainsi qu'un aperçu de l'évolution probable de l'environnement en l'absence de mise en oeuvre du projet, dans la mesure où les changements naturels par rapport au scénario de référence peuvent être évalués moyennant un effort raisonnable sur la base des informations environnementales et des connaissances scientifiques disponibles ; 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; b) De l'utilisation des ressources naturelles, en particulier les terres, le sol, l'eau et la biodiversité, en tenant compte, dans la mesure du possible, de la disponibilité durable de ces ressources ; c) De l'émission de polluants, du bruit, de la vibration, de la lumière, la chaleur et la radiation, de la création de nuisances et de l'élimination et la valorisation des déchets ; d) Des risques pour la santé humaine, pour le patrimoine culturel ou pour l'environnement ; (...) ".

7. Si le corridor écologique signalé par le schéma régional de cohérence écologique de Bretagne (SRCE), deux sites Natura 2000 situés à moins de 10 km (SIC " Vallée de l'Arz " et

" Marais de la Vilaine "), les sites de chiroptères des Ardoisières de Pluherlin et de Limerzel, deux zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type II et quatre ZNIEFF de type I n'ont pas été inclus dans l'aire d'étude rapprochée d'1km autour de la zone d'implantation du projet, ils ont été inclus dans l'aire d'étude intermédiaire de 10 km autour du projet ou l'aire d'étude éloignée d'un rayon de 20 km et il n'est pas établi que cette analyse aurait été insuffisante.

8. L'étude d'impact, qui comporte 232 photographies et 88 photomontages, n'a pas à comporter un photomontage depuis tous les lieux-dits à proximité du projet. Si aucun photomontage n'a été réalisé depuis le hameau du Carglio, situé à 840 mètres du projet et depuis le hameau " chez Louer " à 850 mètres du projet, un photomontage a été réalisé depuis le hameau de Carpehaie situé à 665 mètres du projet et qui a la même orientation que les deux hameaux précités. Un photomontage a été établi depuis le lieu-dit " Les haies Gohies ". Si aucun photomontage n'a été réalisé depuis le hameau " Le Nénéno ", un photomontage a été réalisé depuis le hameau du Brohéac situé à moins de 150 mètres du hameau précité. En outre, si aucun photomontage n'a été effectué depuis le lieu-dit " Saint-Gervais ", le ministre fait valoir sans être utilement contredit que ce lieu-dit se situe à mi-distance entre la vue 2 et la vue 3 de la chapelle Sainte-Suzanne pour laquelle un photomontage a été réalisé. Enfin, il n'est pas établi que le pétitionnaire aurait cherché à minimiser l'impact du projet sur les habitations voisines, alors même que certains des photomontages présentent des bâtiments ou de la végétation qui masquent les éoliennes, ces dernières étant tout de même matérialisées par des ronds et flèches verts.

9. Si l'étude d'impact fait état de deux roses des vents non identiques, cela s'explique par la disparition de la 1ère, et plusieurs campagnes de mesures ont été réalisées. Les mesures sonores ont été effectuées sur 6 points correspondant aux habitations les plus exposées. Si sous les vents Sud-Est et Nord-Est, il existe plusieurs habitations dans les hameaux de Brohéac (13 maisons), Carguilloton (10 maisons), Nénéno (5 maisons), il ne résulte pas de l'instruction, notamment au vu de la distance, que ces habitations auraient été plus exposées que celles prises en compte dans les 6 points de mesure.

10. L'étude d'impact a été complétée, s'agissant des effets sur les haies du raccordement au poste source, dans les réponses apportées par le pétitionnaire par un document intitulé " mémoire en réponse suite aux observations de la mission régionale d'autorité environnementale ", qui a été soumis au public. En outre, l'étude d'impact, si elle indiquait que " les scénarios de tracé de raccordement ne peuvent encore être déterminés à ce stade du projet ", précisait tout de même que ce raccordement serait effectué en souterrain.

11. L'étude d'impact indique qu'une prairie n'est pas classée en zone humide au niveau de l'emplacement des éoliennes d'après les sondages pédologiques. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, le seul critère de la végétation ne suffit pas à caractériser une zone humide, les deux critères de sols habituellement inondés ou gorgés d'eau pendant au moins une partie de l'année et de plantes hygrophiles étant cumulatifs. Une étude pédologique effectuée en 2015 et 2016 a permis de démontrer l'absence de zone humide s'agissant des terrains d'implantation des éoliennes. Si la réalisation d'un merlon de 104 mètres est prévue dès lors qu'une éolienne est implantée à 42 m du ruisseau de l'Enfer, cette mesure permet seulement de maximiser la protection de cette zone humide, sans établir qu'une des éoliennes s'implanterait dans la zone humide. Enfin, si une zone de baignade est à 1 500 m des éoliennes, il n'est pas établi que le seul survol des pales de l'éolienne n°1 du ruisseau entraînerait un risque pour la salubrité et la sécurité publiques et que ce survol aurait donc dû être analysé.

12. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté.

13. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 323-11 du code de l'énergie : " L'exécution des travaux déclarés d'utilité publique est précédée d'une notification directe aux intéressés et d'un affichage dans chaque commune et ne peut avoir lieu qu'après approbation du projet de détail des tracés par l'autorité administrative. Des décrets en Conseil d'Etat déterminent : 1° Les formes de l'instruction des projets de construction des ouvrages de transport et de distribution d'électricité. En outre, la construction de lignes électriques aériennes dont la tension est supérieure à 50 kilovolts fait l'objet d'une approbation par l'autorité administrative ; (...) ". L'étude d'impact a précisé que le raccordement au réseau public se fera en souterrain, soit par un raccordement via un poste source, qui a été mentionné, soit par un raccordement direct au réseau local. Le raccordement électrique relève d'une réglementation technique spécifique, prévue aux articles R. 323-23 et suivants du code de l'énergie, laquelle prévoit le dépôt spécifique d'un dossier de demande d'approbation relatif à la réalisation d'ouvrages électriques et qui ne s'applique pas au dossier de demande d'autorisation unique. Le raccordement interne, jusqu'au poste électrique de livraison raccordé aux éoliennes, a été précisé aux pages 152 et 153 de l'étude d'impact et à la page 34 de l'étude de dangers. Le raccordement externe, situé entre le poste de livraison et le poste source situé sur le réseau public de distribution, relève d'une réglementation technique spécifique comme il a été dit. Dès lors, le moyen tiré de ce que le dossier de demande d'autorisation unique était insuffisant au regard des dispositions du code de l'énergie précitées doit être écarté.

En ce qui concerne les règles de fond :

14. En premier lieu, aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement :

" I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles

L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ". Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ".

15. Il résulte de l'instruction que le parc projeté de trois éoliennes s'insère dans l'unité paysagère du plateau bocager de Questembert, non loin du paysage du Sillon du Loch et de l'Arz, sous-ensembles des Landes de Lanvaux qui constitue un paysage d'intérêt régional. Il est également à 3 km du site des Grées de Lanvaux et de la cité de caractère de Rochefort-en-Terre qui, ainsi que la commune de Malansac, commune d'implantation du projet, sont dotés de zonages de protection de leur patrimoine (ZPPAUP). Le projet est également à proximité de plusieurs monuments historiques. Il s'inscrit donc dans un environnement paysager et patrimonial sensible. Cependant, il résulte également de l'instruction que la topographie, la distance, la végétation et les perspectives permettront de masquer au moins partiellement le projet, qui ne comporte que trois éoliennes, depuis la plupart des points de vue, malgré la taille des éoliennes et leur implantation sur une crête, s'agissant notamment de la chapelle de Carpehaie, l'église Notre - Dame de la Tronchaye, la chapelle du Temple de Haut, les Grées de Lanvaux, la croix de Crévéac, le château et la chapelle de Rochefort-en-terre et le parc de la préhistoire. Comme l'attestent les photomontages et un vidéo-montage, dont l'inexactitude n'est pas établie, les visibilités ou co-visibilités qui subsistent ne sont pas suffisamment prégnantes pour que le projet soit regardé comme portant atteinte aux intérêts mentionnés à l'article

L. 511-1 du code de l'environnement, alors même que la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) a émis un avis réservé le 7 février 2017 et que l'architecte des bâtiments de France a émis un avis défavorable au projet le 9 février 2017. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le projet, en tant qu'il vaut permis de construire, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

16. En deuxième lieu, le règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Malansac dispose : " Est soumis à conditions particulières l'implantation des éoliennes et des installations et équipements nécessaires à leur exploitation sous réserve de leurs règlementations spécifiques et à la condition de démontrer l'absence de covisibilité avec la vallée de l'Arz. ". Le pétitionnaire fait valoir sans être ensuite contredit que le constat d'huissier de justice produit par les requérants ne comporte que des clichés photographiques réalisés depuis la commune de Pluherlin, comme les photomontages mentionnés par les requérants, et non pas depuis la commune Malansac. En outre, le photomontage n°59 de l'étude d'impact auquel se réfèrent les requérants porte non pas sur la vallée de l'Arz mais sur celle de Bodélio. Dès lors, la covisibilité du projet avec la vallée de l'Arz depuis la commune de Malansac n'est pas établie et le moyen tiré de la méconnaissance du règlement du PLU doit être écarté.

17. En troisième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, une ancienne décharge est mentionnée à la page 45 de l'étude d'impact et il n'est pas établi que 100 000 tonnes de produits toxiques y seraient enfouis. En vertu du principe d'indépendance des législations, le règlement de voirie du département du Morbihan n'est pas opposable à une autorisation unique. A supposer qu'elle soit établie, la distance de 122 m entre l'éolienne n°2 et le bord de la chaussée de la RD775 ne suffit pas à établir des risques pour les usagers de la route. Si un recul de 75 m par rapport à cette voie, classée en "route départementale à grande circulation" reliant Vannes à Redon, figure dans le règlement du PLU de la commune de Malansac, l'interdiction des constructions dans cette bande de 75 mètres n'implique pas une interdiction de surplomb. La société pétitionnaire établit, en tout état de cause, que les tronçons concernés par le projet d'élargissement de la RD775 ne concernent pas le secteur du projet de parc éolien en litige. Enfin, au vu du mémoire en réponse à l'avis de l'autorité environnementale, dont les affirmations ne sont ensuite pas contestées par les requérants, la commune de Malansac n'est pas classée comme particulièrement exposée au risque de feux de forêts, au vu de l'arrêté préfectoral du 21 février 2008. Lors des différentes consultations, le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) n'a pas soulevé de point particulier à l'égard du risque incendie, sous réserve de respecter les mesures générales. Le SDIS a demandé que le poste de livraison soit implanté à 50 mètres des zones boisées, ce qui a été respecté. Le pétitionnaire a également apporté des précisions concernant les délais d'intervention. Il est prévu que, dès que le système incendie d'une éolienne détecte une anomalie, la machine se mette aussitôt en sécurité. En outre, l'étude de dangers a été complétée sur le risque d'incendie en septembre 2017. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré des risques pour la sécurité publique doit être écarté.

18. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. Ces prescriptions spéciales tiennent compte, le cas échéant, des mesures mentionnées à l'article R. 181-43 du code de l'environnement. ". La lamproie marine et la lamproie de Planer, la loutre d'Europe et 13 espèces de chiroptères, dont les 6 espèces qui sont protégées, ont été recensées dans l'étude d'impact. Il n'est pas établi que des libellules seraient présentes dans l'aire d'étude du projet. L'étude d'impact indique que le projet n'aura pas d'impact sur l'avifaune, les poissons, notamment leurs interconnexions, sur la loutre d'Europe et qu'une seule espèce de chiroptère présente un risque de collision modéré sur l'ensemble de la zone d'implantation du projet. Il n'est pas établi que ces conclusions seraient inexactes. Dès lors, le moyen tiré de ce que le projet est de nature à porter atteinte à la préservation de la faune doit être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non recevoir soulevées, que M. H... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'autorisation unique du 5 octobre 2018.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par les requérants au titre de ces dispositions. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme demandée par la société d'exploitation du parc éolien du Moulin neuf au titre des frais exposés à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de Mme B... est admise.

Article 2 : La requête présentée par M. H... et autres est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la société d'exploitation du parc éolien du Moulin neuf sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. AS... H..., représentant unique désigné par Me Collet, à Mme L... B..., à la société d'exploitation du parc éolien du Moulin neuf et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Délibéré après l'audience du 7 février 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, président assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 février 2020.

Le rapporteur,

P. Picquet

Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT00588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00588
Date de la décision : 28/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : AARPI VIA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-02-28;19nt00588 ?
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