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12/05/2021 | FRANCE | N°19MA01223

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 12 mai 2021, 19MA01223


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Marquette Famille a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune d'Avignon à lui payer la somme de 141 847, 64 euros en raison de la carence du maire face aux nuisances causées par l'aire d'accueil des gens du voyage et la déchetterie de la zone industrielle de Courtine et de mettre à la charge de la commune d'Avignon la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1700070 du 25 janvier 2019 le tribunal administ

ratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Marquette Famille a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune d'Avignon à lui payer la somme de 141 847, 64 euros en raison de la carence du maire face aux nuisances causées par l'aire d'accueil des gens du voyage et la déchetterie de la zone industrielle de Courtine et de mettre à la charge de la commune d'Avignon la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1700070 du 25 janvier 2019 le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 mars 2019, 12 janvier 2021, et 12 avril 2021 la SCI Marquette Famille, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 janvier 2019 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) de condamner la commune d'Avignon à lui verser la somme de 293 163,89 euros en réparation des préjudices qu'elle a subi ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Avignon la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la commune a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 et 15 avril 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué dès lors qu'il n'était pas utile au litige, la commune d'Avignon, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SCI Marquette Famille une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la SCI Marquette Famille ne sont pas fondés.

La SCI Marquette Famille, représentée par Me B..., a présenté un mémoire le 16 avril 2021, après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., substituant Me B..., représentant la SCI Marquette Famille, et de Me A..., représentant la commune d'Avignon.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Marquette Famille est propriétaire d'un terrain comportant des locaux professionnels donnés à bail aux sociétés Poste Immo et GDF Suez, situé 5 chemin de Courtine à Avignon, à proximité d'une aire de stationnement destinée à l'accueil des gens du voyage et d'une déchetterie. La SCI Marquette a présenté une demande indemnitaire à la commune d'Avignon, qui l'a rejetée le 23 décembre 2016. Elle relève appel du jugement du 25 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande de condamnation de la commune.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. La SCI Marquette Famille recherche la responsabilité de la commune d'Avignon sur le fondement de la carence fautive dans l'exercice des pouvoirs de police que le maire tient des articles L. 2212-2 et L. 2214-2 du code général des collectivités territoriales, et non à raison de fautes commises par le maire en sa qualité d'officier de police judiciaire reconnue par l'article L. 2122-31 du même code. La juridiction administrative est donc compétente pour connaître d'un tel litige. L'exception d'incompétence opposée par la commune d'Avignon en première instance ne peut qu'être écartée.

Sur le fond :

3. En appel, la SCI Marquette Famille se borne à rechercher la responsabilité de la commune d'Avignon sur le seul fondement de la carence du maire dans la mise en oeuvre de ses pouvoirs de police, et notamment en ce qui concerne les atteintes à la salubrité publique et à la commodité du passage sur la voie publique.

4. Aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales, le maire est chargé de la police municipale. Aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues (...) et voies publiques (...).2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues.... et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique (...)5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables ... les pollutions de toute nature (...) ". Selon l'article L. 2214-4 du même code : " Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique, tel qu'il est défini au 2º de l'article L. 2212-2 et mis par cet article en règle générale à la charge du maire, incombe à l'Etat seul dans les communes où la police est étatisée, sauf en ce qui concerne les troubles de voisinage (...) ".

5. Il résulte de l'instruction, et notamment des procès-verbaux de constats d'huissier assortis de photographies des 29 janvier, 15 février, 11 mai et 2 novembre 2016, 19 mai et 18 décembre 2017 et 28 août 2018, que les trottoirs et abords du rond-point d'entrée de la déchetterie et des locaux de la société requérante sont régulièrement jonchés de détritus et encombrants. Par leur ampleur et leur fréquence, ces dépôts sauvages portent atteinte à la salubrité publique et à la commodité du passage sur les dépendances de la voie publique. Pour la surveillance et la mise en oeuvre de l'interdiction de dépôts à l'extérieur de la déchetterie, affichée sur son mur d'enceinte, la commune d'Avignon fait valoir que les agents de police municipale ont effectué 230 rondes sur le chemin de Courtine entre le 1er janvier 2015 et le 27 novembre 2017. Toutefois, une telle intervention ne constitue pas, par sa nature et sa fréquence limitée à une ronde tous les 4-5 jours en moyenne, une réponse adaptée à l'ampleur de l'atteinte à la salubrité publique, alors qu'il ressort des pièces produites que les services de police n'ont sollicité l'enlèvement d'urgence d'encombrants tels que des épaves de voiture qu'à trois reprises. Dans ces conditions, la SCI Marquette est fondée à soutenir que la carence du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police en matière de salubrité publique et de commodité du passage sur les dépendances de la voie publique a la nature d'une faute, commise par la commune d'Avignon.

6. Cependant, il ne résulte pas de l'instruction qu'il existe un lien de causalité direct entre les baisses de loyers consenties à la société GDF Suez et les atteintes à la salubrité publique et à la commodité du passage sur la voie publique, dès lors que la dégradation des lieux, à l'origine de cette baisse, résulte, selon les affirmations même de la société de l'existence de la déchetterie et d'un camp destiné aux gens du voyage. Ainsi, les préjudices dont la société requérante demande réparation ne résultent pas directement de la carence fautive du maire d'Avignon.

7. Il ressort également des pièces du dossier que les difficultés rencontrées par la société requérante pour louer le bien à la société La poste Immo jusqu'au mois de mars 2016, résulte, à titre principal de l'environnement dégradé par les détritus de toute sorte situés aux abords du bien à louer. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la compétence en matière de collecte de déchets a été transférée à la communauté d'agglomération du grand Avignon depuis 2004, et ne relève donc pas de la commune d'Avignon et que les difficultés dont se plaint la requérante relève de la gestion de la collecte des déchets et non, pour l'essentiel, de l'exercice des pouvoirs de police du maire de la commune. Ainsi, les préjudices dont la société requérante demande réparation ne peuvent être directement imputés à la carence fautive du maire d'Avignon.

8. Il résulte de ce qui précède que la SCI Marquette Famille n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 25 janvier 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses conclusions.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de ne mettre à la charge des parties aucune somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à la SCI Marquette Famille.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Marquette Famille est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Avignon fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Avignon et à la SCI Marquette Famille.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 19 avril 2021, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. D..., président assesseur,

- M. Merenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mai 2021.

2

N° 19MA01223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01223
Date de la décision : 12/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Police générale.

Police - Police générale - Tranquillité publique.

Police - Police générale - Salubrité publique.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL ANGLE DROIT - SACCHET MARIE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-05-12;19ma01223 ?
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