Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, de leur accorder la restitution de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis à raison de la plus-value à long terme déclarée au titre de l'année 2013, à concurrence de 120 203 euros, au titre de l'impôt sur le revenu et de 116 447 euros au titre des contributions sociales, assortie du paiement des intérêts moratoires et, d'autre part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 à hauteur de 475 862 euros, pénalités incluses.
Par un jugement n° 1703978, 1802465 du 13 juin 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 juin 2019, le 8 octobre 2019, le 5 décembre 2019, le 16 avril 2020, le 29 octobre 2020 et le 23 avril 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Tournoud, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer, d'une part, la décharge des cotisations primitives à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, d'autre part, la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquels ils ont été assujettis au titre de cette même année ainsi que des pénalités y afférentes, enfin, d'ordonner la restitution effective des contributions sociales mises en recouvrement au vu de leurs déclarations, à concurrence de 116 447 euros, intérêts moratoires en sus ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est irrégulier car entaché d'une contradiction de motifs dès lors qu'en considérant que l'activité de la SCI Mercure n'est pas commerciale faute de satisfaire la condition d'habitude posée par le 1° du I de l'article 35 du code général des impôts, il ne pouvait pas juger que la taxation des bénéfices de la SCI relevait de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;
- aucune des parties ne soutenait que l'activité de la SCI n'était pas commerciale ; en donnant à l'imposition contestée une qualification qui n'avait pas été invoquée par les parties, les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité ;
- le jugement est également entaché d'irrégularité en ce qu'il a omis de statuer sur leurs conclusions distinctes tendant à la restitution des contributions sociales appelées dans le rôle primitif ; il est à tout le moins entaché de contradiction de motifs dès lors que le tribunal ne pouvait, sauf à se contredire, juger que l'activité de la SCI était taxable au visa de l'article 239 ter et refuser de donner suite à la demande de restitution des contributions sociales ;
- l'activité de la SCI Mercure est commerciale ; à ce titre, et dès lors que l'administration fiscale ne démontre pas que ses résultats sont imposables selon le régime dérogatoire prévu à l'article 239 ter du code général des impôts, la taxation de ses bénéfices relève de l'impôt sur les sociétés et ce, en application de la loi, de la doctrine fiscale et de la jurisprudence ;
- la demande de substitution de base légale ne pourra pas être admise en l'état des arguments avancés par l'administration fiscale qui reconnaît que la SCI exerce une activité commerciale ; elle a d'ailleurs pris une position formelle en ce sens dans l'instance n° 1105872 devant le tribunal administratif de Grenoble ainsi que dans l'instance n° 19LY02821 pendante devant la cour ; par ailleurs, cette demande de substitution les prive de la garantie de pouvoir saisir la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;
- par ailleurs, si la cession de l'immeuble constitue le fait générateur du changement d'activité de la SCI, le montant de la plus-value est nul puisque le prix de cession et le prix de d'acquisition, correspondant à la valeur vénale du bien au jour de la sortie du patrimoine professionnel, sont identiques ;
- contrairement aux affirmations du ministre, sa demande de restitution des prélèvements sociaux exprimés dans le rôle primitif n'a pas été satisfaite ; le rôle supplémentaire d'impôt sur le revenu ne saurait purger le litige sur ce terrain puisqu'il procède à une compensation illégale entre prélèvements sociaux et fiscaux qui sont de nature différente ; en outre, le service des impôts n'était ni compétent ni fondé pour procéder au recouvrement et à l'imputation des contributions sociales appelées à raison de la taxation opérée dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux sur le fondement de l'article 239 ter du code général des impôts ;
- en application de la doctrine administrative, c'est seulement lorsque la compensation est demandée par le contribuable au cours de la procédure de rectification que la surtaxe invoquée est admise en déduction du supplément d'impôt liquidé ; en vertu de la doctrine administrative concernant la compensation entre impôts différents, ils peuvent prétendre à la restitution effective des prélèvements sociaux exprimés par le rôle primitif ;
- compte tenu des prises de position formelles antérieures dans le cadre de précédentes instances contentieuses ainsi que dans l'instance n° 19LY02821, la cour ne pourra pas faire droit à la demande de substitution de base légale pour rétablir les prélèvements sociaux dans la cédule des plus-values privées ; une telle substitution les priveraient des garanties attachées à la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, ainsi qu'à la saisine de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; par ailleurs, les règles de prescription s'opposent à voir rétablies des contributions ou prélèvements sociaux pour un montant supérieur à celui ressortant du rôle primitif ;
- la compensation prévue à l'article L. 203 du livre des procédures fiscales ne peut être envisagée dès lors que l'absence d'imposition aux contributions et prélèvements sociaux de la plus-value réalisée par la SCI dans la cédule des plus-values privées ne résulte pas d'une insuffisance ou d'une omission constatée par l'administration au cours de l'instruction mais d'une insuffisance constatée et parfaitement identifiée bien avant la mise en recouvrement des rôles contestés.
Par des mémoires, enregistrés le 26 décembre 2019, le 21 octobre 2020 et le 13 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut, à titre principal, au rejet de la requête et demande à la cour, à titre subsidiaire, de juger que les contribuables demeurent redevables de la somme de 459 745 euros, en droits et pénalités, au titre de l'impôt sur le revenu, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et des contributions sociales de l'année 2013, rôles initial et supplémentaire confondus.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par les appelants pour contester les impositions primitives et complémentaires à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, sur le fondement de l'article 239 ter du code général des impôts ne sont pas fondés ;
- à titre subsidiaire, il est demandé à la cour de procéder une substitution de base légale et de juger que le profit tiré de la cession litigieuse doit être imposé comme une plus-value immobilière des particuliers sur le fondement de l'article 150 U du code général des impôts ;
- la demande des appelants de restitution des contributions sociales mises à leur charge pour la somme de 116 447 euros, par le rôle primitif du 31 juillet 2014, a déjà été satisfaite, ainsi qu'il en résulte du rôle correctif du 30 juin 2017 ; dans la mesure où elles étaient assises sur une plus-value professionnelle à long terme, les contributions sociales portées par le rôle initial du 31 juillet 2014 avaient la nature de contributions sociales assises sur les revenus du patrimoine dont le recouvrement incombe à la direction générale des finances publiques ; par ailleurs, les dispositions de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales relatives à la compensation au cours des opérations de contrôle et de redressement, ouverte à l'administration sans demande du contribuable, sont applicables entre l'impôt sur le revenu et les contributions et prélèvements sociaux en vertu du III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale ;
- il est en droit de demander, par la voie de la substitution de base légale, le rétablissement des prélèvements sociaux dès lors que les contribuables ne sont privés d'aucune garantie ; les conditions d'application du 1° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ne sont pas remplies et aucune prise de position formelle dont les appelants pourraient se prévaloir ne lui est opposable ; cette demande de substitution de base légale peut s'opérer au moins à hauteur de 116 447 euros et pour le surplus, il est fondé à solliciter une compensation entre l'impôt sur le revenu et les contributions sociales sur le fondement de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales.
Par une ordonnance du 14 avril 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 5 mai 2021 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lesieux, première conseillère,
- les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique,
- et les observations de Me Tournoud, représentant M. et Mme A... ;
Vu les notes en délibéré, enregistrées les 19 et 20 octobre 2021, présentées par M. et Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Mercure dont l'objet social est l'acquisition de terrains, la construction d'immeubles en vue de leur vente et accessoirement la location des immeubles invendus et qui avait pour associés, d'une part, M. et Mme A... qui détenaient ensemble 90,1 % de ses parts et, d'autre part, la Société grenobloise d'investissements (SGI), SARL de famille ayant opté pour le régime d'imposition des sociétés de personnes dont ils détenaient 90 % des parts, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 au cours de laquelle il a été constaté qu'elle avait revendu en l'état, en mai 2013, un tènement immobilier comprenant un bâtiment à usage de garage situé à Grenoble, qu'elle avait acquis en 2002 en vue de construire un immeuble collectif. A l'issue de ce contrôle et d'une vérification de comptabilité de la SARL SGI, l'administration a notamment estimé que le profit constaté lors de la cession de cet ensemble immobilier, déclaré par la SCI Mercure comme une plus-value à long terme imposable au taux proportionnel, constituait un produit d'exploitation imposable à l'impôt sur le revenu au taux progressif dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et en a rehaussé l'assiette, par une proposition de rectification du 1er août 2016. En conséquence de ce redressement et de diverses autres rectifications apportées aux résultats de la SCI Mercure et de la SARL SGI, notifiés à proportion de leurs droits, M. et Mme A..., qui au titre de l'année 2013, avaient été primitivement imposés conformément à leur déclaration à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, à hauteur de respectivement 138 492 euros, dont 120 203 euros du chef de cette plus-value, et de 121 690 euros, ont été assujettis, d'une part, à des impositions supplémentaires d'un montant de 266 761 euros correspondant à la différence entre le total de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales de respectivement, 521 699 euros et 5 244 euros résultant du contrôle et le total de ces mêmes impositions avant contrôle et, d'autre part, à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à hauteur de 10 614 euros, au moyen d'un rôle mis en recouvrement le 30 juin 2017. Les droits mis en recouvrement, d'un montant de 277 375 euros, ont été assortis des intérêts de retard et de la majoration de 40 % prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. Par un jugement du 13 juin 2019, dont M. et Mme A... relèvent appel, le tribunal administratif de Grenoble, après les avoir jointes, a rejeté leurs demandes tendant, l'une à la restitution de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu de 120 203 euros établie à raison de la plus-value à long terme et à la restitution, à concurrence de 116 447 euros, des prélèvements sociaux et l'autre à la décharge des sommes d'un montant total de 475 862 euros, en droits et pénalités, mises en recouvrement le 30 juin 2017.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, M. et Mme A... soutiennent que le jugement attaqué est irrégulier aux motifs d'une part, qu'en considérant que l'activité de la SCI Mercure n'était pas commerciale faute de satisfaire à la condition d'habitude posée par le 1° du I de l'article 35 du code général des impôts, les premiers juges ne pouvaient pas en déduire, sans entacher leur jugement de contradiction de motifs, que la taxation des bénéfices de la SCI relevait de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, et d'autre part, qu'en donnant à l'imposition contestée un fondement qui n'avait pas été invoqué par les parties, les premiers juges ont " statué ultra petita ". Toutefois ces moyens ont trait au bien-fondé du jugement attaqué et demeurent ainsi sans incidence sur sa régularité.
3. En second lieu, à l'appui de leurs conclusions tendant à la restitution des cotisations primitives de contributions sociales à hauteur de 116 447 euros, M. et Mme A... ont invoqué l'illégalité de la compensation opérée par l'administration entre le montant de l'impôt sur le revenu après contrôle et celui des prélèvements sociaux avant contrôle, et ce, tant d'un point de vue de la loi fiscale que de la doctrine administrative. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ces moyens qui n'étaient pas inopérants. Par suite, son jugement doit être annulé en tant seulement qu'il statue sur les conclusions tendant à la restitution des cotisations primitives de contributions sociales à hauteur de 116 447 euros.
4. Il y a donc lieu pour la cour de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande de restitution des cotisations primitives de contributions sociales présentée par M. et Mme A....
Sur la demande de restitution des cotisations primitives de contributions sociales à hauteur de 116 447 euros :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale : " I. Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3, L. 136-4 et L. 136-7 : (...) e) Des plus-values, gains en capital et profits réalisés sur les marchés à terme d'instruments financiers et de marchandises, ainsi que sur les marchés d'options négociables, soumis à l'impôt sur le revenu, de même que des distributions définies aux 7 et 8 du II de l'article 150-0 A du code général des impôts et du gain défini à l'article 150 duodecies du même code ; (...) III.- La contribution portant sur les revenus mentionnés aux I à II ci-dessus est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur le revenu. (...) Les dispositions de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales sont applicables (...) ". Aux termes de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales : " L'administration peut effectuer toutes les compensations entre l'impôt sur le revenu, l'impôt sur les sociétés, la contribution prévue à l'article 234 nonies code général des impôts, la taxe d'apprentissage, la taxe sur les salaires, la cotisation perçue au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction, établis au titre d'une même année. (...) ".
6. Le profit résultant de la cession, en 2013, par la SCI Mercure de l'immeuble dont elle était propriétaire depuis 2002, déclaré par elle comme une plus-value professionnelle à long terme imposable à l'impôt sur le revenu au taux proportionnel entre les mains des associés à raison de leurs droits dans les bénéfices de la SCI, était, en application de l'article L. 136-6 précité du code général des impôts, soumis à la contribution sur les revenus du patrimoine. Il résulte de l'instruction que, du fait de la requalification en produit d'exploitation du profit constaté lors de la cession de l'ensemble immobilier en 2013, les contributions sociales d'un montant de 116 447 euros établies par le rôle initial et acquittées par M. et Mme A... à raison de la plus-value à long terme déclarée par la SCI Mercure, ont été imputées d'office par l'administration sur la cotisation d'impôt sur le revenu résultant du contrôle dans le rôle supplémentaire du 30 juin 2017. Ce faisant, l'administration a procédé à la compensation d'assiette prévue au III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité qui renvoie à l'article L. 80 du livre des procédures fiscales dont le premier alinéa permet, dans le cadre d'une procédure de redressement, de procéder à une compensation entre une taxation excessive commise au détriment d'un contribuable et une insuffisance constatée dans l'assiette de l'un des impôts énumérés par ce texte concernant le même contribuable au titre d'une même année.
7. En vertu des mêmes dispositions du III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, le recouvrement de la contribution sur les revenus du patrimoine relève de la compétence de l'administration fiscale, dans les mêmes conditions que l'impôt sur le revenu, et non de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) comme le font valoir les appelants. Par suite, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que l'administration n'était pas compétente pour procéder à la compensation litigieuse.
8. Enfin, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme A..., l'article L. 80 du livre des procédures fiscales ne subordonne pas la compensation de droits à une demande du contribuable même s'il envisage l'éventualité qu'elle soit effectuée sur sa demande au cours de la procédure d'imposition.
9. Il en résulte que M. et Mme A... ne sont pas fondés, sur le terrain de la loi fiscale, à soutenir que l'administration ne pouvait pas légalement procéder à une compensation entre l'excès d'imposition aux prélèvements sociaux constaté à l'issue de la procédure de rectification dont ils s'étaient acquittés et l'insuffisance d'impôt sur le revenu résultant de la requalification du profit constaté lors de la cession, en mai 2013 par la SCI Mercure, de l'ensemble immobilier acquis en 2002, en produit d'exploitation.
10. En second lieu, M. et Mme A... ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 360 de la doctrine fiscale référencée BOI-CF-PGR-30-50 qui concerne la compensation dans le cadre d'un même impôt. Ils se prévalent également du paragraphe 380 de cette même doctrine fiscale, qui a trait à la compensation entre impôts différents, selon lequel : " (...) Il est à noter, enfin, que l'impôt admis en compensation par voie de simple imputation ou déduction sur une imposition supplémentaire ne pourra donner lieu ultérieurement à restitution effective que sur réclamation introduite dans les délais prévus à l'article R*196-1 du LPF et dirigée à la fois contre l'imposition supplémentaire établie après compensation et contre l'imposition qui comportait la surtaxe. Au cas de réclamation visant seulement l'imposition supplémentaire, le dégrèvement maximum qui pourrait être accordé devrait être limité au montant du rappel effectivement diminué des droits admis en compensation ". Ces dispositions n'imposaient pas à l'administration, contrairement à ce que soutiennent les appelants, de procéder à la restitution des cotisations primitives de contributions sociales dès lors qu'une compensation a été opérée dans la limite du montant de l'imposition à l'impôt sur le revenu résultant du rehaussement.
Sur les conclusions tendant à la décharge des cotisations primitives et supplémentaires d'impôt sur le revenu :
11. Aux termes de l'article 206 du code général des impôts dans sa version applicable aux impositions en litige : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 8 ter, 239 bis AA, 239 bis AB et 1655 ter, sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues au IV de l'article 3 du décret n° 55-594 du 20 mai 1955 modifié, les sociétés coopératives et leurs unions ainsi que, sous réserve des dispositions des 6° et 6° bis du 1 de l'article 207, les établissements publics, les organismes de l'Etat jouissant de l'autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. (...) 2. Sous réserve des dispositions de l'article 239 ter, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt, même lorsqu'elles ne revêtent pas l'une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) ". En vertu du I de l'article 239 ter du même code : " Les dispositions du 2 de de l'article 206 ne sont pas applicables aux sociétés civiles créées après l'entrée en vigueur de la loi n° 64-1278 du 23 décembre 1964 et qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, à la condition que ces sociétés ne soient pas constituées sous la forme de sociétés par actions ou à responsabilité limitée et que leurs statuts prévoient la responsabilité indéfinie des associés en ce qui concerne le passif social. / Les sociétés civiles visées au premier alinéa sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations ; leurs associés sont imposés dans les mêmes conditions que les membres de ces dernières sociétés (...) ". En application de l'article 8 de ce code : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...) Il en est de même, sous les mêmes conditions : / 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées au 1 de l'article 206 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) ". Enfin, aux termes du I de l'article 35 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés./ 1° bis Personnes qui, à titre habituel, achètent des biens immeubles, en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre, en bloc ou par locaux (...) ".
12. Il résulte de l'instruction que la SCI Mercure, dont l'objet social est la construction d'immeubles en vue de leur vente a acquis, le 27 juin 2002, un ensemble immobilier à Grenoble, en vue d'y construire, après démolition de l'existant, un bâtiment collectif destiné à la vente pour lequel elle a obtenu un permis de démolir en 2003 et un permis de construire en 2007, dont la légalité a été confirmée par la juridiction administrative. La SCI Mercure a néanmoins renoncé à exécuter elle-même ce projet et a vendu, le 3 mai 2013, le bien immobilier en l'état à la Société auxiliaire pour le financement du logement des Alpes françaises (SAFILAF). Pour cette cession, faisant application de l'article 239 ter précité, la société a constaté une plus-value à long terme imposable au taux proportionnel de 16 % au nom des associés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. A l'issue de la vérification de comptabilité dont cette société a fait l'objet, l'administration fiscale a considéré que le profit résultant de la cession de cet immeuble, détenu en stock, constituait un produit d'exploitation imposable à l'impôt sur le revenu au barème progressif au nom des associés, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en vertu du même article 239 ter du code général des impôts.
13. M. et Mme A... soutiennent qu'en ayant délibérément renoncé à réaliser son projet de construction d'un immeuble en vue de sa vente, la SCI Mercure ne pouvait plus, qu'elles qu'aient été les causes de cette renonciation, bénéficier du régime dérogatoire de l'article 239 ter du code général des impôts dès lors que ce projet constituait la seule et unique opération relevant de son objet social, qu'elle a dit avoir abandonné. Ils font valoir que, ce faisant, la SCI Mercure était imposable à l'impôt sur les sociétés en vertu du 2. de l'article 206 précité. Toutefois, il résulte de l'instruction et, ainsi qu'il a été dit précédemment, que l'application du régime d'imposition de l'article 239 ter du code général des impôts résulte des déclarations souscrites par M. et Mme A... et par la SCI Mercure. Si la SCI Mercure peut être regardée comme ayant abandonné son projet de construction lorsqu'elle a revendu le tènement immobilier en 2013, après, au demeurant, avoir obtenu les autorisations administratives nécessaires à la réalisation de ce projet, il est constant qu'elle n'a pas pour autant abandonné son objet social qui, ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, portait sur l'acquisition de terrains, la construction d'immeubles en vue de leur vente et accessoirement la location des immeubles invendus et ne se limitait pas à la construction d'immeubles sur le tènement immobilier cédé. La circonstance que la SCI Mercure a, en 2008, comptablement inscrit dans un compte d'immobilisations le bien acquis en 2002, ne saurait être regardée comme exprimant sa décision de renoncer à son objet social et ce alors que cette inscription comptable a été remise en cause par l'administration, confirmée par un jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 novembre 2014 devenu définitif. Il résulte par ailleurs de l'instruction que la SCI Mercure ainsi que M. et Mme A... ont, postérieurement à la vente du tènement immobilier en 2013, continué de déposer des déclarations dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux sous le régime de l'article 239 ter du code général des impôts marquant ainsi leur intention de ne pas abandonner l'objet social de la SCI Mercure et il n'est pas sérieusement contesté que la SCI Mercure n'est pas restée inactive postérieurement à la vente, l'administration ayant constaté, lors des opérations de contrôle sur place, qu'elle avait déduit de ses résultats imposables des années 2014 et 2015, des prestations d'architecte dans le cadre d'un projet de construction et de rénovation d'un immeuble situé en Belgique. Il s'en déduit que la SCI Mercure ne peut être regardée comme ayant renoncé à son objet social malgré sa décision de ne pas réaliser elle-même un projet de construction d'un immeuble en vue de sa vente. M. et Mme A... ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le profit résultant de la vente, par cette société, du bien immobilier acquis en 2002, était imposable à l'impôt sur les sociétés et non entre leurs mains, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux sous le régime de l'article 239 ter du code général des impôts.
14. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande de substitution de base légale présentée à titre subsidiaire par le ministre, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions primitives et supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, ainsi que des pénalités y afférentes.
Sur les frais du litige :
15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme que demandent M. et Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1703978, 1802465 du tribunal administratif de Grenoble du 13 juin 2019 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. et Mme A... tendant à la restitution des contributions sociales primitives acquittées au titre de l'année 2013 pour un montant de 116 447 euros.
Article 2 : La demande de première instance tendant à la restitution de la somme de 116 447 euros assortie des intérêts moratoires et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Lesieux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 novembre 2021.
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N° 19LY02403