Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'Union départementale CGT-FO de la Haute-Saône a saisi le tribunal administratif de Besançon d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 9 février 2018 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Bourgogne - Franche-Comté en tant qu'elle autorise l'Union nationale des syndicats autonomes à désigner un représentant au sein de l'observatoire d'analyse et d'appui au dialogue social et à la négociation de la Haute-Saône.
Par un jugement n° 1800616, 1800617, 1800618 du 25 juillet 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 septembre 2018, et un mémoire complémentaire, enregistré le 5 février 2020, l'Union départementale CGT-FO de la Haute-Saône, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800616, 1800617, 1800618 du tribunal administratif de Besançon du 25 juillet 2018 en tant qu'il a rejeté sa demande ;
2°) d'annuler la décision du 9 février 2018 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Bourgogne - Franche-Comté en tant qu'elle autorise l'Union nationale des syndicats autonomes à désigner un représentant au sein de l'observatoire départemental d'analyse et d'appui au dialogue social et à la négociation du département de la Haute-Saône ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est entaché d'irrégularité, dès lors que les premiers juges ont omis de répondre au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'erreur de droit commise par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, qui, en retenant l'Union nationale des syndicats autonomes parmi les six organisations syndicales autorisées à désigner un représentant sans porter une réelle appréciation sur la représentativité de ce syndicat, s'est cru, à tort, lié par le seuil énoncé à l'article R. 2234-1 du code du travail ;
- la décision en litige, qui retient l'Union nationale des syndicats autonomes parmi les organisations syndicales autorisées à désigner un représentant, est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard de l'exigence de représentativité prévue à l'article L. 2234-5 du code du travail.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 février 2019, la ministre du travail conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.
La requête a été régulièrement communiquée à l'Union nationale des syndicats autonomes qui n'a pas défendu dans la présente instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 9 février 2018, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Bourgogne - Franche-Comté a dressé la liste des organisations syndicales de salariés représentatives au niveau départemental et interprofessionnel et autorisées, en cette qualité, à désigner un représentant au sein des observatoires d'analyse et d'appui au dialogue social et à la négociation des départements concernés, en application des articles L. 2234-5 et R. 2234-2 du code du travail. L'union départementale CGT-FO de la Haute-Saône a saisi le tribunal administratif de Besançon d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 9 février 2018 en tant qu'elle autorise l'Union nationale des syndicats autonomes à désigner un représentant au sein de l'observatoire de la Haute-Saône. La requérante relève appel du jugement n° 1800616, 1800617, 1800618 du 25 juillet 2018, en tant qu'il rejette sa demande.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des pièces du dossier que, dans son mémoire en réplique du 15 juin 2018, l'Union départementale CGT-FO de la Haute-Saône a invoqué, devant les premiers juges, un moyen tiré de l'erreur de droit en faisant valoir que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, qui a retenu l'Union nationale des syndicats autonomes parmi les six organisations syndicales autorisées à désigner un représentant, sans porter une réelle appréciation sur la représentativité de ce syndicat, s'est cru, à tort, lié par le seuil énoncé à l'article R. 2234-1 du code du travail. Le tribunal administratif de Besançon ne s'est pas prononcé sur ce moyen qui n'était pas inopérant. Par suite, son jugement est entaché d'irrégularité et doit, en conséquence, être annulé. Il y a donc lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par l'Union départementale CGT-FO de la Haute-Saône devant le tribunal administratif de Besançon.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article L. 2234-4 du code du travail : " Un observatoire d'analyse et d'appui au dialogue social et à la négociation est institué au niveau départemental par décision de l'autorité administrative compétente. Il favorise et encourage le développement du dialogue social et la négociation collective au sein des entreprises de moins de cinquante salariés du département. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2234-5 de ce code : " L'observatoire d'analyse et d'appui au dialogue social et à la négociation est composé : 1° De membres, salariés et employeurs ayant leur activité dans la région, désignés par les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau interprofessionnel et du département et par les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national interprofessionnel et multiprofessionnel. Chaque organisation répondant à ces critères dispose d'un siège au sein de l'observatoire ; 2° De représentants de l'autorité administrative compétente dans le département. ". Aux termes de l'article L. 2234-6 du même code : " L'observatoire exerce les missions suivantes : 1° Il établit un bilan annuel du dialogue social dans le département ; 2° Il est saisi par les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs de toutes difficultés rencontrées dans le cadre d'une négociation ; 3° Il apporte son concours et son expertise juridique aux entreprises de son ressort dans le domaine du droit social. ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 2234-1 dudit code : " L'observatoire d'analyse et d'appui au dialogue social et à la négociation est composé au plus de treize membres : - jusqu'à six membres représentants des salariés ; - jusqu'à six membres représentants des employeurs. ". Aux termes de l'article R. 2234-2 du même code : " Le directeur régional des entreprises, de la consommation, de la concurrence, du travail et de l'emploi, sur proposition du responsable de l'unité départementale, publie tous les quatre ans la liste des organisations syndicales de salariés représentatives au niveau départemental et interprofessionnel. ".
4. Pour l'application des dispositions du premier alinéa de l'article L. 2234-5 du code du travail, la représentativité des organisations syndicales appelées à désigner un représentant au sein d'un observatoire départemental d'analyse et d'appui au dialogue social et à la négociation doit être appréciée au regard de l'ensemble des critères de représentativité, et notamment de l'ancienneté, des effectifs et de l'audience. Le principe général de représentativité implique notamment que la représentativité d'une organisation syndicale s'apprécie, pour la composition d'un organisme, au niveau territorial ou professionnel auquel il siège. Ainsi, dans le cas d'un organisme départemental, il appartient à l'autorité administrative de mesurer la représentativité des syndicats appelés à y siéger en fonction notamment de leurs résultats aux diverses élections professionnelles au niveau départemental.
5. S'il est vrai que l'Union nationale des syndicats autonomes se classe au sixième rang des organisations syndicales ayant recueilli le plus de voix lors des dernières élections professionnelles dans le département de la Haute-Saône, il est constant qu'elle n'a obtenu, à cette occasion, que 2,82 % des suffrages exprimés. Dans ces conditions, eu égard à la faiblesse de son audience et en l'absence de tout autre élément dans le dossier permettant d'apprécier sa représentativité au niveau interprofessionnel départemental, la requérante est fondée à soutenir que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Bourgogne - Franche-Comté a commis une erreur d'appréciation en estimant que l'Union nationale des syndicats autonomes était suffisamment représentative pour désigner un représentant au sein de l'observatoire d'analyse et d'appui au dialogue social du département de la Haute-Saône. Par suite et sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen tiré de l'erreur de droit, elle est également fondée à demander l'annulation, dans cette mesure, de la décision du 9 février 2018.
Sur les frais de justice :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la requérante et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n°1800616, 1800617, 1800618 du tribunal administratif de Besançon du 25 juillet 2018 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de l'Union départementale CGT-FO de la Haute-Saône.
Article 2 : La décision du 9 février 2018 est annulée en tant qu'elle a autorisé l'Union nationale des syndicats autonomes à désigner un représentant au sein de l'observatoire d'analyse et d'appui au dialogue social et à la négociation de la Haute-Saône.
Article 3 : L'Etat versera à l'Union départementale CGT-FO de la Haute-Saône la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Union départementale CGT-FO de la Haute-Saône, à l'Union nationale des syndicats autonomes et à la ministre du travail.
Copie en sera adressée au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Bourgogne - Franche-Comté.
N° 18NC02603 2