Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile d'exploitation agricole (SCEA) Grameyer a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 août 2015 par lequel le maire de Sénas lui a retiré le permis de construire accordé le 13 mai 2015.
Par un jugement n° 1508141 du 15 mars 2018, le tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 mai 2018, la commune de Sénas, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 mars 2018 ;
2°) de rejeter la demande de la SCEA Grameyer présentée devant le tribunal administratif de Marseille ;
3°) de mettre à la charge de la SCEA Grameyer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le projet de construction d'une serre photovoltaïque en vue de la culture d'asperges n'est pas compatible avec une activité agricole pérenne en violation de l'article NC2 du plan d'occupation des sols (POS) de la commune qui subordonne dans l'intérêt de l'exploitation les constructions à caractère fonctionnel à la condition qu'elles soient nécessaires à celle-ci ;
- par substitution de motifs, le projet de permis était incomplet en l'absence d'une étude d'impact au cas par cas en violation de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire, enregistré le 5 décembre 2018, la SCEA Grameyer, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande à la Cour à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la commune de Sénas au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la commune de Sénas ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. D... pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., substituant Me B... représentant la commune de Sénas et celles de Me E... représentant la SCEA Grameyer.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 13 mai 2015, le maire de la commune de Sénas a délivré à la SCEA Grameyer un permis de construire une serre équipée de panneaux photovoltaïques destinée à la culture des asperges, au motif que la construction projetée était nécessaire à l'exercice de la profession agricole exercée par le pétitionnaire. A la suite de deux recours gracieux des 1er et 17 juillet 2015 formés par des riverains et le préfet des Bouches-du-Rhône à l'encontre du projet, le maire de Sénas a, par un arrêté du 11 août 2015, retiré le permis de construire au motif que le projet de construction d'une serre photovoltaïque en vue de la culture d'asperges n'est pas compatible avec une activité agricole pérenne et ainsi méconnaît la vocation agricole de la zone sur laquelle il est implanté, et que l'autorisation initiale est illégale car non conforme à l'article 2NC du règlement du plan d'occupation des sols, alors en vigueur. Par la présente requête, la commune de Sénas relève appel du jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 mars 2018 qui a annulé cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article NC2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Sénas, alors en vigueur: " Sont autorisées aux conditions fixées ci-dessous : / Dans les secteurs NC1, NC2, Ncr2 : / 1. Dans l'intérêt de l'exploitation les constructions suivantes : / - constructions à caractère fonctionnel, autres qu'à usage d'habitation, lorsqu'elles sont nécessaires à l'exploitation ". Il résulte de ces dispositions que le critère exclusif d'autorisation de l'installation réside dans sa nécessité pour l'activité agricole.
3. La commune de Sénas ne saurait ainsi utilement faire valoir en appel uniquement le bien-fondé du motif de retrait tiré de la méconnaissance de ces dispositions à raison de l'incompatibilité du projet de construction d'une serre photovoltaïque avec une activité agricole pérenne dès lors que le caractère durable ou le type de la culture, en l'occurrence d'asperges, n'est pas requis à titre exclusif par les dispositions précitées. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que l'installation de serres avec panneaux photovoltaïques s'avère nécessaire à l'exploitation de la SCEA Grameyer, dont le rendement est amélioré et la destination agricole, loin d'être remise en cause, confortée.
4. En second lieu, la commune sollicite la substitution d'un motif tiré du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire ledit projet en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme, qui imposerait une étude d'impact. Elle fait valoir qu'à la suite du dépôt de sa demande de permis de construire le 16 mars 2015, la SCEA Grameyer a fait l'objet d'un arrêté préfectoral du 31 mars 2015 qui a emporté retrait de l'arrêté précédent du 4 décembre 2014 l'ayant dispensée d'étude d'impact et prévu que " le dossier de demande d'autorisation du projet de construction de serres agricoles dotées d'une toiture photovoltaïque situé sur la commune de Senas doit comporter une étude d'impact dont le contenu est défini par l'article 122-5 du code de l'environnement ". Toutefois, il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que cet arrêté du 31 mars 2015 concerne un autre projet, situé certes sur les mêmes parcelles mais distinct car bien plus important de celui en cause, dont la demande de permis de construire n° PC 13 105 15 00009 date du 13 mai 2015. De plus, l'administration ne précise pas les éléments de fait qui rendraient cette étude d'impact exigible au-delà de l'interférence avec ce précédent retrait. Il ne ressort par ailleurs pas du dossier que le nouveau projet de la SCEA serait incomplet. Dans ces conditions, le moyen ne peut qu'être écarté.
5. Il résulte de ce qui précède que la commune de Sénas n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande de première instance de la SCEA Grameyer.
Sur les frais liés au litige :
6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
7. Les dispositions précitées font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune de Sénas qui doit être regardée, dans la présente instance, comme la partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de celle-ci la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SCEA Grameyer et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de Sénas est rejetée.
Article 2 : La commune de Sénas versera à la SCEA Grameyer la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Sénas et à la SCEA Grameyer.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2020, où siégeaient :
- M. D..., président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222 26 du code de justice administrative,
- M. C..., premier conseiller,
- Mme Gougot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.
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N° 18MA02297
hw