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18/06/2020 | FRANCE | N°18LY00672

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 18 juin 2020, 18LY00672


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n 18LY00672-18LY00699 du 27 juin 2019, la cour a sursis à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sur les requêtes de la SNC Eurocommercial Properties Taverny et de l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2017 par laquelle le maire de la commune de Saint-Genis-Pouilly (Ain) a délivré à la société " IF Allondon " un permis de construire, valant autorisation d'exploitation commerciale, pour la création d'un ensemble dénommé " OPE

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Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n 18LY00672-18LY00699 du 27 juin 2019, la cour a sursis à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sur les requêtes de la SNC Eurocommercial Properties Taverny et de l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2017 par laquelle le maire de la commune de Saint-Genis-Pouilly (Ain) a délivré à la société " IF Allondon " un permis de construire, valant autorisation d'exploitation commerciale, pour la création d'un ensemble dénommé " OPEN " de 39 000 m² de surface de vente et d'un parc de stationnement de 2 056 places, sur un terrain de 13,68 hectares situé rue de la Faucille.

Par des mémoires, enregistrés le 15 janvier 2020, la société " IF Allondon ", représentée par Me F..., conclut au rejet des requêtes.

Elle fait valoir que la Commission nationale d'aménagement commercial a rendu un nouvel avis favorable au projet, le 3 décembre 2019 et que le maire de Saint-Genis-Pouilly lui a délivré un permis de construire modificatif le 10 janvier 2020 régularisant le vice.

Par des mémoires, enregistrés le 15 janvier 2020, la commune de Saint-Genis-Pouilly, représentée par Me Eard-Aminthas, avocat, conclut au rejet des requêtes et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de chacune des requérantes, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle demande à la cour de prendre acte de ce que la Commission nationale d'aménagement commercial a rendu un nouvel avis favorable au projet, le 3 décembre 2019 et qu'un permis de construire modificatif a été accordé le 10 janvier 2020.

Par un mémoire enregistré le 11 mars 2020, la SNC Eurocommercial Properties Taverny conclut en outre à l'annulation du permis de construire modificatif du 10 janvier 2020.

Elle soutient que :

- elle a été convoquée tardivement pour la séance de la commission et n'a pas obtenu communication des documents demandés, ce qui entache d'irrégularité la procédure suivie devant la CNAC ;

- il n'est pas établi que les membres de la CNAC ont été régulièrement convoqués et ont reçu l'ensemble des pièces requises ;

- le dossier de demande d'autorisation devait être actualisé et comprendre les données à jour au 10 janvier 2020 ;

- le projet méconnait toujours le critère d'aménagement du territoire.

Par des mémoires enregistrés les 11 mars et 23 mai 2020, dont le dernier n'a pas été communiqué, l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry conclut en outre à l'annulation du permis de construire modificatif du 10 janvier 2020.

Elle soutient que :

- le projet compromet l'objectif de développement durable et les vices dont était entaché l'avis initial de la Commission nationale d'aménagement commercial ne pouvaient faire l'objet d'aucune régularisation ;

- le pétitionnaire devait actualiser son dossier notamment sur l'étude de trafic ;

- la CNAC a refusé de lui communiquer les éléments nouveaux du dossier avant de la convoquer à l'audition en méconnaissance du principe du contradictoire ;

-les membres de la Commission n'ont pas eu connaissance de la contribution écrite de la Fédération nationale de l'environnement, ce qui méconnaît l'article R. 752-36 du code de commerce ;

- le dossier de demande d'autorisation devait être actualisé ;

- le projet méconnait toujours le critère d'aménagement du territoire.

Par des mémoires, enregistrés le 22 avril 2020, la commune de Saint-Genis-Pouilly, représentée par Me Eard-Aminthas, avocat, conclut au rejet des requêtes et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de chacune des requérantes, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet présente un caractère suffisant en termes de desserte et d'accessibilité en transport en commun et au regard du service de navettes privées ;

- le projet présente de bonnes conditions d'accessibilité par route ;

- il est totalement compatible avec le SCoT du Pays de Gex.

Par un mémoire enregistré le 12 mai 2020, la société " IF Allondon " conclut au rejet des requêtes et à ce que la somme de 8 000 euros soit mise à la charge de chacune des requérantes, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de la prétendue absence de débat contradictoire devant la CNAC n'est pas fondé ;

- il en est de même du moyen tiré de la convocation irrégulière des membres de la CNAC ;

- le dossier de demande a été actualisé ;

- les aménagements routiers projetés sur le giratoire de la Porte de France présentent un caractère certain et les nouvelles conditions de desserte de ce secteur par les transports en commun, et notamment par le BHNS, sont d'ores et déjà prévues par les collectivités publiques.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- les observations de Me E..., représentant la société Eurocommercial Properties Taverny, de Me I..., représentant l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry, de Me A..., représentant la commune de Saint-Genis-Pouilly, de Me F..., représentant la Société civile If Allondon et de Me D..., représentant la communauté d'agglomération du pays de Gex ;

Des notes en délibéré présentées pour la SNC Eurocommercial Properties Taverny et l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry ont été enregistrées le 29 mai 2020.

Une note en délibéré présentée pour la commune de Saint-Genis-Pouilly a été enregistrée le 2 juin 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 16 juillet 2014, confirmée le 12 juillet 2016 par la cour, la Commission nationale d'aménagement commercial a refusé le projet de la société " IF Allondon " consistant en la création d'un ensemble commercial de 46 000 m² de surface de vente et 2 056 places de stationnement sur un terrain agricole de 19 hectares appartenant à la commune de Saint-Genis-Pouilly, classé en zone 1AUX1 du plan local d'urbanisme. Le 17 février 2017, la commission départementale d'aménagement commercial de l'Ain a émis un avis défavorable au second projet dit " OPEN " porté par le même promoteur sur le même site portant sur 39 000 m² de surface de vente et une réduction de 20 % de l'emprise au sol initiale. Saisie par la société " IF Allondon " et la commune de Saint-Genis-Pouilly, la Commission nationale d'aménagement commercial s'est prononcée favorablement le 23 mai 2017 sur ce projet et le maire de Saint-Genis-Pouilly, par un arrêté du 22 décembre 2017, a délivré à la société " IF Allondon " un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, dont la société Eurocommercial Properties Taverny, propriétaire du centre commercial Val Thoiry situé sur la commune voisine de Thoiry, et l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry ont demandé l'annulation.

2. Par un arrêt du 27 juin 2019, après avoir écarté les autres moyens invoqués, la cour a sursis à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sur les requêtes de la CNC Eurocommercial Properties Taverny et de l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry pour permettre à la société " IF Allondon ", de notifier à la cour dans un délai de huit mois, un permis de construire modificatif régularisant le vice relatif à l'appréciation portée par la Commission nationale d'aménagement commercial concernant l'incidence du projet sur l'objectif légal d'aménagement du territoire. La cour a précisé que devaient être soumis à l'appréciation de la Commission nationale d'aménagement commercial de nouveaux engagements de la société pétitionnaire susceptibles d'atténuer les effets du projet " Open " sur le trafic routier et de permettre de garantir, sur le site, le stationnement des véhicules de sa clientèle.

3. Le 3 décembre 2019, la Commission nationale d'aménagement commercial a rendu un avis favorable au projet litigieux en se fondant sur des lettres et attestations confirmant l'intention du pétitionnaire de mettre en place un double système de navettes reliant d'une part le site du projet à l'arrêt " Jean Monnet " dans le centre-ville de Saint-Genis-Pouilly, et d'autre part le site du projet à l'arrêt " CERN " en Suisse. Ces documents indiquaient également que ces navettes seraient assurées par des véhicules d'une capacité d'environ quarante personnes et que le coût financier serait intégralement supporté par le pétitionnaire. Parmi les autres éléments transmis par le pétitionnaire, la Commission nationale d'aménagement commercial a relevé qu'un projet de reconfiguration du carrefour " Porte de France ", situé à environ 2,5 kilomètres du projet et qui connaît des phénomènes de saturation aux heures de pointe, est en cours de réalisation, que la livraison des travaux a été prévue pour 2024 et que la configuration définitive du site avait déjà été présentée à la presse. Au vu notamment de ces dernières éléments transmis, la Commission nationale d'aménagement commercial a pu constater que les conditions d'accessibilité du site du projet seraient satisfaisantes.

4. En se fondant sur cet avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial, le maire de Saint-Genis-Pouilly a accordé, le 10 janvier 2020, à la société " IF Allondon " un permis modificatif valant autorisation d'exploitation commerciale.

5. En premier lieu, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices affectant sa légalité externe et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant-dire droit. Elles ne peuvent soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse d'un moyen déjà écarté par la décision avant-dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

6. Il résulte de ces dispositions que le moyen tiré de ce que le projet litigieux méconnaîtrait l'objectif de développement durable fixé à l'article L. 752-6 du code de commerce, dirigé en réalité contre le permis de construire initial, et qui a été écarté par l'arrêt de la cour du 27 juin 2019, ne peut être utilement invoqué. Il en est de même du moyen tiré de ce que les vices dont était entaché l'avis initial de la Commission nationale d'aménagement commercial ne pouvaient faire l'objet d'aucune régularisation.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 411-6 du même code : " Lorsque le recours administratif émane d'une personne autre que le bénéficiaire de la décision initiale et que la décision prise sur recours doit être motivée en application de l'article L. 211-2, la procédure contradictoire prévue à l'article L. 122-1 est mise en oeuvre à son égard. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 75236 du code de commerce : " La commission nationale peut recevoir des contributions écrites. / La commission nationale entend toute personne qui en fait la demande écrite au secrétariat, en justifiant les motifs de son audition, au moins cinq jours avant la réunion. / Sont dispensés de justifier les motifs de leur audition : l'auteur du recours devant la commission nationale, le demandeur, (...) ".

8. Pour contester le permis de construire modificatif du 10 janvier 2020, les requérantes soutiennent que la procédure suivie devant la Commission nationale d'aménagement commercial a méconnu le principe du contradictoire, dès lors, qu'en dépit de plusieurs demandes, elles n'ont pas obtenu communication des éléments nouveaux déposés par le pétitionnaire et qu'elles n'ont été convoquées que quatre jours ouvrés avant la séance. Toutefois, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que la commission nationale serait tenue de communiquer aux requérants contestant une décision d'autorisation accordée à une société pétitionnaire les documents produits par cette dernière pour sa défense, ou ceux produits par les personnes intéressées au sens des dispositions de l'article R. 752-14 du code de commerce, afin qu'ils puissent y répondre. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que les requérantes qui ont été auditionnées par la Commission nationale d'aménagement commercial, n'auraient pas été mises à même de débattre et de faire valoir leurs observations sur les nouveaux éléments apportés au projet par le pétitionnaire. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance par la Commission nationale d'aménagement commercial du principe du contradictoire doit être écarté.

9. En troisième lieu, l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry fait valoir qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 752-36 du code de commerce, la Fédération nationale de l'environnement a transmis, par courrier du 6 novembre 2019, à la Commission nationale d'aménagement commercial, l'avis qu'elle avait émis en septembre 2017, lors de l'enquête publique concernant notamment l'insuffisance de prise en compte des conséquences environnementales de l'augmentation du trafic engendré par le projet litigieux. Toutefois, les circonstances que cette contribution ne soit mentionnée ni dans le rapport d'instruction, ni dans les avis des ministres et qu'elle n'ait pas été transmise par la cour, ne permettent pas d'établir qu'elle n'aurait pas été portée à la connaissance des membres de la Commission.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 752-35 du code de commerce : " La commission nationale se réunit sur convocation de son président. Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier : / 1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; / 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ; / 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; /4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision; / 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale. ". Il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que les décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial doivent comporter les mentions attestant de ce que la convocation de ses membres a été accompagnée de l'envoi de l'ordre du jour et des documents nécessaires à ses délibérations.

11. En tout état de cause, en l'espèce, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 752-35 du code de commerce manque en fait dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que, le 19 novembre 2019, le secrétaire de la CNAC a adressé aux membres de la commission une convocation pour la réunion du 3 décembre suivant, à laquelle était joint l'ordre du jour et où il était mentionné que tous les documents visés au même article sont disponibles, au moins cinq jours avant la tenue de la séance, sur la plateforme de téléchargement.

12. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 752-6 du code de commerce : " La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments suivants : (...) 4° Effets du projet en matière d'aménagement du territoire. Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : / (...) c) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; / d) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules de livraison générés par le projet et description des accès au projet pour ces véhicules ; / e) Indication de la distance du projet par rapport aux arrêts des moyens de transports collectifs, de la fréquence et de l'amplitude horaire de la desserte de ces arrêts ; / f) Analyse prévisionnelle des flux de déplacement dans la zone de chalandise, tous modes de transport confondus, selon les catégories de clients (...) ".

13. La circonstance que le dossier de demande d'autorisation ne comporterait pas l'ensemble des éléments exigés par les dispositions précitées, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité l'autorisation qui a été accordée que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

14. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'arrêt du 27 juin 2019, la société " IF Allondon " a transmis à la Commission nationale d'aménagement commercial, de nouvelles informations et pièces à l'appui de sa demande d'avis. A ce titre, elle a notamment produit le courrier du 28 septembre 2017 adressé au maire de Saint-Genis-Pouilly par lequel elle s'engageait à financer un dispositif double de navettes à hauteur de 300 000 euros, qui avait été enregistré tardivement devant la Commission nationale d'aménagement commercial lorsqu'elle avait émis son précédent avis. Elle a produit également un nouvel engagement daté du 9 mai 2019 précisant qu'elle prendrait en charge ce service de navettes privées " sans limitation de durée autre que la mise en service d'un transport collectif public a minima équivalent ", ainsi qu'une confirmation de cet engagement datée du 23 septembre 2019. De même, en ce qui concerne l'évolution du giratoire " Porte de France ", la société " IF Allondon " a transmis à la Commission les différentes délibérations par lesquelles, le département de l'Ain s'est engagé dans le financement de travaux de reconfiguration. La description de ces travaux et leur calendrier apparaissent dans le dossier de presse du 12 septembre 2019 transmis à la Commission qui mentionne également la décision par les collectivités territoriales concernées de mettre en place un Bus à Haut Niveau de Service (BHNS). Enfin, le pétitionnaire a transmis des éléments actualisés concernant l'évolution démographique de la zone de chalandise et des commerces du centre-ville de Saint-Genis-Pouilly. Ces informations ont permis à la Commission nationale d'aménagement commercial de porter une appréciation éclairée sur le projet, alors même que l'étude de trafic routier datant de 2015 n'a pas été réactualisée. Par suite, le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de la demande doit être écarté.

15. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. (...) / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / II.- A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale. ".

16. En application des dispositions précitées, l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi, et, il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

17. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'étude de trafic produite par le pétitionnaire à l'appui de sa demande initiale que l'état de saturation du giratoire du carrefour de la " Porte de France ", situé à 2,5 kilomètres du site du projet atteindrait 125 %, à compter de 18 heures en semaine, en cas de réalisation de l'ensemble commercial. S'il est constant qu'aucune modification de ce giratoire n'avait été prévue lors du dépôt de la demande initiale d'autorisation d'exploiter, le pétitionnaire a produit à l'appui de sa nouvelle demande d'avis devant la Commission nationale d'aménagement commercial, une délibération du Conseil départemental de l'Ain du 24 septembre 2018 désignant un nouveau groupement titulaire d'un marché de maîtrise d'oeuvre " relative à l'étude préliminaire de la restructuration du secteur Porte de France à Saint-Genis-Pouilly ", une délibération du 4 février 2019 confirmant que la réalisation des études concernant le giratoire était inscrite au nombre des grandes opérations pluriannuelles, bénéficiant d'un financement global de 7,7 millions d'euros et enfin une délibération du 17 juin 2019 qui détaille les caractéristiques du futur giratoire reconfiguré. Cette reconfiguration définitive du site " Porte de France " a été présentée à la presse en septembre 2019. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, ces décisions permettent d'établir le caractère suffisamment certain de ces travaux routiers. Il ressort également des pièces du dossier et notamment de la lettre du 23 septembre 2019 de M. B..., gérant de la société " If Allondon ", adressée au président de la Commission nationale d'aménagement commercial que le pétitionnaire s'est engagé à mettre en place et à financer à hauteur de 300 000 euros, un système de navettes avec deux lignes permettant d'assurer la liaison entre d'une part le centre-ville de Saint-Genis-Pouilly et l'ensemble commercial et d'autre part, entre le site " Cern " et l'ensemble commercial. Il résulte de l'étude de trafic produite par le pétitionnaire qu'une telle mesure est de nature à permettre une réduction de 20 % de la circulation routière engendrée par le projet. Ces documents permettent d'établir le caractère certain et suffisant de la mise en place de ces navettes. Dans ces conditions, et alors même que le projet de mise en place d'un BHNS dont s'est prévalu le pétitionnaire présente un caractère incertain, les requérantes ne démontrent pas que la Commission nationale d'aménagement commercial aurait fait une appréciation erronée des effets du projet en matière d'aménagement du territoire en se prononçant en faveur du projet.

18. Il résulte de ce qui précède que le permis de construire modificatif délivré le 10 janvier 2020 par le maire de Saint-Genis-Pouilly permet de régulariser le permis initial du 22 décembre 2017. Dès lors, la SNC Eurocommercial Properties Taverny et l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry ne sont pas fondées à demander l'annulation des permis de construire des 22 décembre 2017 et 10 janvier 2020.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mises à la charge de la société " IF Allondon " et de l'Etat, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, les sommes que la société Eurocommercial Properties Taverny, et l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry demandent au titre des frais qu'elles ont exposés. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces mêmes dispositions à l'encontre de la société Eurocommercial Properties Taverny, de l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry et de la communauté de communes du Pays de Gex.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de la société Eurocommercial Properties Taverny et de l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de la société " IF Allondon " et de la commune de Saint-Genis-Pouilly tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Genis-Pouilly, à la société " IF Allondon ", à la SNC Eurocommercial Properties Taverny, à l'association des exploitants du centre commercial Val Thoiry, à la communauté de communes du Pays de Gex et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au président de la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme C..., présidente assesseure,

Mme G..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 18 juin 2020.

2

N° 18LY00672 - 18LY00699


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY00672
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-043 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Eric SOUTEYRAND
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CABINET PHILIPPE PETIT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-18;18ly00672 ?
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