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15/12/2020 | FRANCE | N°18BX02496

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 15 décembre 2020, 18BX02496


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Parc éolien de Thollet et Coulonges a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2016 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer une autorisation d'exploiter un parc éolien sur le territoire des communes de Thollet et Coulonges.

Par un jugement n° 1602617 du 25 avril 2018, le tribunal a annulé le refus du 21 juillet 2016, a accordé à la société l'autorisation sollicitée et a renvoyé cette dernière devant le préfet pour la fixa

tion des conditions nécessaires au respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Parc éolien de Thollet et Coulonges a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2016 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer une autorisation d'exploiter un parc éolien sur le territoire des communes de Thollet et Coulonges.

Par un jugement n° 1602617 du 25 avril 2018, le tribunal a annulé le refus du 21 juillet 2016, a accordé à la société l'autorisation sollicitée et a renvoyé cette dernière devant le préfet pour la fixation des conditions nécessaires au respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête et des mémoires enregistrés sous le n° 18BX02496 le 25 juin 2018, le 17 décembre 2018 et le 2 novembre 2020, l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Hérolles et Thollet, Mme Q... X..., M. W... C..., M. et Mme R... V..., Mme G... O... et M. P... O..., Mme I... A... et M. N... T..., représentés par Me Monamy, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1602617 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de rejeter les demandes de première instance de la société Parc éolien de Thollet et Coulonges ;

3°) de mettre à la charge de la société la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent, en ce qui concerne la recevabilité de leur appel, que :

- étant régulièrement intervenus devant le tribunal, ils sont recevables à faire appel du jugement rendu contrairement aux conclusions de leur intervention ;

- l'autorisation délivrée par le tribunal porte atteinte à l'objet social de l'association tel qu'il est défini dans ses statuts ; par ailleurs, les conditions de vie des requérants personnes physiques, qui demeurent à proximité du futur parc, vont être affectées par le fonctionnement de l'exploitation composée de 19 aérogénérateurs qui seront notamment à l'origine de nuisances sonores et visuelles ;

Ils soutiennent, en ce qui concerne la régularité du jugement attaqué, que :

- il n'est pas établi que la minute du jugement comporte les signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent, au fond, que :

- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances et d'omissions concernant l'analyse des impacts du projet sur les chiroptères, l'étude avifaunistique, l'analyse des impacts du projet sur le paysage et le patrimoine environnants ainsi que l'étude des incidences Natura 2000 ;

- l'autorisation a été délivrée à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que l'étude d'impact du projet a été examinée par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale qui est aussi le préfet du département dont les services ont instruit la demande d'autorisation ; il en résulte une méconnaissance du principe de l'autonomie de l'autorité environnementale imposé par la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 ; le tribunal ne pouvait en conséquence délivrer l'autorisation sans solliciter une nouvelle consultation de l'autorité environnementale par un organisme bénéficiant d'une autonomie vis-à-vis du préfet de région ;

- les conditions de publicité de l'avis d'enquête publique n'ont pas été réalisées conformément aux exigences de l'article R. 123-11 du code de l'environnement ;

- les conseils municipaux des communes dans lesquelles il a été procédé à l'affichage de l'avis d'enquête publique n'ont pas été consultés en application de l'article R. 512-20 du code de l'environnement ; les conseils municipaux des communes qui se sont prononcés ont pris des délibérations illégales, soit parce qu'ils ont rendu un avis à bulletin secret alors qu'un tel vote n'a pas été demandé, soit parce que les conseillers municipaux n'ont pas été destinataires d'une note explicative de synthèse avant la séance, soit parce que le délai de convocation des conseillers municipaux n'a pas été respecté ; enfin, le conseil municipal de la commune de Bélâbre s'est prononcé avant même le début de l'enquête publique ;

- le dossier soumis à l'enquête publique n'est pas composé conformément aux dispositions de l'article R. 123-8 du code de l'environnement ; ainsi, il n'est pas établi que ce dossier comportait les avis valant accord au permis de construire du ministre de la défense et du ministre de l'aviation civile ni l'avis des maires des communes intéressées ; il manquait également dans le dossier d'enquête publique l'avis de la commission départementale des paysages, des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), l'avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale requis par le XI de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 ;

- les avis de tous les propriétaires intéressés sur les conditions de démantèlement et de remise en état du site n'ont pas été sollicités contrairement au 7° de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ; de même, ni l'avis du conseil départemental ni celui du conseil municipal de Thollet n'ont été sollicités ;

- le tribunal ne pouvait accorder l'autorisation sans que soit consultée de nouveau la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS), alors que celle-ci avait émis un avis défavorable au projet initialement déposé ;

- le pétitionnaire ne justifiait pas des capacités financières lui permettant d'exploiter son projet dans le respect des intérêts environnementaux ; les articles L. 181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement, issus de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale, en vertu desquelles les capacités financières du demandeur doivent être appréciées lors de la mise en service de l'installation, méconnaissent le principe de non régression ; il convient en conséquence d'apprécier les capacités financières de la société pétitionnaire à la date de la décision en litige, conformément aux règles antérieures au 1er mars 2017, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017 ; de plus, l'ordonnance du 26 janvier 2017 est elle-même contraire à la directive DC/2001/42 (CE) et à l'article L. 122-4 du code de l'environnement car son adoption n'a pas été précédée d'une évaluation environnementale ; il convient d'apprécier la légalité de l'autorisation en litige au regard de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, en vigueur antérieurement au 1er mars 2017, et au regard du principe de non régression ; les capacités financières du pétitionnaire sont insuffisantes car son dossier ne comporte pas d'engagement d'apports de fonds propres ; la lettre de confort produite au dossier de demande ne comporte aucun engagement de financement ; aucun engagement de financement au moyen d'un emprunt bancaire n'a été apporté ;

- l'autorisation délivrée méconnait l'article L. 515-44 du code de l'environnement qui impose que l'autorisation doit porter sur une installation située à 500 mètres au minimum des zones habitées ; il convient d'apprécier cette règle en tenant compte de la totalité des éoliennes, pales comprises ; ainsi, les éoliennes E 5 et E 8 ne respectent pas cette règle de distance ; les dispositions de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 en vertu desquelles la règle de distance s'apprécie au niveau du mât sont contraires à l'article L. 515-44 du code de l'environnement ;

- le montant des garanties de démantèlement et de remise en état du site, imposées par l'article R. 515-101 du code de l'environnement, est insuffisant ; le coût unitaire du démantèlement des éoliennes, évalué par l'arrêté ministériel du 26 août 2011, est sous-évalué ; le tribunal aurait dû écarter l'application de cet arrêté et imposer à la société de constituer des garanties propres à couvrir les frais de démantèlement et de remise en état ; les dispositions de l'arrêté du 26 août 2011 sont illégales au regard de l'article R. 515-101 du code de l'environnement ;

- les mesures prévues pour le démantèlement des éoliennes et la remise en état du site sont elles-mêmes insuffisantes ; les dispositions prévues à cet effet par l'arrêté du 26 août 2011 sont illégales parce qu'elles émanent d'une autorité incompétente et prévoient des mesures insuffisantes ; le tribunal aurait dû écarter l'application de l'arrêté du 26 août 2011 et imposer le démantèlement de la totalité du réseau inter-éolien ;

- l'autorisation délivrée porte atteinte aux intérêts environnementaux protégés par les articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement ; elle porte ainsi atteinte aux intérêts paysagers et patrimoniaux car la zone d'implantation du projet est un secteur de bocage, naturel et vallonné comportant des monuments historiques protégés avec lesquels le parc éolien sera en situation de co-visibilité ; le projet portera également atteinte aux chiroptères se trouvant dans plusieurs zones Natura 2000 proches ; il s'agit d'espèces sensibles soumis à un risque de collision avec les éoliennes ; le projet portera encore atteinte à l'avifaune car il se situe dans le couloir de migration de la Grue cendrée.

Par un acte enregistré le 11 décembre 2018, M. et Mme R... V... déclarent se désister de l'instance.

Par un mémoire, enregistré le 17 décembre 2018, M. F... U..., représenté par Me Monamy, s'associe aux conclusions des appelants.

Il soutient que son intervention est recevable et que l'autorisation en litige est illégale au regard des moyens soulevés par les appelants.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 septembre 2020 et le 2 novembre 2020, la société Parc éolien de Thollet et Coulonges, représentée par Me Elfassi, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à la modification de l'autorisation en litige en tant qu'elle porte sur les éoliennes E9 à 12 auxquelles elle a renoncé ;

3°) subsidiairement, à ce que la cour prononce un sursis à statuer en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour permettre la régularisation de l'autorisation environnementale en litige ;

4°) à ce qu'il soit mis à la charge de chacun des appelants la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en ce qui concerne la recevabilité, que :

- en tant qu'intervenants en première instance, les appelants n'avaient pas la qualité de parties ; ils ne seraient recevables à faire appel du jugement que s'ils avaient eu la qualité pour faire tierce opposition au jugement ; celui-ci ne préjudicie pas à leurs droits ; en conséquence, les appelants ne sont pas recevables à faire appel du jugement du tribunal ;

- l'objet social de l'association, tel qu'il est défini dans ses statuts, ne lui confère pas intérêt à agir à l'encontre de l'autorisation en litige ;

- les requérants personnes physiques n'établissent pas que leurs conditions de vie seront affectées par les futures éoliennes ; leur intérêt à agir doit être écarté en conséquence.

Elle soutient, au fond, que :

- tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Par un mémoire en intervention présenté le 15 octobre 2020, la Fédération anti-éolienne de la Vienne, représentée par Me Boudy, demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 25 avril 2018 ainsi que l'arrêté préfectoral du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions applicables à l'installation.

Elle soutient que :

- ses statuts lui confèrent un intérêt à intervenir au soutien des conclusions des appelants ;

- le jugement du tribunal a été rendu à la suite d'une procédure qui n'était pas impartiale en méconnaissance du droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ainsi, le président du tribunal, qui a présidé la chambre ayant rendu le jugement attaqué, était aussi président de la commission d'établissement de la liste d'aptitude aux fonctions de commissaire enquêteur ; il est intervenu, en cours de délibéré, dans le cadre d'un séminaire consacré aux éoliennes ;

- la procédure devant le tribunal a porté atteinte aux principes du contradictoire, des droits de la défense et de l'égalité des armes ; les opposants n'ont pu avoir accès aux données techniques et notamment aux productions permettant d'apprécier les impacts des éoliennes sur l'environnement ;

- le dossier de demande d'autorisation d'exploiter était incomplet ; alors que le poste de livraison de Belâbre fait partie du parc éolien, la demande d'autorisation ne porte pas sur cet équipement connexe qui forme avec ce parc une unité fonctionnelle ;

- il n'a pas été établi d'étude d'impact sur la liaison souterraine jusqu'au poste de livraison/transformation ; le pétitionnaire ne pouvait solliciter le bénéfice d'une instruction séparée en application de l'article L. 122-1-1 III du code de l'environnement dès lors que le projet ne nécessite pas la délivrance de plusieurs autorisations d'exploiter et que les incidences environnementales ont pu être connues dès la première demande d'autorisation ;

- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances quant à l'analyse de l'utilisation rationnelle de l'énergie ; il existe un déséquilibre dans l'offre de production par éoliennes, lesquelles sont concentrées au nord de la région Poitou-Charentes ; le parc éolien projeté ne présente aucun intérêt en termes de production d'énergies renouvelables ; sa production ne sera pas consommée localement et son coût de revient est très important ;

- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances quant à l'analyse des effets du projet sur les biens immobiliers ; le pétitionnaire aurait dû faire établir des expertises immobilières afin que soient mesurées les diverses nuisances que le projet entraînera sur les biens immobiliers du secteur et définies les mesures de réduction et de compensation ;

- le dossier de demande ne comporte pas de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées et d'habitats d'espèces protégées, en l'occurrence les chiroptères ;

- il appartenait à l'autorité compétente de surseoir à statuer sur la demande d'autorisation et l'arrêté de prescription en application des articles L. 153-11 et L. 424-1 du code de l'urbanisme dès lors que le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables de la communauté de communes de Vienne et Gartempe avait eu lieu avant la délivrance de l'arrêté fixant les prescriptions applicables à l'installation ; le principe de l'indépendance des législations ne pouvait faire obstacle à ce sursis à statuer dès lors qu'il résulte de l'article L. 152-1 du code de l'environnement que les installations classées pour la protection de l'environnement doivent être conformes aux documents d'urbanisme en vigueur ; les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables condamnent l'implantation d'éoliennes en raison des impacts négatifs de ces exploitations sur les sites environnants ; de plus, le futur plan local d'urbanisme intercommunal doit décliner les orientations du document d'orientations et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale (SCOT) Sud-Vienne qui donnent priorité à l'extension et à la densification des parcs éoliens existants ;

- les mesures de démantèlement prévues ne sont pas conformes avec la règlementation issue de la réforme du 22 juin 2020 ; l'engagement de démantèlement et la provision nécessaire ne sont pas actualisés ; il en est de même des avis émis par la population et les municipalités sur cette question.

Par ordonnance du 16 septembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 2 novembre 2020 à 12h00.

II - Par une requête enregistrée sous le n° 20BX00762 et des mémoires présentés le 2 mars 2020, le 15 octobre 2020 et le 23 novembre 2020, l'association " Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Hérolles et Thollet ", M. F... U..., Mme Q... X..., Mme G... O... et M. P... O..., Mme I... A... et M. N... T..., représentés par Me Monamy, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet de la Vienne a fixé les prescriptions applicables au parc éolien que la société Parc éolien de Thollet et Coulonges a été autorisée à exploiter par le tribunal administratif de Poitiers dans son jugement du 25 avril 2018 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent, en ce qui concerne leur intérêt à agir, que :

- l'arrêté en litige porte atteinte à l'objet social de l'association tel qu'il est défini dans ses statuts ; par ailleurs, les conditions de vie des requérants personnes physiques, qui demeurent à proximité du futur parc, vont être affectées par le fonctionnement de l'exploitation composée de 19 aérogénérateurs qui seront notamment à l'origine de nuisances sonores et visuelles ;

Ils soutiennent, au fond, que :

- l'arrêté en litige ne pouvait intervenir sans une nouvelle consultation de la commission départementale des paysages, des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) ;

- l'autorisation délivrée méconnait l'article L. 515-44 du code de l'environnement qui impose que l'autorisation doit porter sur une installation située à 500 mètres au minimum des zones habitées ; il convient d'apprécier cette règle en tenant compte de la totalité des éoliennes, pales comprises ; ainsi, les éoliennes ne respectent pas cette règle de distance ;

- le montant des garanties de démantèlement et de remise en état du site, imposées par l'article R. 515-101 du code de l'environnement, est insuffisant ; le coût unitaire du démantèlement des éoliennes, évalué par l'arrêté ministériel du 26 août 2011, est sous-évalué ; le tribunal aurait dû écarter l'application de cet arrêté et imposer à la société de constituer des garanties propres à couvrir les frais de démantèlement et de remise en état ; les dispositions de l'arrêté du 26 août 2011 sont illégales au regard de l'article R. 515-101 du code de l'environnement ;

- les mesures prévues pour le démantèlement des éoliennes et la remise en état du site sont elles-mêmes insuffisantes ; le tribunal aurait dû écarter l'application de l'arrêté du 26 août 2011 qui est illégal en tant qu'il impose seulement la suppression des câbles dans un rayon de 10 mètres autour des éoliennes et imposer le démantèlement de la totalité du réseau inter-éolien ;

- les prescriptions édictées dans l'arrêté en litige sont insuffisantes car elles n'assurent pas une protection suffisante des intérêts environnementaux mentionnés aux articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement ; il est porté atteinte aux intérêts paysagers et patrimoniaux car la zone d'implantation du projet est un secteur de bocage, naturel et vallonné comportant des monuments historiques protégés avec lesquels le parc éolien sera en situation de co-visibilité ; le projet portera également atteinte aux chiroptères se trouvant dans plusieurs zones Natura 2000 proches ; il s'agit d'espèces sensibles soumis à un risque de collision avec les éoliennes ; le projet portera encore atteinte à l'avifaune car il se situe dans le couloir de migration de la Grue cendrée.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 10 septembre 2020 et le 20 novembre 2020, la société Parc éolien de Thollet et Coulonges, représentée par Me Elfassi, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à la modification de l'autorisation en litige en tant qu'elle porte sur les éoliennes E9 à 12 auxquelles elle a renoncé ;

3°) subsidiairement, à ce que la cour prononce un sursis à statuer en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour permettre la régularisation de l'autorisation environnementale en litige ;

4°) à ce qu'il soit mis à la charge de chacun des appelants la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en ce qui concerne la recevabilité, que :

- l'objet social de l'association, tel qu'il est défini dans ses statuts, ne lui confère pas intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté en litige ;

- les requérants personnes physiques n'établissent pas que leurs conditions de vie seront affectées par les futures éoliennes ; leur intérêt à agir doit être écarté en conséquence.

Elle soutient, au fond, que :

- tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Par un mémoire, enregistré le 15 octobre 2020, le ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Par un mémoire en intervention, présenté le 15 octobre 2020, la Fédération anti-éolienne de la Vienne, représentée par Me Boudy, demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 25 avril 2018 ainsi que l'arrêté préfectoral du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions applicables à l'installation.

Elle soutient que :

- ses statuts lui confèrent un intérêt à intervenir au soutien des conclusions des appelants ;

- le jugement du tribunal a été rendu à la suite d'une procédure qui n'était pas impartiale en méconnaissance du droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ainsi, le président du tribunal, qui a présidé la chambre ayant rendu le jugement attaqué, était aussi président de la commission d'établissement de la liste d'aptitude aux fonctions de commissaire enquêteur ; il est intervenu, en cours de délibéré, dans le cadre d'un séminaire consacré aux éoliennes ;

- la procédure devant le tribunal a porté atteinte aux principes du contradictoire, des droits de la défense et de l'égalité des armes ; les opposants n'ont pu avoir accès aux données techniques et notamment aux productions permettant d'apprécier les impacts des éoliennes sur l'environnement ;

- le dossier de demande d'autorisation d'exploiter était incomplet ; alors que le poste de livraison de Belâbre fait partie du parc éolien, la demande d'autorisation ne porte pas sur cet équipement connexe qui forme avec ce parc une unité fonctionnelle ;

- il n'a pas été établi d'étude d'impact sur la liaison souterraine jusqu'au poste de livraison/transformation ; le pétitionnaire ne pouvait solliciter le bénéfice d'une instruction séparée en application de l'article L. 122-1-1 III du code de l'environnement dès lors que le projet ne nécessite pas la délivrance de plusieurs autorisations d'exploiter et que les incidences environnementales ont pu être connues dès la première demande d'autorisation ;

- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances quant à l'analyse de l'utilisation rationnelle de l'énergie ; il existe un déséquilibre dans l'offre de production par éoliennes, lesquelles sont concentrées au nord de la région Poitou-Charentes ; le parc éolien projeté ne présente aucun intérêt en termes de production d'énergies renouvelables ; sa production ne sera pas consommée localement et son coût de revient est très important ;

- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances quant à l'analyse des effets du projet sur les biens immobiliers ; le pétitionnaire aurait dû faire établir des expertises immobilières afin que soient mesurées les diverses nuisances que le projet entraînera sur les biens immobiliers du secteur et définies les mesures de réduction et de compensation ;

- le dossier de demande ne comporte pas de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées et d'habitats d'espèces protégées, en l'occurrence les chiroptères ;

- il appartenait à l'autorité compétente de surseoir à statuer sur la demande d'autorisation et l'arrêté de prescription en application des articles L. 153-11 et L. 424-1 du code de l'urbanisme dès lors que le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables de la communauté de communes de Vienne et Gartempe avait eu lieu avant la délivrance de l'arrêté fixant les prescriptions applicables à l'installation ; le principe de l'indépendance des législations ne pouvait faire obstacle à ce sursis à statuer dès lors qu'il résulte de l'article L. 152-1 du code de l'environnement que les installations classées pour la protection de l'environnement doivent être conformes aux documents d'urbanisme en vigueur ; les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables condamnent l'implantation d'éoliennes en raison des impacts négatifs de ces exploitations sur les sites environnants ; de plus, le futur plan local d'urbanisme intercommunal doit décliner les orientations du document d'orientations et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale (SCOT) Sud-Vienne qui donne priorité à l'extension et à la densification des parcs éoliens existants ;

- les mesures de démantèlement prévues ne sont pas conformes avec la règlementation issue de la réforme du 22 juin 2020 ; l'engagement de démantèlement et la provision nécessaire ne sont pas actualisés ; il en est de même des avis émis par la population et les municipalités sur cette question.

Par ordonnance du 3 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 24 novembre 2020 à 12h00.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à déclaration au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;

- l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me Monamy, représentant l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Hérolles et Thollet et autres, et de Me Z... substituant Me Elfassi, représentant la société Parc éolien de Thollet et Coulonges.

Considérant ce qui suit :

1. Par une demande déposée en préfecture de la Vienne le 18 décembre 2014 et complétée le 7 juillet 2015, la société Parc éolien de Thollet et Coulonges a sollicité l'autorisation d'exploiter, au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, un parc composé de 19 éoliennes sur le territoire des communes de Thollet et Coulonges. Le préfet a opposé à cette demande un arrêté de refus du 21 juillet 2016 aux motifs que le parc éolien projeté serait à l'origine de nuisances sonores, porterait atteinte aux paysages et au patrimoine culturel et aurait des conséquences défavorables pour l'avifaune et les sites Natura 2000 existants.

2. La société Parc éolien de Thollet et Coulonges a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté de refus du 21 juillet 2016. Au cours de l'instance devant le tribunal, l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Héroles et Thollet, Mme X..., M. C..., M. et Mme V..., Mme G... O... et M. P... O..., Mme A... et M. T... sont intervenus au soutien des conclusions du préfet tendant au rejet de la requête de la société. Par un jugement n° 1602617 du 25 avril 2018, le tribunal, après avoir admis l'intervention de l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges et de Thollet, a annulé l'arrêté de refus du 21 juillet 2016 en censurant chacun de ses motifs. Faisant application de l'article L. 514-6 du code de l'environnement, le tribunal a également délivré à la société l'autorisation demandée tout en renvoyant cette dernière devant le préfet pour l'édiction d'un arrêté fixant les prescriptions nécessaires au fonctionnement du parc éolien dans le respect des intérêts environnementaux protégés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Cet arrêté a été pris par le préfet de la Vienne le 29 octobre 2019.

3. Par une requête enregistrée au greffe de la cour sous le n° 18BX02496, l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Hérolles et Thollet, Mme X..., M. C..., M. et Mme V..., Mme G... O... et M. P... O..., Mme A... et M. T... demandent l'annulation du jugement du tribunal ayant délivré l'autorisation d'exploiter. Par une autre requête enregistrée sous le n° 20BX00762, l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Hérolles et Thollet, M. U..., Mme Q... X..., Mme G... O... et M. P... O..., Mme I... A... et M. N... T... demandent l'annulation de l'arrêté préfectoral du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions nécessaires au fonctionnement du parc éolien.

Sur la jonction :

4. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. (...) ". Aux termes de l'article L. 181-12 de ce code, issu de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " L'autorisation environnementale fixe les prescriptions nécessaires au respect des dispositions des articles L. 181-3 et L. 181-4. Ces prescriptions portent (...) sur les mesures et moyens à mettre en oeuvre lors de la réalisation du projet, au cours de son exploitation, au moment de sa cessation et après celle-ci, notamment les mesures d'évitement, de réduction et de compensation des effets négatifs notables sur l'environnement et la santé (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement est indissociable des prescriptions qui l'accompagnent, l'installation projetée ne pouvant, en l'absence de ces prescriptions, fonctionner dans des conditions permettant le respect des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Par suite, l'autorisation d'exploiter que le tribunal a délivrée dans son jugement du 25 avril 2018 et l'arrêté du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions applicables au fonctionnement de l'installation forment un ensemble indissociable. Les requêtes visées ci-dessus sont ainsi dirigées contre la même décision et il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le désistement :

6. Par un mémoire enregistré le 11 décembre 2018, M. et Mme V... ont déclaré se désister de l'instance. Il y a lieu de leur en donner acte.

Sur la recevabilité de l'intervention de M. U... dans l'instance n° 18BX02496 :

7. M. U... est propriétaire du château du Pin, édifice protégé au titre de la législation sur les monuments historiques. Situé à Coulonges, à environ 1 km seulement du parc éolien projeté, le château du Pin est susceptible de subir des nuisances visuelles. Par suite, M. U... justifie d'un intérêt suffisant à intervenir au soutien des conclusions des appelants.

Sur la recevabilité de l'intervention de la Fédération anti-éolienne de la Vienne :

8. Selon l'article 2 de ses statuts, la fédération a pour objet, au sein du département de la Vienne de " Lutter contre tout ce qui porte atteinte, notamment du fait de l'implantation de centrales éoliennes, à l'environnement, aux activités forestières, agricoles, pastorales, viticoles, touristiques, de villégiatures ou de loisirs, aux paysages, à la faune et à la flore, aux espaces protégés Natura 2000 aux ressources naturelles en air et en eau, aux monuments historiques, protégés ou non, au petit patrimoine et aux bâtiments typiques, afin de contribuer à la sauvegarde des atouts du territoire, au cadre de vie de ses habitants, à leur tranquillité, à leur santé, à la préservation de la valeur de leur patrimoine, de leurs activités professionnelles et de leur droit à vivre dans un environnement sain et sans nuisances. (...) Accompagner ses membres et ester en justice (...) contre (...) tout permis de construire, toute autorisation d'exploitation, autorisation ICPE, autorisation unique, autorisation environnementale destinée à accueillir un projet éolien (...) ".

9. Cet objet, qui est suffisamment précis, confère à la Fédération anti-éolienne de la Vienne un intérêt suffisant à intervenir au soutien des conclusions de l'association appelante dirigée contre l'autorisation d'exploiter délivrée par le tribunal.

Sur la régularité du jugement attaqué :

10. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs (...), la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que celle-ci comporte les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience, requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

11. En deuxième lieu, la circonstance que le président du tribunal administratif de Poitiers, qui a présidé la formation de jugement ayant rendu la décision attaquée, ait participé à une journée de formation des commissaires enquêteurs consacrée au thème de l'éolien pendant que le jugement était encore en délibéré ne révèle aucunement un manquement au principe d'impartialité consacré par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, le fait que le président du tribunal préside également la commission d'établissement de la liste d'aptitude aux fonctions de commissaire enquêteur, est par lui-même sans incidence sur le caractère équitable de la procédure suivie devant les premiers juges.

12. En troisième lieu, les interventions en première instance de l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Héroles et Thollet et autres présentaient un caractère accessoire et n'ont pas eu pour effet de donner à leurs auteurs la qualité de partie à l'instance. De ce fait, ces intervenants ne disposaient pas d'un droit d'accès aux pièces de la procédure alors même que le tribunal a délivré, par le jugement attaqué, l'autorisation d'exploiter sollicitée par la société pétitionnaire et présentement contestée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de l'égalité des armes, du principe du contradictoire et des droits de la défense doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'annulation de la décision de refus par le jugement attaqué :

13. Ainsi qu'il a été dit, la demande d'autorisation d'exploiter a été rejetée par le préfet de la Vienne dont l'arrêté de refus du 21 juillet 2016 est fondé sur ce que le parc éolien projeté sera à l'origine de nuisances sonores, portera atteinte aux paysages et au patrimoine culturel et entraînera des conséquences défavorables pour l'avifaune ainsi que pour les sites Natura 2000 existants. Dans le jugement attaqué du 25 avril 2018, le tribunal administratif de Poitiers a censuré chacun de ces motifs.

14. Aux termes du I de l'article L. 181-3 du code l'environnement issu de l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments (...) ".

15. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment de l'avis de l'autorité environnementale du 13 octobre 2015 que les émergences sonores liées au fonctionnement des éoliennes seront conformes à la réglementation grâce au plan de bridage prévu par le pétitionnaire après que l'étude acoustique réalisée à la demande de ce dernier eut admis un risque de dépassement de ces émergences réglementaires. Par ailleurs, l'auteur de la demande s'est engagé à faire réaliser une étude acoustique supplémentaire une fois le parc éolien mis en service afin d'adapter, si nécessaire, le plan de bridage. Par suite, le préfet ne pouvait rejeter la demande d'autorisation d'exploiter au seul motif, énoncé de façon très générale dans la décision du 21 juillet 2016, que le fonctionnement du parc éolien entraînerait un dépassement des émergences sonores réglementaires.

16. En deuxième lieu, le projet porté par la société pétitionnaire était initialement composé de 20 éoliennes d'une hauteur de 180 m en bout de pale, implantées sur un axe nord-ouest/sud-est d'une longueur totale de 8 km. Il résulte de l'instruction que le site d'implantation du projet se situe dans l'unité paysagère dite des Terres Froides, paysage bocager auquel le vallonnement existant donne un certain relief. Sur l'aire d'étude rapprochée, les paysages ouverts sont majoritaires et accueillent essentiellement des prairies. Ce paysage évolue entre des zones de plateaux cultivés où le bocage est dégradé et des enclaves de bocages denses bien conservés. Les boisements eux-mêmes y sont rares et dispersés, leur interconnexion étant assurée par un important réseau de haies arborées et arbustives. De plus, les bocages existants confèrent par endroits au paysage un caractère compartimenté, cloisonné qui est de nature à limiter autant que possible les impacts visuels inhérents au projet. Enfin, la présence d'éléments anthropiques tels que silos, bâtiments agricoles, lignes électriques, pylônes et autres châteaux d'eau est de nature à atténuer l'intérêt qui pourrait s'attacher à ces lieux. Dans ces circonstances, le paysage de type naturel et agricole qui entoure le projet ne peut être regardé comme présentant un caractère ou un intérêt particulier à l'identité, à l'attractivité et à la structuration desquelles le parc éolien porterait atteinte alors même que les services consultés pendant l'instruction de la demande ont émis des avis défavorables au projet en raison des atteintes portées, selon eux, aux paysages.

17. Il résulte néanmoins de l'instruction que le parc éolien projeté est susceptible d'entraîner des situations de visibilités ou co-visibilités pour certains monuments historiques présents dans le secteur environnant. Si tel est le cas pour le colombier du logis seigneurial de Saint-Martin-le-Mault, ce dernier est toutefois distant de 6 km environ du parc éolien projeté et il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu de cet éloignement et de la présence d'écrans paysagers, que ce monument historique subira un impact visuel significativement défavorable. Il est de même pour l'église de Coulonges, dont seul le portail nord est protégé, l'église de Thollet située à 2 km et l'église de Brigueil-le-Chantre qui est protégée par son cadre urbain et éloignée de 4 km du projet. Quant à l'église de la Trimouille, située à 8 km du projet et les sites de Bourg-Archambault, Montmorillon et Saint-Savin-sur-Gartempe, éloignés de plus de 10 km, les éléments du dossier permettent d'estimer qu'ils subiront des atteintes visuelles non significatives à raison de l'implantation du parc éolien. D'ailleurs, à l'exception du colombier du logis seigneurial de Saint-Martin-le-Mault, ces monuments historiques et sites n'étaient pas mentionnés dans les motifs de l'arrêté du 21 juillet 2016 qui mentionne seulement que le projet était de nature à " porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, sites, paysages naturels et urbains ". Par suite, le préfet ne pouvait rejeter la demande d'autorisation d'exploiter au motif que le parc éolien porterait atteinte aux paysages et aux sites avoisinants.

18. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 414-4 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000 (...) doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après " Evaluation des incidences Natura 2000 " : (...) 2° Les (...) projets d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations (...) VI. - L'autorité chargée d'autoriser (...) s'oppose à tout (...) projet (...) si l'évaluation des incidences requise (...) se révèle insuffisante ou s'il en résulte que leur réalisation porterait atteinte aux objectifs de conservation (...). "

19. Il résulte des dispositions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement, éclairées par l'interprétation donnée par la Cour de Justice de l'Union Européenne sur les conditions d'application de la directive " Habitats " (11 avril 2013 C-258/11), que l'autorisation d'un projet entrant dans leur champ d'application ne peut être accordée qu'à la condition que les autorités compétentes, une fois identifiés tous les aspects de ce projet pouvant affecter les objectifs de conservation du site Natura 2000 concerné et compte tenu des meilleures connaissances scientifiques en la matière, aient acquis la certitude, au moment où elles autorisent le projet, qu'il est dépourvu d'effets préjudiciables durables à l'intégrité du site concerné. Il en est ainsi lorsqu'il ne subsiste aucun doute raisonnable d'un point de vue scientifique quant à l'absence de tels effets. Par ailleurs, il résulte de ces dispositions que, pour évaluer les incidences du projet sur l'état de conservation de ce site, il doit être tenu compte des mesures, prévues par le projet, de nature à supprimer ou réduire les effets dommageables de celui-ci sur le site en cause mais, en revanche, il n'y a pas lieu de tenir compte, à ce stade, des mesures compensatoires envisagées, le cas échéant, dans l'étude d'incidences.

20. La zone Natura 2000 la plus proche du site d'implantation du projet est la vallée du Corchon distante de 500 mètres, tandis que les zones Natura 2000 des vallées du Salleron et de l'Anglin sont, respectivement, éloignées de 6 et 7 km de ce site. A la demande de l'autorité environnementale, le pétitionnaire a élaboré une étude d'incidence complémentaire qui a conclu à l'absence d'incidences notables et dommageables du projet sur les espèces et habitats protégés qui ont été identifiés. En se bornant à relever, dans les motifs de sa décision, que le dossier d'évaluation n'écartait pas tout doute raisonnable quant à l'absence d'effets préjudiciables du projet sur les espèces et habitats sensibles, sans critiquer les éléments apportés par le pétitionnaire notamment à l'occasion de l'étude complémentaire, et en l'absence d'éléments en ce sens résultant de l'instruction, le préfet ne peut être regardé comme ayant légalement, par ce motif, fondé sa décision de refus.

21. En quatrième lieu, dans son avis du 13 octobre 2015, l'autorité environnementale a recommandé un éloignement des éoliennes des haies et autres espaces propices à la présence des chiroptères, un arrêt du fonctionnement des éoliennes au cours des périodes durant lesquelles l'activité des chiroptères est la plus intense et la réalisation d'un suivi de mortalité régulier. Il ne résulte pas de l'instruction que le positionnement des éoliennes par rapport aux lisières boisées serait par lui-même de nature à engendrer des risques particuliers pour les chiroptères dès lors que les études citées dans l'évaluation des incidences Natura 2000 contenue dans l'étude d'impact ont relevé qu'au-delà de quelques dizaines de mètres, le caractère attractif que présentent les lisières pour les chiroptères perd de sa force tandis que les observations effectuées sur place par les auteurs de l'étude d'impact ont montré qu'au-delà de 30 mètres de distance et de 70 mètres de hauteur par rapport aux lisières, les enjeux chiroptériques devenaient " très faibles ". C'est pourquoi il a été prévu que les éoliennes seraient implantées à 90 mètres des lisières boisées, la recommandation Eurobats selon laquelle cette distance devrait être de 200 mètres au moins, qui est dépourvue de valeur règlementaire, ne pouvant être utilement invoquée pour contester la légalité de l'autorisation en litige. De plus, dans son mémoire en réponse aux observations de l'autorité environnementale, le pétitionnaire a annoncé l'installation d'un bridage généralisé du parc éolien lors des périodes d'activité intense des chiroptères. Au demeurant, l'arrêté préfectoral du 29 octobre 2019, fixant les prescriptions applicables au fonctionnement de l'installation, définit avec précision les mesures de bridages nécessaires à la réduction du risque de mortalité pesant sur les chiroptères. Par suite, le préfet n'a pas fondé légalement son refus en retenant que le projet porterait une atteinte aux chiroptères protégées.

22. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que le parc éolien est traversé par un couloir emprunté par les oiseaux migrateurs, en particulier la Grue cendrée. Mais, comme l'a d'ailleurs relevé l'autorité environnementale, les grues cendrées ont pour habitude de voler à haute altitude même s'il peut leur arriver de se déplacer à hauteur d'éoliennes en cas d'épisodes météorologiques difficiles ou pour des haltes migratoires. Le risque de collision a néanmoins été pris en considération par le pétitionnaire qui a aménagé une trouée de 1,25 km au sein du parc éolien tandis que la suppression de l'éolienne n° 13, décidée au cours de l'instruction de la demande pour tenir compte des observations de l'autorité environnementale, permet de créer une nouvelle trouée de 1,1 km. Il ne résulte pas de l'instruction que ces mesures seraient insuffisantes pour assurer la protection des oiseaux migrateurs et en particulier des grues cendrées comme l'a pourtant estimé le préfet dans sa décision du 21 juillet 2016.

23. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté de refus du 21 juillet 2016.

Sur la légalité de l'autorisation d'exploiter :

En ce qui concerne le cadre juridique :

24. Les dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017, codifiées aux articles L. 181-1 et suivants du code de l'environnement, instituent une autorisation environnementale dont l'objet est de permettre qu'une décision unique tienne lieu de plusieurs décisions auparavant distinctes dans les conditions qu'elles précisent.

25. Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : 1° Les autorisations délivrées au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance (....) avant le 1er mars 2017, sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code (...) les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables (...) 2° Les demandes d'autorisation au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement (...) régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable (...) ".

26. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme les autres autorisations mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce.

27. La société Parc éolien de Thollet et Coulonges a déposé sa demande d'autorisation le 18 décembre 2014 puis l'a complétée le 7 juillet 2015. En application de l'article 15 précité de l'ordonnance du 26 janvier 2017, l'instruction de la demande d'autorisation et la délivrance de celle-ci sont soumises aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur avant le 1er mars 2017, date d'entrée en vigueur du régime de l'autorisation environnementale. En revanche, l'arrêté préfectoral du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions applicables au fonctionnement du parc éolien est soumis, eu égard à la date de son édiction, au nouveau régime défini par l'ordonnance du 26 janvier 2017.

En ce qui concerne le contenu du dossier de demande sur l'exposé des capacités financières du pétitionnaire :

28. Selon l'article R. 512-3 du code de l'environnement, qui institue une règle de procédure restée en vigueur jusqu'au 1er mars 2017, la demande d'autorisation mentionne " 5° Les capacités (...) financières de l'exploitant (...) ". Il résulte de ces dispositions que le pétitionnaire est tenu de fournir des indications précises et étayées sur ses capacités financières à l'appui de son dossier de demande.

29. La demande d'autorisation indique que la société Parc éolien de Thollet et Coulonges, qui dispose d'un capital de 37 000 euros, est une filiale détenue à 100 % par la société EDF Energies Nouvelles (EN) France dont le capital s'élève à 100 500 000 euros. Cette dernière est elle-même une filiale détenue à 100 % par EDF Energies Nouvelles (EN), société anonyme au capital de 226 755 000 euros détenue par le groupe EDF. Selon le dossier de demande, le coût de l'investissement nécessaire à la construction et à l'exploitation du parc éolien, évalué à 91,3 millions d'euros, doit être financé par les fonds propres de la société EDF EN France à hauteur de 15 % à 25 % de ce montant. La part restante de l'investissement sera assurée par la mise en place d'un financement interne spécifique au groupe EDF ou un financement de projets avec une ou plusieurs banques, garanti par EDF EN pendant la période de construction. Un tableau présentant les résultats financiers de la société EDF EN entre 2009 et 2012 a été joint au dossier de demande et fait apparaître un résultat net consolidé oscillant entre 79 817 euros et 104 426 euros (chiffres exprimés en milliers d'euros). Etait joint au dossier une lettre de confort du 15 décembre 2014 dans laquelle la société EDF Energies Nouvelles, après avoir rappelé que son chiffre d'affaires pour 2013 s'est élevé à 1 293,6 millions d'euros, a confirmé son soutien financier à la société pétitionnaire pour la construction du parc éolien de Thollet et Coulonges. EDF EN s'est ainsi engagée à " mettre en oeuvre tous les efforts raisonnables en faveur de la société afin que celle-ci soit en mesure de procéder à la réalisation des études techniques et environnementales, à l'obtention des autorisations administratives et à la préparation de l'ensemble des accords de fournitures et de prestations pour la construction et l'exploitation du projet. La société et l'actionnaire envisagent de financer la construction du projet sur fonds propres des actionnaires pouvant éventuellement être complété par un financement bancaire...EDF EN a financé au cours des trois dernières années une quinzaine de projets éoliens... ". Il ressort de ces éléments que le dossier de demande comportait des indications précises et étayées sur les capacités financières du pétitionnaire pour la conduite de son projet. Au demeurant, son actionnaire a renouvelé son soutien financier dans un courrier du 18 septembre 2019.

En ce qui concerne l'avis des propriétaires sur le démantèlement et la remise en état du site en fin d'exploitation :

30. Aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement applicable à l'autorisation en litige et devenu l'article D. 181-15-2 au 1er mars 2017 : " I. - A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur (...) ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur (...) ". Aux termes de l'article 29 l'arrêté du 26 août 2011 : " Les opérations de démantèlement et de remise en état (...) comprennent : - le démantèlement des installations de production d'électricité, des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. (...) ".

31. En premier lieu, MM. Jean-Louis et André Fruchon, respectivement nu-propriétaire et usufruitier de la parcelle A 264, ont donné leur avis sur les conditions de démantèlement des éoliennes et de remise en état du site le 17 et 18 octobre 2014. Ils ont aussi donné leur accord en leur qualité de propriétaires de la parcelle A 3 lors de la signature, le 15 avril 2013, d'une promesse de bail avec la société EDF/EN France. Par ailleurs, M. K... J..., gérant de la société Dinesen Farms Thollet KS devenue société Fermes Larsn Lavergne K/S, propriétaire de la parcelle A 46, a donné son accord sur la remise en état du site à l'occasion d'une promesse de bail signée avec EDF/EN France le 24 mai 2013. Enfin, en tant que propriétaire de la parcelle B 473, M. Y... a signé en son nom et au nom de son épouse, sur mandat de celle-ci, l'accord pour la remise en état du site.

32. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que MM. Christian et Jean-Luc Mancel, propriétaires des parcelles A 23 et A 63, ont été invités par EDF/EN à émettre leur avis sur les conditions de remise en état du site. Une telle demande a également été adressée à MM. Barlier, Chantemargue et Boiron, respectivement propriétaires des parcelles A 75 et A 76, C 29 et C 46. En l'absence d'avis explicite de leur part, les intéressés sont réputés s'être prononcés en application des dispositions précitées de l'article R. 512-6 du code de l'environnement.

33. En troisième lieu, M. E..., propriétaire des parcelles B 93, B 107 et B 111, consulté par EDF/EN sur les conditions de démantèlement et de remise en état du site, est réputé s'être prononcé en application de l'article R. 512-6 précité du code de l'environnement. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que l'implantation des éoliennes E 10, E 11 et E 12 sur les parcelles concernées a été abandonnée.

34. En quatrième lieu, il résulte des dispositions de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 modifié, citées au point 30, que la remise en état d'un site d'éoliennes comprend le démantèlement des câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. En application de ces dispositions, le pétitionnaire n'était pas tenu de solliciter l'avis des propriétaires sur la remise en état des voies de circulations et des terrains traversés par les câbles enterrés à plus de 10 mètres des éoliennes.

35. En cinquième lieu, le propriétaire de la parcelle A 85, laquelle doit être traversée par un chemin desservant l'éolienne n°1, a donné son accord sur la remise en état du site lors de la signature, le 15 avril 2013, d'une promesse de bail portant sur cette parcelle. Les propriétaires des parcelles B 112, B 115 et B 117, traversées par un chemin d'accès à l'éolienne n° 11, laquelle a été supprimée dans la version définitive du projet, ont au demeurant donné leur accord sur la remise en état du site ainsi que l'établissent les promesses de bail signées le 23 avril 2013 et le 29 mai 2013.

36. Enfin, à supposer que ces avis mentionnés ci-dessus, ou certains d'entre eux, n'aient pas été versés au dossier d'enquête publique contrairement aux exigences du 4° de l'article R. 123-8 du code de l'environnement, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle omission, alors que ces avis étaient favorables aux conditions de démantèlement du site ou réputés avoir été émis en l'absence de réponse explicite des propriétaires dûment consultés, a pu avoir pour effet de nuire à l'information du public ou a été de nature à exercer une influence sur le sens de l'autorisation contestée.

En ce qui concerne l'objet du dossier de demande :

37. Aux termes de l'article L. 181-1 du code de l'environnement : " l'autorisation environnementale inclut les équipements, installations et activités figurant dans le projet du pétitionnaire que leur connexité rend nécessaires à ces activités, installations, ouvrages et travaux. "

38. Il résulte de l'instruction que ni le lieu d'implantation du poste de livraison électrique ni le tracé de la liaison souterraine n'étaient connus lors de l'instruction de la demande d'autorisation. La circonstance que les éléments du dossier de demande, et l'autorisation délivrée, n'aient pas porté sur aspect du projet est par suite sans incidence sur la légalité de cette autorisation. A cet égard, le poste de livraison a lui-même fait l'objet d'une instruction à part qui a débouché sur la délivrance, le 13 juin 2019, d'un permis autorisant sa construction. Cette autorisation a été délivrée sur la base d'un dossier contenant une étude d'impact qui analysait les incidences sur l'environnement du poste de livraison cumulées avec ceux du parc éolien lui-même. Par suite, l'autorisation en litige n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 181-1 du code de l'environnement.

En ce qui concerne l'étude d'impact :

39. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. II. - (...) l'étude d'impact comporte les éléments suivants, (...) 2° Une description du projet, y compris en particulier : (...) 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : (...) la biodiversité, les terres (...) 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; (...) c) (...) de la création de nuisances (...) d) Des risques (...) pour l'environnement (...) ".

40. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

41. En premier lieu, pour élaborer le volet écologique de l'étude d'impact, le bureau d'études O-Geo, spécialisé dans la réalisation d'analyses chiroptérologiques, s'est appuyé sur un certain nombre de documents, lesquels sont mentionnés dans la bibliographie qui accompagne cette étude écologique. Un recensement des chiroptères a été réalisé à l'aide de 24 points d'écoute au sol et 3 points d'écoute en altitude qui ont duré respectivement 805 heures et 7 299 heures. Les sorties au sol ont été au nombre de 24 s'étalant à chaque fois sur 3 nuits consécutives durant des périodes propices à l'observation de chiroptères. Ces observations ont permis d'identifier la présence de 20 espèces de chauves-souris sur la zone sur les 26 connues dans le département de la Vienne. Les mesures d'activité des chiroptères ont été réalisées en fonction de plusieurs types d'habitats, à savoir les bois, les étangs, les haies arborées, les haies arbustives hautes et les haies arbustives basses. Les auteurs de l'étude d'impact se sont attachés à étudier la localisation et les mouvements des chiroptères issus de sites de mise-bas. Ces différentes observations ont permis d'identifier les espèces de chiroptères qui fréquentent le site en transit, celles qui occupent celui-ci en période de mise-bas et celles qui y demeurent toute l'année. Même si les inventaires ont été réalisés en 2013 et 2014, plus précisément du 4 octobre 2013 au 20 septembre 2014, aucun élément du dossier ne permet d'estimer que les résultats obtenus ne seraient plus représentatifs de la population des chiroptères existante au 25 avril 2018, date de l'autorisation en litige, laquelle résulte du jugement du tribunal annulant le refus d'autorisation du 21 juillet 2016. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la méthodologie mise en oeuvre aurait présenté des insuffisances ayant abouti à un recensement incomplet ou erroné des chiroptères susceptibles d'être impactés par le parc éolien projeté.

42. En deuxième lieu, l'étude avifaunistique contenue dans l'étude d'impact a obéi à la méthodologie IPA (Indices Ponctuels d'abondances) combinant cinq types d'inventaires en fonction des espèces examinées : un suivi des oiseaux migrateurs pour les phases post et pré-migratrices au moyen de 12 points d'observation de 30 minutes répartis sur l'aire d'étude ; un contrôle de la population hivernante sur un secteur de 45,7 km réparti en 10 parcours pédestres sur l'aide d'étude ; un suivi des oiseaux nicheurs par la réalisation de 25 IPA ; un suivi des rapaces en période de nidification sur un trajet en voiture de 39 km parcourant l'ensemble de l'aire d'étude ; une collecte des informations hors-protocole au gré des contacts observés durant les déplacements. Selon le guide d'élaboration des études d'impacts des projets de parcs éoliens établi par le ministère de l'environnement, la méthode IPA, même si elle autorise un effort d'investigation plus réduit, aboutit à des inventaires comparables dans l'espace et dans le temps à ceux des méthodes dites " absolues ", plus exhaustives. L'association appelante, en se référant aux critiques générales formulées par la ligue de protection des oiseaux au cours de l'enquête publique, n'apporte aucun élément suffisamment probant pour estimer que la méthode IPA retenue aurait abouti à des résultats insuffisants ou erronés. Par ailleurs, l'étude d'impact a reconnu que la zone d'implantation du projet, si elle traverse le couloir principal de passage de la Grue cendrée, n'accueille pas des stations importantes de haltes migratoires. Les développements que consacre l'étude aux Grues cendrées, qui portent sur la localisation de l'axe de passage et l'estimation du nombre d'individus de cette espèce, accompagnés d'une carte permettant de localiser les trajets de ces oiseaux, sont suffisamment complets et précis. La circonstance que les résultats du protocole de recherche consacré aux rapaces-nicheurs contenus dans l'étude d'impact ne mentionnent pas le faucon pèlerin ne caractérise pas, à elle seule, une insuffisance de cette étude, les requérants n'apportant aucun élément permettant d'estimer que cette espèce serait présente, autrement que de manière anecdotique, dans le secteur du projet. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les auteurs de l'étude d'impact auraient sous-estimé l'impact des éoliennes sur l'avifaune, notamment les Grues cendrées, qui bénéficiera dans la zone d'implantation du parc de deux trouées de 1,25 km et 3,05 km, d'autant qu'au cours de l'instruction de la demande, le pétitionnaire a abandonné l'implantation de l'éolienne n° 13 et qu'il a au demeurant, après la délivrance de l'autorisation par le tribunal, renoncé à l'implantation des éoliennes n° 9 à 12. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'étude d'impact serait insuffisante du fait qu'elle ne contient pas de mesures compensatoires pour l'avifaune, notamment migratrice.

43. En troisième lieu, l'étude d'impact décrit les caractéristiques des lieux environnant le projet, situé dans l'unité paysagère des Terres-Froides, caractérisée par la présence de bocages et de vallons. Les rebords des vallées sont identifiés comme des secteurs à enjeux y compris au niveau du paysage immédiatement situé aux alentours du projet. Des développements particuliers, illustrés par plusieurs photographies, sont consacrés à la trame bocagère du paysage environnant formé de haies arborées, de plateaux cultivés où le bocage est dégradé, de zones enclavées où le bocage est dense et conservé. Par ailleurs, le volet paysager de l'étude d'impact comporte 47 photomontages destinés à apprécier l'insertion du futur parc éolien dans son environnement. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le format des photomontages, qui a été choisi pour conserver les rapports d'échelle entre les éoliennes et les paysages alentour, aboutirait à une représentation déformée de ces appareils dans leur environnement. De plus, alors que les points de prise de vue des photomontages se situent dans un périmètre entourant le futur parc, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'auteur de l'étude de réaliser des photographies couvrant tous les angles de vue des paysages proche et lointain, notamment depuis les habitations situées dans les environs du futur parc. La réalisation des photomontages a aussi tenu compte des contraintes résultant du caractère vallonné et bocager des paysages existants sans qu'il soit établi au dossier que ces contraintes auraient conduit à minimiser l'impact paysager du projet. Dans ces conditions, aucun élément de l'instruction ne permet d'estimer que le volet paysager de l'étude d'impact, réalisé par le bureau d'études Abies, auquel plusieurs services de l'Etat ont d'ailleurs eu recours pour la réalisation de schémas éoliens ou la rédaction de guides pour l'ADEME ou le ministère de l'écologie, aurait appréhendé de manière insuffisante ou erronée l'insertion paysagère du parc éolien alors que la méthodologie suivie a répondu aux préconisations du guide ministériel de l'étude d'impact sur l'environnement des parcs éoliens. Quant aux édifices classés ou inscrits au titre de la législation sur les monuments historiques, ils sont recensés et localisés par rapport au futur projet dans l'étude d'impact. Les incidences visuelles du projet sur le château du Pin, qui peuvent être appréciées au moyen des photomontages, sont qualifiées de " fortes " dans l'étude d'impact, laquelle précise néanmoins que cet édifice est une propriété privée non ouverte au public. Enfin, la mention contenue dans l'étude et selon laquelle l'impact visuel du parc éolien sur le château d'Archambault est nul n'est pas erronée dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que cet édifice, situé à 13 km de la zone du projet, n'offre pas de vues en direction de celui-ci. Au demeurant, dans son avis du 13 octobre 2015, l'autorité environnementale a estimé que l'étude paysagère était " globalement de bonne qualité et permet d'appréhender correctement les enjeux paysagers ".

44. En quatrième lieu, l'étude d'impact comporte une " évaluation des incidences Natura 2000 " que le pétitionnaire a complétée à la demande de l'autorité environnementale en produisant, d'une part, une carte montrant le périmètre des impacts du projet et, d'autre part, la liste de toutes les zones Natura 2000 sur lesquelles le projet pourrait avoir des incidences et cela pour l'ensemble des espèces concernées par les zones de protection. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ces éléments sont insuffisants, notamment en ce qu'ils concluent à l'absence d'atteinte significative du projet sur les zones Natura 2000 existantes dont seule la zone " Vallée du Corchon " est située à proximité du parc éolien projeté, les autres zones Natura 2000 étant éloignées d'au moins 7 km de celui-ci.

45. En cinquième lieu, l'étude d'impact évalue la quantité de dioxyde de carbone dont le rejet dans l'atmosphère sera évité grâce au parc éolien projeté et rappelle les objectifs en termes de développement des énergies renouvelables fixés par le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires de Nouvelle-Aquitaine. Par ailleurs, l'étude d'impact expose les raisons qui ont conduit le pétitionnaire à choisir le lieu d'implantation du projet, sans qu'importe la circonstance que la répartition géographique des parcs éoliens sur le territoire régional n'est pas uniforme, en raison précisément des différences de potentialités de vent offertes par les espaces concernés. Ainsi, l'étude d'impact, qui n'avait pas à traiter des questions concernant le coût de revient et la maîtrise des coûts propres à une installation d'aérogénérateurs, n'est pas insuffisante dans ses développements consacrés à l'utilisation rationnelle de l'énergie.

46. En sixième lieu et en tout état de cause, l'étude d'impact, complétée par le mémoire en réponse rédigé par le pétitionnaire après l'enquête publique, comporte des développements suffisants quant aux conséquences de l'implantation d'éoliennes sur la valeur des biens immobiliers.

47. En septième lieu, le pétitionnaire ne pouvait être regardé comme tenu de réaliser une seule étude d'impact pour le parc éolien et le poste de livraison dès lors que, comme il a été dit au point 38, la localisation de ce dernier équipement n'était pas encore connue lors du dépôt de la demande d'autorisation. Par suite, l'absence dans l'étude d'impact jointe à la demande d'autorisation d'exploiter d'un volet consacré au poste de livraison ne constitue pas un vice de nature à justifier l'annulation de l'autorisation délivrée. Il est par ailleurs constant que le poste de livraison électrique a fait l'objet d'une étude d'impact spécifique, soumise à enquête publique, une fois que son lieu d'implantation et le tracé de la liaison ont été déterminés et que les effets du poste de livraison et de la liaison électrique souterraine ont été traités dans l'étude d'impact spécifique au poste de livraison, laquelle analyse en particulier les effets cumulés sur l'environnement de ces deux équipements.

48. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté en toutes ses branches.

En ce qui concerne l'avis de l'autorité environnementale :

49. En premier lieu, l'autorisation d'exploiter n'a pas été délivrée par le préfet de la Vienne, auteur de l'arrêté du 21 juillet 2016 rejetant la demande d'autorisation d'exploiter, mais par le tribunal administratif de Poitiers qui, après avoir annulé cet arrêté de refus, a fait usage des pouvoirs de pleine juridiction qu'il tient de l'article L. 514-6 du code de l'environnement. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet ne pouvait à la fois émettre l'avis du 13 octobre 2015 sur l'étude d'impact du projet par le biais de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) de Poitou-Charentes et délivrer l'autorisation en litige en sa qualité de préfet du département de la Vienne, en méconnaissance du principe de l'autonomie de l'autorité environnementale résultant de l'article 6 de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011, est inopérant.

50. En deuxième lieu, l'avis de la DREAL du 13 octobre 2015 s'est montré critique sur le contenu de l'étude d'impact dès lors qu'il a relevé que " l'analyse des impacts du projet n'est pas proportionnée aux enjeux identifiés sur ce territoire. Ceci interfère sur l'évaluation des incidences sur les sites Natura 2000 qui, de ce fait, est insuffisante, ce qui n'est pas compatible avec une autorisation en l'état. Il serait attendu que le porteur de projet prenne en compte les enjeux avifaune et chiroptères, majeurs sur le secteur, pour proposer un projet avec une implantation et un nombre d'éoliennes, qui pourraient concilier développement des énergies renouvelables et préservation de la biodiversité. ". En ayant ainsi mis en lumière les lacunes ou les insuffisances qui entachaient l'étude d'impact, ce qui a conduit la société pétitionnaire à élaborer une étude complémentaire, l'autorité environnementale a contribué à l'information du public et a mis l'autorité compétente à même de fixer en connaissance de cause les prescriptions contenues dans l'arrêté du 29 octobre 2019. Dans ces conditions, la seule circonstance que l'autorité environnementale n'ait pas disposé d'une autonomie vis-à-vis de l'autorité prescriptrice ne suffisait pas à vicier la procédure et, partant, à entacher d'illégalité la décision en litige.

51. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 122-6 du code de l'environnement issu du décret n°2017-626 du 27 avril 2017, applicable en l'espèce : " (...) III. - L'autorité environnementale (...) est la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable de la région sur le territoire de laquelle le projet doit être réalisé (...) ". En application de ces dispositions, l'étude d'impact complémentaire a été soumise à la mission régionale de l'autorité environnementale (MRAE) qui a rendu un avis le 3 avril 2019 préalablement à l'édiction de l'arrêté fixant les prescriptions applicables au parc éolien projeté.

52. A supposer que l'avis du 3 avril 2019 soit regardé comme irrégulier au motif qu'il a été signé par une autorité incompétente, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que cette circonstance a eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou a été de nature à exercer une influence sur le sens de cet avis et sur l'autorisation.

53. L'avis du 3 avril 2019 analyse les compléments apportés à l'étude d'impact initiale à la suite des lacunes de ce document soulignées par l'autorité environnementale dans son avis du 13 octobre 2015. C'est pourquoi l'avis du 3 avril 2019 traite de la prévention des impacts du projet sur la biodiversité, objet des compléments attendus, si bien que l'association appelante ne peut utilement soutenir que la MRAE n'aurait pas exercé l'ensemble de ses compétences en s'abstenant d'analyser les développements de l'étude d'impact sur le paysage, le cadre de vie et la santé humaine, autant de questions qui ont déjà été analysées dans l'étude d'impact initiale et le premier avis du 13 octobre 2015.

54. Aux termes de l'article R. 122-24 du code de l'environnement issu du décret du 26 avril 2017 : " Dans chaque région, la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable bénéficie de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement (...). Pour l'exercice de cet appui, par dérogation à l'article 2 du décret n° 2009-235 du 27 février 2009 relatif à l'organisation et aux missions des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, à l'article 14 du décret n° 2010-687 du 24 juin 2010 relatif à l'organisation et aux missions des services de l'Etat dans la région (...) les agents de ce service sont placés sous l'autorité fonctionnelle du président de la mission régionale d'autorité environnementale. ". Ces dispositions organisent l'autonomie fonctionnelle de la MRAE, chargée de se prononcer sur l'évaluation environnementale, vis-à-vis de l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'exploiter. Aucun élément du dossier ne permet d'estimer que l'avis du 3 avril 2019 aurait été rendu sur la base d'un rapport émis par la DREAL, service régional de l'Etat, comme le prévoit, il est vrai, l'article 15 du règlement intérieur du conseil général de l'environnement et du développement durable. A supposer qu'il en ait été ainsi, il n'est pas établi au dossier, eu égard notamment aux termes de son avis, que la MRAE aurait exercé sa mission en méconnaissance du principe de l'autonomie fonctionnelle consacré par l'article 6 de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011.

55. A la suite de la mesure d'instruction effectuée par la cour, le ministre a justifié de la publication de l'avis de la MRAE sur le site internet de la préfecture de la Vienne et sur le site de la MRAE. Le droit à l'information du public a ainsi été satisfait.

En ce qui concerne la publicité de l'avis d'enquête publique :

56. Aux termes de l'article R. 123-11 du code de l'environnement : " I. - Un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 123-9 à la connaissance du public est publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. (...) ". Aux termes de l'article R. 512-14 du même code : " III. - Les communes, dans lesquelles il est procédé à l'affichage de l'avis au public prévu au II de l'article R. 123-11, sont celles concernées par les risques et inconvénients dont l'établissement peut être la source (...) ".

57. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 15 avril 2015 par lequel le préfet de la Vienne a ouvert l'enquête publique a été publié dans deux journaux du département de la Vienne alors que le périmètre de cette enquête a couvert d'autres commune situées dans les départements de la Haute-Vienne et de l'Indre. Toutefois, alors que l'avis d'enquête a été affiché dans les mairies de l'ensemble des communes des trois départements situés dans le périmètre de l'enquête publique, il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du commissaire enquêteur, que 254 personnes ont déposé leurs observations au cours de l'enquête, le commissaire enquêteur ayant été destinataire de 254 lettres par ailleurs. De plus, ont été présentées durant l'enquête publique deux pétitions défavorables au projet signées par 1 850 personnes et 47 commerçants tandis qu'une pétition favorable au projet a réuni 197 signatures. L'enquête publique a ainsi donné lieu à une participation importante du public, comme l'a d'ailleurs relevé le commissaire enquêteur, si bien que la publication de l'avis d'enquête dans le seul département de la Vienne n'a pas porté atteinte au droit à l'information du public. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 123-11 du code de l'environnement doit être écarté.

En ce qui concerne la consultation des conseils municipaux intéressés :

58. Aux termes de l'article R. 512-20 du code de l'environnement : " Le conseil municipal de la commune où l'installation projetée doit être implantée et celui de chacune des communes mentionnées au III de l'article R. 512-14 sont appelés à donner leur avis sur la demande d'autorisation dès l'ouverture de l'enquête. (...) ". L'article R. 512-14 du même code, vise les communes concernées par les risques et inconvénients dont le projet peut être la source.

59. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées manque en fait dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 19 octobre 2015 le préfet de la Vienne a invité les communes intéressées à donner un avis sur le projet d'installation classée. Contrairement à ce que soutient les requérants, les communes de La Trimouille, Lignac et Tilly ont aussi été destinataires d'un tel courrier. Par ailleurs, la circonstance que les conseils municipaux des communes intéressées se seraient prononcés dans des conditions irrégulières, comme l'allègue l'association appelante, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité l'autorisation contestée dès lors qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que les irrégularités alléguées, à les supposer établies, auraient privé les tiers d'une garantie ou exercé une influence sur l'autorisation en litige.

En ce qui concerne la composition du dossier d'enquête publique :

60. Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. Le dossier comprend au moins : (...) 4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme. (...) ".

61. L'enquête publique a porté sur le projet d'exploitation d'un parc éolien au titre des installations classées pour la protection de l'environnement et non sur le permis de construire que cette opération nécessite par ailleurs. Dans ces conditions, l'association appelante ne peut utilement soutenir que les avis du ministre en charge de l'aviation civile et du ministre de la défense, les avis des maires des communes de Thollet et de Coulonges, l'avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers et ceux des établissements publics de coopération intercommunale et des communes limitrophes du projet auraient dû être joints au dossier soumis à enquête publique, dès lors que ces avis concernaient la procédure d'instruction du permis de construire que le pétitionnaire a déposée parallèlement.

En ce qui concerne l'absence de nouvelle consultation de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) :

62. Aux termes de l'article R. 553-9 du code de l'environnement : " Pour les installations relevant du présent titre (...) la commission départementale de la nature, des paysages et des sites est consultée, dans sa formation spécialisée sites et paysages, en lieu et place de la commission compétente en matière d'environnement et de risques sanitaires et technologiques. ". Aux termes de l'article R. 512-25 du même code : " Au vu du dossier de l'enquête (...) l'inspection des installations classées établit un rapport sur la demande d'autorisation et sur les résultats de l'enquête. Ce rapport est présenté au conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques saisi par le préfet. L'inspection des installations classées soumet également à ce conseil ses propositions concernant soit le refus de la demande, soit les prescriptions envisagées. (...) ". En application de l'article 15 de l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017, ces dispositions procédurales, en vigueur jusqu'au 1er mars 2017, sont applicables à la demande d'autorisation présentée par le pétitionnaire et que le tribunal a satisfaite dans son jugement du 25 avril 2018.

63. Dans son rapport du 25 mars 2016 remis à la CDNPS, l'inspecteur des installations classées a émis un avis défavorable au projet. Saisie de ce rapport qu'elle a examiné au cours de sa séance du 7 avril 2016, la CDNPS a émis un avis favorable au projet d'arrêté refusant l'autorisation d'exploiter dont elle était également saisie. Même si l'avis rendu par la CDNPS a porté sur le rapport défavorable rédigé par l'inspecteur des installations classées et sur un projet d'arrêté de refus, il ressort des pièces du dossier que l'opération en litige n'a fait l'objet d'aucune modification ultérieure, si bien que la délivrance de l'autorisation présentement contestée n'était pas subordonnée à une nouvelle consultation de cette commission, l'autorisation délivrée par le tribunal ayant porté, ainsi qu'il vient, d'être dit sur un projet inchangé par rapport à celui défini dans la demande d'autorisation. Au demeurant, à supposer que l'absence de nouvelle consultation de la CDNPS révèle un vice de procédure, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette irrégularité aurait porté atteinte à l'information du public ou exercé une influence sur le sens de l'autorisation contestée.

64. Par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 que le régime de l'autorisation environnementale s'applique aux décisions prises après la délivrance des autorisations ayant fait l'objet d'une demande déposée avant le 1er mars 2017. Par suite, l'arrêté du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions applicables au parc éolien en litige est soumis au régime issu de l'ordonnance du 26 janvier 2017, dont l'article R. 181-45 du code de l'environnement, en vigueur au 29 octobre 2019, n'impose plus au préfet de saisir obligatoirement la CDPNS avant de prendre un arrêté de prescriptions. Le moyen soulevé doit ainsi être écarté.

En ce qui concerne l'absence de dérogation à la destruction d'espèces protégées ou d'habitats d'espèces protégés :

65. Alors que l'association appelante allègue que le projet entraînera la destruction d'espèces protégées de chiroptères, aucun élément de l'instruction ne fait apparaître, ainsi qu'il a été dit au point 20, que la réalisation de ce projet présente un risque suffisamment avéré de destruction d'individus ou d'habitats sensibles. Dans ces conditions, le pétitionnaire n'était pas tenu de joindre à son dossier une demande de dérogation aux interdictions prévues à l'article L. 411-1 du code de l'environnement.

En ce qui concerne l'absence de sursis à statuer sur la demande d'autorisation :

66. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de parc éolien était manifestement susceptible de compromettre l'exécution du plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté de communes Vienne et Gartempe alors en cours d'élaboration dont les documents qui le composent, et notamment les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables, ne condamnent pas, par principe, la création de nouveaux parc éoliens.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 515-44 du code de l'environnement :

67. Aux termes de l'article L. 515-44 : " (...) Les installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent dont la hauteur des mâts dépasse 50 mètres sont soumises à autorisation (...) La délivrance de l'autorisation d'exploiter est subordonnée au respect d'une distance d'éloignement entre les installations et les constructions à usage d'habitation, les immeubles habités (...) Elle est au minimum fixée à 500 mètres. (...) ". En vertu de l'article 3 de l'arrêté du 26 août 2011, cette distance est mesurée à partir de la base du mât de chaque aérogénérateur.

68. Il résulte de l'instruction que les éoliennes doivent être implantées à une distance d'au moins 500 mètres des habitations environnantes selon la règle de calcul fixée par l'article 3 précité de l'arrêté du 26 août 2011. Dès lors que la fixation d'une distance supérieure à 500 mètres n'est pas le seul moyen de garantir l'absence de dépassement des émergences sonores, qui peut notamment être assurée au moyen d'un plan de bridage des éoliennes, l'association appelante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de l'article 3 de l'arrêté du 26 août 2011 en ce qu'il n'exige pas que cette distance soit mesurée à partir de l'extrémité des pâles. Il s'ensuit que l'autorisation en litige n'est pas illégale du seul fait que des habitations se trouvent à une distance inférieure à 500 mètres à compter de l'extrémité des pales de certaines des éoliennes projetées. Enfin, si l'étude acoustique jointe à la demande d'autorisation a reconnu un risque de dépassement des émergences réglementaires durant certaines périodes, il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que le plan de bridage prévu doit assurer le respect de la réglementation sonore pour l'ensemble du site.

En ce qui concerne les capacités financières :

S'agissant de l'exception d'inconventionnalité de l'ordonnance du 26 janvier 2017 :

69. A la lumière de l'arrêt du 27 octobre 2016, aff. C-290/15 de la Cour de justice de l'Union européenne, la notion de " plans et programmes " au sens de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001 doit être entendue comme se rapportant à tout acte qui établit, en définissant des règles et des procédures de contrôle applicables au secteur concerné, un ensemble significatif de critères et de modalités pour l'autorisation et la mise en oeuvre d'un ou de plusieurs projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. Tel qu'interprété par l'arrêt du 11 septembre 2012, aff. C-43/10 de la Cour, l'article 2, sous a), second tiret, de la directive 2001/42, ne vise comme des " plans et programmes " que les plans et programmes exigés par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives. Au sens de la directive, ne peut ainsi être considéré comme un plan ou programme une ordonnance définissant le régime juridique de l'autorisation environnementale, qui n'établit pas un ensemble de critères et de modalités de mise en oeuvre d'un ou plusieurs projets, prévu par des dispositions législatives, règlementaires ou administratives. Ainsi, l'ordonnance du 26 janvier 2017 n'entre pas dans le champ de la directive invoquée 2001/42/CE et n'avait pas à faire l'objet d'une évaluation environnementale. Par suite le moyen tiré de l'exception d'inconventionnalité de l'ordonnance du 26 janvier 2017 doit être écarté.

70. Les requérants, par ailleurs, ne peuvent utilement invoquer à l'encontre de l'article L. 181-27 du code de l'environnement la méconnaissance du principe de non régression consacré par le II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement dès lors que ce principe n'a pas, par lui-même, de valeur supérieure à la loi.

S'agissant de l'applicabilité des dispositions issues de l'ordonnance du 26 janvier 2017 au présent litige :

71. Aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement, issu de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en oeuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ". L'article D. 181-15-2 du même code, issu du décret du 26 janvier 2017, dispose que : " (...) le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes (...) 3° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir. Dans ce dernier cas, l'exploitant adresse au préfet les éléments justifiant la constitution effective des capacités techniques et financières au plus tard à la mise en service de l'installation (...) ".

72. Ces dispositions modifient les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement définies à l'article L. 512-1 du code de l'environnement. Dès lors qu'il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, il convient ainsi de faire application au présent litige des dispositions de l'article L. 181-7 du code de l'environnement issues de l'ordonnance du 26 janvier 2017.

S'agissant de l'appréciation des capacités financières du pétitionnaire :

73. Une autorisation d'exploiter une installation classée ne peut légalement être délivrée, sous le contrôle du juge du plein contentieux des installations classées, si les conditions qu'elles posent ne sont pas remplies. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site, au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.

74. Ainsi qu'il a été dit précédemment, la demande d'autorisation indique que la société Parc éolien de Thollet et Coulonges est une filiale de la société EDF Energies Nouvelles (EN) France dont le capital s'élève à 100 500 000 euros, elle-même détenue à 100 % par EDF Energies Nouvelles (EN), société au capital de 226 755 000 euros. Le coût de l'investissement nécessaire à la construction et à l'exploitation du parc éolien, évalué à 91,3 millions d'euros, doit être financé par les fonds propres de la société EDF EN France à hauteur de 15 % à 25 % de ce montant tandis que la part restante de l'investissement sera assurée au moyen d'un financement interne spécifique au groupe EDF ou d'un financement de projets avec une ou plusieurs banques, garanti par EDF EN. La société pétitionnaire a ainsi produit deux lettres de confort du 15 décembre 2014 et du 18 septembre 2019 de la société EDF Energies Nouvelles confirmant que le projet bénéficierait de son soutien financier. Par suite, l'exploitant justifie de la pertinence des modalités par lesquelles il entend financer son projet.

En ce qui concerne les garanties de démantèlement et de remise en état du site :

75. Aux termes de l'article R. 515-101 du code de l'environnement : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation (...) est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation. II. - Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe, en fonction de l'importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement. (...) ". Aux termes de l'article R. 515-106 du même code : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : 1° Le démantèlement des installations de production ; 2° L'excavation d'une partie des fondations ;3° La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; 4° La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état. ".

76. En prévoyant à l'article R. 515-106 précité qu'un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixerait les conditions techniques de remise en état d'un site après exploitation, le pouvoir règlementaire a nécessairement entendu confier à ce ministre le soin de fixer, par arrêté, l'ensemble des conditions de réalisation des opérations mentionnées à cet article, ce qui inclut la détermination des garanties financières rendues nécessaires par les opérations de démantèlement et de remise en état. Dès lors, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir qu'en prévoyant à l'article 2 de l'arrêté du 26 août 2011, modifié, la constitution par l'exploitant d'une garantie financière, le ministre de l'environnement aurait excédé les pouvoirs qu'il détenait de l'article R. 515-106. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité des dispositions de l'arrêté du 26 août 2011 pour vice d'incompétence ne peut qu'être écarté.

77. En vertu de l'annexe 1 à l'arrêté du 26 août 2011 modifiée par l'arrêté du 22 juin 2020, le coût unitaire forfaitaire correspondant au démantèlement d'une unité, à la remise en état des terrains, à l'élimination ou à la valorisation des déchets générés est fixé à 50 000 euros. Eu égard à l'objectif de préservation des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 auquel les mesures de démantèlement contribuent directement, il n'apparaît pas que le ministre chargé de l'environnement ait fait une inexacte application des pouvoirs qu'il tient des dispositions du II de l'article R. 515-101 du code de l'environnement en fixant à 50 000 euros le coût unitaire forfaitaire correspondant au démantèlement d'une unité. Par suite, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 26 août 2011 modifié est illégal et que, par voie de conséquence, l'autorisation en litige aurait dû fixer ce coût unitaire à un montant supérieur à 50 000 euros.

78. L'association appelante fait valoir que l'arrêté du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions applicables au parc éolien ne comporte aucune disposition actualisant l'engagement et la provision pour le démantèlement conformément aux exigences de fond issues de l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation. Les dispositions de l'article 20 de cet arrêté, relatives aux opérations de démantèlement à réaliser et à leurs garanties financières, édictent des règles qui s'appliquent d'office à l'exploitant et, dès lors que la formule d'actualisation des garanties définie dans l'arrêté du 26 août 2011, et reprises dans l'arrêté du 29 octobre 2019 contesté, n'a pas été modifiée par l'arrêté ministériel du 22 juin 2020, il n'est pas nécessaire d'ajouter aux prescriptions de cet arrêté du 29 octobre 2019.

En ce qui concerne l'insuffisance des mesures de démantèlement et de remise en état du site :

79. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 du ministre en charge de l'environnement relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité mécanique du vent, modifié par l'arrêté du 6 novembre 2014 : " Les opérations de démantèlement et de remise en état des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent prévues à l'article R. 553-6 du code de l'environnement comprennent : 1. Le démantèlement des installations de production d'électricité, des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. (...) ".

80. L'arrêté du 26 août 2011 modifié est venu préciser l'étendue des obligations de démantèlement et de remise en état des parcs éoliens pesant sur l'exploitant, lesquelles n'exigent en aucun cas la suppression de l'ensemble du réseau électrique. Par suite, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir qu'en se bornant à imposer, à l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 dans sa version en vigueur, le démantèlement des câbles dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison, règle figurant désormais à l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 à la suite de sa modification par l'arrêté du 22 juin 2020, le ministre chargé de l'environnement aurait méconnu les dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement.

En ce qui concerne l'atteinte aux intérêts protégés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

81. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. (...) ".

82. Le projet porté par la société pétitionnaire était initialement composé de 20 éoliennes d'une hauteur de 180 m en bout de pale implantées sur un axe d'une longueur totale de 8 km. Ainsi qu'il a été dit au point 16, et alors que l'exploitant demande à la cour de modifier le contenu de l'autorisation délivrée par le tribunal en y supprimant quatre appareils (E9 à E12) dont l'exploitation est abandonnée, ce paysage ne présente pas d'intérêt ou de caractère particulier.

83. Il résulte de l'instruction que trois éoliennes seront visibles depuis l'église de Tilly, monument historique situé à environ 1 km de l'appareil le plus proche. Toutefois, les photomontages produits au dossier ne montrent pas une atteinte visuelle significative porté par le projet à cette église dont seul le décor intérieur bénéficie d'une protection au titre de la législation sur les monuments historiques. Il ne résulte pas non plus de l'instruction et notamment des photomontages produits, que le projet porterait une atteinte visuelle significative à l'église Notre-Dame de Thollet, située à 2 km environ de l'éolienne la plus proche. Quant au château du Pin, édifice inscrit aux monuments historiques, l'étude d'impact reconnait qu'il présente un " enjeu fort " vis-à-vis du parc éolien dès lors que plusieurs appareils seront visibles depuis cet édifice situé à 1 km environ de l'éolienne la plus proche. Toutefois, il résulte de l'instruction que la suppression des éoliennes E9 à 12 décidée par la société pétitionnaire permettra d'atténuer sensiblement l'impact visuel du projet sur le château du Pin. Par ailleurs, il résulte du point 17 que les éoliennes ne sont pas susceptibles de porter une atteinte visuelle significative aux autres monuments historiques identifiés dans le secteur. S'il est vrai, enfin, que les futures éoliennes auront sur les hameaux environnants un impact visuel plus sensible, même si par endroits cet impact pourra être atténué par des haies et bosquets faisant office d'écrans visuels, il ne résulte pas de l'instruction que ces nuisances constitueraient un grave inconvénient pour la protection des paysages.

84. En deuxième lieu, dans son avis du 13 octobre 2015, l'autorité environnementale a recommandé un éloignement des éoliennes des haies et autres espaces propices à la présence des chiroptères, un arrêt du fonctionnement des éoliennes au cours des périodes durant lesquelles l'activité des chiroptères est la plus intense et la réalisation d'un suivi de mortalité régulier. Il ne résulte pas de l'instruction que le positionnement des éoliennes par rapport aux lisières boisées serait par lui-même de nature à engendrer des risques particuliers pour les chiroptères dès lors que les études citées dans l'évaluation des incidences Natura 2000 contenue dans l'étude d'impact ont relevé qu'au-delà de quelques dizaines de mètres, le caractère attractif que présentent les lisières pour les chiroptères perd de sa force tandis que les observations effectuées sur place par les auteurs de l'étude d'impact ont montré qu'au-delà de 30 mètres de distance et de 70 mètres de hauteur par rapport aux lisières, les enjeux chiroptériques devenaient " très faibles ". C'est pourquoi, il a été prévu que les éoliennes seraient implantées à 90 mètres des lisières boisées, la recommandation Eurobats selon laquelle cette distance devrait être de 200 mètres au moins qui est dépourvue de valeur règlementaire ne pouvant être utilement invoquée pour contester la légalité de l'autorisation en litige. De plus, dans son mémoire en réponse aux observations de l'autorité environnementale, le pétitionnaire a annoncé l'installation d'un bridage généralisé du parc éolien lors des périodes d'activité intense des chiroptères. A cet égard, l'article 5 de l'arrêté du 29 octobre 2019 en litige impose un arrêt des éoliennes lorsque les températures sont supérieures à 8°C et les vitesses de vent inférieures à 6 m/s, cet arrêt étant aussi prévu du 1er avril au 31 juillet 30 minutes avant le coucher du soleil jusqu'à 5 heures après le coucher du soleil puis du 1er août au 31 octobre, 30 minutes avant le coucher du soleil jusqu'à 30 mn après le lever du soleil. L'exploitant se voit aussi imposer l'obligation d'établir un rapport sur l'arrêt effectif des éoliennes à tenir à la disposition de l'inspection des installations classées. Des mesures de suivi sont prévues par l'article 7 de l'arrêté du 29 octobre 2019 afin d'examiner l'efficacité du dispositif de bridage et de le revoir le cas échéant. Enfin, la suppression des quatre éoliennes E9 à 12 décidée par le pétitionnaire sera de nature à diminuer les risques de mortalité que le parc éolien pourrait faire peser sur les chiroptères.

85. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que le parc éolien est traversé par un couloir emprunté par les oiseaux migrateurs, en particulier la Grue cendrée. Mais, comme l'a d'ailleurs relevé l'autorité environnementale, les grues cendrées ont pour habitude de voler à haute altitude même s'il peut leur arriver de se déplacer à hauteur d'éoliennes en cas d'épisodes météorologiques difficiles ou pour des haltes migratoires. Le risque de collision a néanmoins été pris en considération par le pétitionnaire qui a aménagé une trouée de 1,25 km au sein du parc éolien tandis que la suppression de l'éolienne n° 13 décidée par le pétitionnaire au cours de l'instruction de sa demande, après les observations de l'autorité environnementale, permet de créer une nouvelle trouée de 1,1 km. La suppression des éoliennes E9 à E12 dont la société fait état devant la cour, et qui doit conduire à une modification du contenu de l'autorisation en litige décidée par le présent arrêt, permettra de créer une trouée supplémentaire de 3,05 km. Enfin, le III de l'article 5 de l'arrêté du 29 octobre 2019 impose, si nécessaire, de mettre à l'arrêt le parc éolien lors des passages migratoires à risque des grues cendrées. Un ornithologue doit être missionné chaque année lors des deux passages migratoires pour évaluer la pertinence de l'arrêt des machines et revoir, si nécessaire, ses modalités. Doit aussi contribuer à cet objectif les mesures de suivis naturalistes définies à l'article 7 de l'arrêté du 19 octobre 2019. Il ne résulte pas de l'instruction que ces mesures seraient insuffisantes pour assurer la protection des oiseaux migrateurs et en particulier des grues cendrées.

86. En quatrième lieu, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment de l'avis émis par l'autorité environnementale le 13 octobre 2015, que le fonctionnement du parc éolien aurait des incidences autres que " faibles ", selon les termes de l'étude d'impact, sur les autres espèces protégées telles que l'Aigle royal et le Circaète-Jean-le-Blanc.

87. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que les éoliennes projetées et leurs aménagements ne seront pas implantés dans un périmètre de protection immédiat ou rapproché d'un captage d'eau potable. Si quatre de ces appareils se situent dans le périmètre de protection éloignée du captage de la source des Gâts, cette donnée a été prise en compte par le pétitionnaire qui a prévu la réalisation, en amont des travaux, d'études géotechniques qui permettront de connaître les dimensions des fondations, la profondeur de la nappe et d'adapter ces travaux en conséquence. En raison de ces mesures et de la distance qui sépare les éoliennes du captage des Gâts, il n'apparait pas que le préfet a commis une illégalité du seul fait que son arrêté du 29 octobre 2019 ne soit pas assorti d'une prescription imposant le passage d'un hydrogéologue agréé avant la réalisation des sondages de reconnaissance.

88. Il résulte de ce qui précède que l'autorisation contestée n'a pas méconnu les intérêts protégés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

Sur les conclusions de la société Parc éolien de Thollet et Coulonges tendant à la modification de l'autorisation :

89. La société pétitionnaire a renoncé à l'implantation des éoliennes E9 à E12. Dans ces conditions, il y a lieu de modifier l'autorisation délivrée par le tribunal et l'arrêté du 29 octobre 2019, ainsi qu'il le sera précisé au dispositif du présent arrêt, en y supprimant la référence aux éoliennes E9 à E12. Le parc éolien autorisé par la décision du tribunal administratif de Poitiers du 25 avril 2018 porte dès lors sur un ensemble de 15 aérogénérateurs.

90. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir, que les appelants que ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté de refus du 21 juillet 2016 et a délivré l'autorisation d'exploiter en litige. Les appelants ne sont pas davantage fondés à demander à la cour d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions applicables au parc éolien projeté.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

91. Il y a lieu de faire application de ces dispositions en mettant à la charge des requérants la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Parc éolien de Thollet et Coulonges et non compris dans les dépens. En revanche, les conclusions présentées sur ce même fondement par les requérants doivent être rejetées dès lors qu'ils sont la partie perdante à l'instance.

DECIDE :

Article 1er : Il est donné acte à M. et Mme V... de leur désistement d'instance dans l'affaire n° 18BX02496.

Article 2 : L'intervention de M. U... dans l'affaire n° 18BX024296 et l'intervention de la Fédération anti-éolienne de la Vienne dans les affaires n° 18BX02496 et n° 20BX0762 sont admises.

Article 3 : Les éoliennes E9 à E12, auxquelles s'appliquent l'autorisation d'exploiter délivrée par le tribunal administratif de Poitiers dans son jugement du 25 avril 2018 et l'arrêté préfectoral du 29 octobre 2019 fixant les prescriptions applicables à l'installation, sont supprimées. L'autorisation et l'arrêté préfectoral sont modifiés dans cette mesure.

Article 4 : Les requêtes n° 18BX02496 et 20BX00762 présentées par l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Hérolles et Thollet et autres sont rejetées.

Article 5 : L'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Hérolles et Thollet, Mme Q... X..., M. W... C..., M. et Mme R... V..., Mme G... O... et M. P... O..., Mme I... A... et M. N... H..., pris ensemble, verseront à la société Parc éolien de Thollet et Coulonges la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Vent de raison pour la sauvegarde du bocage des communes de Coulonges-les-Hérolles et Thollet, désignée en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société Parc éolien de Thollet et Coulonges, au ministre de la transition écologique, à M. F... U... et à la Fédération anti-éolienne de la Vienne. Copie pour information en sera délivrée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2020.

Le président,

Elisabeth Jayat La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°s 18BX02496, 20BX00762


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02496
Date de la décision : 15/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement - Régime juridique - Actes affectant le régime juridique des installations - Première mise en service.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : MONAMY ; ; MONAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-15;18bx02496 ?
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