Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, par trois demandes distinctes, enregistrées sous les numéros 1600305, 1600347 et 1600381, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie sur sa demande tendant au retrait de la décision du 19 avril 2016 du directeur de l'établissement de formation professionnelle des adultes (E.T.F.P.A.) relative au montant de sa rémunération durant le congé d'accompagnement de son enfant mineur en métropole, d'autre part, de condamner la Nouvelle-Calédonie et l'E.T.F.P.A. à lui payer une indemnité de 612 266 F CFP en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de la désindexation de son traitement et des informations erronées qui lui ont été délivrées, enfin, d'annuler la décision contenue dans la lettre du 16 septembre 2016 du directeur de l'établissement de formation professionnelle des adultes relative au montant de sa rémunération durant ce congé.
Par un jugement du 16 février 2017, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté ses demandes après les avoir jointes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 avril et 4 octobre 2017, MmeA..., représentée par la SELARL Raphaële Charlier, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 16 février 2017 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet contestée en première instance ;
3°) de condamner la Nouvelle-Calédonie et de l'E.T.F.P.A à lui verser une indemnité de 612 266 F FCP ;
4°) d'annuler la décision contenue dans la lettre du 16 septembre 2016 ;
5°) de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie et de l'E.T.F.P.A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est en entaché d'irrégularité, d'une part, en tant qu'il a rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie alors que les premiers juges n'auraient pu les rejeter que comme infondées, d'autre part, en ce qu'ils n'ont pas répondu aux moyens qu'elle avait soulevés pour contester cette décision ;
- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal administratif, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, en sa qualité d'autorité de tutelle de l'E.T.F.P.A, est compétent pour annuler la décision de son directeur ;
- pendant la durée du congé d'accompagnement qui lui a été accordé, elle avait droit au versement de son traitement indexé, dès lors qu'elle était en position d'activité au sens de l'article Lp. 71 de la loi n° 2014-13 du 24 avril 2014 ;
- les premiers juges ont inexactement décidé qu'elle n'avait pas reçu d'information erronée sur le maintien de l'indexation de son traitement pendant son congé d'accompagnement ;
- en supprimant illégalement l'indexation de son traitement et en lui délivrant des informations erronées, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et l'E.T.F.P.A ont commis des fautes susceptibles d'engager leur responsabilité solidaire ;
- l'indemnité à laquelle elle a droit en réparation du préjudice résultant de ces fautes s'élève à 237 266 F FCP au titre de la perte de traitement et à 375 000 F FCP au titre du préjudice moral.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2017, l'établissement de formation professionnelle des adultes (E.T.F.P.A.), représenté par la SELARL Royanez, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A...le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2017, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, représenté par la SELARL Milliard-Million, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A...le versement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;
- l'arrêté n° 1065 du 22 août 1953 portant statut général des fonctionnaires des cadres territoriaux ;
- l'arrêté n° 1066 du 22 août 1953 fixant le régime des congés des personnels civils relevant de l'autorité du chef du territoire ;
- l'arrêté n° 68-038/CG du 29 janvier 1968 fixant le régime de rémunération et le régime des prestations familiales applicables aux fonctionnaires des cadres territoriaux de Nouvelle-Calédonie ;
- la délibération n° 130 du 21 août 1990 modifiée portant création d'un établissement territorial de formation professionnelle des adultes (E.T.F.P.A.) ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jardin,
- et les conclusions de M. Platillero, rapporteur public.
Sur le rejet par le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de la demande enregistrée sous le numéro 1600347 :
1. Considérant que l'article R. 811-1 du code de justice administrative dispose : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 8° Sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15. / (...) " ; que le montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 est égal à 10 000 euros ;
2. Considérant que la demande enregistrée sous le numéro 1600347 est une action en responsabilité engagée par Mme A...pour obtenir la condamnation de la Nouvelle-Calédonie et l'E.T.F.P.A. à lui payer une indemnité de 612 266 F CFP en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de la désindexation de son traitement et des informations erronées qui lui ont été délivrées ; que le montant de cette indemnité, qui inclut la perte de rémunération que la requérante estime avoir illégalement subie mais aussi la réparation de son préjudice moral, est inférieur à 10 000 euros ; que les premiers juges ont dans ces conditions statué en premier et dernier ressort sur cette demande ; qu'il s'ensuit que la contestation du jugement, sur ce point, ne relève pas de la voie de l'appel, ouverte devant la Cour administrative d'appel de Paris, mais de celle de la cassation, ouverte devant le Conseil d'Etat ; qu'il y a lieu, dès lors, de transmettre les conclusions de la requête de Mme A...au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative ;
Sur le rejet par le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de la demande enregistrée sous le numéro 1600305 :
3. Considérant que MmeA..., fonctionnaire des cadres territoriaux de Nouvelle-Calédonie exerçant des fonctions de psychologue à l'E.T.F.P.A, a obtenu un congé d'accompagnement, sur le fondement de l'article 18 bis de l'arrêté du 22 août 1953, qui devait initialement se dérouler du 21 mars au 20 juin 2016 ; qu'à la suite d'une note du 18 mars 2016 adressée par le trésorier des établissements publics de Nouvelle-Calédonie au directeur de l'E.T.F.P.A pour lui faire savoir que les fonctionnaires bénéficiaires de ces congés n'avaient plus droit à l'indexation de leur traitement pendant leur séjour en métropole, le directeur de cet établissement public, dans une lettre du 19 avril 2016, a informé Mme A...de la position du comptable public ; que l'intéressée, par une lettre du 28 mai 2016, a demandé au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de retirer la décision de supprimer l'indexation de son traitement pendant la durée de son congé d'accompagnement contenue dans la lettre du 19 avril 2016 ;
4. Considérant que si l'E.T.F.P.A est un établissement public territorial à caractère administratif soumis à la tutelle du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, aucune disposition de la délibération n° 130 du 21 août 1990 n'habilite l'autorité de tutelle à annuler une décision prise par son directeur dans le cadre de la gestion des fonctionnaires sur lesquels il exerce le pouvoir hiérarchique ; que le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie était ainsi tenu de rejeter la demande de MmeA... ; que toutefois, la décision implicite de rejet résultant du silence gardé sur cette demande, qui fait grief à l'intéressée, était susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'en rejetant comme irrecevable la demande enregistrée sous le numéro 1600305, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a par suite entaché son jugement d'irrégularité ; qu'il y a dès lors lieu de l'annuler et de statuer sur cette demande par la voie de l'évocation ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie était tenu de rejeter la demande de MmeA..., ce qui rend les moyens de sa demande inopérants ; qu'il y a dès lors lieu pour la Cour de rejeter comme infondée la demande enregistrée sous le numéro 1600305 ;
Sur le rejet par le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de la demande enregistrée sous le numéro 1600381 :
6. Considérant que l'article 18 bis de l'arrêté du 22 août 1953 dispose : " Les femmes fonctionnaires dont les enfants sont évacués sanitaires hors du Territoire pourront sur prescription médicale, bénéficier d'un congé d'accompagnement d'une durée maximale de six mois, calculée par référence à une période de douze mois consécutifs. /Ce congé pourra être pris soit dans sa totalité en une seule fois, soit de manière fractionnée ; quelle qu'en soit la modalité, il ouvre droit, quant à la rémunération, à trois mois à plein traitement suivis de trois mois à demi-traitement. " ;
7. Considérant que l'article 4 de l'arrêté du 29 janvier 1968 dispose : " L'indemnité résidentielle de cherté de vie est due pour toute journée passée dans la zone de service ou en déplacement temporaire. Elle n'est pas allouée pendant les déplacements définitifs. Elle suit le sort de la solde de base, son montant étant réduit dans la proportion où la solde de base se trouve réduite pour quelque cause que ce soit. / Elle continue toutefois à être servie dans les conditions prévues ci-après, même en cas de déplacement effectué à titre personnel hors du Territoire, aux fonctionnaires bénéficiaires : - d'un congé annuel cumulé ou non ; - d'un congé de maladie, de convalescence, de cure thermale ou de longue durée, à passer dans le Territoire ; - d'un congé de maternité ; - d'une permission exceptionnelle dans la limite de 30 jours ; - de vacances scolaires. " ; qu'aux termes de son article 5 : " Le montant du traitement payé aux personnels des cadres territoriaux en service dans le territoire d'après la parité en vigueur au cours de la période sur laquelle porte la liquidation est le traitement de base établi en euro, retenue pour pension, telle que calculée à l'article 2 du décret modifié n° 54/48 du 4 janvier 1954, déduite, auquel est ajouté le montant de l'indexation tel que calculé conformément aux alinéas 1 et 2 du présent article ainsi que le montant de l'indemnité résidentielle de cherté de vie telle que calculée à l'alinéa 3. /L'indexation du traitement et l'indemnité résidentielle de cherté de vie telle que définie ci-dessus, sont conservées à tout fonctionnaire placé dans l'une des positions d'activités énumérées à l'alinéa 2ème de l'article 4 ci-dessus. L'indexation reste également acquise aux agents placés dans l'une de ces positions lorsqu'ils se déplacent hors de la Nouvelle-Calédonie à titre personnel " ;
8. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, même si le fonctionnaire bénéficiant d'un congé d'accompagnement est réputé être en position d'activité, en vertu de l'article Lp. 71 de le loi de pays n° 2014-13 du 23 avril 2014, qui a complété l'arrêté du 22 août 1953, ce congé n'est pas au nombre de ceux, limitativement énumérés, qui ouvrent droit au maintien de l'indexation du traitement ; que le directeur de l'E.T.F.P.A a par suite pu légalement supprimer l'indexation du traitement de Mme A...pendant la durée de son congé d'accompagnement ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande d'annulation de la décision contenue dans la lettre du 16 septembre 2016 du directeur de cet établissement relative au montant de sa rémunération durant ce congé ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et de l'E.T.F.P.A, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que Mme A...demande au titre de ses frais d'avocat ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A...les sommes que demandent le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et l'E.T.F.P.A au titre de ces dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les conclusions de la requête présentée par Mme A...dirigées contre le jugement du 16 février 2017 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en tant qu'il a rejeté la demande enregistrée sous le numéro 1600347 sont transmises au Conseil d'Etat.
Article 2 : Le jugement du 16 février 2017 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est annulé en tant qu'il a rejeté la demande enregistrée sous le numéro 1600305.
Article 3 : La demande enregistrée au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie sous le numéro 1600305 est rejetée.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de Mme A...est rejeté.
Article 5 : Les conclusions du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et de l'E.T.F.P.A présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., à l'établissement de formation professionnelle des adultes (E.T.F.P.A) et au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 novembre 2017.
L'assesseur le plus ancien,
D. DALLELe président-rapporteur,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA01270