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26/03/2019 | FRANCE | N°17NT03964

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 26 mars 2019, 17NT03964


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Orange a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 3 février 2015 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Lorient Agglomération a fixé les conditions d'installation des antennes de téléphonie mobile sur les réservoirs de stockage d'eau potable.

Par un jugement n°1501583 du 27 octobre 2017 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27

décembre 2017, la société Orange, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Orange a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 3 février 2015 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Lorient Agglomération a fixé les conditions d'installation des antennes de téléphonie mobile sur les réservoirs de stockage d'eau potable.

Par un jugement n°1501583 du 27 octobre 2017 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 décembre 2017, la société Orange, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 octobre 2017 ;

2°) d'annuler la délibération du 3 février 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Lorient Agglomération une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la convocation des conseillers communautaires n'était pas régulière ;

- la communauté Lorient Agglomération ne pouvait, au prétexte de règles techniques, ajouter à la loi, en l'occurrence l'article L. 46 du code des postes et communications électroniques, un motif de refus d'une autorisation d'occupation ;

- la délibération litigieuse, en adoptant une convention-cadre dont les dispositions financières sont expressément fixées exclusivement en fonction du chiffre d'affaire, est entachée d'une erreur de droit ;

- le montant actuel de la redevance n'est pas insuffisant ;

- l'augmentation de la redevance présente un caractère excessif ;

- la tarification présente un caractère discriminatoire et inintelligible.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2018, la communauté d'agglomération Lorient Agglomération, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande que la société Orange soit condamnée à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des postes et des télécommunications ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me A...représentant la société Orange et de MeB..., représentant la communauté d'agglomération Lorient agglomération.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 3 février 2015, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Lorient agglomération a notamment fixé les conditions techniques et financières d'installation des antennes de téléphonies mobiles sur les réservoirs de stockage d'eau potable, à compter du 1er janvier 2015. La société Orange en a demandé l'annulation. Elle relève appel du jugement du 27 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales dispose que : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que la convocation aux réunions d'un conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut de note explicative lors de l'envoi de la convocation aux conseillers communautaires entache alors d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le président du conseil communautaire n'ait fait parvenir aux intéressés, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et d'apprécier les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas, toutefois, de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

4. Il n'est pas contesté que le projet de délibération a été adressé aux membres du conseil communautaire de Lorient Agglomération, dont le périmètre compte plus de 3 500 habitants, en même temps que les convocations. Il est constant qu'à cet envoi n'était pas jointe une note explicative de synthèse telle que prévue à l'article L. 2121-12 précité du code général des collectivités territoriales. Toutefois, le projet de délibération adressé aux conseillers communautaires mentionnait l'affectation des châteaux d'eau au service public de distribution d'eau potable, les dégradations constatées sur ces ouvrages du fait des occupations par les équipements de téléphonie mobile et les conditions disparates d'occupation sous l'empire des anciennes conventions. De plus, il est constant que les tarifs d'occupation pour l'année 2014 avaient déjà été adoptés par une délibération du 15 décembre 2015 et étaient fixés sur les mêmes principes et les mêmes montants. En outre, la requérante n'apporte aucun commencement de preuve contraire de l'absence de dégradations des ouvrages alors qu'il n'est pas contesté que les conditions d'installations techniques et financières des antennes avaient fait l'objet d'un exposé complet en bureau communautaire le 28 novembre 2014 et également au Conseil des maires le 16 janvier 2015, avec des photographies jointes faisant état de ces dégradations. Enfin, s'agissant de l'absence de mention du régime spécifique de l'article L. 46 du code des postes et télécommunications, il n'est pas établi que cela aurait pu induire en erreur les conseillers communautaires s'agissant de la décision prise. Dès lors, le moyen tiré de ce que la délibération litigieuse serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 46 du code des postes et des communications électroniques : " Les autorités concessionnaires ou gestionnaires du domaine public non routier, lorsqu'elles donnent accès à des exploitants de réseaux de communications électroniques, doivent le faire sous la forme de convention, dans des conditions transparentes et non discriminatoires et dans toute la mesure où cette occupation n'est pas incompatible avec son affectation ou avec les capacités disponibles. La convention donnant accès au domaine public non routier ne peut contenir de dispositions relatives aux conditions commerciales de l'exploitation. Elle peut donner lieu à versement de redevances dues à l'autorité concessionnaire ou gestionnaire du domaine public concerné dans le respect du principe d'égalité entre les opérateurs. Ces redevances sont raisonnables et proportionnées à l'usage du domaine. / Les autorités concessionnaires ou gestionnaires du domaine public non routier se prononcent dans un délai de deux mois suivant la demande faite par l'exploitant. / Un décret en Conseil d'Etat détermine le montant maximum des redevances assorties à l'occupation du domaine public non routier. ".

6. Ces dispositions ont pour objet de préciser que l'accès accordé par les autorités gestionnaires du domaine public non routier aux exploitants de réseaux de communications électroniques doit se faire sous forme de convention d'occupation dans le respect du principe d'égalité des candidats à l'occupation. Cependant, elles n'ont pas pour effet d'imposer aux autorités gestionnaires de ce domaine public, le passage des équipements de ces opérateurs ni de porter atteinte aux prérogatives que tiennent ces autorités des exigences qui s'attachent à la protection du domaine public et à l'intérêt général. Ainsi, la société Orange n'est pas fondée à soutenir que Lorient Agglomération ne pouvait refuser de renouveler l'autorisation d'occupation de son domaine public que dans les cas où cette occupation est incompatible avec son affectation ou avec les capacités disponibles et ne pouvait donc pas conditionner la poursuite des occupations à la signature d'une convention cadre intégrant des nouvelles règles techniques.

7. En troisième et dernier lieu, il ressort de la délibération litigieuse que Lorient Agglomération a prévu pour l'année 2015 trois tarifs différents pour la redevance annuelle pour l'occupation des châteaux d'eau par des antennes relais : la gratuité pour les opérateurs de sécurité et de secours, un tarif de 1 500 euros par ouvrage occupé pour les opérateurs publics et les opérateurs économiques dont le chiffre d'affaire annuel consolidé du groupe auquel ils appartiennent est inférieur à 5 millions d'euros et un tarif de 10 000 euros par ouvrage occupé pour les opérateurs publics et les opérateurs économiques dont le chiffre d'affaire annuel consolidé du groupe auquel ils appartiennent est supérieur à 5 millions d'euros. Il ressort de la convention-cadre annexée à la délibération que le chiffre d'affaire de référence est le dernier connu à la date de la signature de la convention. La défense ne saurait utilement faire valoir que la délibération litigieuse ne serait que confirmative d'une délibération du 11 décembre 2014, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cette dernière serait devenue définitive. Le critère lié au chiffre d'affaire pour déterminer le montant de la redevance, dans le cadre de conventions de renouvellement comme en l'espèce, tend à prendre en compte les avantages économiques procurés par l'occupation domaniale. En se bornant à faire valoir que la délibération ne prévoit qu'un tarif unique pour l'implantation d'antennes visant à desservir des communes de tailles différentes, la société Orange n'établit pas que le tarif de 10 000 euros fixé pour ces implantations ne serait ni raisonnable, ni proportionné aux avantages de toute nature qu'elle en retire. La société Orange, qui se borne à soutenir que l'augmentation du montant varie de 222 à 666 %, n'établit pas davantage, faute de mettre en rapport le montant de la redevance par rapport aux avantages procurés, que ce montant serait disproportionné. En outre, il n'est pas établi que les références retenues pour fixer le montant de la redevance auraient dû être explicitées. Enfin, si la société Orange se prévaut de ce qu'elle participe à une mission de service public par le maillage du territoire national en téléphonie mobile et de ce que les opérateurs de téléphonie mobile assurent la prise en charge d'appels d'urgence, ces opérateurs, dont l'activité principale demeure les appels courants, ne peuvent être regardés comme étant dans la même situation que des opérateurs de sécurité et de secours.

8. Dès lors et alors même que le tarif actuel de la redevance n'était pas insuffisant, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation dans la fixation du montant de la redevance doivent être écartés.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Lorient Agglomération, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre desdites dispositions. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Orange le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Lorient Agglomération en appel.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Orange est rejetée.

Article 2 : La société Orange versera à Lorient Agglomération, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Orange et à la communauté d'agglomération Lorient Agglomération.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 mars 2019.

Le rapporteur,

P. PICQUET

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°17NT03964


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT03964
Date de la décision : 26/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SELARL GENTILHOMME

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-03-26;17nt03964 ?
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