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03/04/2018 | FRANCE | N°17NT01851

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 03 avril 2018, 17NT01851


Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 19 juin et les 11, 13 et 26 décembre 2017 ainsi que le 6 mars 2018, les associations " Gardez les caps", " Robin des Bois ", " Fédération Environnement Durable ", " société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France ", " Vent de colère ", " Fédération des associations et des usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur (FAUR) " ainsi que M. J...G..., M. A...N...et M. K...H..., représentés par MeF..., demandent à la cour :

1°) d'annuler la convention de conc

ession d'utilisation du domaine public maritime au large de Saint-Brieuc conc...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 19 juin et les 11, 13 et 26 décembre 2017 ainsi que le 6 mars 2018, les associations " Gardez les caps", " Robin des Bois ", " Fédération Environnement Durable ", " société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France ", " Vent de colère ", " Fédération des associations et des usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur (FAUR) " ainsi que M. J...G..., M. A...N...et M. K...H..., représentés par MeF..., demandent à la cour :

1°) d'annuler la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime au large de Saint-Brieuc conclue le 18 avril 2017, pour une durée de quarante ans, entre l'Etat et la société Ailes marines ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 avril 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a approuvé cette convention ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Ailes marines le versement d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'avis conforme du 8 avril 2016 du commandant de zone maritime, requis en application de l'article R. 2124-56 du code général de la propriété des personnes publiques, émane d'une autorité incompétente, à défaut d'établir que son signataire disposait d'une délégation adaptée et régulièrement publiée ;

- la concession litigieuse n'a pas fait l'objet de publicité et de mise en concurrence préalables, en méconnaissance de l'article 12 de la directive 2006/123/CE ;

- il n'apparait pas que l'information préalable à l'instruction telle que prévue à l'article R. 2124-5 du code général de la propriété des personnes publiques ait été effectuée ;

- l'étude d'impact soumise à enquête publique est insuffisante ;

- les conclusions de la commission d'enquête sont insuffisamment motivées au regard des dispositions de l'article L. 123-9 du code de l'environnement ;

- l'alinéa 1er de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques a été méconnu ;

- eu égard à l'insuffisance du montant de la redevance qui en est résulté, l'arrêté du 2 avril 2008 au vu duquel le directeur régional des finances publiques a émis un avis sur la convention méconnaît les dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques ;

- la convention est irrégulière du fait de l'illégalité du cahier des charges de l'appel d'offres n° 2011/S 126-208873 portant sur des installations éoliennes de production d'électricité en mer en France métropolitaine ;

- a été méconnu l'article R. 2124-9 du code général de la propriété des personnes publiques dès lors que la convention n'en reprend pas les termes ;

- la convention de concession d'utilisation du domaine public du 31 mars 2017 et son arrêté d'approbation du même jour constituent une mesure d'aide d'Etat contraire à l'article 107§1 TFUE précité ; or, cette aide d'Etat est illégale, dans la mesure où elle a été mise en oeuvre sans approbation préalable de la Commission au titre de l'article 108§3 TFUE ; en cas de doute la cour pourrait poser à la CJUE une question préjudicielle sur ce point ;

- l'article R. 2124-8 du code général de la propriété des personnes publiques a été méconnu dès lors que la convention ne prévoit pas les conditions de mise en oeuvre des garanties financières à fins de réhabilitation du site par le préfet en cas de disparition juridique du titulaire la concession ;

- l'article 38-3 de la convention conduit à une responsabilité automatique de RTE dès lors que le concessionnaire " démontre, le cas échéant sur base d'un avis d'expert, que la mise à disposition des ouvrages de raccordement n'est pas réalisable dans les trente-six mois suivant les dates contractuelles " et " pour des motifs hors du contrôle du concessionnaire " ; il s'agit d'un déséquilibre manifestement excessif en faveur du concessionnaire ;

- l'arrêté préfectoral du 18 avril 2017 portant approbation de la convention de concession d'utilisation du domaine public conclue le même jour entre l'Etat et la société Ailes marines est insuffisamment motivé et sera en tout état de cause annulé par voie de conséquence de l'annulation de cette convention.

Par des mémoires, enregistrés les 19 juin, 11 et 29 décembre 2017 et le 3 janvier 2018, l'association de défense du site de Lancieux et de la baie de Beaussais " du Frémur à l'Arguenon ", l'" association pour la protection des sites d'Erquy et des environs (APSEE) - Erquy Environnement ", l'association " Bien vivre à Plurien ", l'association " Fréhel Environnement ", représentées par MeD..., demandent à la cour :

1°) d'annuler la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime conclue le 18 avril 2017 entre l'Etat et la société Ailes marines ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 avril 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a approuvé cette convention ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le contenu de l'étude d'impact de ce projet n'est pas proportionné à la sensibilité environnementale de la zone et à l'importance et la nature des travaux, compte tenu de l'insuffisance de précision quant aux choix d'implantation retenus et de l'insuffisance de l'analyse des effets du projet sur l'environnement ;

- l'alinéa 1er de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques a été méconnu compte tenu de ce que le littoral et la mer de l'aire d'étude présentent une grande richesse patrimoniale et paysagère et que l'aire d'étude concerne de nombreuses espèces et habitats protégés.

Par mémoire enregistré le 11 décembre 2017, l'association " Union de Penthièvre et de l'Emeraude pour l'environnement (UPEEL) ", représentée par MeD..., est intervenue à l'instance.

Elle se prévaut de son intérêt en tant qu'association de défense de l'environnement et s'associe aux moyens et conclusions développés par l'association de défense du site de Lancieux et de la baie de Beaussais " du Frémur à l'Arguenon " et des autres associations requérantes ; elle demande en outre que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par mémoire enregistré le 26 décembre 2017 M. E...M...est intervenu à l'instance.

Se prévalant de sa qualité de pêcheur professionnel il s'associe aux conclusions et moyens soutenus par l'association Gardez les caps et les autres requérants.

Par mémoire enregistré le 13 décembre 2017, la Fédération des associations et des usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur s'est désistée de ses conclusions.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 décembre 2017 et le 12 mars 2018, le ministre de la Transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 11 décembre 2017, la société Ailes marines, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge de chacun des requérants au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, à défaut pour les requérants de justifier d'un intérêt à agir contre la concession ou contre l'arrêté d'approbation ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Un mémoire présenté pour la société Ailes marines, enregistré le 15 janvier 2018, n'a pas été communiqué à défaut d'éléments nouveaux au sens de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Un mémoire présenté pour le ministre de la Transition écologique et solidaire, enregistré le 15 janvier 2018, n'a pas été communiqué à défaut d'éléments nouveaux au sens de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte de l'environnement ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de l'environnement ;

- le décret n° 2004-112 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., assisté de MeL..., représentant les associations Gardez les Caps, Robin des Bois, Fédération environnement durable, Vent de colère, Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, M.G..., M.N..., M. H...et M.M..., celles de MeI..., substituant MeD..., représentant l'association pour la protection des sites d'Erquy et des environs, l'association de défense du site de Lancieux et de la baie de Beaussais, l'association Bien vivre à Plurien, l'association Fréhel environnement, et l'association Union de Penthièvre et de l'émeraude pour l'environnement, celles de Mes C...et Cambus pour la société Ailes Marines, ainsi que celles de Mme B...pour le ministre de la Transition écologique et solidaire.

Une note en délibéré enregistrée le 20 mars 2018 a été présentée par le ministre de la Transition écologique et solidaire.

Une note en délibéré enregistrée le 29 mars 2018 a été présentée pour la société Ailes marines.

1. Considérant que, par arrêté du 18 avril 2012, le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et de la mer et le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique ont autorisé la société Ailes marines à exploiter un parc éolien d'une capacité de production de 500 MW localisé sur le domaine public maritime au large de la commune de Saint-Brieuc ; que le 23 octobre 2015, la société Ailes marines a sollicité du préfet des Côtes d'Armor la délivrance d'une autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement ainsi que la conclusion d'une concession d'utilisation du domaine public maritime sur le fondement des articles L. 2124-1 et suivants du code général de la propriété des personnes publiques, en vue de l'implantation et de l'exploitation de soixante-deux éoliennes de 216 mètres de hauteur et d'une puissance unitaire de 8 MW au sein d'une zone de 103 km² ; que les deux demandes ayant fait l'objet d'une enquête publique commune, le préfet des Côtes d'Armor a délivré le 18 avril 2017 à la société Ailes marines l'autorisation sollicitée au titre du code de l'environnement ; que le 18 avril 2017, une concession d'utilisation du domaine public maritime a été conclue entre l'État et la société Ailes marines ; que cette concession a été approuvée par arrêté du même jour du Préfet des Côtes d'Armor ; que les associations " Gardez les caps ", " Robin des Bois ", " Fédération Environnement Durable " " la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France ", " Vent de colère ", " Association de défense du site de Lancieux et de la baie de Beaussais ", " Association pour la protection des sites d'Erquy et des environs " (ASPEE), " Bien vivre à Plurien ", " Fédération des associations et des usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur ", " Fréhel Environnement ", ainsi que M. J...G..., M. A...N...et M. K...H..., demandent l'annulation tant de la convention de concession que de l'arrêté préfectoral d'approbation ;

Sur le désistement de la Fédération des associations et des usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur :

2. Considérant que par mémoire enregistré le 13 décembre 2017, la Fédération des associations et des usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur s'est désistée de ses conclusions ; que ce désistement est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il lui en soit donné acte ;

Sur la recevabilité des interventions :

En ce qui concerne l'association " Union de Penthièvre et de l'Emeraude pour l'environnement " :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les décisions d'utilisation du domaine public maritime tiennent compte de la vocation des zones concernées et de celles des espaces terrestres avoisinants, ainsi que des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques (...) " ;

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 2 des statuts de " l'Union de Penthièvre et de l'Emeraude pour l'environnement " : " L'objet de l'Union (...) est territorialement circonscrit au territoire des côtes d'Emeraude et de Penthièvre intégrant tous les bassins versants depuis le Gouessant à l'Ouest du territoire à la Rance en limite Est du territoire sur une bande côtière de quinze kilomètres vers l'intérieur des terres. / L'union est toutefois compétente pour prévenir tout dommage dont la source est située à l'extérieur de son champ de compétence géographique et qui serait de nature à porter atteinte à ses intérêts à l'intérieur de son champ de compétence géographique " ;

5. Considérant que le site concédé par l'Etat en application de la convention en litige, qui se situe dans le domaine public maritime au large de Saint-Brieuc, n'est pas situé dans l'un des bassins versants qui forme le champ d'action de l'association ; qu'il n'est pas démontré, ni même allégué que l'exploitation du parc éolien en cause serait susceptible de porter atteinte aux intérêts protégés par l'association à l'intérieur de ces mêmes bassins versants ; que l'association " Union de Penthièvre et de l'Emeraude pour l'environnement " ne peut dès lors se prévaloir d'un intérêt suffisant à intervenir à la présente instance ;

En ce qui concerne M.M... :

6. Considérant que M. M...tient de sa qualité de pêcheur professionnel un intérêt à défendre la vocation piscicole de la zone concédée ; qu'il justifie ainsi, eu égard à la nature et à l'objet du litige, d'un intérêt suffisant à intervenir à la présente instance ;

Sur la recevabilité :

7. Considérant, d'une part, que M.G..., M. N...et M.H..., qui se sont d'abord prévalus de leur qualité d'usagers du service public de l'électricité, ne justifient pas en quoi le contrat de concession en cause ou son approbation seraient susceptibles de porter atteinte à l'organisation de ce service ; que s'ils ont ensuite invoqué leur qualité de contribuable de l'Etat en faisant référence aux conditions financières de la convention, cette qualité ne leur confère en tout état de cause pas un intérêt suffisant à attaquer une décision au motif de ses incidences budgétaires ; qu'ainsi la requête est irrecevable en tant qu'elle est introduite par M.G..., M. N...et M.H..., qui ne justifient être lésés dans leurs intérêts de façon suffisamment directe et certaine ni par la passation de la convention de concession ici en cause ni par son exécution ;

8. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les décisions d'utilisation du domaine public maritime tiennent compte de la vocation des zones concernées et de celles des espaces terrestres avoisinants, ainsi que des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques (...) " ;

9. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la préservation des ressources biologiques ainsi que celle des sites et paysages du littoral font partie de l'intérêt de la conservation du domaine public maritime ; qu'ainsi les associations requérantes, qui se sont fixé pour but, soit la protection de l'environnement maritime, soit la prévention des dommages écologiques, technologiques et sanitaires, notamment ceux liés au déploiement des énergies renouvelables, justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir à l'encontre de la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime conclue le 18 avril 2017 entre l'Etat et la société Ailes marines ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les associations requérantes sont seules recevables à demander l'annulation de la convention de concession ainsi que de son arrêté d'approbation ;

Sur la validité de la convention de concession du domaine public maritime :

11. Considérant qu'indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles ; que la légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours ainsi défini ;

12. Considérant que le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini ; que les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office ; que, saisi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences ;

En ce qui concerne l'information préalable du public :

13. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2124-5 du code général de la propriété des personnes publiques : " Avant ouverture de l'instruction administrative prévue à l'article R. 2124-6, le préfet procède à une publicité préalable consistant en un avis publié dans deux journaux à diffusion locale ou régionale habilités à recevoir des annonces légales diffusées dans le ou les départements intéressés. Si l'importance du projet le justifie, le préfet procède à la même publication dans deux journaux à diffusion nationale. / L'avis mentionne les caractéristiques principales de la demande " ;

14. Considérant que ces dispositions ont été respectées par le préfet des Côtes d'Armor dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que cette formalité de publicité préalable a bien été accomplie le 29 janvier 2016, par des publications dans deux journaux à diffusion locale et régionale (Ouest France Côtes-d'Armor et Le Télégramme de l'Ouest) et dans deux journaux à diffusion nationale (Le Marin et le Journal de la marine marchande) ;

En ce qui concerne l'étude d'impact :

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2124-3 du code général de la propriété des personnes publiques " Les concessions d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports font l'objet, avant leur approbation, d'une enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement " ; et qu'aux termes de l'article R. 2124-2 du code général de la propriété des personnes publiques, relatif aux demandes de concession d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports la demande : " S'il y a lieu, le demandeur fournit également l'étude d'impact ou la notice d'impact établies dans les conditions prévues par les articles R. 122-1 à R. 122-6 du code de l'environnement " ; qu'il résulte du 27 ° du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable, que les installations en mer de production d'énergie sont soumises à étude d'impact environnementale ; que les associations requérants critiquent le contenu de l'étude d'impact soumise par la société Ailes Marines à enquête publique en préalable à la signature de la concession en litige au regard des dispositions de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, qui précisent les éléments qu'une telle étude doit comporter ;

S'agissant de la portée de l'avis émis par l'Autorité environnementale sur l'étude d'impact :

16. Considérant que selon le IV de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à l'espèce " La décision de l'autorité compétente qui autorise le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage à réaliser le projet prend en considération l'étude d'impact, l'avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement et le résultat de la consultation du public " ; que pour mettre en cause la régularité de l'étude d'impact réalisée par la société Ailes marines, l'association Gardez les caps et les autres requérants invoquent la teneur de l'avis délibéré le 4 mai 2016 par le Conseil général de l'environnement et du développement durable, saisi de cette étude en tant qu'autorité environnementale sur le fondement des dispositions combinées du III de L. 122-1 du code de l'environnement et du II de l'article R. 122-6 du même code, ainsi que l'insuffisance des réponses qu'a apportées la société à cet avis ;

17. Considérant, d'une part, que si les associations requérantes critiquent l'insuffisance, selon elles, de la réponse du pétitionnaire à l'avis émis le 4 mai 2016 par l'Autorité environnementale, il ne résulte pas des dispositions précitées du code de l'environnement que les recommandations et observations formulées par l'autorité environnementale, qui ont donné lieu au cas particulier à des réponses circonstanciées de l'exploitant, communes à la présente procédure et à celle poursuivie au titre du code de l'environnement, revêtent un caractère contraignant ; d'autre part, qu'aucune disposition du code de l'environnement n'impose de soumettre à l'autorité compétente en matière d'environnement les éléments complémentaires que produit le pétitionnaire, à la suite d'un avis rendu par cette autorité, en vue d'assurer une meilleure information du public et de l'autorité chargée de statuer sur la demande ; qu'ainsi la teneur de l'avis émis par l'autorité environnementale, qui doit être lu avec la réponse formulée le 23 juin 2016 par le demandeur, constitue l'un des éléments permettant d'apprécier le caractère suffisant du dossier de demande ;

S'agissant de la description du projet :

18. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le pétitionnaire, qui était titulaire à l'issue d'une autorisation d'exploiter au titre du code de l'énergie prévoyant l'implantation d'un parc éolien en mer au large de Saint-Brieuc, aurait envisagé d'autres lieux d'implantation pour l'installation qui fait l'objet de la concession en litige ; qu'il résulte en tout état de cause de l'étude d'impact que la société Ailes marines a justifié en quoi l'implantation définitive du parc à l'intérieur de l'espace correspondant à cette autorisation permettait d'atténuer les effets du projet tant en termes d'impact visuel que sur d'effets sur la pêche ; que la société bénéficiaire n'avait pas à justifier davantage le choix de ce site ;

19. Considérant, s'agissant des solutions techniques retenues par l'exploitant, que si les requérants critiquent le choix d'éoliennes d'une puissance unitaire de 8 MW, l'exploitant, qui a détaillé à l'étude d'impact les caractéristiques techniques du modèle de turbine retenu et justifié du rendement attendu, n'était pas tenu d'écarter les solutions qui n'auraient pas déjà fait l'objet d'une " validation " en milieu maritime, ni de rendre compte des impacts comparés des différents modèles envisageables ;

S'agissant de la description de l'état initial :

20. Considérant que les associations ne démontrent pas l'insuffisance de la partie de l'étude d'impact relative à la description de l'état initial du site en faisant valoir que la société Ailes Marines se serait abstenue, en ce qui concerne les mammifères marins, de consulter au préalable les bases de données du Groupe d'Etude des Cétacés du Cotentin ;

S'agissant des effets des travaux sur le milieu marin :

21. Considérant que les associations ne démontrent pas, en reprenant les effets des travaux d'installation (écrasement des pieux, remise en suspension de sédiments), tels qu'il sont décrits par l'étude d'impact, que cette dernière aurait sous-estimé les effets de l'édification du parc sur l'écosystème marin ou certains habitats ;

22. Considérant, s'agissant de l'impact des anodes sacrificielles destinées à limiter la détérioration des structures métalliques des éoliennes, qu'à la suite de l'avis émis sur ce point par le Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement), et des réponses qu'y a apportées la société Ailes marines, l'arrêté du 18 avril 2017 autorisant l'installation et l'exploitation du parc au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement a en tout état de cause étendu les obligations de suivi mises à la charge de l'exploitant relativement aux mesures de surveillance assurées à proximité des aérogénérateurs, qui sont ainsi imposées tous les ans pendant les cinq premières années, puis tous les cinq ans jusqu'au démantèlement de l'installation, sans préjudice des suivis qui pourraient être préconisé par le comité de suivi ; qu'à défaut d'apporter une quelconque démonstration de ce que, comme elles l'affirment, l'impact de la quantité d'aluminium dissous aurait été mal apprécié, les requérants ne sont de ce fait pas fondées à invoquer l'insuffisance des mesures de suivi de cet aspect de l'exploitation ;

23. Considérant que contrairement à ce que soutiennent l'association " Gardez les caps et les autres associations requérantes, l'étude ne passe pas sous silence l'impact des travaux d'ensouillement sur les écosystèmes sableux ; que les requérants n'apportent pas d'arguments permettant d'écarter les conclusions de cette partie de l'étude, selon lesquelles " au vu de la surface concernée et du faible remaniement des fonds, les effets, liés à l'ensouillage des câbles, sur la nature sédimentaire sont négligeables " ;

24. Considérant, en ce qui concerne les nuisances sonores, que l'étude comporte une analyse approfondie de l'impact acoustique du projet, y compris en phase d'exploitation, réalisée par des bureaux d'études spécialisés ; que les requérants ne démontrent pas en quoi les conclusions de ces études seraient erronés en se référant à deux courtes citations d'universitaires, dépourvues de toute indication quant à leur contexte ou à leur domaine de validité, sur les effets des infrasons ;

25. Considérant que l'association " Gardez les caps " et les autres requérants critiquent l'incomplétude du bilan carbone du projet en faisant valoir qu'il aurait dû prendre en compte les effets d'une centrale électrique à terre, de puissance équivalente, sans laquelle le parc éolien offshore ne pourra fonctionner, compte tenu du caractère intermittent de la production ; que les requérants soutiennent encore que le bilan carbone aurait dû porter sur les infrastructures nécessaires à la réalisation du port de maintenance de Saint-Quai Portrieux ; que toutefois le bilan carbone exigible de la société Ailes marines ne portait que sur les émissions liées au projet soumis à enquête et n'avait pas à prendre en compte, au titre de la convention de concession du domaine public maritime en dehors des ports ici en litige, les émissions provenant de l'ensemble des sites de production d'électricité qui pourront être mis à contribution pour assurer l'équilibre sur le réseau national ;

26. Considérant qu'ainsi que le reconnaissent les requérants les effets directs des champs magnétiques sur la faune et la flore ont été analysés et n'ont pas fait débat ; que les requérants n'apportent pas les éléments suffisants permettant de démontrer l'existence et l'incidence d'effets indirects dus à la présence de matériaux conducteurs à proximité des liaisons de raccordement ;

S'agissant de l'analyse des effets du projet sur la faune marine :

27. Considérant, en ce qui concerne les effets du parc sur l'avifaune, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la taille des éoliennes n'aurait pas été prise en compte, dès lors qu'il résulte de l'étude d'impact que les modèles appliqués pour approcher les risques de collision font intervenir le champ couvert par les pales au regard de la hauteur de vol des différentes espèces ; qu'elles n'expliquent pas en quoi une limitation de la vitesse de rotation des éoliennes serait de nature à atténuer les effets négatifs sur l'avifaune ; qu'ainsi et alors que les articles 21 et 23 de l'arrêté pris au titre du code de l'environnement comprend des mesures d'évitement de réduction de compensation et de suivi en la matière l'argumentation ne permet pas d'écarter les enseignements de l'étude d'impact quant aux effets prévisibles du parc sur l'avifaune ;

28. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'éventualité d'une colonisation par les crépidules à la suite d'un " effet récif " a été étudiée sur le fondement de plusieurs publications, l'étude concluant à la nécessité d'un suivi, dès lors que ce risque de prolifération ne peut être quantifié avec précision ; que de telles informations ne peuvent être qualifiées d'insuffisantes dès lors d'une part qu'aucun banc de crépidules n'a été repéré lors des investigations préalables et d'autre part qu'il n'est pas contesté que la profondeur maximale de vie des crépidules ne dépasse pas 25 mètres ;

29. Considérant que les requérants soutiennent, en se prévalant de la teneur de l'avis émis par l'Autorité environnementale, que l'étude d'impact serait entachée d'omissions concernant les chiroptères, qui auraient conduit 1'exposante à ne pas demander de demande de dérogation relative aux espèces protégées pour la pipistrelle de Nathusius ; que toutefois l'Autorité environnementale s'est bornée à demander au maitre d'ouvrage d'assurer un suivi de cette espèce de chauve-souris lors de périodes de migration en phase de fonctionnement du parc, selon des prescriptions qui ont été suivies d'effet à travers la mise en place de plusieurs enregistrements pendant les deux premières années des travaux et les trois premières années de fonctionnement de l'installation, afin de vérifier la présence de chauve-souris ; que compte tenu des suivis réalisés pour l'élaboration de l'étude d'impact, qui n'ont pas permis de mettre en évidence la présence dans la zone d'implantation de la Pipistrelle de Nathusius les requérants ne peuvent sérieusement soutenir, en se référant aux observations formulées durant l'enquête publique par le groupe mammalogique breton, qu'il aurait fallu demander une dérogation au titre de la législation sur les espèces protégées ;

S'agissant des effets sur l'activité économique :

30. Considérant que les requérants affirment, sans autre démonstration, que l'impact sur la pêche aux bulots et aux grands crustacés " n'est quasiment pas étudiée dans l'étude d'impact, la ressource ayant été minorée" ; que cependant l'étude d'impact présente notamment les effets du projet (écrasement, turbidité, acoustique) sur les espèces benthiques ; que de même les requérants n'apportent aucun élément circonstancié de nature à remettre en cause les résultats des campagnes spécifiques aux fins d'évaluation de la population marine, qui ont mis en évidence que la zone d'implantation, si elle pouvait être traversée ponctuellement par des larves de poissons en ce qui concerne les espèces qui fraient le plus au large, n'était pas une zone importante de frayères ; qu'ainsi cette argumentation ne peut en tout état de cause qu'être écartée ;

31. Considérant que si les requérants invoquent l'insuffisance de l'analyse des effets cumulés du parc de la baie de Saint-Brieuc, en soutenant qu'il n'aurait pas été tenu compte des autres parcs éoliens en mer existant ou en projet, ils ne contestent pas que l'analyse a été réalisée, conformément aux dispositions du code de l'environnement, en tenant compte de tous les projets connus de parcs éoliens en Manche qu'avec les parcs éoliens terrestres et avec les autres projets maritimes, littoraux ou terrestres dès lors qu'ils avaient fait l'objet d'un avis de l'autorité environnementale, ainsi que l'exigent les dispositions du 4° du II de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, dans sa version ici applicable ; que s'ils se réfèrent à l'avis de l'Autorité environnementale qui recommande de se rapprocher des autres maîtres d'ouvrage afin de coordonner le suivi sur la faune marine, la société Ailes marines a pris à cette fin un engagement dont le suivi sera réalisé, aux termes de l'article 11 de l'autorisation délivrée au titre du code de l'environnement, par le comité de gestion et de suivi ;

S'agissant de l'analyse des effets du projet sur le paysage :

32. Considérant, s'agissant de l'impact sur les paysages, que les requérants contestent le recours à des photomontages rendant compte d'une vision panoramique du paysage ; qu'il résulte du compte-rendu de la commission d'enquête que la question de la fiabilité de ces photomontages ayant été débattue au cours de l'enquête publique, la commission a demandé, d'une part, la réalisation de clichés supplémentaires par temps clair, ainsi que des montages incluant des hypothèses différentes d'implantation du parc et, d'autre part, la désignation par le tribunal administratif de Rennes d'un expert indépendant du maître d'ouvrage pour l'aider à apprécier la procédure d'élaboration des photomontages et à en juger l'aspect global et la vraisemblance ; que ces études supplémentaires ont permis de valider la procédure d'élaboration de ces photomontages et d'en écarter tout caractère mensonger, sans que la circonstance que l'expert ait déjà travaillé sur d'autres projets de parcs éoliens soit de nature à entacher ses conclusions de partialité ;

S'agissant de l'éventualité du maintien des installations à l'issue de la période d'exploitation :

33. Considérant que les requérants soutiennent que l'étude d'impact est également insuffisante, en ce que les incidences sur l'environnement d'un éventuel maintien des installations en place à l'issue de la période d'exploitation du parc éolien n'ont pas été examinées, alors pourtant que cette hypothèse est prévue à la convention ;

34. Considérant que l'article 4-3 de la convention de concession prévoit en principe le démantèlement des installations objet de l'exploitation au terme normal de la concession, et fait obligation au concessionnaire d'avoir achevé les opérations de démantèlement et de remise en état, de restauration ou réhabilitation du site, afin d'assurer la réversibilité effective des modifications apportées au milieu naturel en conformité avec les spécifications résultant du dossier de précisions techniques qui forme l'annexe 1 à la convention, et notamment à son chapitre VI, relatif aux modalités des travaux de démantèlement et de remise en état ; que toutefois le même article prévoit que " Par exception, le concédant peut avoir décidé, après avis des services de la Direction de l'immobilier de l'Etat et du préfet maritime, du maintien des ouvrages, constructions et installations faisant l'objet de la concession, auquel cals la convention prévoit que " le concédant se trouve alors subrogé dans tous les droits du concessionnaire au titre des garanties attachées aux ouvrages qui lui sont remis " ; que dans cette hypothèse le contrat prévoit que le concessionnaire est libéré de son obligation de procéder au démantèlement en contrepartie du versement d'une somme correspondant au montant actualisé de la garantie financière prévue à cet effet par la convention ;

35. Considérant qu'il résulte nécessairement de ces dispositions qu'en cas de transfert à l'Etat, par application des stipulations qui viennent d'être rappelées, de tout ou partie des ouvrages, constructions et installations faisant l'objet de la concession en litige, les obligations de remise en état du domaine public maritime concédé imparties au concessionnaire sont transférées au concédant, qui serait alors tenu de respecter les modalités des travaux de démantèlement et de remise en état, telles que prévues au chapitre VI du dossier de précisions techniques annexé à la convention ; que, dès lors, les associations ne sont pas fondées à soutenir que l'étude d'impact préalable à la convention de concession aurait dû prévoir de manière distincte les obligations incombant à l'Etat en cas d'exercice de cette possibilité de reprise des ouvrages ;

S'agissant du surplus des critiques faites à l'étude d'impact :

36. Considérant, pour le surplus de l'argumentation développée à l'encontre de l'étude d'impact, que l'association " Gardez les caps " et les autres requérants ne mettent pas le juge à même d'apprécier le bien-fondé de leur argumentation en se bornant, après avoir cité des extraits d'avis ou observations émis sur le dossier d'enquête par divers organismes ou administrations, à conclure à l'insuffisance des réponses apportées par le pétitionnaire sur les sujets abordés par ces contributions, sans détailler leur argumentation, qu'il s'agisse des différents avis émis par l'Agence des aires marines protégées, la DREAL, l'architecte des bâtiments de France, ou le Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement) ;

37. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les associations requérantes ne sont fondées à soutenir ni que le contenu de l'étude d'impact n'aurait pas été proportionné à la sensibilité environnementale de la zone et à l'importance et à la nature des travaux, ni que cette étude aurait été affectée d'insuffisances de nature à nuire à la bonne information du public ;

En ce qui concerne les conclusions de la commission d'enquête :

38. Considérant que les requérants soutiennent que les conclusions de la commission d'enquête, rendues à la suite de l'enquête publique commune au code de l'environnement et au code général de la propriété des personnes publiques, seraient insuffisamment motivées au regard de l'article R. 123-19 du code de l'environnement ;

39. Considérant que la commission d'enquête a rendu compte dans son rapport de l'ensemble des observations présentées, et a notamment retracé de manière précise, au titre des contributions défavorables, les doléances des riverains à propos de l'impact du projet sur le paysage ; que dans une partie distincte de son rapport, et après avoir estimé que le public avait reçu l'information nécessaire, la commission a considéré que le projet de parc éolien en mer, par son importance, permettait de donner suite aux objectifs fixés par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique ainsi que de participer à l'autonomie énergétique de la Bretagne, que la société Ailes marines avait poursuivi une démarche d'évitement de nature à atténuer les différents impacts tant par le choix de la zone d'implantation, dont l'emprise se trouve diminuée par rapport à l'appel d'offres, que par le modèle d'éolienne qui permettait d'en diminuer le nombre, le type de fondations choisi, l'éloignement par rapport à la côte, supérieur à 16 km, ou encore l'organisation du parc, qui permettait de préserver la pêche professionnelle ; qu'elle a relevé les incidences du projet pour l'emploi et la filière industrielle considérée ; qu'elle a fait état de l'ensemble des connaissances sur le milieu marin acquises par le pétitionnaire grâce aux études réalisées, ainsi que des mesures visant à épargner les peuplements benthiques grâce notamment aux choix des câbles et des méthodes d'ensouillage, aux mesures de gestion des déchets, de récupération des pollutions accidentelles, ainsi qu'aux mesures de suivi de ces peuplements ; que la commission a encore rappelé les différentes mesures de suivi tenant à la vérification du positionnement des câbles ou, plus généralement, à la mise en place d'un comité de suivi scientifique permettant de vérifier l'efficacité des mesures environnementales mises en oeuvre ; que la commission a cependant relevé deux inconvénients du projet, tenant d'une part au manque de connaissances sur les biocénoses planctoniques animales et végétales, et notamment sur les niveaux de sensibilités définis pour les larves d'intérêt halieutiques, et d'autre part relativement à l'incertitude subsistant quant au mode d'ensouillage des câbles inter-éoliennes et au raccordement de la sous-station à l'atterrage ; que la commission a enfin considéré que ces inconvénients étaient limités au regard des avantages du projet, et émis un avis favorable au projet de parc, assorti de cinq recommandations, tenant à la réalisation d'un état de référence et d'un suivi de la ressource halieutique, à la composition et au rôle du comité scientifique de suivi ayant pour mission de proposer des mesures correctives, à l'intégration au comité scientifique de suivi en tant que membre permanent du Comité des pêches des Côtes d'Armor, à l'extension des mesures de suivi (eau, sédiments, animaux filtreurs, faune) à la durée de vie du parc éolien, y compris en sa phase de démantèlement, et à la réalisation d'un ensouillage maximal des câbles inter-éoliennes, compte tenu de la faisabilité technique et en fonction des résultats des études géophysiques et géotechniques ;

40. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commission d'enquête, qui a pu régulièrement faire sien le point de vue du pétitionnaire sur certains aspects de l'exploitation, n'a pas méconnu l'obligation que lui imposaient les dispositions de l'article R. 123-19 du code de l'environnement d'émettre un avis personnel motivé sur le projet soumis à enquête ;

En ce qui concerne les conséquences d'une éventuelle défaillance du concessionnaire :

41. Considérant que les associations requérants font grief à la convention de ne pas comporter les conditions de mise en oeuvre des garanties financières à fins de réhabilitation du site par le préfet en cas de disparition juridique du titulaire de la concession, en se prévalant des dispositions de l'article R. 2124-8 du code général de la propriété des personnes publiques, aux termes desquelles : " Lorsque le titulaire est une personne physique ou une personne morale de droit privé, la convention peut prévoir, afin d'assurer la réversibilité effective des modifications apportées au milieu naturel, la constitution de garanties financières ou une consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations, dont le montant est établi compte tenu du coût estimé des opérations de remise en état, de restauration ou de réhabilitation du site / La convention précise les conditions dans lesquelles le préfet met en oeuvre ces garanties, notamment en cas de défaut d'exécution par le titulaire des opérations de remise en état, de restauration ou de réhabilitation du site, ou en cas de disparition juridique du titulaire " ;

42. Considérant que l'article 4-3 de la convention de concession prévoit le démantèlement des installations objet de l'exploitation au terme normal de la concession, et fait obligation au concessionnaire d'avoir achevé les opérations de démantèlement et de remise en état, de restauration ou réhabilitation du site afin d'assurer la réversibilité effective des modifications apportées au milieu naturel, en conformité avec les spécifications résultant du dossier de précisions techniques qui forme l'annexe 1 à la convention, et notamment à son chapitre VI, relatif aux modalités des travaux de démantèlement et de remise en état ; qu'à cet effet l'article 4-1 du contrat se réfère à l'article 6.1 du cahier des charges de l'appel d'offres organisé au titre du code de l'énergie, lequel impartit au concessionnaire l'obligation de constituer des garanties financières, qui doivent permettre de couvrir les coûts du démantèlement et de remise en état du domaine public maritime après exploitation, à la fin normale ou anticipée de la concession ; qu'ainsi l'hypothèse visée par les associations d'une disparition du concessionnaire avant le terme de la convention, qui correspond à une hypothèse de cessation anticipée de la convention, est en tout état de cause prévue au contrat, tout comme les garanties propres à assurer une remise en état du site concédé ;

En ce qui concerne la méconnaissance du code général de la propriété des personnes publiques :

43. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les décisions d'utilisation du domaine public maritime tiennent compte de la vocation des zones concernées et de celles des espaces terrestres avoisinants, ainsi que des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques (...) " ;

44. Considérant, en premier lieu, qu'en se livrant à la description des caractéristiques du parc éolien et des richesses de la baie de Saint-Brieuc, de son milieu physique et biologique, des espèces faunistiques et avifaunistiques qui peuvent y être rencontrées, ainsi qu'au rappel des zones de protection avoisinantes, puis en procédant à des citations de divers organismes appelés à émettre un avis sur le projet, les requérants ne critiquent pas utilement les conclusions de l'étude d'impact selon lesquelles, notamment, l'effet de ce parc sur la ressource sera modéré à l'égard de l'avifaune, cependant que la mise en oeuvre d'un battage progressif permettra d'atténuer l'effet des nuisances sonores sur les mammifères marins en phase de travaux ; que l'application des dispositions précitées de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques n'excluait pas l'attribution d'une dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées sur le fondement du 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ; qu'ainsi il ne résulte pas de l'instruction que le contrat de concession n'aurait pas pris en compte des impératifs de préservation des ressources biologiques de la zone concédée ;

45. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'étude d'impact, non sérieusement critiquée sur ces points, que si des interdictions de pêches, limitées à 500 mètres autour des engins de travaux seront édictées en phase de travaux, l'impact sur la pêche professionnelle en sera limité, dès lors que la plupart des flottilles utilisent l'ensemble de la baie et ne sont pas pour l'essentiel dépendantes de la zone en litige, que la période de pêche est limitée à environ trois mois par an, et que le manque à gagner fera l'objet pour les professionnels d'une compensation financière ; que pour le surplus les affirmations ou interrogations des requérants ou intervenant ne permettent pas d'établir que, comme ils le soutiennent le projet entrainera " une dégradation de l'écosystème de la baie qui va fragiliser la filière pêche par la diminution des stocks, qu'aucune mesure de compensation financière ou naturelle ne pourra le restaurer " ; qu'ainsi il ne résulte pas de l'instruction que la convention n'aurait pas tenu compte de la vocation halieutique de la zone ;

46. Considérant, enfin, que si les requérants allèguent que le parc éolien pour les besoins duquel la concession a été consentie entraînera une altération profonde du paysage, ils ne le démontrent pas en se bornant à faire valoir que l'installation sera visible de la côte et de plusieurs sites emblématiques tels les caps d'Erquy ou le cap Fréhel ou encore depuis des secteurs protégés du littoral tels que le fort La Latte, dès lors que la distance séparant l'éolienne la plus proche du littoral est en tout état de cause supérieure à 16 km et concourt, conjointement avec les modalités d'organisation interne du parc, à atténuer la perception qu'il est possible d'avoir, par beau temps, depuis les sites et paysages côtiers ;

47. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association " Gardez les caps " et les autres requérants ne sont pas fondés à soutenir que la concession ne pouvait être accordée à la société Ailes marines sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;

En ce qui concerne le surplus des moyens dirigés contre la convention de concession :

48. Considérant que les associations requérants soutiennent encore que l'article 12 de la directive 2006/123/CE a été méconnu dès lors que la concession litigieuse n'a pas fait l'objet de publicité et de mise en concurrence préalables, que la convention de concession d'utilisation du domaine public du 31 mars 2017 et son arrêté d'approbation du même jour constituent une mesure d'aide d'Etat contraire à l'article 107§1 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dès lors que cette convention n'a pas fait l'objet d'une notification à la Commission européenne ; qu'elles invoquent la méconnaissance de l'article R. 2124-9 du code général de la propriété des personnes publiques qui prévoit que " La convention indique que la mise en oeuvre par le préfet des mesures indispensables à la conservation du domaine public maritime n'ouvre pas droit à indemnité au profit du titulaire " ; qu'elles excipent de l'illégalité, au regard des principes de fixation des redevances domaniales résultant de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques, de l'arrêté du 2 avril 2008 fixant le tarif des redevances dues pour occupation du domaine public de l'Etat par des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, au vu duquel a été pris émis par le directeur régional des finances publiques un avis sur la demande présentée par la société Ailes Marines ; qu'enfin elles invoquent l'illégalité du cahier des charges de l'appel d'offres à l'issue duquel la société Ailes marines s'est vu délivrer le 18 avril 2012 l'autorisation d'exploiter prévue par le code de l'énergie ;

49. Considérant qu'aucun de ces moyens, par lesquels les associations invoquent, soit la méconnaissance de règles relatives au droit de la concurrence, soit les conditions financières de la convention, n'est en rapport avec les préoccupations environnementales ou esthétiques dont les associations requérants se sont prévalues au soutien de leurs conclusions ; qu'ils ne sont pas d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office ; que ces moyens ne peuvent dès lors qu'être écartés en application des principes rappelés au point 12 du présent arrêt ;

50. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de la convention de concession conclue le 18 avril 2017 entre l'Etat et la société Ailes Marines ;

Sur la légalité de l'arrêté par lequel le préfet des Côtes d'Armor a approuvé la convention de concession :

51. Considérant qu'indépendamment du recours de pleine juridiction dont disposent les tiers à un contrat administratif pour en contester la validité dans les conditions rappelées au point 11, les tiers qui se prévalent d'intérêts auxquels l'exécution du contrat est de nature à porter une atteinte directe et certaine sont recevables à contester devant le juge de l'excès de pouvoir la légalité de l'acte administratif portant approbation du contrat ; qu'ils ne peuvent toutefois soulever, dans le cadre d'un tel recours, que des moyens tirés de vices propres à l'acte d'approbation, et non des moyens relatifs au contrat lui-même ;

52. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2124-56 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les avis conformes du préfet maritime ou du délégué du Gouvernement pour l'action de l'Etat en mer et de l'autorité militaire compétente doivent être demandés pour les autorisations relatives à la formation d'établissement de quelque nature que ce soit sur la mer ou sur ses rivages/ L'autorité militaire compétente est, en métropole, le commandant de zone maritime et, outre-mer, l'officier général commandant supérieur des forces armées " ; que les associations invoquent l'incompétence du signataire de l'avis conforme émis le 8 avril 2016, sur le fondement de ces dispositions, par le capitaine de vaisseau Jean-Louis Fournier, agissant " au nom du commandant de la zone maritime de la Manche et de la mer du Nord " ;

53. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une décision du 8 février 2016 M.O..., commandant de la zone maritime Atlantique, a donné délégation au capitaine de vaisseau Xavier Rebour, adjoint au commandant de zone maritime, et, en qualité de suppléant de ce dernier, au capitaine de vaisseau Jean-Louis Fournier, aux fins de signer les pièces de correspondance relatives à l'occupation du domaine public maritime ; que toutefois, si le ministre de la transition écologique et solidaire soutient que cette décision a été insérée dans un registre accessible au public sur simple demande à la préfecture maritime, les associations sont fondées à soutenir qu'une telle modalité de publication n'est pas suffisante pour permettre l'entrée en vigueur de cette délégation ; qu'il en résulte que le signataire de l'avis conforme émis le 8 avril 2016 sur le fondement des dispositions de l'article R. 2124-6 du code général de la propriété des personnes publiques n'était pas compétent pour ce faire ; que contrairement à ce que soutient le ministre, cette irrégularité, qui a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision, affecte la légalité de l'arrêté du 18 avril 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a approuvé la convention de concession ; qu'il s'ensuit que cet acte d'approbation de la convention ne peut qu'être annulé, sans préjudice des possibilités de régularisation ouvertes à l'administration sous le contrôle du juge ;

54. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association " Gardez les caps " et les autres requérants sont seulement fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 18 avril 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a approuvé la convention de concession du domaine public maritime signée le même jour entre l'Etat et la société Ailes marines ;

Sur les frais de la procédure :

55. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées d'une part par les requérants et d'autre part par la société Ailes marines sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il est donné acte à la Fédération des associations et des usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur de son désistement.

Article 2 : L'intervention de M. E...M...est admise.

Article 3 : L'intervention de l'association " Union de Penthièvre et de l'Emeraude pour l'environnement " n'est pas admise.

Article 4 : L'arrêté du 18 avril 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a approuvé la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime au large de Saint-Brieuc conclue le 18 avril 2017, pour une durée de quarante ans, entre l'Etat et la société Ailes marines, est annulé.

Article 5 : Le surplus de la requête présentée par les associations " Gardez les caps", " Robin des Bois ", " Fédération Environnement Durable ", " la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France ", " Vent de colère ", " Association de défense du site de Lancieux et de la baie de Beaussais ", Association pour la protection des sites d'Erquy et des environs " (ASPEE), " Bien vivre à Plurien ", Fédération des associations et de usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur, Fréhel Environnement ainsi que par MM. J...G..., M. A...N...et M. K...H...est rejeté.

Article 6 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par les requérants et par la société Ailes Marines sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié aux associations " Gardez les caps ", " Robin des Bois ", " Fédération Environnement Durable ", " société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France ", " Vent de colère ", " Association de défense du site de Lancieux et de la baie de Beaussais - du Frémur à l'Arguenon ", Association pour la protection des sites d'Erquy et des environs " (ASPEE) - Erquy environnement, " Bien vivre à Plurien ", Fédération des associations et des usagers des bassins versants de la Rance et du Frémur, Fréhel Environnement ainsi qu'à MM. J...G..., A...N..., K...H..., et E...M..., à l'" Union de Penthièvre et de l'Emeraude pour l'environnement ", au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et à la société Ailes marines.

Une copie sera transmise au préfet des Côtes d'Armor.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 avril 2018.

Le rapporteur,

J. FRANCFORTLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la Transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT01851


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01851
Date de la décision : 03/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : AARPI VIA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-04-03;17nt01851 ?
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