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06/02/2018 | FRANCE | N°16PA02870

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 06 février 2018, 16PA02870


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision

du 28 novembre 2014 par laquelle la société La Poste l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de 4 mois et a révoqué le sursis accordé par une décision du 9 juillet 2010.

Par un jugement n° 1501575/5-2 du 13 juillet 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M.A....

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 6

septembre 2016 et

20 décembre 2017, M. A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision

du 28 novembre 2014 par laquelle la société La Poste l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de 4 mois et a révoqué le sursis accordé par une décision du 9 juillet 2010.

Par un jugement n° 1501575/5-2 du 13 juillet 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M.A....

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 6 septembre 2016 et

20 décembre 2017, M. A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1501575/5-2 du

13 juillet 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 28 novembre 2014 par laquelle la société La Poste l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de 4 mois et a révoqué le sursis accordé par une décision du 9 juillet 2010 ;

3°) de mettre à la charge de La Poste une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué méconnaît l'article R. 711-3 du code de justice administrative dans la mesure où les conclusions du rapporteur public ont été communiquées moins de 48 heures avant l'audience ;

- il est entaché d'une omission à statuer ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait, d'une erreur de droit au regard des articles 6 et 10 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 et 8 du règlement intérieur de La Poste, ainsi que d'une erreur dans la qualification juridique des faits.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2018, La Poste représentée par

Me E...de la SCP Granrut avocats conclut au rejet de la requête pour irrecevabilité ou, en tout état de cause, au fond et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de

M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;

- le décret 82-447 du 28 mai 1982 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour M. A...et de Me C...pour La Poste.

Une note en délibéré, enregistrée le 24 janvier 2018, a été présentée pour La Poste.

1. Considérant que M.A..., fonctionnaire de La Poste et représentant du syndicat SUD au sein du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), de décembre 2011 à décembre 2014, exerce ses fonctions à la plateforme de distribution du courrier du 5ème arrondissement de Paris ; qu'afin de faire signer une pétition contre le licenciement de l'un de ses collègues, il s'est rendu, le 18 mars 2014, dans les locaux de la plateforme de préparation et de distribution du courrier du 15ème arrondissement, sans l'accord de la directrice du site à l'égard de laquelle il aurait proféré des menaces ; que M. A...a, par une décision du

28 novembre 2014, été, du fait de ces agissements, suspendu de ses fonctions pour une durée de quatre mois ; que ladite décision a par ailleurs révoqué un précédent sursis de 2 mois accordé à l'intéressé ; que, par un jugement du 13 juillet 2016 dont M. A...relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 novembre 2014 ;

Sur la fin de non recevoir opposée à la demande de première instance :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a produit, en première instance, le bordereau de notification de la sanction en litige lequel, en y faisant expressément référence, reprend les motifs de cette sanction ; qu'ainsi, une telle pièce était de nature à pallier le défaut de production de la décision attaquée et ce d'autant plus que La Poste, bien que soulevant cette fin de non recevoir, a elle-même produit la décision attaquée ; que, dans ces conditions, la demande introduite par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris était recevable ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision contestée :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 9 du décret susvisé du 28 mai 1982 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique : " Les documents d'origine syndicale peuvent être distribués aux agents dans l'enceinte des bâtiments administratifs, mais en dehors des locaux ouverts au public. Ces distributions ne doivent en aucun cas porter atteinte au bon fonctionnement du service. Lorsqu'elles ont lieu pendant les heures de service, elles ne peuvent être assurées que par des agents qui ne sont pas en service ou qui bénéficient d'une décharge de service " ; qu'aux termes de l'article 8 du règlement intérieur de La Poste relatif aux conditions d'accès et de sécurité : " Les personnels sont tenus de respecter les procédures et les consignes de sécurité relative à l'accès et à la circulation des personnes et des véhicules à l'intérieur de l'entité et de ses dépendances. Une carte d'identité professionnelle régulièrement renouvelée est fournie à chaque postier. Les personnels doivent pouvoir la présenter comme preuve de leur appartenance à La Poste (...) " ; que contrairement à ce que soutient La Poste, aucune de ces deux dispositions, ni aucun autre des textes en débat, n'impose à un agent titulaire d'un mandat syndical souhaitant procéder à une distribution de matériel syndical de prévenir sa direction ni, a fortiori, d'obtenir une autorisation préalable, la seule limite à cette distribution étant qu'elle ne porte en aucun cas atteinte au bon fonctionnement du service ;

4. Considérant qu'il ressort des termes de la décision du 28 novembre 2014 que

M. A...a été sanctionné pour deux motifs ainsi exprimés : " menace à l'encontre d'une directrice d'établissement " et " intrusion dans un établissement postal sans prévenance et sans autorisation " ; que s'il n'est pas contesté que M. A...en affirmant " Il vaudrait mieux que vous nous laissiez passer car nous sommes plus nombreux que vous, à moins que vous souhaitiez que ça devienne physique " a tenu des propos déplacés à l'égard de la directrice d'établissement, il résulte de ce qui précède que l'intéressé n'était pas tenu de prévenir la direction, ni d'obtenir de cette dernière une autorisation préalable, avant de se rendre, le 18 mars 2014, sur la plate forme de préparation et de distribution du 15ème arrondissement ; que, par suite, le second motif sur lequel repose la décision attaquée est entaché d'une erreur de droit ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que La Poste aurait pris la même sanction de suspension de ses fonctions durant quatre mois si elle ne s'était fondée que sur le premier de ces deux motifs ;

5. Considérant, par ailleurs, que si La Poste fait valoir que M. A...aurait désobéi à un ordre de sa hiérarchie, se serait rendu coupable d'une intrusion dans un établissement postal et enfin aurait porté atteinte au bon fonctionnement du service, l'entreprise n'a pas expressément demandé que ces motifs, qui ne sont pas énoncés par la décision contestée, soient substitués aux deux motifs existants analysés au point 4 ; qu'il n'y a donc pas lieu d'y répondre ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens notamment de régularité, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 novembre 2014 ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.A..., qui n'est pas la partie perdante, la somme que La Poste réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de La Poste une somme de 1 500 euros à verser à M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1501175/5-2 du 13 juillet 2016 et la décision de La Poste du 28 novembre 2014 sont annulés.

Article 2 : La Poste versera une somme de 1 500 euros à M. A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...et à La Poste.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 février 2018.

Le rapporteur,

L. d'ARGENLIEULe président,

B. EVEN Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02870


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02870
Date de la décision : 06/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Suspension.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : RENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-02-06;16pa02870 ?
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